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  • Les nouveaux chiens de garde

    Marine Le Pen attirait dernièrement notre attention sur le film-documentaire intitulé Les nouveaux chiens de garde qui, malgré une diffusion restreinte, mais grâce notamment au réseau des salles indépendantes, dépassa les 200 000 entrées en 2012. Réalisé par Gilbert Balbastre et Yannick Kergoat, Les nouveaux chiens de garde se nourrit très largement de l’ouvrage éponyme à succès de Serge Halimi (paru en 1997 et réactualisé en 2005 ). Un titre faisant lui-même référence au livre de Paul Nizan « Les chiens de garde » (1932), qui explorait (déjà) les collusions entre pouvoir politique, monde des affaires et journalistes.

     Ce tableau est ici dressé par des personnes se réclamant de la gauche  dite antilibérale. Serge Halimi (qui a pris part à l’élaboration de ce film-documentaire) est ainsi membre de l’équipe de rédaction du Monde diplomatique depuis 1992, et occupe depuis mars 2008 le poste de directeur de ce mensuel. Les réalisateurs du film soulignent pour leur part ce qu’ils doivent aussi à une structure comme Acrimed (acronyme d’« Action critique Médias ») qui se situe  clairement dans la mouvance altermondialiste.

      Les critiques et constats élaborés ici, n’en sont pas moins très souvent pertinents. Ils rejoignent, recoupent les analyses et études effectuées à l’autre bout de l’échiquier politique. Nous pensons ainsi aux écrits d’Emmanuel Ratier sur le club Le Siècle.

     Au moins huit membres du gouvernement Ayrault sont passés par le Club Le Siècle qui comme le rappelait M. Ratier,  regroupe « les principaux hommes politiques (de l’UMPS), patrons de journaux et présentateurs de télévision, grands hommes d’affaires et financiers. Ils représentent la quintessence du pouvoir oligarchique français, concentrant entre leurs mains l’essentiel du pouvoir et sans doute près de 90% du PIB français. »

     Dans le film-documentaire qui nous occupe ici est mise en lumière la réalité disséquée par Serge Halimi dans son livre. D’abord l’emprise croissante des grands groupes financiers et industriels sur l’information. Les Bolloré, Bouyues, PPR, Dassault, Rothschild et autre Lagardère détiennent les principales chaines de  télévision et de radio, les principaux magazines et journaux.

     Ensuite,  le développement d’un « journalisme de révérence » d’une «  pensée de marché »,« la prédisposition des journalistes à accompagner les choix économiques et sociaux de la classe dominante », de la caste acquise au mondialisme dirions nous.

     Bref, dans un univers médiatique dans lequel la publicité joue un rôle croissant, la généralisation d’un « univers de connivence », dissimulé derrière la multiplication des chaines et des canaux dits d’informations mais délivrant les mêmes messages formatés…

     Sociologue au CNRS, François Denord souligne dans le film la proximité sociologique des  « milieux journalistiques et politiques »,  le rôle de  « journalistes vedettes »   proches des politiciens  par leur cursus : «  même milieu, même formation des stars de l’info » qui ont fait  « science po ou HEC.

     Rédacteur en chef sur France 3, Michel Naudy note pareillement que si  le système « rejette tout ce qu’il ne peut pas récupérer » – « On ne reste jamais à l’antenne impunément »- c’est aussi parce que « le milieu politique et journalistique est un monde unique, un seul et même monde ». Ils partagent « les mêmes valeurs, le même mode de vie, les mêmes amitiés, fréquentent  les mêmes hôtels passent les vacances dans les mêmes lieux. C’est une famille réellement. »

     Un monde de la finance qui n’a pas investi dans les médias « pour qu’ils nuisent à leurs intérêts ».Au-delà du groupe Bouygues (TF1), Dassault (Le Figaro), Rothschild (Libération), est particulièrement mis en exergue comme exemple de  cette dépendance  des  principaux médias français au pouvoir économique le cas  Arnaud Lagardère.

     Celui-ci possède non seulement  Europe 1, mais de huit chaînes de télévisions, une vingtaine de magazines (Paris-Match, Marie-Claire…), le réseau  de distribution Relay et ses 1000 points de vente…

     Cet intérêt des  groupes industriels à investir et  à  posséder des médias répond à une  double démarche : non seulement  « faire des profits » mais aussi   «  disposer d’un levier politique évident ».

     Or , «  les intérêts des gens qui de fait détiennent ce pays les poussent a soutenir ceux qui défendent leurs intérêts financiers et idéologiques (…). Ces gens changent de cheval comme ils changent de chemise, et l’intérêt c’est qu’il y a des candidats à droite, mais aussi à gauche… » (M. Naudy).

     Le film s’arrête ainsi longuement sur le fameux club Le Siècle, « club privé dont les membres sont regroupés par cooptation », réunissant « le gratin du monde  de la finance, de la politique se et du journalisme », « intellectuels, hauts fonctionnaires… ». « Rien de ce qui se dit à l’intérieur ne doit se répéter à l’extérieur. »

     Pour Fréderic Lordon, économiste directeur de recherche au CNRS, entrer dans ce type de cercle pour un journaliste, un chroniqueur, se traduit « par des pertes de liberté de parole, des pertes de sens critique, des effets de normalisation, d’adaptation , d’ajustement,  d’auto censure ». «  Rapidement  tu sais bien ce que tu peux dire et ce que tu ne  peux plus dire , les questions, que tu as le droit de soulever et celles qu’il faudra mieux taire…».

