écologie et environnement - Page 157
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Analyse du système financier international par Martin Armstrong (Princeton Economics International)
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LE DÉSERT CHINOIS CACHE UN GIGANTESQUE OCÉAN SOUTERRAIN
Le bassin du Tarim, dans la province chinoise du Xinjiang, est l’une des régions les plus sèches de la planète. Du moins à sa surface. Sous le bassin, les chercheurs chinois viennent de découvrir un gigantesque océan souterrain.
Au total, la quantité d’eau salée pourrait atteindre dix fois le volume des cinq Grands Lacs américains réunis. ” C’est une quantité d’eau terrifiante“, déclarait le professeur en charge de l’étude Li Yan au South China Morning Post. ” Personne n’avait jamais imaginé qu’il puisse y en avoir autant sous le sable. Nous allons devoir revoir notre définition du désert.”
UN COLOSSAL PUITS DE CARBONE
Les scientifiques ont pris conscience de l’existence d’un phénomène anormal dans le bassin du Tarim pendant leur travaux de recherche sur le réchauffement climatique. Ils se sont aperçus que du dioxyde de carbone disparaissait dans le bassin sans qu’aucune raison n’explique cette anomalie.
Le bassin est en fait un colossal “puits de carbone”, c’est à dire une zone de la planète qui participe à limiter le réchauffement climatique. Habituellement, ces zones sont des forêts ou des océans. En mesurant des échantillons de dioxyde de carbone dans plus de 200 emplacements à travers le désert, les scientifiques ont été capables d’estimer la quantité d’eau infiltrée dans le bassin.
” Notre estimation est pessimiste. Le volume d’eau pourrait être encore bien plus impressionnant“, a précisé Li Yan. Il est également probable qu’il y ait de nombreux autres océans souterrains dans le monde, selon le professeur. Il y aurait en effet mille milliards de tonnes de carbone “manquantes” dans le monde.
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Contre la frénésie du tout-béton.
Je parcours fréquemment les campagnes françaises, particulièrement entre la région parisienne et le pays gallo, et j'ai d'ailleurs fait une sorte de « tour de l'Ouest » au début du mois d'août, sur une douzaine de jours, dont il me faudra reparler au fil de quelques notes prochaines pour évoquer cette France pleine de ressources et pourtant souvent dévitalisée et « asséchée » par la République et la Société de consommation : il y a tant à dire, mais il y a aussi tant à faire, le désespoir n'étant, en ce domaine comme en d'autres, qu'une « sottise absolue » pour reprendre la juste formule de Maurras.
Ce qui me marque dans mes pérégrinations champêtres, c'est la frénésie, un peu calmée aujourd'hui mais toujours active néanmoins, pour le bétonnage ou l'artificialisation des campagnes : lignes de TGV (les LGV, lignes à grande vitesse) ; ronds-points ; routes élargies ou nouvelles ; zones pavillonnaires et centres commerciaux alors que les centres-bourgs se vident et que les cafés ferment ; etc. Une étude récente parlait de plus de 80.000 hectares de terres françaises sacrifiées au béton ou à d'autres matériaux de l'artificialisation chaque année ! Au moment même où il y a tant de maisons inoccupées dans nos villages ruraux ou, même, rurbains ! Cherchez l'erreur...
