entretiens et videos - Page 767
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Alain de Benoist : « Les armes ou les larmes : il faut choisir »
La rédaction de Breizh-Info a interrogé Alain de Benoist, intellectuel majeur de la Nouvelle Droite, sur l’actualité et sur les évènements qui s’enchaînent, en France, en Europe et dans le monde. Nous reprenons ici cette entretien publié le 21 juillet 2016 par Breizh-Info.
Breizh-info.com : Nice, Turquie, Brexit : est-on en train d’assister à une accélération de l’histoire ?
Alain de Benoist : Il y a déjà eu des attentats en France (et il y en aura d’autres), comme il y a déjà eu des coups d’État en Turquie (et ce n’est sans doute pas le dernier). Le Brexit est plus important, surtout s’il s’avère qu’il aura marqué le début de la déconstruction européenne. Mais cela suffit-il à parler à d’« accélération de l’histoire », expression dont une définition précise est encore à donner ? Plus intéressante me paraît être l’accélération sociale, à laquelle Hartmut Rosa a consacré un excellent livre : « L’accroissement de la vitesse, écrit-il, constitue le véritable moteur de l’histoire moderne ».
Mais cette accélération-là n’a pas grand-chose à voir avec les événements qui font la une des médias. C’est une accélération silencieuse, d’autant plus efficace qu’elle ne fait pas de bruit. Si l’on recherche le décisif, plus que vers Ankara, c’est vers la Silicon Valley qu’il faut se tourner.
Les responsables européens sont-ils à la hauteur des événements ?
Alain de Benoist : Vous connaissez très bien la réponse. Ces gnomes ne sont même pas à la hauteur d’eux-mêmes.
Que vous inspire la tentative de coup d’État en Turquie ?
Alain de Benoist : Ses auteurs s’y sont véritablement pris comme des manches, ce qui confirme une fois de plus que les militaires putschistes sont rarement intelligents. Erdogan, comme de Gaulle en avril 1961, a au contraire réagi avec une rapidité et un sens du moment historique qui méritent l’admiration. C’est une belle illustration du propos de Carl Schmitt : « Est souverain celui qui décide dans le cas d’exception ».
Le président turc est évidemment le grand vainqueur de ce coup d’État avorté : ses adversaires lui ont offert sur un plateau d’argent les circonstances qui vont lui permettre de museler son opposition. Reste à savoir si l’événement ne va pas également dégrader les relations de la Turquie avec les Etats-Unis, ceux-ci n’ayant condamné le coup d’État qu’avec un retard assez suspect. Il faudrait alors s’attendre à une confirmation du rapprochement entre Ankara et Moscou. Mais rien n’est sûr. La Turquie étant une spécialiste du triple ou quadruple jeu, il est difficile d’en dire plus pour le moment.
Du Front national au Parti communiste français, il semblerait que la solution du « tout sécuritaire » soit prisée pour combattre l’islamisme. Partagez-vous cet avis ? Le mal n’est-il pas plus profond, et à traiter à la racine ?
Alain de Benoist : La quasi-totalité de la classe politique estime que la réponse au terrorisme doit être avant tout « sécuritaire ». Cela revient à vouloir agir sur les conséquences plutôt que sur les causes, c’est-à-dire à chercher à régler en aval ce qui doit se régler en amont. Les mesures dites de sécurité ne servent en outre pas à grand-chose. La présence des militaires dans les rues rassure, mais ne protège pas. Le renseignement reste inefficace aussi longtemps qu’il n’est pas orienté vers le décèlement précoce. Quant aux mesures d’exception, que réclament les hystériques, elles ne font que restreindre les libertés sans améliorer la situation.
Comprendre le djihadisme, afin de mieux lutter contre lui, implique un changement radical des mentalités. Nos contemporains estiment pour la plupart que rien n’est pire que la mort, idée dont ils ignorent qu’elle est assez récente (mais à laquelle l’idéologie libérale apporte sa caution : l’Homo œconomicus étant posé comme fondé à toujours rechercher son meilleur intérêt, il n’est objectivement rien au nom de quoi on puisse lui demander de sacrifier sa vie).
Ils se sont par ailleurs habitués à penser que la religion trahit sa vocation quand elle encourage le fanatisme. Cela leur interdit de comprendre la dimension existentielle d’un activisme islamiste dont les protagonistes, non seulement ne craignent pas la mort, mais la recherchent volontairement avec passion. Cela leur interdit aussi de comprendre ce fait brutal qu’à l’heure actuelle, le djihadisme est apparemment la seule cause pour laquelle des milliers de jeunes sont prêts à aller mourir loin de chez eux. L’explication psychologique par la « folie » et la « radicalisation » des « déséquilibrés » arrange tout le monde. Grande différence culturelle, que les Américains ont déjà éprouvée en Afghanistan : quand un Occidental est tué, sa famille le pleure ; quand un djihadiste est tué, sa famille prend les armes. Les armes ou les larmes : il faut choisir.
La France peut-elle basculer dans la guerre civile ?
Alain de Benoist : Vous m’avez déjà posé la question, et ma réponse est la même : pour l’instant, c’est non. Des colères ne suffisent pas à déclencher une guerre civile, et il en va de même des actes de violence, même répétés, ou des éventuelles dérives individuelles ou groupusculaires de sociopathes du type Breivik.
Il ne peut y avoir une guerre civile que lorsque des masses ont le désir, la volonté et les moyens de se battre. Je ne vois rien de tel actuellement. Les réactions qui font suite aux attentats le démontrent amplement : ce que les Français veulent aujourd’hui, ce n’est pas la guerre, mais la paix – et même la paix à tout prix.