     Comme le résume François Denord,  être membre du Siècle «c’est avoir montré qu’on est capable de s’intégrer dans la classe dominante française et une fois qu’on en est membre il faut bien respecter au minimum les intérêts de cette classe, ne pas aller contre ses intérêts politiques et  économiques.»

    Les nouveaux chien de garde s’arrête aussi avec bonheur sur « les experts », les  invités récurrents  des chaînes et des stations. Un cercle restreint, tous médias confondus, « ils sont une trentaine », eux aussi très souvent membres du Siècle, à l’instar d’Elie Cohen, d’Alain Minc, de Jacques Attali, de Nicolas Baverez, de Jean-Hervé Lorenzi, de Christian de Boissieu, Michel Godet (qui n’en fait pas partie) …

     Jean Gadrey, professeur émérite d’économie membre d e la commission Stiglitz s’interroge : « Pourquoi les grands médias font ils silence sur les collusions, les liaisons dangereues entre un certain nombre d économistes  que l’on invitent systématiquement et les milieux d’affaires?».

     « Les citoyens les auditeurs les téléspectateur regarderaient tout autrement un brillant économiste universitaire s’ils savaient que cet économiste est  largement rétribué par les banques, les compagnies d’assurance et les sociétés privées comme administrateur c’est à dire au centre de la gestion de ses entreprises. »

     « Leur fonction est de promouvoir la pensée unique économique, le démantèlement de l’Etat social selon les propres termes de Frédéric Lordon. « Ceux qui refusent  de parler dans le cadre de la pensée unique économique sont éjectés. Bienvenue à ceux qui acceptent de grenouiller dans les limites du bac à sable, mais cela fait une pensée singulièrement atrophiée. »

     D’ailleurs aucun de ces pseudos experts (notamment M. Cohen meilleur économiste de France selon M Minc) n’a vu venir la crise systémique qui a frappé la planète en 2008.  A commencer par Alain Minc qui vantait au début de cette  crise des subprimes la capacité du système  à la réguler, balayer d’un revers de la main  « les risques de dérapage » !

     « La crise a pris  à contre-pied tous ces experts qui pendant 20 ans ont expliqué que la déréglementation était le meilleur des systèmes »(Lordon). Pourtant  ce sont toujours les mêmes  qui sont invités sur les plateaux . Ce sont eux qui ont été invités à venir commenter cette crise, squattant la quasi-totalité des émissions. «Constance dans l’erreur constance dans l’indulgence, ils sont inoxydables » (Lordon).

     Cette domination de la pensée unique néo-libérale  est maintenant complète y compris à gauche, au  Monde, sous l’impulsion alors du triumvirat Plenel-Minc-Colombani, comme à Libération sous celle de l’inénarrable Laurent Joffrin (Le Siècle bien sur), qui se sont ralliés aux thèses libre-échangistes et euromondialistes.

     D’autant que la concurrence entre médias ne garantie pas l’indépendance des journalistes et de l’information. Sont cités ici les cas d ‘Alain Duhamel ou de Michel Field (membres du siècle),  ex militant trotskiste que l’on a retrouvé au meeting de l’UMP pour le oui à la constitution européenne en 2005,  « faisant acclamer Arnaud Lagardère,  son employeur sur Europe 1 ».

     Et ce documentaire bien ficelé de conclure : « trente ans de renoncement à légiférer pour garantir des médias plus indépendants.  Trente ans de soutien à l’appropriation par des groupes industriels  et financiers  d’une bonne partie de la presse écrite des radios et des télévisons. Trente ans de renoncement à un service public de l’information indépendant et de qualité,  à faire des médias une question politique  essentielle ».

     Un film qui permet de comprendre implicitement souligne Bruno Gollnisch (n’en déplaisent pour le coup aux auteurs de ce film), les raisons de l’ostracisme, des attitudes dédaigneuses, méprisantes,  de la partialité  de la caste médiatique à l’endroit du Front National  et de son programme politique.  

    http://www.gollnisch.com/2013/10/04/les-nouveaux-chiens-garde-2/

  • Sauvetage jusqu’à la banqueroute : L’euro, ou le rachat allemand

    La poursuite du sauvetage de l’euro est le ciment d’une doxa politique qui imprègne l’Allemagne, doxa qui conduit l’élite politique à persuader la population – et ce près de soixante-dix ans après la fin de la guerre – qu’elle porte aujourd’hui comme naguère une responsabilité morale particulière tant dans les faits de guerre que dans la politique alors menée par la direction allemande de l’époque. C’est ce qu’écrit Gunnar Beck (qui enseigne le droit communautaire à l’Université de Londres).

    La question décisive qui se pose après l’élection du Bundestag est : “Avec qui gouvernera Angela Merkel ?” Verra-t-on une grande coalition avec le SPD ? Le discours de Merkel aux électeurs s’est focalisé sur la ligne qu’elle a suivi jusque-là dans la gestion de la crise de l’euro : une aide financière ne peut être octroyée qu’aux seuls pays qui adoptent un comportement vertueux, c’est-à-dire économe. Ainsi la Chancelière a-t-elle pu jusqu’ici se présenter à la population comme une négociatrice inflexible. Ce qui depuis des années constituait pour la politique allemande la difficulté la plus sérieuse, le terrain le plus miné, a ainsi apporté à Merkel un succès majeur, succès qui constitue sans nul doute – même l’opposition s’est vu forcée d’en convenir – le point fort du bilan gouvernemental.