Dans le courrier des lecteurs du quotidien La Croix, une lettre publiée dans l'édition du 9 juillet dernier et écrite par M. Christian Guinard, résume bien ce que je pense sur cette question, et je me permets donc de la citer longuement, avec quelques commentaires :
« (…) Nos élus, de tous bords ou presque, croient encore que quand le bâtiment va, tout va. Ils appellent de leurs vœux des LGV ruineuses et non rentables ; des aéroports inutiles et dévoreurs d'espace ; des barrages qui ne serviront qu'à polluer un peu plus les eaux ; des canaux à grand gabarit qui ne feront le bonheur que de quelques engins de terrassement. Même constat pour les projets de routes et autoroutes alors que la majorité des besoins de déplacement des personnes réside aujourd'hui dans des transports ferroviaires à courte et moyenne distance dont les infrastructures sont à l'abandon. A croire que les décideurs de travaux ne se déplacent qu'en voiture ou en avion. »
On pourrait accompagner cette lettre de nombreux exemples, et les cas de l'aéroport annoncé de Notre-Dame-des-Landes peut être cité : pourquoi rebâtir une structure aussi lourde alors que Nantes a déjà un aéroport réputé et largement suffisant pour répondre aux défis de son développement et de sa réputation internationale ? De plus, pourquoi vouloir détruire le dernier bocage bien conservé de la région et une zone humide dont on connaît, au-delà de l'heureuse biodiversité, l'importance pour toutes les campagnes avoisinantes ? Sans oublier que cette construction entraînerait celle de nombreuses voies d'accès rapide qui, pour l'heure, ne sont pas financées et qui pourraient coûter près de 4 milliards d'euros, dont une grande partie serait payée par les contribuables de l'Ouest de la France... Surtout si c'est pour revendre cet aéroport, quelques années après sa construction, à des investisseurs chinois, comme c'est le cas pour celui de Toulouse actuellement ! Va-t-on refaire éternellement le même coup que pour les autoroutes françaises, que les usagers payent deux fois, l'une pour la construction, l'autre pour l'utilisation, et cela malgré les promesses des années 1960-70 d'une gratuité future qui n'est jamais advenue ?
La lettre se termine par un constat économique simple et vérifié par les expériences passées : « Ce n'est pas ainsi qu'on créera des emplois durables et non délocalisables. Ce serait plutôt en améliorant la qualité des bâtiments dont les mauvaises performances thermiques nous coûtent des milliards sous forme de pétrole ou de gaz.(...) ». Effectivement, au-delà même des aménagements permettant une meilleure pratique énergétique, conjuguant sobriété et efficacité, mieux vaut rénover, rehausser, restaurer que bétonner sans fin : il y a, là encore, de quoi faire et de quoi travailler des millions d'heures, tout en embellissant plutôt qu'enlaidir nos zones rurales et même urbaines. Cela ouvre, en définitive, bien des perspectives !
Je me souviens d'une famille royaliste de Touraine qui, non loin de Loudun, avait passé plus de vingt ans à relever un vieux château jusque là condamné à disparaître dans les ronces et bientôt dans l'oubli : elle en avait aussi profité pour rénover les bâtiments avoisinants, eux aussi en piètre état avant son heureuse intervention. De quoi rendre vie à un lieu et à ses environs, et fournir quelque travail aux artisans locaux... Ce qui est possible pour une vieille demeure féodale est tout à fait envisageable et même souhaitable pour des centres-bourgs aujourd'hui délaissés et qui, pourtant, disposent de nombreuses maisons d'habitation, souvent pourvues de petits jardins propices aux potagers et poulaillers ou, tout simplement, au repos et à la lecture tranquille...
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COP21 : manipulation de la cause écologique au profit d'objectifs politiques
Valeurs Actuelles a publié en avant dernière page de son n°4108 du 20 août 2015, une tribune de Stanislas de Larminat. Il décrypte le dernier "Sommet des consciences" que le Président Hollande a réuni le 21 juillet, se faisant entourer de plus de 40 personnalités morales et religieuses.
"Le maître de cérémonie, Nicolas Hulot, avait déjà repris un des qualificatifs du Christ pour prétendre que « rétablir les équilibres climatiques est la "pierre angulaire" de la dignité humaine ». Saluons l’artiste en instrumentalisation, des religions, et de toutes les thématiques associées à la question climatique."
