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Europe et Union européenne - Page 1070

  • Les 3 dogmes assassins à l’origine de la désindustrialisation

    La France, cimetière d’usines : 900 fermées en trois ans. Le spectre d’une désindustrialisation dramatique quitte les chiffres froids, secs et désincarnés de la macro-économie pour miner le paysage du réel. Vertige d’une grande puissance industrielle au tapis, impuissante à invoquer la crise comme seule responsable de ces maux puisqu’au cours de ces dernières années, elle a fait beaucoup moins bien que ses classiques concurrents européens, l’Allemagne, le Royaume-uni, l’Italie.

    Ainsi, dans la zone euro, entre 2000 et 2010, le poids de la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière dans le PIB accuse un recul de 3,7 points contre 5,2 points en France (plus de 100 milliards d’euros). La part de l’industrie dans la valeur ajoutée totale de l’économie a régressé brutalement en une décennie de 30 %, passant de 18 % en 2000 à 12,5 % en 2011. Alors que ce ratio est de plus du double en Allemagne, de 18,6 % en Italie.

    Du côté des exportations dont la balance commerciale accuse 70 milliards de déficit, les performances son calamiteuses : la France a perdu de 1998 à 2012, 41 % de ses parts de marché, le double de l’OCDE, le triple de l’Allemagne. Du côté des emplois, les chiffres sont encore plus accusateurs puisqu’en 30 ans la France a perdu 2 millions d’emplois industriels. A part l’agroalimentaire, le luxe et l’aéronautique, qui ont réussi à tirer leur épingle du jeu, toutes les filières sont plus ou moins touchées.

    Sans industrie, point de R&D

    Or à elle seule, l’industrie réalise plus des trois quarts des exportations, 85 % des investissements en R&D. A contrario, sans industrie, point d’export ni de R&D. Ses effets d’entraînement sont donc majeurs. Alors que le solde extérieur de la branche manufacturière s’est dégradé rapidement, passant de + 10,5 milliards d’euros€ en 2000 à -10,7 en 2007.

    En Grande-Bretagne, qui produit aujourd’hui davantage d’automobiles que la France alors que son industrie était moribonde il y a une demi-douzaine d’années, le poids de l’industrie manufacturière dans le PIB remonte pour atteindre 12,6 % avec un objectif de 15 % dans 5 ans. Bref, les capacités productives de l’industrie française sont proches de celles de 1998, alors que celles de l’Allemagne ont progressé de 30 %. CQFD. L’effondrement industriel français n’est pas la conséquence de la crise.

    Le mal vient de beaucoup plus loin et l’on voit bien que l’appareil de production des pays concurrents est, comparé à celui des usines françaises, dans un bien meilleur état si l’on en croit ces quelques données : 150 000 robots en Allemagne, 70 000 en Italie mais 35 000 en France où l’on trouve un parc de machines- outils accusant 17 ans de moyenne d’âge contre 10 en Italie, 9 en Allemagne. Et à l’heure de l’export, si dans les pays les plus développés d’Europe, 80 % des PME de plus de 10 salariés ont un site Internet, dans l’Hexagone, elles ne sont qu’une sur deux à proposer cette essentielle vitrine commerciale. Le taux de patrons d’Eti parlant l’anglais est ridicule. Bref, l’Etat n’est pas totalement responsable de ce déclin.

    Le “fabless”

    Etrange défaite, curieuse déroute dont les causes réelles remontent en fait à trois décennies, ces “trente piteuses” pilotées par trois dogmes successifs responsables de cette lente désindustrialisation : “la société post-industrielle”, “la nouvelle économie”, “l’entreprise sans usine”… Adieu ateliers et usines, rapidement troqués contre des bureaux, la fabrication contre des prestations, le secondaire contre le tertiaire, si noble et peu salissant. C’était un peu vite oublier que les activités de services se nourrissent, en support, de celles de l’industrie, pour une large part. Qu’elles ne sont point rivales mais complémentaires jusqu’à être indissociables. Et que le plus souvent, les industriels avaient externalisé un certain nombre de tâches et missions, ne serait-ce qu’en faisant appel à des sociétés d’intérim. Bref, que du passé industriel il était franchement impossible de faire table rase.

    Puis débarquèrent ces nouvelles technologies qui devaient brutalement tout détrôner, la révolution numérique, elle aussi, si noble et vertueuse avec ses charmes immatériels, démodait les modes de production classiques salissants, bruyants. Les nouveaux petits machins, si fins, avaient autrement plus de séductions que ces grosses machines.

    Enfin, un beau jour de 2001, Serge Tchuruk, patron d’Alcatel, se fit le chantre du “Fabless”, “l’entreprise sans usines”; les cerveaux européens sous-traiteraient aux milliers de petits bras asiatiques le travail industriel à faible valeur ajoutée. Cette illusion dura juste le temps pour les Chinois de mettre leur recherche à niveau, de proposer des innovations rudement concurrentielles afin de livrer de sévères batailles sur les marchés mondiaux. Tout faux. Alors que la mondialisation érode les marges, provoquant un véritable cercle vicieux. Laminées, ces dernières ne permettent plus les investissements, surtout en R&D, impossible de monter en gamme, les produits devenant moins innovants perdent leur avantage concurrentiel. Alors il faut réduire les prix…

    Pente fatale. Pour Max Blanchet, senior partner de Roland Berger, “ce modèle “fabless” – Alcatel, Thomson qui a vendu ses usines – s’est révélé totalement erroné. Car si on ne produit plus en France, on perd les capacités de recherche, les compétences”. Fermez le ban sur cette “colossale erreur stratégique”. Nous avons atteint un niveau d’obsolescence historique faute d’avoir suffisamment investi dans l’appareil de production. Et nous ne pourrons nous imposer que dans les domaines industriels où le coût de main-d’oeuvre tient pour une faible part dans les coûts de production.

    La commande publique

    Durant les Trente Glorieuses, l’industrie française figurait parmi les champions mondiaux, grâce il est vrai à l’importance des commandes relevant du budget national. La puissance de feu de cette industrie triomphante – le nucléaire, le téléphone, le Minitel, le Concorde – devait l’essentiel de ses réussites à un Etat régalien autant que colbertiste pratiquant la stratégie de l’arsenal : l’essentiel de la production était drivé par des commandes publiques. Selon une politique industrielle des plus dirigistes.

    D’ailleurs les polytechniciens, centraliens et autres ingénieurs des Mines formaient les bataillons de l’élite à la tête de la haute administration comme des grands groupes. L’aristocratie du tout-Etat. Tout a changé. La montée en puissance des gestionnaires et financiers au sommet des grandes entreprises correspond au déclin d’une industrie confrontée à une concurrence mondialisée. S’il y a relativement peu d’ingénieurs à la tête des groupes du CAC 40 – on y compte un seul “docteur” -, il n’y a pas un seul ingénieur dans le gouvernement Hollande.

    On le voit bien, d’anciennes causes de nature culturelle plombent notre dynamique industrielle. Alors qu’en Allemagne, la culture dominante est largement plus versée vers les techniques, les technologies, selon un long chemin très ouvert pouvant transformer des apprentis en patrons. Le rite initiatique des ateliers et usines laisse des traces. En France, les jeunes ont une opinion négative des usines, se détournent des formations scientifiques, ensuite va s’ajouter le principe de précaution et la peur maladive du risque or l’industrie est par essence une activité à risque.

    D’où un climat défavorable du côté des élites qui s’est traduit très concrètement par une certaine prise de distance avec ces activités industrielles qui ont forgé des générations de pionniers. Ajoutons-y le télescopage des temps, longs pour les industriels mais courts pour les financiers, et l’anti politique industrielle de Bruxelles qui, privilégiant la concurrence et le consommateur, s’est opposée aux regroupements de grands groupes industriels de taille à affronter les marchés mondiaux.

    5 faiblesses et 7 leviers pour tout changer

    Les experts de Roland Berger ont fait le diagnostic de l’industrie française et délivré l’ordonnance

    Les 5 faiblesses coupables:
    Coût du travail supérieur à celui de l’Allemagne de 10 %, difficulté à reconfigurer les activités industrielles, insuffisance de la recherche sur les technologies, faibles performances des PME industrielles, manque de culture entrepreneuriale et d’innovation industrielle. Inverser la tendance nécessite de changer nos dogmes du passé afin de prendre en compte une nouvelle donne.

    Les 7 leviers d’action :
    Réduire les charges, faciliter la reconfiguration de l’industrie, aider les entreprises à produire en France et à exporter, dynamiser l’investissement dans les secteurs d’avenir, soutenir et développer les PME industrielles, orienter l’enseignement et la recherche vers l’innovation technologique et industrielle, revaloriser notre culture industrielle.

    Il n’y a pas si longtemps, les négociations sociales chez EADS ont provoqué deux résultats contrastés : face à un choix, les syndicats allemands ont opté pour la garantie de l’emploi quand de ce côté-ci du Rhin, les syndicats ont préféré la garantie de salaire. Symptôme d’une attitude vis-à- vis de l’entreprise. Quand se désole Frédéric Sanchez, président du directoire de l’entreprise Fives qui, ne trouvant pas de soudeurs sur le marché du travail, a été obligé d’ouvrir une école dédiée. L’industrie a aussi mal à son image. Il suffit d’observer la proportion de filles dans les écoles d’ingénieurs – 13 % aux Arts et Métiers – pour s’apercevoir que même à haut niveau dans la société française, sa cote est au plus bas.

    Trois décennies d’errements autant que d’erreurs stratégiques collectives qui se payent aujourd’hui au prix fort. Faut-il donc désespérer de l’industrie française ? Sinon, comment peut-elle se reconstruire ? L’Histoire à cet égard nous donne une bonne leçon.