    Dans les processus de négociations intra-européennes, la Chancelière a été régulièrement amenée à concéder ceci ou à refuser cela, amenant d’occasionnelles défaites tactiques ou la prise de certaines libertés avec la lettre et l’esprit des lois. L’opposition cependant, au lieu d’en tirer parti s’est cantonnée dans le ressassement d’un seul et unique reproche, à savoir celui du manque de solidarité.

    Le “Plan Marshall” du SPD

    Jürgen Trittin, candidat principal des Verts et qui ambitionnait le Ministère des Finances, un homme dont la compréhension de l’économie est à peu près celle d’un élève du primaire, s’est depuis des années déclaré en faveur des euro-bonds, tandis que de son côté le SPD ne jure que par un “Plan Marshall” allemand, plan qu’il appelle de ses vœux, plan destiné à sauver l’euro : le SPD oublie seulement que l’Allemagne ne pèse, démographiquement, que le quart des Etats-Unis et, économiquement, pas même le cinquième de cette puissance. Mais voyons quelle est ici la position d‘Angela Merkel.

    Jusqu’à l’élection, Merkel est restée en mesure d’exiger des pays en crise leur solidarité en échange de sa solidarité, mais dès l’élection faite, l’argument de la pression de son électorat ne lui permettra plus justifier sa résistance à leurs demandes insistantes de modérer la rigueur qui s’impose à eux, ou de différer les réformes qu’elle implique. Merkel se verra donc contrainte de renoncer à ses exigences de vertu et devra, les unes après les autres, les abandonner.

    Huit mauvaises raisons

    Il y a bien des raisons pour lesquelles on peut penser que le gouvernement ne pourra éviter d’être mis à genoux. Je présenterai ici huit de ces (mauvaises) raisons, qui se laissent classer en trois groupes : premièrement, les raisons qui tiennent à l’approche névrotique, due à des raisons historiques, par les politiciens allemands, de la notion de dette. Deuxièmement, l’avantage toujours donné aux calculs de court terme sur la préservation des intérêts à long terme. Et troisièmement, la montée en puissance des oligarchies, dans toutes les “démocraties” occidentales, depuis au plus tard le début de la crise financière.

    La Chancelière, comme d’ailleurs presque tous les dirigeants des partis politiques établis, est ce que l’on appelle une européenne convaincue. Et certes, Européens, nous le sommes tous, par la force des choses et depuis notre naissance. Mais “européenne convaincue” signifie ici l’être avec partialité. Chaque conviction devrait pourtant, en principe, toujours être mise et remise à l’épreuve de la réalité, chose que d’ailleurs personne au Bundestag ne fait jamais.

    Quoi qu’il en puisse coûter

    Si l’euro échoue, c’est l’Europe qui échoue” : Ces mots de la Chancelière, si dépourvus qu’ils puissent être de sens comme de logique, n’en sont pas moins l’expression d’une volonté profondément enracinée, celle de défendre la monnaie unique à n’importe quel prix et quoi qu’il en puisse coûter.

    La politique allemande professe la foi en l’unité européenne, cette croyance de substitution qui s’est imposée quasiment dès la fondation de la République Fédérale. Quant à l’euro lui-même, il n’est rien moins qu’un élément constitutif de ce processus historique d’unification (et de nettoyage) qui vise à régénérer l’innocence perdue de l’Allemagne. Un chef de gouvernement allemand qui voudrait mettre fin à la mauvaise blague de l’euro se verrait exposé à une pression politique et médiatique internationale sans précédent, cloué au pilori comme un dangereux nationaliste faisant passer l’intérêt national avant la réconciliation – réconciliation d’ailleurs sans fin et éternellement financée par les contribuables allemands – et précipitant l’Europe occidentale dans une nouvelle et écrasante récession.

    De l’échec vu du point de vue politiquement correct

    Tout au plus verrait-on peut-être, et ce longtemps après la fin de l’aventure, quelques historiens révisionnistes qui se souviendraient que l’euro n’avait en fait été qu’une fausse couche, un projet incapable de jamais satisfaire aux besoins d’une pluralité d’États membres aux économies peu compatibles.

    Aujourd’hui par contre, n’importe quel chef de gouvernement capable d’allouer sans discontinuer le bon argent des contribuables allemands à des crédits douteux, peut parfaitement bien s’imaginer – en gardant à l’esprit cette responsabilité historique de l’Allemagne, laquelle ne connaîtra jamais de fin – avoir agi, par ses dilapidations, de façon responsable et solidaire. Et s’il en vient à échouer, alors ce ne sera pas pour de mauvaises raisons, mais pour de bonnes, d’excellentes raisons, bonnes et excellentes tout du moins du point de vue politiquement correct, lequel se tapit derrière les noms ronflants de solidarité européenne et d’amitié franco-allemande.

    Des amis, les Français ?