La première instrumentalisation citée est celle de la science:
"Le Giec a reconnu le plafonnement du réchauffement depuis 15 ans. Il qualifie de "hiatus" cet évènement, qu’il n’avait d’ailleurs pas prévu. On parle du consensus de milliers de scientifiques - quelques 50 disciplines sont référencées. Tout cela ne fait que quelques dizaines d’experts pour chacune. Il manque au Giec la cohérence d’ensemble pour apporter une preuve. Or le Giec a ignoré une discipline reconnue dans le monde entier, l’Identification des systèmes complexes. S’y attelant, Philippe de Larminat conclut « que l’hypothèse d’un impact insignifiant de l’activité humaine ne peut pas être écartée et qu’on doit considérer comme un fait établi que l’activité solaire constitue l’explication première du "changement climatique » (Changement climatique -Identification et projections, éditions Iste, 2014)."
Instrumentalisation de l'encyclique également :
"Ils se trompent d’encyclique, ceux qui voient en Laudato si une supplique scientifique de la cause humaine des variations climatiques. Ils ont mal lu : « L’Église n’a pas de raison de proposer une parole définitive et elle comprend qu’elle doit écouter puis promouvoir le débat honnête entre scientifiques, en respectant la diversité d’opinions. »
Le pape, en s’appuyant sur une thèse scientifique, majoritaire médiatiquement, veut surtout démontrer que "tout est lié". Cette phrase lancinante répétée 10 fois, qui l’a entendue ? « Puisque tout est lié, la défense de la nature n’est pas compatible non plus avec la justification de l’avortement » (§ 120), « les attaques auxquelles [la famille] est exposée », (§ 213), « l’effacement des différences sexuelles » (§ 155), « la culture du relativisme (...), l’exploitation sexuelle des enfants ou l’abandon des personnes âgées » (§ 123). Qui prépare les esprits pour que la COP21 intègre cette "écologie intégrale" ?
Les 17 objectifs de développement durable qui seront adoptés par l’ONU juste avant la COP21 prévoient « d’autonomiser toutes les femmes et les filles, (…) d’assurer la santé et l’éducation ». Mais, derrière cette bonne conscience, se cache la "santé reproductive" dont on sait qu’elle ambitionne de faire du droit à l’avortement une clef de voute. Le Pape a pourtant condamné, dans l’encyclique, "les pressions internationales (…) conditionnant des aides économiques à certaines politiques de santé reproductive » (§ 50)".
L'auteur décrypte également l'instrumentalisation des opinions publiques manipulées par le "catastrophisme éclairé" de nos gouvernants. Bref: un dévoiement des consciences qui manipule la cause écologique au profit d'objectifs politiques.
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Pourquoi le porc français est-il plus cher que celui des voisins européens ?
Stéphane Le Foll a annoncé lundi de nouvelles mesures pour la filière porcine avec un objectif clair : que la France retrouve sa compétitivité. Les industriels dénoncent un prix «politique», fixé hors des contraintes du marché.
C'était un engagement du gouvernement: 1,40 euro le kilo, au minimum. Les éleveurs exigent un tel prix de retrait, qui correspond à la moyenne du coût de production. Mais Cooperl et Bigard, qui représentent à eux seuls 30% des achats du marché du porc en France, ne veulent pas d'un prix fixé par le gouvernement mais par le marché.
Dès la semaine prochaine, de nouvelles discussions vont s'engager autour d'une évolution du système de fixation des prix de la viande. Reste que le problème français est plus profond. Le secteur porcin est aujourd'hui confronté à une concurrence féroce à l'échelle européenne. Des voix s'élèvent chez ses représentants pour demander une politique européenne commune concernant l'exportation de la viande de porc alors qu'un sommet sur l'agriculture est prévu à Bruxelles, le 7 septembre. Mais pourquoi le cochon français est-il à ce point délaissé par nos industriels?