    En 1890, l’industrie française était dans un état lamentable tandis que sa concurrente allemande était florissante. Il a fallu seulement dix ans pour que la situation s’inverse grâce à la perspective mobilisatrice de l’Exposition universelle, le travail de la constituante, etc. Pourquoi ne pas imager un tel retournement d’ici à l’horizon 2022 ? La crise peut être une chance de mettre un terme à cette lente érosion qui n’a rien d’inéluctable.

    L’i-conomie

    Actuellement l’industrie est à la croisée de chemins antagonistes : le premier poursuit la lente dégringolade provoquant la destruction de 600 000 emplois à échéance 2022, tandis que le rebond enraye non seulement cette hémorragie mais initie une dynamique permettant de créer 700 000 emplois à cette même échéance. Au prix certainement d’un électrochoc du côté des investissements dans les technologies d’avenir. Coprésident de l’Institut Xerfi, Michel Vitolle est partisan d’une troisième révolution industrielle qui a d’ailleurs un nom, “l’iconomie”. Cette transformation est aussi importante que celles provoquées par les autres révolutions industrielles avec la mécanisation au XVIIIe siècle, puis la maîtrise de l’énergie à la fin du XIXe.

    Le système productif fait émerger une “iconomie” en transformant la nature des produits, la façon de produire et de commercialiser, les compétences, les organisations, la structure du marché, la forme de la concurrence et l’attitude des consommateurs. Nous n’avons pas assez tiré profit du système technique à base de logiciels et de réseaux qui permet de supplanter l’économie mécanisée. Les tâches répétitives physiques et mentales sont automatisées, chaque produit est un assemblage de biens et de services élaboré par un réseau de partenaires et la cohésion de cet assemblage est assurée par un système d’information.”

    Ce chamboulement radical du modèle productif sera gourmand en capitaux, réclamera une organisation différente de la chaîne de valeur et un cadre réglementaire et fiscal sensiblement plus favorable. Aujourd’hui, notre portefeuille d’activités industrielles affiche une grande vulnérabilité à la concurrence mondiale. “Mais nous pouvons jouer le coup d’après afin de doubler les Allemands dans dix ans”, plaide Michel Vitolle. Bref, le big bang d’un nouveau modèle industriel qui fait voler en éclats les schémas classiques.

    Quels sont alors les leviers de manœuvre de ce fameux “Etat stratège” qui voudrait bien donner de la consistance au concept de “politique industrielle” ? Il n’en a déjà pas au niveau européen, fiasco sur toute la ligne. Mais au niveau national ?

    La stratègie de quelques “filières privilégiées” est-elle la bonne ? Trouver des innovations de rupture oblige à des coopérations entre différentes filières, en créant des “hub” favorisant ces partenariats. Cela n’existe pas vraiment. Les filières ne sont donc pas adaptées car les innovations sont toujours induites par des coopérations trans-sectoriels selon ce postulat si connu de la fertilisation croisée. Il faut donc faciliter la coordination de plusieurs secteurs.

    La vallée de la mort

    Le politique – Arnaud Montebourg en l’occurence –, aux prises avec l’angoissante détresse des canards boiteux, arbitre dans l’urgence. Mais dans des contraintes de ressources si chiches, faut-il préférer la perfusion d’industries condamnées ou concentrer les maigres moyens sur le développement des activités d’avenir ? Certitude, les pouvoirs publics peuvent jouer un rôle dans le franchissement de la “vallée de la mort” (equity gap). Ce concept a permis d’identifier et de nommer la transition si délicate entre l’invention issue de la recherche jusqu’à sa commercialisation. Vallée jonchée d’échecs, faute de phase d’industrialisation satisfaisante. Zone de risques de haut niveau, cette rencontre entre la recherche et le marché passe par la conception d’une maquette, d’un prototype que ne veulent financer les concours bancaires. Alors, si la BPI s’en occupe…

    “Une vision radicalement nouvelle du modèle de production pour la France, plaide de son côté Jean-Louis Levet, expert de la fondation Jean-Jaurès. Il s’agit d’en faire le levier majeur d’une stratégie de développement pour notre pays et l’Union européenne. En mettant en œuvre un ensemble d’orientations nouvelles et puissantes. En construisant un nouveau mode de gouvernement mettant fin aux pathologies du système politico-administratif. En mobilisant l’ensemble des acteurs territoriaux, de l’entreprise, des partenaires sociaux.” Il reste à provoquer, par quelques signaux forts, cette renaissance.

    Le nouvel Economiste via http://fortune.fdesouche.com/

  • Grèce : Face à la gabegie et à l’immigration, l’Aube dorée s’impose au… biceps

    Grèce : Face à la gabegie et à l’immigration, l’Aube dorée s’impose au… biceps

    Photo ci-dessus : distribution de nourriture et de vêtements par l’Aube dorée à la partie des grecs en voie de clochardisation.

    C’est devenu le paradoxe grec. Fin janvier, à Athènes, des milliers de gauchistes ont manifesté contre les “ratonnades” d’immigrés illégaux organisées par le parti « néo-nazi » Aube dorée… Mais rien n’y fait ! Malgré ces protestations, le parti le plus radical du paysage politique grec continue sa course en avant

     Grèce : Face à la gabegie et à l'immigration, l’Aube dorée s’impose au… biceps

    Une vue de la manifestation anti Aube dorée de janvier dernier à Athènes

    Le parti Aube dorée, groupusculaire tout au long des années 2000, entré au Parlement en juin 2012 avec 7 % des voix, est désormais crédité de 13 % d’intentions de vote, devenant la troisième force politique du pays ! Un succès que l’on ne peut séparer d’un discours ultranationaliste et de méthodes musclées, sur fond de démission des autorités.

    L’Aube dorée a commencé sa longue conquête électorale dans le quartier athénien d’Agios Panteleimonos, connu pour accueillir un grand nombre d’étrangers. Face aux multiples violences et perturbations causées par les immigrés illégaux, touristes et badauds finissaient par déserter ce coin populaire de la capitale. Même les riverains n’osaient plus sortir de chez eux…

    Grèce : Face à la gabegie et à l'immigration, l’Aube dorée s’impose au… biceps

    Aube dorée

    Jusqu’à ce que l’Aube dorée constitue des patrouilles et entreprenne de nettoyer l’endroit par la force. « Avant que les membres du parti viennent s’en prendre aux immigrés pour assurer notre sécurité, personne ne sortait après 17 heures. On tremblait de peur », avouent Pavlos et Vaguélia, deux habitants du quartier interrogés par des journalistes suisses interloqués.

    Véritable porte d’entrée de l’immigration irrégulière à destination de l’Union européenne, la Grèce est terrassée par la crise (le chômage vient d’atteindre 26 %) et l’insécurité. Dans ce contexte, nombre d’immigrés illégaux venus bénéficier du système social ont versé dans la délinquance et la criminalité. L’Etat, lui, est accusé de ne pas jouer son rôle. Yiannis tient un kiosque dans le quartier depuis six ans. Selon lui, « la Grèce se passerait bien d’Aube dorée… si seulement la police était plus efficace ! Je l’ai appelée plusieurs fois car des immigrés volaient ma marchandise. Elle n’est jamais venue. L’Aube dorée comble donc le vide de l’Etat à sa manière. »

    La Grèce prête pour le grand saut ?

    Entre les chasses à l’homme contre les dealers et les proxénètes ou les attaques de marchands à la sauvette, le parti multiplie les actions violentes. Mais cela ne choque plus ! Georges Contogeorgis, professeur de sciences politiques à Athènes, sans légitimer ces méthodes, les replace dans leur contexte: « Il ne suffit pas de blâmer le succès d’Aube dorée, il faut essayer de comprendre. En agissant sur le terrain, le parti répond aux inquiétudes de la société que les autres politiques ignorent, enfermés derrière leurs privilèges. »

    Si l’Aube dorée souffre de son image, les membres du parti s’en nourrissent pour inverser la tendance. Artémios Mathéopoulos, député Aube dorée de Thessalonique analyse le succès de son parti: « Nous n’avons pas peur de parler des problèmes et de proposer des solutions concrètes pour aider notre pays. Les politiques et les médias nous accusent d’être violents et déforment la réalité car ils ne savent pas à qui s’en prendre. Mais les sondages montrent que cela ne marche pas. Contrairement aux politiques mises en place depuis toujours, nous ne volons pas le peuple et ne mentons pas. Nous sommes la solution et pas le problème d’une Grèce devenue dépendante. »

    Face à une asphyxiante politique économique dictée par la technocratie bruxelloise, l’Aube dorée a, une fois de plus, décidé d’agir sur le terrain pour aider une population en voie de clochardisation.

    En véritable ONG, le parti ouvre les portes de ses locaux, désormais implantés partout en Grèce. La préférence nationale y est appliquée avec soin. Et cela marche! Après avoir prouvé sa nationalité, chacun peut venir y chercher des sacs de nourriture et de vêtements. Si Artémios Mathéopoulos assure que le parti a toujours agi ainsi, l’entrée d’Aube dorée au Parlement a favorisé une meilleure organisation et permis d’accroître les moyens.

    « Chacun de nos députés donne 3000 euros, pris sur son salaire, afin que nous puissions aider davantage les Grecs. » Après la mise en place d’une banque de sang, le parti vient de créer une sorte de Pôle emploi pour aider les chômeurs. Là encore, priorité nationale, solidarité et proximité sont les maîtres mots: « On connaît les gens qui viennent dans nos locaux et si je sais que, parmi eux, il y a un électricien, je ferai appel à lui et non à un inconnu », explique le député.