    Car l’amitié franco-allemande est un élément constitutif de la nouvelle identité allemande. Cette amitié est sous plus d’un aspect contre nature, presque une mésalliance par excellence [En français dans le texte. - Ndt] – les deux nations, et leur citoyens, ont sur de nombreuses questions économiques, politiques ou touchant à la sphère privée des vues inconciliables. C’est pour des raisons de culpabilité et de sentiment d’avoir péché que l’Allemagne supporte le projet d’intégration européenne, tandis que – suivant le sociologue-politologue américain Larry Siedentop – la France, ou tout du moins ses dirigeants, n’y voient qu’un moyen d’assurer leurs propres intérêts nationaux leur primauté nationale, un moyen aussi de courber à leur convenance les institutions européennes et avant tout d’affaiblir économiquement l’Allemagne [Le traducteur souhaite rappeler au lecteur qu’il ne fait que traduire. - Ndt].

    Lorsque tout récemment l’ancien président du BDI [Bundesverband der Deutschen Industrie e. V. : Confédération de l’industrie allemande - Ndt] – le Président Henkel – a remarqué que le temps pourrait bien être venu du divorce franco-allemand, la droite allemande a été outrée ; il faut pourtant rappeler qu’aucun homme politique allemand, ou à peu près, n’est capable de converser avec un collègue français dans la langue natale soit de l’un, soit de l’autre. Des deux côtés, la soi-disant amitié franco-allemande se nourrit d’ignorance et d’incompréhension. Ce regrettable état de fait se trouve encore renforcé par les rêveries irréalistes auxquels les Allemands n’ont que trop tendance à s’adonner, et aussi par cette circonstance particulière que les mots d’”intérêt national” aient été rayés par les politiques allemands du dictionnaire allemand.

    L’Allemagne peut abandonner l’euro

    Depuis longtemps déjà, il n’y a plus, face la crise de l’euro, de ligne de conduite possible qui n’entraîne pas au moins quelques dégâts. La République Fédérale peut parfaitement quitter dans l’instant la zone euro et, par la même occasion, le reste de la fiesta européenne. En cas d’implosion de l’euro, l’Allemagne perdrait quelque 600 à 800 milliards d’euros au titre de ses créances Target – lesquelles sont des créances libellées en euro que détient la Bundesbank sur les autres banques centrales de la zone euro [Quoique les chiffres soient justes, ils donnent une idée incorrecte de la réalité. La Bundesbank en effet, en cessant d’être contrainte de reconnaître les billets euros comme les siens propres, se retrouverait par compensation redevable à la BCE du montant de billets mis par elle en circulation, cette dette viendrait se défalquer de la créance liée aux Target, et la créance finale de la Bundesbank serait ramenée à un ordre de grandeur beaucoup plus modique de l’ordre, tout au plus, de 150 milliards. Par surcroît, il n’est pas du tout sûr que cette créance serait perdue dans son intégralité. Les chiffres de 600 et 800 sont néanmoins volontiers utilisés tels quels par les opposants à l’euro, en raison de l’impression qu’ils peuvent produire. - Ndt] – de quoi se retrancheraient toutes les aides gouvernementales effectuées via le MSE, le FESF, et autres programmes d’aides comme ceux pour la Grèce [L’auteur commet ici une erreur de signe : des créances allemandes sur l'étranger ne peuvent venir en déduction d’autres créances allemandes sur l’étranger. - Ndt]. Il ne resterait grosso modo que 300 à 500 milliards, une somme évidemment énorme, mais nullement catastrophique.

    Il faudrait d’autre part tenir compte d’une chute des exportations, au moins pour quelque temps, en direction des Etats de la zone euro en crise ; cette chute cependant a déjà commencé depuis le début de la crise. La part de la zone euro dans nos exportations, qui lors de l’introduction de l’euro se montait encore à quelque 45 %, est depuis lors tombée aux alentours d’un tiers, et la tendance est à la poursuite de cette baisse.

    L’euro zone n’est pas un marché générateur de croissance pour l’Allemagne

    Contrairement à l’opinion officielle du gouvernement et de l’UE, la zone euro, si elle offre un débouché important à l’industrie allemande, ne lui procure pas d’opportunités de croissance. Les coûts induits par une implosion de l’euro seraient conséquents, mais pas catastrophiques. Ces coûts d’ailleurs ne resteraient pas masqués, mais seraient immédiatement révélés au grand jour.

    L’autre terme de l’alternative est celle d’un sauvetage de la zone euro, et ce, à n’importe quel prix : un sauvetage dans lequel l’Allemagne serait progressivement amenée à souscrire à une mutualisation complète des budgets – et ce, via plans de sauvetage, réductions de dettes, rachats d’obligations par la BCE, union bancaire et, à la fin des fins, euro-bonds – conduirait à un accroissement substantiel des pertes subies par le contribuable allemand, qui seraient dissimulées pour une part importante dans un regain d’inflation et dans la contrainte imposée par la BCE de taux très bas, les deux choses conduisant insidieusement à la ruine de l’épargnant. Nous parlons ici de coûts qui se chiffrent en dizaines de milliards d’euros, et qui sont amenés par la dépréciation des épargnes allemandes détenues tant dans nos frontières qu’à l’étranger ; ces coûts pourtant donnent l’impression d’être inférieurs à ceux d’une sortie de la zone euro, avec ses pertes immédiatement constatables, parce qu’ils seraient répartis sur de grandes périodes de temps, sans limite prévisible, parce qu’ils ne seraient pas, eux, immédiatement constatables, mais bien plutôt prendraient la forme plus sournoise de dépréciation de la monnaie, de perte de pouvoir d’achat et des freins à la croissance qui y sont liés, tous coûts donc qui sur le long terme dépassent ceux induits par une implosion de l’euro, mais qui cependant ne se laissent pas aisément quantifier ou mesurer dans l’instant.