La donne est claire: la France est moins compétitive que ses voisins européens. Troisième producteur de viande de porc en Europe avec 1,9 millions de tonnes produites en 2014, le pays affiche le prix le plus élevé: 1,55 euro le kilo. En Allemagne, le porc est vendu à 1,32 euro le kilo et va même jusqu'à 1,25 euro du kilo en Espagne. Certains industriels préfèrent alors se tourner vers l'étranger.
• Des exploitations plus petites en France
Les exploitations françaises ont un problème de rentabilité. En moyenne, un élevage en France compte 200 truies contre 560 au Danemark et même le double en Espagne! «En 1998, la circulaire Voynet-Le Pensec, a mis un coup à la modernisation nécessaire à notre système agricole, estime Guillaume Roué, de l'interprofession porcine (Inaporc). L'objectif était alors de limiter l'élargissement des élevages. En 2004, on a commencé à voir une inversion de la courbe sur la production de porcs français. Pendant ce temps-là, nos voisins se sont diversifiés, ont augmenté leur productivité et ont agrandi leurs exploitations.» En vingt ans, l'Allemagne est en effet passée de 35 millions de porcs abattus à presque 60 millions l'an passé.
• Une main-d'oeuvre plus chère
En France, un employé du secteur «est en moyenne rémunéré entre 17 et 18 euros de l'heure. En Allemagne, les travailleurs détachés européens sont nombreux et sont payés 5 ou 6 euros de l'heure avec un rythme impensable, c'est du dumping social», précise Guillaume Roué. Le plus grand élevage allemand emploie environ 90% de personnel étranger, avec 20 nationalités différentes, sous le statut de travailleur détaché. La réunification allemande a également boosté le poids du pays dans le secteur porcin. Aujourd'hui, l'Allemagne compte 4340 abattoirs et produit plus de cinq millions de tonnes de porc chaque année.
• Des normes environnementales contraignantes
Il y a quelques semaines, le président de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, Philippe Chalmin, nous confiait que «l'administration française appliquait, selon lui, les normes environnementales de façon plus tatillonne». Autre facteur, la décision allemande de fermer toutes les centrales nucléaires du pays en juin 2000, ce qui a provoqué la mise en place d'un plan sur les énergies renouvelables et le développement d'une nouvelle donne écologique. Une disposition permettant une diversification rapide de l'agriculture du pays.Maxime Brigand
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Le nucléaire : nouvelle preuve de l’incurie socialiste
Le Conseil constitutionnel vient de passer au crible la loi sur la transition énergétique. Celle-ci fixe désormais une limite maximum au nombre de kilowatts pouvant être produits par le parc nucléaire. Le but de ce moratoire est de ramener la part de l’électricité d’origine nucléaire de 75 % à 50 %. Le jour où l’EPR de Flamanville entrera en fonction, il faudra impérativement fermer une puissance équivalente, donc trois réacteurs plus anciens. Or, le Conseil constitutionnel qui a validé ce maximum a pris en parallèle une décision lourde de conséquences.
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Ségolène Royal : lutte contre le gaspillage alimentaire ou posture démagogique ?
Le Conseil constitutionnel a validé la loi sur la transition énergétique, mais a retoqué dans celle-ci trois articles, dont celui concernant les mesures pour la grande distribution sur le gaspillage alimentaire.
Le 13 août dernier, au plus fort de la torpeur estivale, le Conseil constitutionnel a validé la loi sur la transition énergétique, mais a retoqué dans celle-ci trois articles, dont celui concernant les mesures pour la grande distribution sur le gaspillage alimentaire.
D’où la grosse colère de Ségolène Royal qui, vaillante comme toujours, a courageusement déclaré sur i>Télé : « Il est très important de lutter contre le gaspillage alimentaire à un moment où tout le monde n’a pas les moyens de se nourrir correctement. »
C’est une vérité que monsieur de La Palice n’aurait pas reniée.