    Grâce à ces actions sécuritaires et sociales, fondées sur la solidarité nationale, ainsi que sur la critique pertinente d’un Etat démissionnaire et de partis ayant fait la preuve de leur incompétence, l’Aube dorée rassemble largement au-delà des fanatiques et des déçus d’une société mise à mal. Elle devient même une alternative possible au Système. Selon le politologue et historien anglais Antony Beevor, « si une nouvelle crise se préparait avec la troïka (FMI, BCE, zone euro), le gouvernement d’Antonis Samaras [ndlr: qui ira prochainement demander une nouvelle aumône à Berlin], n’y résisterait sans doute pas: ce serait alors un vrai saut dans l’inconnu pour Athènes. »

    Patrick Cousteau http://fr.novopress.info

    Article de l’hebdomadaire “Minute” du 6 février 2013 reproduit avec son aimable autorisation. Minute disponible en kiosque ou sur Internet.

    Crédit photos : Aube dorée.

    Grèce : Face à la gabegie et à l'immigration, l’Aube dorée s’impose au… biceps

  • La France est-elle encore juridiquement souveraine ?

    Que reste-t-il de souveraineté à la France, dès lors que les règles de l'Union européenne l'emportent sur ses lois ? Une peau de chagrin.

    Les prochaines élections européennes conduisent à s'interroger sur l'indépendance juridique qu'a encore la France. La question est d'importance, bien qu'elle ne soit pas souvent abordée, sans doute parce que le sujet est quelque peu technique. Pour comprendre la situation, il est nécessaire de se placer, d'une part, du point de vue européen et, d'autre part, du point de vue français, même si les deux systèmes convergent.

    La primauté du droit communautaire
    Le droit communautaire est constitué de deux ensembles : d'un côté, le droit institutionnel (composé de tous les traités ayant concouru à l'établissement de l'Union européenne) et, de l'autre, le droit matériel qui est l'ensemble des règles élaborées par les institutions européennes. Au sein de ce dernier, il faut distinguer le règlement de la directive. Le premier est un texte à portée générale qui s'applique directement et immédiatement dans les États membres. La seconde est un texte fixant un objectif aux États, ces derniers devant le transposer dans leur droit interne. Mais, quelle est la force de ce droit de l'Union ?
    La Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a profité de son rôle d'application et d'unification du droit de l'Union pour imposer le principe de la primauté de ce dernier sur les droits nationaux. Quatre arrêts doivent retenir particulièrement l'attention. La CJCE a affirmé que l'ordre juridique communautaire ne concerne pas seulement les États mais aussi les citoyens (Van Gend en Loos, 1963). Elle a, ensuite,considéré que cet ordre est intégré à celui des États membres (Costa c. ENEL, 1964). Mais, elle est allée encore plus loin : l'acte communautaire, même contraire à la constitution d'un État membre, doit être appliqué (International Handelsgesellschaft, 1970). Enfin, le juge communautaire a dicté sa conduite aux juges des États : ces derniers ne doivent pas appliquer une règle nationale contraire à un texte européen (Simmenthal, 1978). Ainsi, du point de vue de l'Union, la chose est claire : les droits nationaux doivent plier devant la règle communautaire.
    Face à cela, les systèmes juridiques des États membres ont-ils résisté ? Du point de vue français, deux questions doivent être distinguées : quelle est la place des engagements internationaux (et donc notamment du droit communautaire) d'une part, par rapport à la constitution française et, d'autre part, vis-à-vis de la loi nationale ? Quand la France veut signer un engagement international, en particulier un traité européen, si ce dernier comporte des clauses contraires à sa constitution, celle-ci doit être révisée (art. 54 de la constitution de la Ve République). Elle s'efface donc derrière le texte international ou communautaire. La logique veut donc que ce dernier ait une valeur supérieure à la constitution.

    L'effacement du droit français
    Mais, les plus hautes juridictions françaises - Conseil d'État, Sarran (1998), Cour de cassation, Fraisse (2000), Conseil constitutionnel, TCE (2004) - ont affirmé que, puisque c'est la constitution qui prévoit, elle-même, qu'elle doit être révisée, elle reste donc, en droit interne (la précision est d'importance) la norme supérieure. L'hypocrisie, à moins qu'il ne s'agisse de la politique de l'autruche, atteint ici son comble.
    Pour ce qui est de la loi, la situation est encore plus défavorable au droit national. L'art. 55 de la constitution prévoit que le droit international a une valeur supérieure à la loi interne. Ce principe s'applique explicitement vis-à-vis des lois votées avant la ratification du texte international. Mais la jurisprudence a également appliqué ce principe vis-à-vis des lois postérieures, c'est-à-dire que si le Parlement français vote une loi sur une question déjà traitée par le droit communautaire, celle-ci n'aura aucune force réelle : elle ne s'appliquera pas. La Cour de cassation a, la première, affirmé cette position (Jacques Vabre, 1975). Le Conseil d'État a rejoint cette analyse (Nicolo, 1989). La haute juridiction administrative a, ensuite, étendu le bénéfice de ce régime à l'ensemble des actes de droit communautaire : les règlements (Boisdet, 1990) et les directives (Rothmans, 1992). Il est même allé jusqu'à affirmer la responsabilité de l'État si la loi française est contraire aux textes internationaux (Gardelieu, 2007). La conclusion de tout cela est limpide : non, la France n'est plus juridiquement souveraine !
    Bernard Lhéritier monde & vie 6 juin 2009

  • Radio Courtoisie : “Une terrible beauté est née”

    Samedi 09 février à midi, Romain Lecap recevra dans le Libre Journal des lycéens, sur Radio Courtoisie, Adriano Scianca et son éditeur Gérard Vaudan, pour la sortie en France de l’ouvrage “Une terrible beauté est née“, livre-évènement sur le phénomène Casa Pound Italie..

    Nous retrouverons également les chroniqueurs habituels ainsi que Patrick Weber pour son livre Eva-Evita, pour l’amour du diable !

    http://fortune.fdesouche.com/

  • Nigel Farage à François Hollande : "Vous utilisez le vieux truc : une intervention militaire"

  • Euro : l’Elysée comprend enfin que la monnaie unique ne correspond pas au niveau économique de la France

    Mardi, à Strasbourg, soit peu avant le sommet de Bruxelles, le président français, François Hollande, s’en est pris à l’euro fort. À 1,35 dollar, Paris juge l’euro «trop fort» : «La parité de l’euro ne correspond pas à la valeur réelle de son économie» s’est en effet expliqué François Hollande. Une attaque surprise qui a suscité une réaction sèche du gouvernement allemand sur le niveau de l’euro : «La politique de change n’est pas un instrument adapté pour améliorer la compétitivité», a affirmé Steffen Seibert, porte-parole de la chancelière Angela Merkel. «Le gouvernement allemand est convaincu qu’en comparaison historique, l’euro n’est pas surévalué à l’heure actuelle», a-t-il poursuivi.

    Le président français soulève un vrai problème, en effet, mais il reste incapable d’en saisir les véritables implications, ni par conséquent de rechercher une vraie solution. Car l’euro est devenu un dogme idéologique, protégé par une vulgate intangible. Sauf que la monnaie n’est pas une fin, elle est un moyen : et un moyen doit s’adapter précisément à la fin qu’il poursuit.

    Or, précisément, le dogme de l’euro interdit aux États d’adapter leur monnaie à leur niveau économique. En contraignant les nations a abdiquer leurs prérogatives régaliennes, dont frapper monnaie, l’Union Européenne a confisqué leur souveraineté, également monétaire, leur niant ainsi toute maîtrise de leur politique économique. C’est ainsi que l’euro, taillé à la mesure des allemands, est une monnaie trop forte pour l’économie française qui, asphyxiée, et sans recours possible à la dévaluation, voit ses exportations plombées. Ce qui provoque enfin une réaction de l’Élysée…

    Le problème en cause, c’est évidemment le mondialisme qui, sous prétexte de la mondialisation, veut promouvoir un monde sans frontières, uniforme, dans lequel les nations seraient une structure historique dépassée. Mais la réalité se rappelle au souvenir des idéologues : car on peut bien nier les caractéristiques respectives des peuples, niveler leurs différences, et vouloir les couler dans le même moule, il est un moment où, l’homme vivant aussi de pain, les exigences propres des différentes économies se font plus revendicatrices et leur différences doivent êtres prises en compte…

    http://www.contre-info.com/

  • [Tribune libre] L’Europe de la Défense sera continentale ou ne sera pas ! – par Marc Rousset

    PARIS (NOVOpress) - Accaparés depuis plus de trois ans par la crise de l’euro, les dirigeants de l’Union européenne (UE )ont voulu montrer lors du dernier sommet européen en décembre 2012 qu’ils avaient aussi d’autres ambitions. Ils ont ainsi décidé de relancer le débat sur la défense européenne, à laquelle ils consacreront un sommet fin 2013. Au-delà de la dimension politique, il s’agit surtout de renforcer la coopération en faisant des économies à l’heure des restrictions budgétaires. Mais ce n’est là que le petit côté de la lorgnette cher aux technocrates et aux incapables droit de l’hommistes, libre-échangistes et immigrationnistes qui nous dirigent ! Il manque à l’Europe de la Défense une vision gaullienne à long terme, une vision stratégique !

     

    Il faut quitter l’OTAN alors qu’aucun pays européen n’est véritablement prêt à l’envisager !
    La triste réalité, c’est que nous sommes revenus à l’ère pré-gaullienne ! Il ne se trouve aujourd’hui aucun pays en Europe pour envisager un format exclusivement européen dans le domaine de la défense mutuelle. Principal partenaire et allié de la France à l’intérieur de l’UE, l’Allemagne est sur une ligne d’affirmation géo-économique. Elle néglige les questions militaires avec un budget ridicule de la défense (1,3% du PIB) et privilégie l’appartenance à l’OTAN qui lui permet de contrebalancer son partenariat commercial et énergétique avec la Russie. L’UE constitue un vaste et distendu Commonwealth paneuropéen dont on peine à imaginer la transformation en une unité politico-militaire. La construction européenne a d’autres priorités que les questions de défense (1).