    Faute et responsabilité [L’auteur joue sur l’homonymie, en allemand, des mots "dette" et "faute" (au sens moral du terme), tous deux rendus par "Schuld". - Ndt]

    Par chance, les coûts d’une implosion de l’euro ont pu, quant à eux, être quantifiés avec la dernière précision par la Fondation Bertelsmann [Bertelsmann Stiftung : une fondation qui produit des études, et dont l’idéologie libérale et humaniste se rapproche assez de ce que l’on appelle en France la "pensée unique" - Ndt] – sur la base, il est vrai, d’hypothèses arbitraires et avec un résultat encore plus scandaleusement arbitraire. Pour l’ensemble des gouvernements occidentaux, les coûts relativement moindres, quoique immédiats, d’une terminaison de l’euro valent toujours mieux que ceux, beaucoup plus hauts quoique beaucoup moins transparents, d’une longue tergiversation. Cela dit, il s’en faut de beaucoup que l’on pratique encore, en Europe occidentale, le raisonnement à long terme.

    Seuls un petit nombre d’hommes, et un encore plus petit nombre d’hommes politiques, possèdent la force de caractère qui est nécessaire pour reconnaître ses erreurs et pour les corriger. La chose apparaît depuis longtemps comme particulièrement difficile pour les hommes politiques allemands. Quant à savoir reconnaître qu’il est devenu temps de limiter ses pertes et de les reconnaître… La Chancelière est en cela sans doute plus flexible et plus lucide que d’autres et cependant, si elle devait se résoudre maintenant à renoncer à la pensée magique des pro-euro allemands, elle devrait admettre sa propre responsabilité dans des pertes qui dépassent le demi-billion d’euros.

    L’Allemagne sombrerait dans le discrédit

    Ce serait un peu comme si – la comparaison de vise pas en particulier telle ou telle personne, mais porte simplement sur les situation – Adolf Hitler avait conclu la paix avec Staline avant la débâcle de la bataille de Koursk, en juin 1943. Ç’eût à la fois été la seule chose raisonnable à faire, en même temps que la reconnaissance complète et sans appel d’erreurs colossales. Pour cette raison précisément le sauvetage de l’euro ne sera pas accompli – tout au moins aussi longtemps que la République Fédérale ne sera pas complètement ruinée.

    Car l’euro doit encore devenir le Front de l’Est des contribuables allemands. La réputation de l’Allemagne est en beaucoup d’endroits mauvaise, et ce bien au-delà de ce qui serait justifié. Au contraire, la réputation de démocratie et d’Etat de droit de l’Allemagne fédérale est mondialement excellente et possède presque valeur d’exemple. Ceci pose tout autant question que la mauvaise réputation, largement injustifiée, du pays en tant que tel. La moitié à peine des députés du Bundestag sont directement élus par leur circonscription, l’autre moitié provenant des listes qui sont déposées par les appareils des partis auprès du Parlement. Les députés qui voteraient contre les instructions de leur parti risqueraient donc leur place sur ces listes… Qui ambitionne de grimper doit donc se montrer obéissant, car l’avancement n’est octroyé dans la majorité des cas que comme une récompense de la loyauté et de l’obéissance. Il n’est donc guère surprenant qu’aucune rébellion de députés contre un gouvernement en place n’ait eut lieu au cours des trente dernières années.

    Un Parlement obéissant

    Tout aussi questionnable que la soumission du Parlement est la conduite du Tribunal constitutionnel, pourtant censément indépendant du pouvoir politique. Ses juges sont sans exception nommés sur la recommandation de l’un ou l’autre des quatre partis régnants en Allemagne, et donc principalement par la CDU/CSU et par le SPD. Une attitude coopérative des juges pour tout ce qui concerne ces sujets cruciaux que sont les questions internationales, les questions européennes, et enfin celles qui touchent à la politique budgétaire, est ainsi garantie.

    Ces faits, souvent élégamment dissimulés, qui sous-tendent la séparation des pouvoirs à la mode fédérale allemande, suffisent largement à expliquer pourquoi et comment le Tribunal a constamment rejeté toutes les plaintes formulées contre les mécanismes de sauvetage de l’euro, l’occurrence la plus récente étant le jugement rendu sur le MES, le 12 septembre 2012. Dans ce jugement, les magistrats ont arrêté que l’acceptation par le gouvernement fédéral de se porter caution de gouvernements douteux et de banques douteuses, à hauteur de dizaine ou centaines de milliards d’euros et sans que le montant total n’en puisse être circonscrit, connu ou déterminé à l’avance, n’entrait pas le moins du monde en conflit ou contradiction avec la souveraineté budgétaire du Bundestag, qui autorise bon an mal an des dépenses gouvernementales de l’ordre de 300 milliards d’euros. Il est, je crois, inutile d’insister sur la saine compréhension des affaires dont ces juges ont fait preuve.