Bref, Ségolène Royal nous annonce qu’elle va réunir dans les dix jours qui viennent les représentants de la grande distribution afin qu’ils acceptent gentiment et par voie contractuelle ce que le Conseil a retiré à la loi. Belle ambition qui devrait valoir à notre ministre et à son rondouillard de Président un prix Nobel de la paix et du ravitaillement. Au moins.
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Désertification : tous responsables ?
Qui n’a jamais rêvé de passer ses vacances en Grèce sous les oliviers, en Espagne sur les plages de sable blanc ou encore en Italie au milieu de la végétation odorante ? Mais tous ces lieux de villégiature sont en voie de désertification et le changement climatique n’est pas l’unique responsable.
Qui ne rêve de passer ses vacances en Grèce sous les oliviers, en Espagne sur les plages de sable blanc ou encore en Italie au milieu de la végétation odorante ? Mais tous ces heureux vacanciers ont-il remarqué qu’un problème environnemental préoccupant se développe dans ces paysages de rêve? Emilie Langlade et Adrian Pflug sont allés en Andalousie, dans l’arrière-pays d’Almería, pour constater que ces lieux de villégiature sont en voie de désertification. Le changement climatique n’est pas l’unique responsable de cette désertification, il ne fait qu’aggraver la situation dans les régions les plus arides d’Europe, où l’eau vient à manquer en raison du surpâturage et de la concentration sur le littoral de l’industrie, du tourisme et de l’agriculture.
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Le porc bio : Un marché qui rapporte
http://fortune.fdesouche.com/
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Aurelio Peccei, premier résistant à la croissance
Il fallait un lieu de réunion solennel. Ce fut l’Accademia Nazionale dei Lincei, la plus ancienne académie d’Europe, fondée à Rome en 1603. En français, l’Académie des lynx. Un nom qui prête à ses membres la capacité de voir juste et loin. L’endroit idéal, en somme, pour réfléchir à l’avenir du monde, comme le souhaite, en cette année 1968, le maître de cérémonie, Aurelio Peccei. L’industriel italien, patron d’Olivetti et cadre dirigeant de Fiat, n’est ni un diseur de bonne aventure ni un futurologue. Juste un humaniste inquiet des tourments de son époque : « Un grand désordre règne sous les cieux. Il faut faire une pause et réfléchir. »
L’heure est à la course aux armements et à la contestation du modèle capitaliste. Cet ancien résistant, torturé dans les geôles fascistes, fête alors ses 60 ans (il mourra d’un cancer seize ans plus tard). Samedi 6 avril 1968 au matin, ils sont une vingtaine à s’asseoir autour de la longue table installée dans la Loggia di Galatea, la pièce la plus somptueuse de la Villa Farnesina, une demeure de la Renaissance acquise en 1944 par l’Académie des lynx. L’une des fresques murales a été peinte par Raphaël. Le décor de la Loggia est un enchantement. Aucune femme parmi les participants. Economistes, banquiers, statisticiens, hauts fonctionnaires, responsables politiques, les hôtes viennent de nombreux pays : Etats-Unis, Grande-Bretagne, Suisse, Belgique, Suède, Allemagne… Cinq Français ont fait le voyage, dont Bertrand de Jouvenel, fondateur de la revue Futuribles, et Jean Saint-Geours, inspecteur des finances et directeur général du Crédit lyonnais.
Brainstorming de haut vol
A l’ordre du jour, du brainstorming de haut vol. Le petit groupe est invité à réfléchir à « la création d’un système d’observation et de monitoring du monde ». Ambitieux. C’est un flop. Le dimanche midi, les protagonistes se séparent, incapables de parler le même langage. Quelques irréductibles, dont l’Ecossais Alexander King, directeur des affaires scientifiques à l’OCDE, acceptent néanmoins de poursuivre les discussions enflammées au domicile d’Aurelio Peccei. Le Club de Rome est né.