    La dissolution de l’OTAN mettrait cependant l’Europe devant ses responsabilités, suite à la nécessité de constituer une défense crédible avec un niveau plus ou moins grand d’intégration.IL faudrait commencer par mettre en commun tout ce que l’on peut sans perdre son autonomie de décision puis, ensuite, aller vers des regroupements industriels ou nationaux. Mais tant que l’OTAN existera, rien ne se passera et l’Europe restera une vassale des Etats-Unis.

    Par ailleurs, la Russie considère l’OTAN comme une menace et sa dissolution permettrait un rapprochement avec ce pays dont la place est maintenant dans le concert européen tant nous avons d’intérêts économiques et politiques communs (2).

    Une Défense française qui part à vau-l’eau avec un budget en peau de chagrin
    Lors de son audition le 11 Juillet 2012 devant la commission de la Défense de l’Assemblée nationale l’amiral Edouard Guillaud, chef d’état -major des Armées, a souligné que la Force océane stratégique (FOST) est mise en œuvre par 3.200 marins(effectif équivalent à celui des agents municipaux d’une ville comme Montpellier). L’effectif de l’armée de l’Air est équivalent à celui de la RATP. Le Groupe PSA pèse en effectifs deux fois plus que l’armée de terre. L’Allemagne consacre à la défense un budget comparable alors qu’elle ne dispose pas de dissuasion nucléaire et qu’elle est moins impliquée que la France sur la scène internationale. L’armée britannique, armée jumelle de la France, dispose d’un budget supérieur de 40%.

    A l’époque du général De Gaulle, le budget de la Défense représentait près de 5% de la richesse nationale ; le budget de l’Etat était en équilibre et les dettes contractées pendant et après la guerre en cours de remboursement. Avec une part du PIB de 1,6% consacrée à la Défense, soit 10% du budget de l’Etat, la France a divisé par 3 son effort de défense depuis 50 ans. Les intérêts de la dette qui n’ont cessé de gonfler depuis 35 ans, malgré des taux nominaux anormalement bas, représentent une fois et demie le budget de la Défense !

    Jamais l’Armée française n’aura connu un volume de forces aussi faible dans son histoire depuis la Révolution. Le budget de la Défense devient une variable annuelle d’ajustement alors qu’il importe d’avoir une vision cohérente à long terme. On assiste en fait à un effondrement radical des moyens matériels et humains ; un démantèlement est en cours. Les politiques de l’UMPS savent qu’ils n’ont pas de syndicats à affronter, de grève à craindre d’un corps où la discipline et le sens de la mission priment sur tout. Le moral est en chute libre comme l’atteste la diminution des renouvellements de contrat. Voilà plus de soixante ans, le général De Gaulle avertissait déjà dans un discours fameux : « La Défense ? C’est la première raison d’être de l’Etat. Il ne peut y manquer sans se détruire lui-même ! » La France se doit cependant de concevoir une force militaire plurivalente pouvant s’opposer à des menaces polymorphes et à un ennemi protéiforme.

    Dès les premiers jours de l’intervention française au Mali apparaissent les insuffisances de nos armées en moyens de transport, ravitaillement, matériel (Transall pour acheminer les troupes à bout de souffle, 2 drones Harfang en bout de course après 3 ans de service et 5.000 heures de vol en Afghanistan….). Paris a dû demander l’aide des Etats-Unis et de ses partenaires européens, comme cela avait été déjà le cas en Libye. La France, au-delà des rodomontades de François Hollande, est incapable d’intervenir d’une façon sérieuse en Syrie, car elle n’en a pas les moyens militaires. L’Armée française devient de plus en plus une équipe de démonstration de vente de matériel militaire à l’exportation sur échantillons. Berlin fait comprendre à Paris que l’ «on ne peut pas voyager éternellement en 1ère classe avec un billet de seconde » !

    Si nous ne voulons pas aller droit dans le mur, ce n’est pas 30 milliards d’impôts en plus par an qu’il fallait lever sur les ménages, mais réaliser 160 milliards de diminution des dépenses publiques (2 millions de fonctionnaires en trop par rapport à l’Allemagne), tout en augmentant le budget et les effectifs des armées !

    Il faut sauver l’industrie française technologique de l’armement
    Il n’y a pas de défense sans industries de défense. La France possède une industrie capable de fabriquer l’ensemble de ses armements et matériels, soit 4.000 entreprises de haute technologie qui exportent annuellement pour 6 milliards d’euros : programme Scorpion de modernisation de l’armée de terre, poursuite du déploiement de Félin, tenue haute technologie du fantassin, drones, missiles de moyenne portée, hélicoptères, etc. Thalès, dont Dassault Aviation est l’actionnaire de référence au côté de l’Etat, est devenu le pivot de l’industrie militaire française en montant de 25 % à 35 % au capital de DCNS (porte-avions, sous-marins, frégates, leader européen du naval militaire).

    Les Etats-Unis, tout en s’appuyant davantage sur les budgets européens à l’OTAN, souhaitent conserver pour eux le rôle central, en tant que maîtres des fonctions « hautes » (puissance aérienne, défense antimissile) dont dépendront toutes les autres, celles des « niches » ; ce qui remettrait en cause l’autonomie stratégique de la France et de l’Europe.

    On ne peut donc que se réjouir du succès du drone de combat Neuron en décembre 2012, conçu par Dassault Aviation en coopération avec six industriels européens. C’est le premier avion de combat furtif qui préserve l’autonomie européenne dans ce domaine. Neuron est le plus important programme de recherche et de technologie européens sous la direction d’un unique maître d’œuvre.

    Même pour les souverainistes purs et durs, l’Europe de la Défense est incontournable
    En 15 ans, la part des dépenses militaires de l’Europe dans le monde est passée de 31 % à 19 %, pendant que les Etats-Unis continuaient à représenter 44 % de ceux de la planète et que les pays émergents montaient en puissance à une vitesse impressionnante, notamment dans le domaine naval. L’Europe ne consacre plus que 1,6 % de son PIB à sa défense contre 5 % pour les Etats-Unis. En 2011, les dépenses militaires sont tombées dans l’UE à environ 180 milliards d’euros contre plus de 200 milliards il y a cinq ans. En 2011, les dépenses militaires des Etats-Unis ont été de 739 milliards de dollars, celles de la Chine de 90 milliards de dollars, celles du Royaume-Uni de 63 milliards de dollars, celles de la France de 59 milliards de dollars. Quant à la soi -disant puissance impérialiste russe , son budget était seulement de 53 milliards de dollars, c’est-à-dire un quinzième du budget de l’Amérique, et la pacifique Allemagne ferme le ban avec un budget de seulement 44 milliards de dollars. Une coopération des pays européens pour survivre s’impose donc.

    L’Europe constitue encore un marché important pour l’industrie de l’armement. La concurrence actuelle pour le marché de l’avion multi-rôles profite exclusivement à l’industrie américaine. IL faudrait une véritable Agence européenne de l’armement. Les militaires des différents pays devraient apprendre à travailler ensemble sans la tutelle américaine. Survivre ensemble ou disparaître séparément, tel est le dilemme !

    Le groupement français de PME Eden qui se présente comme le premier cluster de défense, de sécurité et de sûreté à vocation européenne a signé le 12 juin 2012 une convention avec Renault Trucks Défense, son parrain à l’exportation. Parallèlement, Eden a noué une alliance avec un cluster qui lui ressemble, l’allemand GSV, basé à Düsseldorf qui, a lui, pour parrain le géant allemand du matériel terrestre Rheinmetall.

    Pour la première fois, la Corée a vendu en 2011 un sous-marin à l’Indonésie. Les Européens en ordre dispersé sont contraints aux alliances. Pour les sous-marins l’allié naturel du français DCNS est l’allemand TKMS. Pour les bâtiments de surface, le jeu est plus ouvert avec l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne et la Grande-Bretagne.

    L’armement terrestre européen est très émietté ; il compte dix acteurs, dont trois en France : Nexter, Panhard et Renault Trucks Défense (Groupe Volvo). Des alliances et regroupements vont donc bientôt s’effectuer par le biais de Thales, EADS et Rheinmetall. Troisième exportateur mondial d’armement en 2011 grâce à l’exportation de ses blindés Leopard, l’Allemagne cultive de grandes ambitions dans le secteur des drones où elle voudrait jouer un rôle de leader.

    L’Europe de la Défense sera continentale ou ne sera pas
    Après la monnaie, l’Europe doit s’attaquer aux problèmes de l’énergie, des institutions, de la défense. Tant qu’il n’y aura pas d’union politique, totale ou partielle, l’organisation d’une défense européenne intégrée n’est pas envisageable. L’opération Atalante qui regroupe un certain nombre de bateaux de l’Union pour la lutte contre la piraterie montre que les moyens de plusieurs pays européens peuvent être mis en commun efficacement.

    Le véritable projet mobilisateur, plus qu’un souverainisme étroit, irréaliste, enfantin, nous parait être celui d’une Europe carolingienne qui se libérerait du protectorat de l’OTAN et des Etats-Unis ! C’est ce que souhaite l’Allemagne à très long terme avec un noyau dur de pays européens prêts à franchir le pas ; elle ne fait que reprendre à sa façon, avec une Europe à plusieurs vitesses, le projet gaullien.

    Contrairement aux apparences, l’échec de la fusion EADS/BAE n’est pas une catastrophe pour l’Europe de la Défense ! BAE souhaitait en fait écouler tout son matériel conçu pour le marché américain au détriment des principaux programmes de défense français et surtout allemand (Cassidian). Le paradoxe, comme le remarque Alexandre Adler (3), est que c’est Berlin qui aura opposé en définitive à cette ultime ambition britannique sur le Continent, un nein, certes très allemand dans la forme peu enveloppée, mais très gaullien sur le fonds substantiel. Il s’agit en fait de maintenir coûte que coûte EADS comme le cœur technologique d’un projet de défense européenne indépendante.