Propos recueillis par Yann Vallerie
Texte paru initialement sur Breizh-Info sous le titre
« Alain de Benoist sur les responsables européens :
“Ces gnomes ne sont même pas à la hauteur d’eux-mêmes.“ » -
Henri Christian Giraud: De Gaulle, Staline et les communistes
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Bernard Monot (FN) invité de BFM Business dans l'émission "500 millions d'européens".
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La stratégie du choc des civilisations (Vernochet, Hindi)
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Jean-François Colosimo : « La Turquie a fait un pas de plus vers la dictature islamiste »
Il manquait, nous semble-t-il, une analyse de fond de la crise turque.Jean-François Colosimo la donne dans cet entretien paru sur Figarovox[18.07] : Erdogan n'a pas hésité à lancer la foule contre les tanks pour empêcher un coup d'Etat militaire dont l'échec renforce aujourd'hui encore davantage la mainmise du président turc sur un pays islamisé, mais fragile, selon Jean-François Colosimo. LFAR
Le président turc Erdogan a maté une tentative de coup d'Etat militaire. Que s'est-il passé ? Cela a-t-il un lien avec l'attentat d'Istanbul, il y a un quinzaine de jours ?
La Turquie d'Erdogan est un pays a la dérive qui voit resurgir les fantômes de son passé irrésolu, refuse de faire face à sa faille constitutive et pratique la fuite en avant quant à son ancrage définitif entre l'Europe sécularisée et l'Orient islamisé. Trois mesures de temps sont nécessaires pour appréhender ce coup d'état avorté. Le premier, de long terme, tient à l'affrontement constant sous l'Empire ottoman entre le sabre et le turban, l'armée et le clergé, dont la fin des janissaires est exemplaire: cette puissante élite militaire et administative issue de chrétiens convertis de force et demeurée religieusement minoritaire puisque liée aux Bektachis, Alévis et autres confréries soufies, est exterminée en 1826 à l'occasion d'un déchaînement populaire fomenté par le Sultan Mahmoud II au nom de Mahomet et relayé par les oulémas sunnites ; déjà il s'agit d'éradiquer un “État dans l'État ” jugé de surcroît hétérodoxe. Second moment, de moyen terme, le mouvement se reproduit tout en s'inversant avec les Jeunes-Turcs puis Mustapha Kemal et les chefs militaires de la guerre de révolution nationale qui, au nom cette fois de la laïcité, briment l'islam institutionnel non sans précisément tolérer les Bektachis pour des raisons de convergence idéologique quant à l'impératif de la modernisation: l'armée, qui se veut garante de ce républicanisme émancipateur, interrompt ce qu'elle conçoit comme des “dérives démocratiques” en 1960, 1971 et 1980 en instaurant la dictature et en considérant le putsch comme un moindre mal au regard de forces considérées là encore comme centrifuges et destructrices d'une impossible unité hors la violence étatique. Le troisième moment, auquel nous assistons, relève d'une sorte de volonté de synthèse en forme d'impasse. Au nom du califat, cette expression suprême et politico-religieuse du sunnisme orthodoxe qui serait hypothétiquement restauré en sa propre personne dès lors qu'il réussirait à imposer une présidence dotée des pleins pouvoirs, Erdogan se bat sur les deux fronts: d'un côté, ce qu'il reste de l'armée kémaliste, laïciste et anti-religieuse ; d'autre part, la puissante confrérie de Fettulah Gulen issue du mouvement religieux et revivaliste nordjou, lequel ambitionne d'unir fondamentalisme et modernisme à travers le maillage de la société et la pénétration de l'appareil d'État (Éducation, Justice, Police, Armée, etc.). Les gulenistes ont été décisifs comme levier dans la conquête du pouvoir menée par Ergogan à la tête de l'AKP, le parti “islamo-conservateur”. Mais l'alliance est rompue depuis 2013 et la dénonciation par Gulen, qui vit aux États Unis, de la corruption organisée par les cercles gouvernementaux et plus encore par les proches et parents de l'actuel président. Erdogan, qui avait jusque là mené une traque sourde à l'encontre des kémalistes a alors systématisé la chasse aux gulenistes. Il veut incarner à la fois le sabre et le turban, quitte à devoir lutter contre ceux qui traditionnellement les représentent. Que les mutins appartiennent à l'une ou l'autre tendance importe peu au regard de la logique de purge qui préside à l'ensemble de sa quête autocratique. Or c'est par cette logique, jusqu'ici réversible, désormais totale, que la Turquie n'a cessé de se survivre afin d'échapper à son vide fondateur ainsi qu'à sa construction artificielle reposant sur l' élimination des minorités et des dissidences, ou plus largement de toute différence, au profit d'une identité imaginaire. Ainsi, plus Ergogan entend fusionner les pouvoirs, plus menace l'implosion dont ce putsch n'est jamais que l'un des nombreux signes.
Le gouvernement « islamo-conservateur » semblait être réconcilié avec l'armée ? Comment expliquez-vous ce revirement ? Lors des précédents putschs en Turquie, l'armée était unie. Est-ce toujours le cas aujourd'hui ?
En recourant dans un premier temps , afin d'asseoir sa conquête du pouvoir, à un processus de démocratisation qui faisait la part belle aux autres communautés brimées par le kémalisme - et ce, pour d'autant mieux instituer le retour sinon inassimilable de l'islam politique -, Erdogan a neutralisé le rôle traditionnel de l'armée comme gardienne d'un républicanisme intransigeant.
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