    Un climat oppressant de politiquement correct

    A cela s’ajoute le parti pris apparent d‘Andreas Voßkuhle, qui préside le tribunal, proche du SPD mais néanmoins fidèle de la Chancelière, et naviguant d’ailleurs dans toutes les eaux pouvant présenter quelque utilité. En octobre 2012, à l’occasion d’une réception par des étudiants d’Oxford, il révéla que “faute de temps” son tribunal, (dont les membres passent leur temps à voyager en toute jovialité,) ne pourrait pas avant de longs mois statuer sur la plainte concernant des rachats de titres par la BCE. Si la BCE n’avait toujours rien commencé passé les élections de 2013 au Bundestag, on serait alors en mesure au moyen de l’un ou de l’autre artifice juridique d’éviter à cette institution de voir son programme frappé d’interdit.

    Car telle est la “bonne nouvelle” selon Voßkuhle : Le sauvetage de l’euro par le gouvernement ne sera pas torpillé juridiquement. Ceci, alors que l’annonce faite par Draghi est celle d’une mesure qui viole de façon flagrante des articles 123 et 127 du Traité. C’est ainsi que, selon le Tribunal, les risques incalculables liés au MES ou les rachats illégaux de titres par la BCE sont sans incidence sur la souveraineté budgétaire du Bundestag. La violation de la loi se fait donc avec la bénédiction de la plus haute juridiction allemande.

    Un climat oppressant de politiquement correct imprègne la culture de l’Allemagne fédérale, comme celle aussi de la plupart des pays occidentaux, aux seules exceptions de la Suisse, de l’Autriche, de la Finlande, de l’Irlande et peut-être de l’Islande. Or, en Allemagne, la foi dans le processus d’intégration européenne fait partie intégrante du catalogue des croyances politiquement correctes.

    Chauffage politique à effet de serre

    Tous ces faits et facteurs structurant la culture politique de l’Allemagne fédérale sont sans rapport avec la moindre considération de nature économique et en particulier n’amènent nullement à conclure que le peuple allemand dans sa majorité, ou d’ailleurs qu’aucun autre peuple européen dans sa majorité, ne profite réellement de l’euro. Pour la poursuite du sauvetage de l’euro il n’existe que de mauvaises raisons, pas de bonnes, car cette poursuite constitue le ciment d’une doxa politique qui imprègne l’Allemagne, doxa qui amène l’élite politique à charger la population – et ce près de soixante-dix ans après la fin de la guerre – d’une responsabilité morale particulière tant dans les faits de guerre que dans la politique alors menée par la direction allemande de l’époque.

    Sous l’influence de ce chauffage politique à effet de serre il est à peu près impensable qu’une chancelière, qui se voit elle-même comme une partisane zélée de l’intégration européenne, en vienne soudainement à abjurer la foi européiste et en arrive à la conclusion que les coûts d’une implosion de l’euro restent inférieurs à ceux d’une continuation, que ce soit du point de vue des contribuables allemands, des épargnants allemands ou des entreprises allemandes. Et l’une parmi les nombreuses mauvaises raisons justifiant un sauvetage de l’euro est par conséquence également une raison, et non moins mauvaise, justifiant un relâchement de la politique budgétaire économe et parcimonieuse suivie jusqu’à présent – jusqu’à la création d’une union d‘endettés : Unis dans la Dette, telle pourrait en effet être la devise de la nouvelle Europe.

    Un biotope incestueux

    Les hommes politiques d’Europe occidentale, et en particulier les dirigeants et les principaux ministres, passent beaucoup plus de temps entre eux que dans la compagnie de n’importe qui d’autre, sauf peut-être leurs plus proches conseillers et quelques lobbyistes influents. Cette situation crée un biotope incestueux dans lequel nos élus tournent trop souvent le dos aux possibilités d’accords politiques ainsi qu’aux intérêts de leurs électeurs ou de la population de leur pays.

    Cela n’est pas sans conséquences. Il n’est que de voir l’impuissance dans laquelle ils se trouvent d’opposer aux exigences des lobbies bancaires les refus fermes et définitifs que celles-ci mériteraient pourtant. L’Union européenne, qui détermine sa politique sur la base de réunions informelles en petit comité et derrière des portes closes, porte atteinte aux principes du débat public, de la responsabilité démocratique et d’une façon générale à tous les principes moraux qui devraient gouverner l’exercice du pouvoir. Les responsable politiques français s‘adonnent à Bruxelles sans la moindre vergogne à la poursuite de leurs seuls intérêts nationaux pris au sens le plus étroit, ils se sentent comme chez eux dans la capitale de l’UE, et pas seulement d’un simple point de vue linguistique. Au contraire de leurs collègues français, les responsables politiques allemands sont toujours obligés de se battre dès l‘abord pour ménager à leur pays un tant soit peu d’acceptation, de tolérance ou d’encouragement pour la défense de ses intérêts : et dans ces matchs à l’extérieur ils finissent toujours roulés, ne se sentant d’ailleurs que trop enclins, lors de ces navettes incessantes entre Berlin et Bruxelles, à sacrifier les intérêts vitaux de leur pays sur l’autel d’un problématique “plus grand bien européen”.