    L’attitude nouvelle de l’Angleterre est une chance pour l’Europe continentale de la Défense
    L’Angleterre a rejoint la CEE afin d’empêcher de l’intérieur la construction d’une « Europe puissance ». C’est d’ailleurs ce qu’ont fait depuis avec brio, accords de Saint-Malo inclus, tous les gouvernements britanniques successifs. Plus l’Europe se rapproche d’une quelconque unité, plus la Grande-Bretagne cherche à s’en détacher. Il n’est pas impossible, même si cela est peu probable que, suite à un référendum, l’Angleterre quitte l’Union Européenne. 50 % des Britanniques disent vouloir quitter l’UE. Le Royaume-Uni, d’instinct, comme l’avait déjà fait remarquer Winston Churchill avec l’appel du Grand Large, préfère penser global plutôt européen.

    L’élément nouveau, c’est que l’Angleterre eurosceptique accepte la naissance d’un fédéralisme européen à base franco-allemande et donc la création d’une Europe à deux vitesses. La perfide Albion maintiendrait certaines positions mais cesserait de paralyser les efforts des autres. « Nous n’entendons pas nous opposer à une intégration politique plus poussée des pays de la zone euro qu’exige la solution à la crise », a pu même dire le ministre des Finances britannique George Osborne.

    Rien n’empêchera cependant de continuer d’envisager à terme une coopération militaire pragmatique, au cas par cas, avec l’Angleterre qui sera prise à terme entre le marteau des Etats -Unis et l’enclume de l’Europe continentale carolingienne. C’est dans ce contexte que Jean-Yves Le Drian et son homologue britannique Philip Hammond, ont signé en 2012 deux importants accords cadres qui concernent les drones.

    Le premier porte sur un contrat d’études de 13 millions d’euros attribué à BAE Systems et Dassault Aviation pour lancer les premiers travaux du Système de combat aérien du futur (Scaf) à l’horizon 2030. BAE avec son Taranis tout comme Dassault Aviation avec le Neuron ont déjà acquis un précieux savoir-faire. Le second accord est un prélude à la constitution d’une task force franco-britannique dans les drones tactiques aux alentours de 2014-2015. L’armée de terre française qui doit remplacer ses drones Sperwear, testera pendant un an le Watchkeeper, un drone de reconnaissance développé par le français Thales pour l’armée britannique.

    Alliance continentale avec la Russie et renégociation du Traité de l’Alliance atlantique après le retrait des pays européens de l’OTAN
    Une révolution culturelle de type gaullien s’imposera un jour en matière militaire à l’Europe ! La Russie est le chien de garde de l’Europe à l’Est face à la Chine et au danger islamique dans le Caucase et en Asie Centrale. En soutenant des mouvements de contestation internes, l’Europe valet des Etats-Unis joue contre son propre camp. Ni la Sainte Russie ni son Président ne représentent un quelconque danger pour l’Europe. La France et l’Allemagne doivent s’opposer avec force au sein de l’OTAN au système de défense anti-missile, arme anti-russe de Washington.

    Vladimir Poutine a annoncé que la Russie consacrerait 600 milliards d’euros à l’industrie de défense dans les dix ans à venir. Après l’humiliation de la désagrégation générale du pays à l’ère Eltsine, Poutine rend aux Russes leur fierté de citoyens d’un grand pays. La Russie s’oppose à un universalisme (jus gentium) qui fournit des prétextes intéressés à l’interventionnisme occidental, ne respecte pas le droit souverain des nations (jus intergentes) et attise les conflits plus qu’il ne les apaise. Même s’il représentera environ un dixième du budget militaire des Etats-Unis et la moitié de celui de la Chine, le budget militaire de la Russie devrait s’élever à 54 milliards d’euros en 2013 , contre 47 pour la France et la Grande-Bretagne et seulement 35 milliards d’euros pour l’Allemagne.

    Si le Kremlin a gagné en Tchétchénie et plus récemment en Géorgie, il le doit surtout à la vaillance de ses soldats qui a permis de compenser un profond retard technologique. La Chine n’a pas oublié qu’un territoire vaste comme deux fois la France, le Primorié et le sud du Kraï de Khabarovsk , lui appartenait jusqu’aux fameux traités inégaux de 1858-1860. Et Moscou n’en a pas fini avec le fondamentalisme sunnite d’Asie Centrale et du Caucase, le retour probable des Talibans après la défaite inéluctable de l’OTAN et des Etats-Unis en Afghanistan, attentats suicide. Comme disait Trotsky : « La guerre ne vous intéresse peut-être pas, mais elle s’intéresse à vous » (4).

    Une Europe carolingienne devrait donc envisager une alliance militaire et non plus seulement une simple coopération industrielle, énergétique avec la Russie. La présente coopération technologique en matière aéronautique et spatiale devrait être bien évidemment renforcée. Après le retrait de l’organisation militaire intégrée de l’OTAN, le Traité de l’Alliance Atlantique, signé à Washington dans un contexte tout à fait différent (4 avril 1949) , devrait être renégocié sur une base égalitaire avec les Etats-Unis tandis qu’un traité d’alliance continentale serait signé avec la Russie, où l’on pourrait remplacer schématiquement le mot Etats-Unis par Russie.
    L’Europe européenne se retrouverait ainsi libre et équidistante de la Russie et des Etats-Unis.

    Le problème à terme de la langue européenne de commandement
    Quitte à faire sourire les irréalistes qui se croient réalistes et qualifient les défenseurs de la langue française et les espérantistes d’utopistes, sans avoir approfondi et réfléchi véritablement à la question, à terme la langue de commandement des forces armées européennes continentales ne pourra être, à défaut du français, que l’espéranto. Cette langue éthique, neutre, sept fois plus facile à apprendre que l’anglo-américain, est la seule langue capable de se substituer au basic english pour nous défendre culturellement contre le soft power des Etats-Unis. L’introduction de cette langue ne peut correspondre qu’ à une volonté politique européenne, de la même façon que le système métrique, introduit par Talleyrand en 1792 lors d’un simple discours à la Convention, s’est progressivement et naturellement imposé à tous les pays européens

    Dans les armées, le multilinguisme a ses limites ; il faut une langue commune. A terme, de la même façon que les armées de Byzance étaient commandées en latin, les Armées de l’Europe devraient donc être commandées en français ou beaucoup plus probablement en espéranto !

    Conclusion
    Rien ne se fera en matière d’Europe de la défense tant que la France et l’Allemagne ne seront pas persuadées de leur « communauté de destins » (Schicksalgemeinschaft) (5) dans ce monde du XXIème siècle qui n’est plus celui de l’Europe du Congrès de Vienne en 1815. Suite au laxisme chiraquien et à l’incompétence socialiste, le cinquantenaire du traité signé le 22 janvier 1963 à l’Elysée par Charles De Gaulle et Konrad Adenauer est malheureusement une occasion ratée ; la France actuelle ne s’attirant à juste titre qu’un mépris mérité par les Allemands. Le paradoxe est que c’est l’Allemagne qui reprend à sa façon le projet gaullien, sans le dire !

    La France avait déjà fait preuve d’une suffisance stupide, d’un orgueil non justifié en 1994, en refusant l’union politique proposée par le rapport Schäuble-Lamers sous forme d’un noyau dur de l’Union. Les Allemands ont même considéré l’abandon du DM demandé par la France et l’introduction de l’euro , qu’ils ont accepté avec reluctance, comme une sorte de paiement anticipé pour réaliser une union politique. Les Français qui se plaignent aujourd’hui de l’euro allemand ne sont vraiment pas à une inconséquence près de leur légèreté et n’ont qu’une cervelle indigne de moineau !

    Valéry Giscard d’Estaing dans son plaidoyer pour l’Europe unie (6) exprime le vœu que le président français, la chancelière allemande, et deux ou trois autres grands dirigeants se mettent autour d’une table pour rédiger le projet d’une Europe unie monétaire, budgétaire et fiscale. Il remarque que la compétence monétaire est réalisée, la compétence budgétaire est en train de voir le jour et que la compétence fiscale reste à faire. Il passe sous silence et ne dit pas un mot de l’Europe de la Défense qui ,dans son esprit, ne pourra sans doute venir qu’ensuite. Le défi  selon Giscard d’Estaing : « Comment organiser une puissance européenne que les autres puissances respectent ; sa réponse : faire l’Europe-Unie pour 2030 ! »

    N’oublions pas que demain le monde unipolaire américain aura disparu avec la montée en puissance de la Chine, de l’Asie, du Brésil, de l’Inde, des pays émergents, de la Russie, de la démographie africaine ! IL importera alors au pôle européen de pouvoir se défendre seul avec ses propres moyens! Cela est d’autant plus vrai que les Etats-Unis commencent déjà à se redéployer vers le Pacifique tandis que le reste du monde, l’Europe exceptée, réarme !