Ni sponsor ni budget. Apolitique, transculturelle et indépendante, l’association se définit comme un centre de réflexion dont l’essence est de « lancer des idées, bonnes ou mauvaises, pour mieux appréhender les transitions profondes qui affectent l’humanité ». Quatre ans plus tard, en mars 1972, à l’initiative de ces penseurs distingués, paraît chez Universe Books, petit éditeur de New York, The Limits to Growth, littéralement « Les limites à la croissance », qui devient en français Halte à la croissance ?
Le livre, une étude menée en dix-huit mois par une équipe du Massachusetts Institute of Technology (MIT) dirigée par le physicien américain Dennis Meadows, fait l’effet d’une bombe. Il devient un best-seller traduit en 36 langues et diffusé à 10 millions d’exemplaires. Un succès qui perdure. « Le rapport Meadows fascine toujours, se félicite Thomas Bout, directeur des éditions Rue de l’échiquier, qui ont publié en 2012 une version réactualisée des travaux du MIT. Nous sommes à près de 10 000 exemplaires vendus, un très bon résultat. La demande est forte à chaque rentrée universitaire. »
Manifeste écologique avant l’heure
1972 ? C’est encore les « trente glorieuses », avec un taux de croissance insolent de 5 % à 6 % dans les pays riches. La société de consommation bat son plein. Et voilà que le Club de Rome joue les défaitistes. Il rappelle en cent pages à peine que nous n’avons qu’une seule planète et que son exploitation forcenée peut conduire sur le long terme, si rien ne change, à un « effondrement » de notre société. Un manifeste écologique avant l’heure.
Le MIT confronte quatre variables, toutes en forte croissance – la population, la production industrielle, la demande alimentaire, la pollution –, aux ressources naturelles finies de la Terre. Les chercheurs avancent une série de scénarios qui nous projettent jusqu’en 2100. Le message est clair : si les limites physiques de notre système sont franchies, ce sera la rupture avant la fin du XXIe siècle. Comme l’indique l’édition du 3 mars 1972 du Financial Times, les scientifiques du MIT « ne disent pas que le monde doit aller jusqu’au dérapage final catastrophique. Ils mettent en avant une série d’options pour nous aider à aller délibérément de la croissance vers l’équilibre avant que les forces naturelles ne s’en chargent de manière inévitablement bien plus désastreuse. Selon l’ordinateur, il est encore temps ».
Les critiques fusent
Rien n’y fait. Aurelio Peccei est traité d’oiseau de mauvais augure. Des scientifiques remettent en cause les hypothèses retenues, soulignent l’absurdité à considérer l’humanité comme une entité globale, alors que les disparités Est-Ouest ou Nord-Sud sont si saillantes. A droite et à gauche, les critiques fusent.
En juin 1972, Raymond Barre, vice-président de la Commission européenne, convaincu « que le diagnostic apocalyptique du MIT est au moins partiellement faux », rejette les conclusions du rapport. « Il serait malvenu, argumente celui qui deviendra, en 1976, le premier ministre de Valéry Giscard d’Estaing, de vouloir substituer des priorités nouvelles comme la préservation des ressources naturelles aux priorités anciennes – le plein-emploi et l’accroissement des revenus – et de plaider pour une diminution de la croissance en Europe. » Dans L’Humanité, Georges Marchais, secrétaire général du Parti communiste français, estime que le rapport et son idée d’une nouvelle civilisation sont une « atteinte intolérable » à l’amélioration du sort des travailleurs.
« Cela peut sembler incroyable aujourd’hui, mais, au début des années 1970, très peu de gens pensaient que nos modes de vie allaient conduire au réchauffement climatique, à la raréfaction des terres arables ou à la pénurie d’eau… », témoigne Jorgen Randers, 70 ans, professeur à l’Institut norvégien sur le climat et l’un des auteurs de l’étude du MIT. Gianfranco Bologna, 62 ans, directeur scientifique de WWF Italie, diplômé en ornithologie, était un proche d’Aurelio Peccei, un amoureux de la nature, membre de la Ligue pour la protection des oiseaux. « Beaucoup de personnes parlaient du rapport sans l’avoir lu, critiquant les notions de croissance zéro et de décroissance alors qu’elles n’y figuraient pas ! », s’énerve-t-il aujourd’hui.