    Conclaves de nuit à Bruxelles

    Et tout ceci est dû à la crainte pathologique d’un isolement diplomatique, lequel, et quoi qu’on fasse, continuera toujours, à la crainte pathologique des allusions historiques récurrentes, à la crainte pathologique enfin du rôle de Mauvais et d’Ennemi sans cesse réassigné à l’Allemagne. Tel le vampire qui, devant la croix faiblit et tremble, prend peur et s’incline, tel est l’Allemand, dès lors que qui que ce soit, et si peu que ce soit, évoque la croix gammée.

    Et si même les conjurations des conclaves nocturnes de Bruxelles, conjurations pour l’unité, pour l’union et pour l’unification de l’Europe, ne suffisaient pas à contraindre la Chancelière à accepter L’Union des Dettes, eh bien d’autres y parviendront toujours : j’ai nommé la Très Peu Sainte Trinité des banquiers centraux au bras long, des gouvernements surendettés et des plus influentes institutions financières. Ce triumvirat oligarchique qui, en dépit des alternances mises en scène sur les écrans de nos télévisions soi-disant démocratiques, ne cesse jamais de tenir fermement entre ses mains le sceptre du pouvoir, a bien su s’accorder après 2008 pour que le capitalisme-casino ne soit pas réellement stoppé, mais qu’au contraire les dettes accumulées par les banques, dont les montants défiaient déjà l’imagination, soient mutualisées et en fin de compte réattribuées aux contribuables et aux épargnants.

    Car c’était la seule façon d’éviter des répudiations de dettes, des faillites bancaires, des coupes dans les bonus payés aux traders des banques et des hedge funds. En d’autre termes, c’était la seule façon de maintenir l’intouchabilité des profits de l’industrie financière, et, à grand renforts de paradis fiscaux et de magie comptable, de maintenir ces profits privatisés.

    Faiblesse de Merkel sur la scène internationale

    Angela Merkel, dont la sensibilité politique et la compétence sont sans comparaison sur la scène nationale, ne semble pas atteindre, sur le terrain de la diplomatie et des intrigues internationales, au même niveau de sensibilité, de connaissance de la nature humaine et de sûreté de jugement. Pour ce qui est des affaires internes à l’Allemagne, personne ne lui arrive à la cheville, mais s’agit-il d’affaires internationales, rien ne va plus. Pour ce qui est des affaires intérieures à l’Allemagne, on l’a vue pendant plus de quinze ans débarquer méthodiquement, patiemment et avec une maîtrise souveraine, chaque rival potentiel, l’un après l’autre. Mais sur la scène de Bruxelles, c’est par contre elle qui est régulièrement jouée par de meilleurs joueurs et qui doit abandonner les unes après les autres les positions qu’elle pensait défendre.

    Cela est devenu particulièrement apparent en juin 2012, lorsque Hollande et Monti pressèrent la Chancelière, pendant une conférence de presse donnée à une heure très tardive et, l’effet de surprise aidant, la contraignirent, ou à peu près, à dire oui à la possibilité d’utiliser le MES, dont la machinerie venait tout juste d’être créée, à des tâches pour lesquelles il n’avait aucunement été prévu : le sauvetage de banques privées dans les Etats de la périphérie, voire de banques françaises. Moins de deux mois plus tard, le représentant des intérêts de Goldman Sachs à la BCE [Mario Draghi - Ndt] la convainquait par des arguties jésuitiques à donner son blanc-seing à l’OMT [Les "Outright Monetary Transactions", rendues en français par "Operations Monétaires sur Titres", désignent un mécanisme que la BCE s’est donné pour racheter des titres obligataires en quantité illimitées (ex ante). Le projet a été annoncé en septembre 2012 et constitue la concrétisation de la déclaration d’intention du discours du 26 juillet 2012 prononcé à Londres par Draghi. L’OMT fait l’objet d’une plainte auprès du Tribunal constitutionnel allemand pour inconstitutionnalité, plainte déposée par diverses organisations allemandes. Le verdict n’a pas été prononcé à ce jour. - Ndt], son projet de rachat d’obligations d’Etat en quantités illimitées : ce n‘était que de cette façon qu’il était encore possible de dissimuler au grand public l’immensité des coûts qui allaient devoir être supportés par l’Allemagne, dans le cadre d’une Union des Dettes d’ores et déjà entrée, dans les faits, en vigueur.

    “Que la volonté de Draghi soit faite”

    Après que la BCE aura racheté une masse critique d’emprunts d’Etat, les pays bénéficiaires pourront-ils être amenés à tenir les promesses de vertu et de rigueur qu’ils auront dû pour cela consentir ? Les hiérarques de Bruxelles et de la BCE y croient tout autant que les gamins d’aujourd’hui croient que leur petite sœur a été amenée par une cigogne.

    Voici quelques années, lorsqu’un des principaux quotidiens allemands s’était mis à enquêter sur l’éventuelle implication de Draghi dans l’affaire des swaps de devise avec la Grèce, grâce à laquelle cette dernière a pu se faufiler dans la zone euro, ce quotidien reçut un appel des plus inamicaux, lui enjoignant de cesser sur le champ cette enquête. Le même “conseil” valait pour l’implication de Draghi dans d‘autres affaires remontant aux années quatre-vingt-dix, du temps où il était directeur général au ministère des finances italien, s’occupant des privatisations, fonction dans laquelle il aurait encouru le reproche d’avoir sous-estimé la valeur de biens d’Etat à privatiser auprès d’investisseurs internationaux et de banques.