    Marc Rousset, http://fr.novopress.info
    économiste, écrivain, auteur de « La Nouvelle Europe Paris-Berlin-Moscou »

    (1) Philippe Maze-Sencier et Jean-Sylvestre Mongrenier, “Conforter la présence française dans l’OTAN”, Le Figaro du 19 mai 2012
    (2) François Jourdier-Officier contre Amiral (2S), article Revue de la Défense Nationale, publié par Magistro, 2 décembre 2012
    (3) Alexandre Adler, “Cameron ouvre la voie à un fédéralisme européen”, Le Figaro du 13 octobre 2012
    (4) Philippe Migault, chercheur à l’Iris, “Réarmement Légitime”, La Russie d’aujourd’hui, 2012
    (5) Concept du sociologue allemand Max Weber (1864-1920)
    (6) Valéry Giscard d’Estaing, “Plaidoyer pour l’Europe unie”, Le Figaro du samedi 19 Janvier 2013

  • Journal hebdomadaire de Voix de la Russie – 4 février 2013

    Au sommaire de cette édition du 4 février 2013 :
    - L'État français en faillite : 63 % des Français sont d'accord, ça sent le Sapin ! (voir Le Gaulois)
    - Le Forum de Davos est clos. Pas d'inquiétude, c'est juste une diversion
    - Traité des Forces Conventionnelles en Europe : sans les Russes
    - Mariage pour tous : une minorité sape les fondements de la civilisation européenne
    - Hommage à Evgueni Etvouchenko, le grand poète de l'âme slave

    En bref, mais en détails :
    Ø  L'affaire Cassez : les deux pieds dans le pathos, pour faire oublier le reste
    Ø  L'Iran devient une puissance spatiale
    Ø  Israël veut la guerre en Syrie
    Ø  Il y a 70 ans, Stalingrad ne tombait pas !

    http://www.francepresseinfos.com/

  • Quand la CIA finançait la construction européenne

    De 1949 à 1959, en pleine guerre froide, les Américains, par l’intermédiaire de leurs services secrets et du Comité pour l’Europe unie, versent l’équivalent de 50 millions de dollars actuels à tous les mouvements pro-européens, parmi lesquels ceux du Britannique Winston Churchill ou du Français Henri Frenay. Leur but, contenir la poussée soviétique…

    A 82 ans, Henri Frenay, le pionnier de la Résistance intérieure, fondateur du mouvement Combat, arbore une forme intellectuelle éblouissante malgré sa surdité de l’oreille droite et sa récente opération de l’estomac. Pourtant, il n’a plus que trois mois à vivre. En ces jours de mai 1988, il me parle de l’Europe dans son appartement de Boulogne-sur-Seine. De cette Europe fédérale dont il a rêvé en vain entre 1948-1954. De la dette aussi que, en cas de succès, le Vieux Continent aurait contracté envers les Américains, ceux notamment du “Comité”. Et d’insister une fois, deux fois, dix fois, tandis que moi, je m’interroge : pourquoi diable ce mystérieux “Comité” revient-il à une telle fréquence dans nos conversations ? Pourquoi ? Mais parce que Frenay me confie, avec il est vrai d’infinies précautions de langage, son ultime secret : l’aide financière occulte de la CIA via l’American Committee for United Europe – le Comité – à l’Union européenne des fédéralistes dont il a été le président. Pour reconstituer cette filière inédite, il me faudra une quinzaine d’années. Un jeu qui en valait la chandelle puisqu’il me permet d’ouvrir, pour les lecteurs d’Historia, la porte d’un des compartiments les plus secrets de la guerre froide…

    Tout commence à l’automne 1948. Déjà coupée en deux, l’Europe vit sous la menace d’une invasion totale par l’armée rouge. Au “coup de Prague” en février, vient de succéder en juin le blocus de Berlin. Un petit cénacle de personnalités de l’ombre jette alors les bases de l’American Committee for United Europe, l’ACUE – son existence sera officialisée le 5 janvier 1949 à la maison de la Fondation Woodrow-Wilson de New York. Politiques, juristes, banquiers, syndicalistes vont se méler au sein de son conseil de direction. De hautes figures gouvernementales aussi comme Robert Paterson, le secrétaire à la Guerre ; James Webb, le directeur du budget ; Paul Hoffman, le chef de l’administration du plan Marshall ; ou Lucius Clay, le “proconsul” de la zone d’occupation américaine en Allemagne.

    Bien tranquilles, ces Américains-là ? Non, car la véritable ossature de l’ACUE est constituée d’hommes des services secrets. Prenez son président, William Donovan. Né en 1883 à Buffalo, cet avocat irlando-américain au physique de bouledogue, surnommé “Wild Bill” par ses amis, connaît bien l’Europe. En 1915, il y remplissait déjà une mission humanitaire pour le compte de la Fondation Rockefeller. Deux ans plus tard, Donovan retrouvait le Vieux Continent pour y faire, cette fois, une Grande Guerre magnifique. Redevenu civil, “Wild Bill” va se muer en missus dominicus du gouvernement américain. Ses pas d’émissaire officieux le portent vers l’Europe pour des rencontres parfois imprévues. En janvier 1923, alors qu’ils goûtent un repos bien mérité, sa femme Ruth et lui devront ainsi subir une soirée entière les vociférations d’un autre habitué de la pension Moritz de Berchtesgaden. Dix-sept ans plus tard, l’agité, un certain Adolf Hitler, s’est rendu maître de la partie continentale de l’Europe, et c’est “Wild Bill” que Franklin Roosevelt, inquiet, dépéche à Londres s’enquérir auprès de Winston Churchill du potentiel britannique face à l’avancée nazie.

    En juin 1942, Donovan, homme de confiance du président démocrate pour les affaires spéciales, crée l’Office of Strategic Services (OSS), le service secret américain du temps de la Seconde Guerre mondiale dont il devient le chef et qu’il quittera à sa dissolution, en septembre 1945, sans perdre le contact avec l’univers du renseignement : “Wild Bill” tisse des liens privilégiés avec la Central Intelligence Agency, la CIA, créée officiellement le 15 septembre 1947 par une loi sur la sécurité nationale signée par le successeur de Roosevelt, Harry Truman.

    Prenez le vice-président de l’ACUE Walter Bedell Smith, ancien chef d’état-major d’Eisenhower pendant la Seconde Guerre mondiale puis ambassadeur des Etats-Unis à Moscou. A partir d’octobre 1950, celui que ses amis surnomment le “Scarabée” (beetle en anglais) va prendre les commandes de la CIA. 1950, c’est justement l’année où des universitaires comme Frederick Burkhardt et surtout William Langer, historien à Harvard, lancent la section culturelle de l’ACUE. Ces deux proches de Donovan ont servi autrefois dans les rangs de l’OSS. Langer en a dirigé le service Recherche et Analyse et, excellent connaisseur de la politique française, a même commis après-guerre un ouvrage savant qui s’efforçait de dédouaner Le Jeu américain à Vichy (Plon, 1948).

    Prenez surtout Allen Dulles. A l’été 1948, c’est lui qui a “inventé” le Comité avec Duncan Sandys, le gendre de Churchill, et George Franklin, un diplomate américain. Principal associé du cabinet de juristes Sullivan & Cromwell, Dulles n’impressionne guère de prime abord avec ses fines lunettes, ses éternelles pipes de bruyère et ses vestes en tweed. Sauf qu’avec ce quinquagénaire, un maître espion entre dans la danse.

    Retour à la case Seconde Guerre mondiale. Chef de l’OSS à Berne, Dulles noue en février 1943 des contacts avec la délégation de Combat en Suisse. Un temps, il assurera méme le financement du mouvement clandestin. “Coup de poignard dans le dos du général de Gaulle“, s’insurge Jean Moulin au nom de la France libre. “Survie de la Résistance intérieure menacée d’étranglement financier“, rétorque Frenay. Pensant d’abord à ses camarades dénués de moyens, aux maquisards en danger, il ne voit pas pourquoi Combat devrait se priver d’un argent allié versé, c’est convenu, sans contrepartie politique. Cette “affaire suisse” va empoisonner un peu plus encore ses rapports avec Moulin.

    En 1946, Dulles démissionne des services secrets… pour en devenir aussitôt l’éminence grise, prenant une part prépondérante à la rédaction du texte de loi présidentiel sur la sécurité nationale. Cofondateur à ce titre de la CIA (pour les initiés : l’Agence ou mieux, la Compagnie), Dulles pense qu’en matière d’action clandestine, privé et public doivent conjuguer leurs forces. C’est lui qui a déjà inspiré, par l’intermédiaire de ses amis du Brook Club de New York, le versement des subsides de grosses sociétés américaines à la démocratie chrétienne italienne menacée par un parti communiste surpuissant. En 1950, il va reprendre officiellement du service comme bras droit du Scarabée d’abord, comme son successeur à la tête de la CIA ensuite – de février 1953 à septembre 1961. Record de longévité d’autant plus impressionnant que son frère aîné John Foster Dulles, restera, lui, ministre des Affaires étrangères de 1953 à sa mort de maladie en mai 1959.

    Etonnant creuset que l’ACUE, où des personnalités de la haute société et/ou de la CIA côtoient les dirigeants de la puissante centrale syndicale American Federation of Labor, l’AFL, dont ils partagent l’aversion du communisme. Exemples : David Dubinsky, né en 1892 à Brest-Litovsk, en Russie, dirige le Syndicat international de la confection pour dames (ILGWU) : 45.000 adhérents à son arrivée en 1932, 200.000 à la fin des années 1940 ! Ennemi acharné des nazis hier (les syndicalistes proches de l’ACUE sont presque tous juifs), c’est aux commies, les “cocos”, qu’il en veut dorénavant. Jay Lovestone aussi. Conseiller politique de l’AFL, ce Lituanien d’origine sait de quoi il parle : avant sa brutale exclusion puis sa lente rupture avec le marxisme, il fut, entre 1925 et 1929, le secrétaire général du PC américain ! Autre recrue de choix du Comité, Arthur Goldberg, le meilleur juriste de l’AFL. Futur secrétaire au Travail du président Kennedy puis juge à la Cour suprême, Goldberg, né en 1908, a dirigé l’aile syndicale de l’OSS. A ce titre, il fut en son temps le supérieur hiérarchique d’Irving Brown, son cadet de deux ans. Brown, représentant de l’AFL pour l’Europe et grand dispensateur de dollars aux syndicalistes modérés du Vieux Continent. Puisant dans les fonds secrets de la toute jeune CIA, laquelle finance depuis 1946 toutes les opérations anticommunistes de l’AFL, ce dur à cuire ne ménage pas, par exemple, son soutien à Force ouvrière, la centrale syndicale née fin 1947 de la scission de la CGT (lire “Derrière Force ouvrière, Brown, l’ami américain” dans Historia n° 621 de décembre 1997). Pure et dure, la ligne Brown contraste d’ailleurs avec celle, plus nuancée, de la CIA. A la Compagnie, on aurait préféré que les non-communistes restent dans le giron de la CGT, même contrôlée par le PCF…

    C’est qu’au-delà des hommes, il y a la stratégie d’ensemble. Face à l’Union soviétique, Washington développe deux concepts clés : le containment (l’endiguement) et plan Marshall. L’idée du containment, revient à un diplomate russophone, George Kennan, qui la développe dès juillet 1947 dans un article de la revue Foreign Affairs : “L’élément majeur de la politique des Etats-Unis en direction de l’Union soviétique doit être celui d’un endiguement à long terme, patient mais ferme, des tendances expansionnistes russes.