Des erreurs ? « Bien sûr il y en avait dans le modèle du MIT, mais est-ce si grave ? », s’interroge Jean-Luc Gaffard, professeur à Skema Business School, sixième école mondiale pour son programme en finance, selon le classement 2015 du Financial Times. « Le rapport soulevait une question déjà évoquée par Ricardo et Malthus – la limite finie de nos ressources –, mais derrière se posait la question de la définition du bien-être : est-ce bon d’avoir deux ou trois voitures ? De manger tous les jours de la viande ? »
Professeur émérite de sciences économiques à l’université Lyon-II, Pierre Dockès est un spécialiste des grandes peurs. Au XVIIIe siècle, rappelle l’historien, les populations pensaient que le bois allait disparaître. Plus tard, elles se sont inquiétées du manque de charbon, puis du pétrole… « Tout cela a été démenti. Mais nous n’avons aucune preuve aujourd’hui que ce que prédit le Club de Rome le sera aussi. Quels miracles le progrès technologique pourra-t-il réaliser face au non-renouvellement des ressources ? Sans oublier la dimension climatique qui aggrave le tableau… »
Tous ceux qui ont connu de près Aurelio Peccei ne supportent guère le malentendu né du rapport de 1972 qui fit du fondateur du Club de Rome un prophète du malheur. Ce 1er juillet 2015, rendez-vous est pris avec Anna Maria Pignocchi à l’Accademia dei Lincei, afin de raviver les souvenirs. Comme Aurelio Peccei, dont elle fut la fidèle secrétaire pendant plus de vingt ans, la vieille dame italienne, fille de diplomate, est polyglotte. Bientôt 80 ans, mais la jeunesse d’esprit d’une adolescente. « Aurelio Peccei, un pessimiste ? Un défaitiste ? Mais c’était l’inverse, il aimait la vie et les gens. Il avait foi en l’homme et en sa capacité de faire bouger les choses si cela était nécessaire », raconte-t-elle, la voix émue et toujours admirative.
Le témoignage de Roberto Peccei, 73 ans, le fils cadet de la famille, astrophysicien à l’université de Californie à Los Angeles (UCLA), ne dit rien d’autre : « Mon père était un homme libre, un grand voyageur qui n’avait qu’une idée en tête : mettre son expérience au service des autres. Il pensait qu’il existait des solutions à tout, y compris aux défis mondiaux. »
« Gentleman de la Renaissance »
Aujourd’hui, le Club de Rome, orphelin de son fondateur, agite moins les idées. Certes, il compte plus de femmes (14 sur 56 membres à part entière) qu’à ses débuts. La première, Elisabeth Mann-Borgese, n’y fait son entrée qu’en 1973. La benjamine de l’écrivain Thomas Mann était une spécialiste des océans. Elle fut rejointe deux ans plus tard par Eleonora Barbieri Masini, grand nom de la sociologie en Italie, qui se souvient aujourd’hui, à 86 ans, de ce « gentleman de la Renaissance qu’était Aurelio Peccei ».
Mais même si l’association helvétique publie toujours des rapports, elle ne crée plus l’événement. L’industriel italien et l’équipe du MIT avaient en effet réussi le prodige, comme le rappelle Jorgen Randers, « de modéliser le monde sur ordinateur ». Cette première mondiale fut un déclic. Il n’existait alors aucune base de données, hormis les photos aériennes des forces armées, susceptibles de rendre compte de l’état réel de la Terre. En juillet 1972, la NASA lançait le premier satellite d’observation et de monitoring de la Terre. Aurelio Peccei s’en était réjoui.
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