    Le plan Marshall, lui, porte la marque de son inventeur le général George Marshall, chef d’état-major de l’US Army pendant la guerre, et désormais ministre des Affaires étrangères du président Truman. En apportant une aide massive aux pays d’Europe ruinés, les Etats-Unis doivent, selon lui, faire coup double : un, couper l’herbe sous le pied des partis communistes par une hausse rapide du niveau de vie dans les pays concernés ; deux, empêcher leur propre industrie de sombrer dans la dépression en lui ouvrant de nouveaux marchés.

    Pour le tandem Marshall-Kennan, pas de meilleur outil que la CIA (lire l’interview d’Alexis Debat, page 51). Et c’est naturellement un autre ancien de l’OSS, [Frank Gardiner Wisner], qu’on charge de mettre sur pied un département autonome spécialisé dans la guerre psychologique, intellectuelle et idéologique, l’Office of Policy Coordination ! Si ce bon vieux “Wiz” ne fait pas partie du Comité, ses hommes vont lui fournir toute la logistique nécessaire. Mais chut ! c’est top secret…

    L’ACUE allie sans complexe une certaine forme de messianisme américain avec le souci de la défense bien comprise des intérêts des Etats-Unis. Messianique, cette volonté bien ancrée de mettre le Vieux Continent à l’école du Nouveau Monde. Phare de la liberté menacée, l’Amérique a trouvé, la première, la voie d’une fédération d’Etats, succès si resplendissant que l’Europe n’a plus qu’à l’imiter… Cet européanisme made in Washington comporte sa part de sincérité : “Ils m’appellent le père du renseignement centralisé, mais je préférerais qu’on se souvienne de moi à cause de ma contribution à l’unification de l’Europe“, soupire ainsi Donovan en octobre 1952.

    De sa part de calcul aussi. Car en décembre 1956, trois mois avant sa mort, le même Donovan présentera l’Europe unie comme “un rempart contre les menées agressives du monde communiste“. En d’autres termes, un atout supplémentaire de la stratégie américaine conçue par Marshall, Kennan et leurs successeurs : construire l’Europe, c’est remplir un vide continental qui ne profite qu’à Staline, donc, en dernier ressort, protéger les Etats-Unis.

    Ajoutons une troisième dimension. Dans l’esprit des hommes de la Compagnie, rien de plus noble qu’une action clandestine au service de la liberté. Tout officier de la CIA le sait : les Etats-Unis sont nés pour une bonne part du soutien des agents de Louis XVI, Beaumarchais en tête, aux insurgés nord-américains. Ainsi l’opération American Committee, la plus importante, et de loin menée, par l’Agence en Europe pendant la guerre froide, se trouve-t-elle justifiée par l’Histoire.

    Pour chaleureuse qu’elle soit, l’amitié franco-américaine ne saurait toutefois distendre le “lien spécial” entre Grande-Bretagne et Etats-Unis. En foi de quoi, Comité et Compagnie tournent d’abord leur regard vers Londres. Hélas ! Churchill, battu aux législatives de 1945, ronge ses griffes dans l’opposition. Le nouveau secrétaire d’Etat britannique aux Affaires étrangères, Ernest Bevin, a bien proclamé le 2 janvier 1948 aux Communes : “Les nations libres d’Europe doivent maintenant se réunir.” N’empêche que ses collègues du cabinet travailliste et lui repoussent avec horreur la perspective d’une véritable intégration continentale. Non pas que Bevin craigne de s’affronter aux communistes : deux jours après son discours de janvier, il créait un organisme clandestin de guerre idéologique, l’Information Research Department. Ce méme IRD qui, jugeant La Ferme des animaux et 1984 plus efficaces que mille brochures de propagande, va contribuer à diffuser partout dans le monde les oeuvres de George Orwell. Mais la carte Europe unie, alors là, non !

    Cette carte, Churchill la joue-t-il de son côté par conviction profonde ou par aversion pour ses rivaux politiques de gauche ? Le fait est que le 19 septembre 1946 à Zurich, le Vieux Lion appelle à un axe anglo-franco-allemand, élément majeur selon lui d’une “espèce d’Etats unis d’Europe“. Qu’en mai 1948, Duncan Sandys, taille aux mesures de son homme d’Etat de beau-père le Congrès européaniste de La Haye. Qu’en octobre 1948, Churchill crée l’United European Movement – le Mouvement européen. Qu’il en devient président d’honneur aux côtés de deux démocrates-chrétiens, l’Italien Alcide De Gasperi et l’Allemand Konrad Adenauer, et de deux socialistes, le Français Léon Blum et le Belge Paul-Henri Spaak. Malheureusement pour les “amis américains“, cette tendance “unioniste” ne propose, à l’exception notable de Spaak, que des objectifs européens limités. Reconstruction économique et politique sur une base démocratique, d’accord, mais sans transfert, méme partiel, de souveraineté.

    Le Comité et la tendance “fédéraliste”, dont Henri Frenay émerge comme la figure emblématique, veulent, eux, aller beaucoup plus loin. Aux heures les plus noires de la Seconde Guerre mondiale, Frenay, patriote mondialiste, a conçu l’idée d’un Vieux Continent unifié sur une base supranationale. En novembre 1942, révélera quarante ans plus tard Robert Belot dans le remarquable travail sur Frenay qui vient de lui valoir l’habilitation à diriger des recherches à l’Université, le chef de Combat écrivait au général de Gaulle qu’il faudrait dépasser l’idée d’Etat-Nation, se réconcilier avec l’Allemagne après-guerre et construire une Europe fédérale. Logique avec lui-méme, Frenay se jette dès 1946 dans cette croisade européaniste aux côtés d’Alexandre Marc. Né Lipiansky à Odessa en 1904, ce théoricien du fédéralisme a croisé la trajectoire de Frenay à Lyon en 1941, puis après-guerre. A rebours de l’européanisme de droite inspiré des thèses monarchistes maurrassiennes ou du catholicisme social, les deux amis s’efforcent de gauchir le fédéralisme français alors fort de “plusieurs dizaines de milliers d’adhérents“, ainsi que me l’assurera l’ancien chef de Combat en 1988.

    Orientée à gauche, l’Union européenne des fédéralistes, l’UEF, est créée fin 1946. Elle va tenir son propre congrès à Rome en septembre 1948. Frenay en devient le président du bureau exécutif, flanqué de l’ex-communiste italien Altiero Spinelli, prisonnier de Mussolini entre 1927 et 1937 puis assigné à résidence, et de l’Autrichien Eugen Kogon, victime, lui, du système concentrationnaire nazi qu’il décortiquera dans L’Etat SS (Le Seuil, rééd. 1993). A ces trois dirigeants d’atténuer le profond malaise né de la participation de nombreux membres de l’UEF au congrès de La Haye, où Churchill et son gendre Sandys les ont littéralement roulés dans leur farine “unioniste”.

    Faut-il choisir entre le Vieux Lion et le pionnier de la Résistance intérieure française à l’internationalisme si radical ? Perplexité au Comité, donc à la CIA. Pour Churchill, sa stature d’homme d’Etat, d’allié de la guerre, sa préférence affichée pour le “grand large”, les Etats-Unis ; contre, son refus acharné du modèle fédéraliste si cher aux européanistes américains et bientôt, ses violentes querelles avec le très atlantiste Spaak. En mars 1949, Churchill rencontre Donovan à Washington. En juin, il lui écrit pour solliciter le versement de fonds d’urgence (très riche à titre personnel, l’ancien Premier ministre britannique n’entend pas puiser dans sa propre bourse). Quelques jours plus tard, Sandys appuie par courrier la demande de son beau-père : de l’argent, vite, sinon le Mouvement européen de Churchill s’effondre. Comité et CIA, la principale bailleuse de fonds, débloquent alors une première tranche équivalant à un peu moins de 2 millions de nos euros. Elle permettra de “préparer” les premières réunions du Conseil de l’Europe de Strasbourg, qui associe une assemblée consultative sans pouvoir réel à un comité des ministres statuant, lui, à l’unanimité.

    Pour soutenir leurs partenaires du Vieux Continent, ACUE et CIA montent dès lors des circuits financiers complexes. Les dollars de l’oncle Sam – l’équivalent de 5 millions d’euros entre 1949 et 1951, le même montant annuel par la suite – proviennent pour l’essentiel de fonds alloués spécialement à la CIA par le Département d’Etat. Ils seront d’abord répartis sous le manteau par les chefs du Mouvement européen : Churchill, son gendre, le secrétaire général Joseph Retinger, et le trésorier Edward Beddington-Behrens. En octobre 1951, le retour de Churchill à Downing Street, résidence des premiers ministres anglais, ne tarira pas ce flot : entre 1949 et 1953, la CIA va en effet verser aux unionistes l’équivalent de plus de 15 millions d’euros, à charge pour eux d’en redistribuer une partie à leurs rivaux de la Fédération, la tendance de droite du fédéralisme français, laquelle reverse ensuite sa quote-part à l’UEF. Sommes substantielles mais sans commune mesure avec la manne que l’appareil stalinien international, le Kominform, investit au même moment dans le financement souterrain des PC nationaux et des innombrables “fronts de masse” : Fédération syndicale mondiale de Prague, Mouvement de la paix, mouvements de jeunes, d’étudiants, de femmes…

    Pour Frenay, c’est clair : l’Europe fédérale constitue désormais le seul bouclier efficace contre l’expansionnisme communiste. Mais comment aller de l’avant quand le nerf de la guerre manque si cruellement ? L’UEF n’est pas riche. Son président encore moins, dont la probité est reconnue de tous – après son passage au ministère des Prisonniers, Déportés et Réfugiés, Frenay, ancien officier de carrière sans fortune personnelle, a quitté l’armée au titre de la loi Diethelm de dégagement des cadres. Comme au temps de “l’affaire suisse”, le salut financier viendra-t-il de l’allié américain ? Oui, assurent dès l’été 1950 les hommes de l’ACUE à un représentant français de l’UEF en visite à New York. Conforme à la position officielle du gouvernement américain en faveur de l’intégration européenne, leur aide ne sera soumise à aucune contrepartie politique ou autre, condition sine qua non aux yeux d’Henri Frenay. Et de fait, à partir de novembre 1950, l’ACUE va financer secrètement à hauteur de 600.000 euros l’une des initiatives majeures de Frenay et des fédéralistes de gauche : la création à Strasbourg, en parallèle du très officiel Conseil de l’Europe, d’un Congrès des peuples européens, aussi appelé Comité européen de vigilance.

    S’associeront à ce projet des socialistes (Edouard Depreux), des religieux (le père Chaillet, fondateur de Témoignage chrétien ), des syndicalistes, des militants du secteur coopératif, des représentants du patronat et même… des gaullistes tels Michel Debré ou Jacques Chaban-Delmas. Mal conçue médiatiquement, l’affaire échoue de peu. Raison de plus pour accentuer le soutien financier, oeuvre du secrétaire général de l’ACUE, Thomas Braden. Connu pour ses opinions libérales, cet ami du peintre Jackson Pollock, n’a pas hésité quand Donovan, son ancien patron à l’OSS, lui a demandé de quitter la direction du musée d’Art moderne de New York.

    En juillet 1951, Frenay effectue à son tour le voyage des Etats-Unis sous les auspices du Congrès pour la liberté de la culture – une organisation que nous retrouverons bientôt. L’occasion de rencontrer les dirigeants du Comité et ceux de la Fondation Ford (mais pas ceux de la CIA avec lesquels il n’entretiendra jamais de rapports directs) pour leur faire part des besoins matériels des fédéralistes. Message reçu “5 sur 5″ par les Américains…

    A cette date, Braden ne figure plus parmi les dirigeants officiels de l’ACUE. En vertu du principe des vases communicants, l’agent secret esthète vient en effet de rejoindre Dulles à la CIA. Les deux hommes partagent cette idée de bon sens : face aux communistes, ce ne sont pas les milieux conservateurs qu’il faut convaincre, mais la gauche antistalinienne européenne, dont Frenay constitue un des meilleurs représentants. Braden va plus loin : “Comme l’adversaire rassemblé au sein du Kominform, structurons-nous au plan mondial par grands secteurs d’activité : intellectuels, jeunes, syndicalistes réformistes, gauche modérée…“, plaide-t-il. D’accord, répond Dulles. Naît ainsi la Division des organisations internationales de la CIA. Dirigée par Braden, cette direction centralise, entre autres, l’aide de la Compagnie via l’ACUE aux fédéralistes européens. En 1952, l’American Committee for United Europe finance ainsi l’éphémère Comité d’initiative pour l’assemblée constituante européenne, dont Spaak sera président et Frenay, le secrétaire général.

    Brouillés avec la “Fédération”, leur rivale de droite qui servait jusque-là d’intermédiaire pour le versement des fonds CIA-ACUE par le truchement du mouvement churchillien, les amis de Frenay sont très vite au bord de l’asphyxie. Pour parer à l’urgence, Braden, virtuose du financement souterrain au travers de fondations privées plus ou moins bidon, va, cette fois, mettre en place une procédure de versements directs aux fédéralistes de gauche par des antennes para-gouvernementales américaines. A Paris, plaque tournante des opérations de la CIA en Europe avec Francfort, on opérera par le biais de l’Office of Special Representative, conçu à l’origine pour servir d’interface avec la toute jeune Communauté européenne du charbon et de l’acier (Ceca), ou de l’US Information Service (USIS). Par la suite, un bureau ACUE proprement dit sera ouvert.

    Comme Jean Monnet, président de la Ceca, Frenay caresse, en cette année 1952, l’idée d’une armée européenne, pas décisif vers l’Europe politique selon lui. L’ACUE approuve chaudement. Prévue par le traité de Londres de mars 1952, cette Communauté européenne de défense comprendrait – c’est le point le plus épineux -, des contingents allemands. Reste à faire ratifier le traité par les parlements nationaux. Frenay s’engage avec enthousiasme dans ce nouveau combat. Pour se heurter, une fois encore, à de Gaulle, qui refuse la CED au nom de la souveraineté nationale et, déjà, du projet ultrasecret de force atomique française, ainsi qu’aux communistes, hostiles par principe à tout ce qui contrarie Moscou. D’après les éléments recueillis par Robert Belot – dont la biographie du chef de Combat devrait sortir ce printemps au Seuil -, Frenay demandera même à l’ACUE de financer l’édition d’une brochure réfutant… les thèses gaullistes sur la CED.

    Staline meurt en mars 1953. L’année suivante, Cord Meyer Jr, un proche de la famille Kennedy, remplace Braden à la téte de la Division des organisations internationales de la CIA. Mais 1954 verra surtout cet échec cuisant des européanistes : l’enterrement définitif de la CED. Découragé, Frenay abandonne alors la présidence de l’Union européenne des fédéralistes. A partir d’octobre 1955, les “amis américains” reportent donc leurs espoirs sur un nouveau venu, le Comité d’action pour les Etats-Unis d’Europe de Jean Monnet. Lié à Donovan et surtout à l’ambassadeur américain à Paris, David Bruce, un proche de Franck Wisner, Monnet est trop fin connaisseur du monde anglo-saxon pour accepter directement les dollars de la CIA. Compte tenu de sa prudence de Sioux, l’aide américaine à son courant européaniste devra emprunter d’autres voies. En 1956, Monnet se voit ainsi proposer l’équivalent de 150.000 euros par la Fondation Ford. Une offre qu’il décline, préférant que cet argent soit versé au professeur Henri Rieben, un économiste et universitaire suisse pro-européen qui vient d’être nommé chargé de mission aux Hautes Etudes commerciales de Lausanne. Rieben utilisera ces fonds en toute transparence financière pour créer un Centre de recherches européen.

    En 1958, le retour du général de Gaulle, radicalement hostile aux thèses fédéralistes, annihile les derniers espoirs de l’UEF et de ses amis américains. Dissolution de l’ACUE dès mai 1960 puis cessation des financements occultes par la CIA s’ensuivent. En douze ans, la Compagnie aura quand même versé aux européanistes de toutes tendances l’équivalent de 50 millions d’euros sans être jamais prise la main dans le sac ! Mais pourra-t-on préserver longtemps le grand secret ?

    La première alerte éclate dès 1962. Trop précise sur les financements américains, une thèse universitaire sur les mouvements européanistes doit être “enterrée” d’urgence en Angleterre. Ce remarquable travail est l’oeuvre du fils d’un camarade de résistance de Frenay, Georges Rebattet, créateur en avril 1943 du Service national maquis. Georges Rebattet, le successeur en 1952 de Joseph Retinger comme secrétaire général d’un Mouvement européen dont il a d’ailleurs assaini pour une bonne part le financement.

    Deuxième secousse au milieu des années 1960. L’étau de la presse américaine (le New York Times et la revue gauchiste Ramparts ) se resserre sur une des filiales du “trust” Braden-Meyer, le Congrès pour la liberté de la culture où se côtoyaient des intellectuels antitotalitaires européens de haute volée – Denis de Rougemont, Manès Sperber, Franz Borkenau, Ignazio Silone, Arthur Koestler ou, par éclipses, Malraux et Raymond Aron. Financé par la CIA au travers de la Fondation Fairfield, le Congrès édite en français l’une de ses revues les plus prestigieuses, Preuves. Jouant la transparence, Braden jette alors son pavé dans la mare. “Je suis fier que la CIA soit immorale“, déclare-t-il en 1967 au journal britannique Saturday Evening Post, auquel il confie des révélations sensationnelles sur le financement occulte par la CIA du Congrès pour la liberté et sur le rôle d’Irving Brown dans les milieux syndicaux. Silence radio, en revanche, sur le soutien aux mouvements européanistes, le secret des secrets…

    Ultime rebondissement à partir de juin 1970, quand le conservateur anglais pro-européen Edward Heath arrive à Downing Street. A sa demande, l’Information Research Department lance une vaste campagne pour populariser sous le manteau l’européanisme dans les médias et les milieux politiques britanniques. En 1973, l’Angleterre fait son entrée dans le Marché commun ; le 5 juin 1975, 67,2 % des électeurs britanniques ratifient la décision par référendum. Dans ce renversement de tendance en faveur de l’Europe, un homme s’est jeté à corps perdu : nul autre que le chef de la station de la CIA de Londres, Cord Meyer Jr. Ce bon vieux Cord qui remplaçait vingt ans plus tôt son copain Braden à la tête de la Division des organisations internationales de la Compagnie.

    Par Rémi Kauffer  Historia n° 675 (27 février 2003), via La théorie du tout

    (Titre originel : “La CIA finance la construction européenne”)

    http://fortune.fdesouche.com

  • Manifestation nationaliste en Grèce

    Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté ce dimanche à Athènes, sous l’égide du parti Aube dorée, pour dénoncer les impérialismes américain et turc, ainsi que l’immigration.
    La plus grande manifestation nationaliste depuis très longtemps dans ce pays.
    Les ignorants qui accusent ce parti d’être antichrétien savoureront les premières images du rassemblement.

    http://www.contre-info.com/