    Le nouveau Méphistophélès

    Avec son background de banquier d’affaires, acquis tant chez Goldman Sachs que durant de nombreuses années dans les corridors labyrinthiques du pouvoir romain, Mario Draghi, à l’éternel sourire sardonique, incarne l’antithèse exacte de ces qualités de solidité et d’intégrité conservatrice que les citoyens ouest-allemands de l’immédiat après-guerre avaient appris à attendre de la Bundesbank et de son président. Cette circonstance que le gouvernement et Draghi s’entendent comme larrons en foire – Draghi, que le Président de la Bundesbank, Weidmann, a comparé en termes à peine voilés au personnage de Méphistophélès, faux-monnayeur de l’Empereur dans le Faust II de Goethe [L’auteur fait référence à un discours de Weidmann, tenu en allemand et non traduit par elle en anglais. Le texte se trouve sur le site de cette institution sous le lien http://www.bundesbank.de/Redaktion/DE/Reden/2012/2012_09_18_weidmann_begruessungsrede.html - Ndt] – met en lumière peut-être plus qu’aucune autre, la persistance de deux des aspects les plus regrettables de la politique étrangère allemande, et ce, même sous un gouvernement Merkel : la méconnaissance de la nature humaine et la naïveté politique.

    C’est ainsi qu’il semblerait que soixante-dix ans après la cessation des hostilités, la République Fédérale n’ait toujours pas retrouvé l’entièreté de sa souveraineté politique, c’est-à-dire la liberté de défendre ses intérêts nationaux propres, dans le respect de l’opinion de la majorité de sa population et des contraintes du droit international, et d’appuyer cette défense de tout son poids politique et économique.

    De même, le pays apparaît comme tout au plus partiellement démocratisé, en ceci au moins que le gouvernement répugne toujours à tenir compte de l’avis de sa propre population pour ce qui est des choix économiques et politiques les plus décisifs. Cela est parfois fort bien compris des observateurs étrangers les plus expérimentés, citons à cet égard l’ancien Premier Ministre britannique Tony Blair. Moyennant la perception d’un salaire assez considérable, Blair a été à même de rassurer ses amis des banques d’investissement et des hedge funds [Il s’agit ici, selon Wikipedia, de JP Morgan et de Zurich Financial. - Ndt] sur le fait que le gouvernement fédéral allemand allait faire tout son possible pour sauver l’euro, conformément à la fameuse déclaration [du 26 juillet 2012 - Ndt] de Draghi, et que ce gouvernement allemand le ferait fut-ce au détriment de son propre pays, et malgré le scepticisme sa propre population.

    Que le représentant des intérêts de Goldman Sachs à la tête de la BCE en vienne à demander un adoucissement des mesures d’austérité [pour les pays de la périphérie - Ndt] ou bien encore la mutualisation au niveau de la zone euro des garanties interbancaires, c’est-à-dire en fin de compte la construction d’une union des dettes, Berlin ne lui opposera pas de fin de non-recevoir. Angela Merkel est réélue pour quatre ans, le Belzébuth aux commandes de la BCE peut, d’après les statuts de cette institution, rester en place au moins six ans, une place qu’il doit en particulier à un feu vert du gouvernement allemand. Sa volonté sera faite, plus dans l’intérêt d’une internationale financière ploutocrate que dans celui du bien des peuples européens.

    Geolitico

    (Article traduit de l’allemand par notre lecteur @JoeLeTaxi, que nous remercions vivement de ce travail. – Fortune)

    Cette traduction peut être reproduite à la double condition de citer Fortune et le traducteur en source.

    http://fortune.fdesouche.com/326391-exclusivite-fortune-sauvetage-jusqua-la-banqueroute-leuro-ou-le-rachat-allemand#more-326391

  • Editorial de L’AF 2871 : VERS L’ETAT PS

    Il suffit donc que quelques grandes enseignes violent avec cynisme une décision de justice protégeant le principe du repos dominical pour que le gouvernement se plie à leur volonté : il est vrai qu’il s’agit de porter une nouvelle atteinte à la fois à la structure chrétienne de la société française et à la famille.

    Et que la majorité socialiste semble avoir été élue pour cela ! S’il faut une nouvelle preuve de la collusion idéologique entre la droite libérale et la gauche sociétaliste, l’aggravation de la très sarkosyste loi Mallié la fournit aisément sous couvert, évidemment, de laisser à ceux qui le « désirent » la possibilité d’exercer leur « liberté » de travailler le dimanche... Maurras parlait dans Libertés et Libéralisme, texte écrit en 1906 mais d’une actualité toujours aussi brûlante, de la célèbre liberté ...libérale de mourir de faim. Cette idéologie mortifère ne change pas, qui, avec cynisme, impose aux salariés de choisir entre leur vie familiale et sociale et leur salaire, tout en réduisant les Français au consumérisme. On dira que le travail le dimanche concerne les étudiants ? Outre qu’il s’agit d’un mensonge — l’encadrement n’est pas composé d’étudiants —, cette ouverture a également pour conséquence, voire pour objet, une concurrence déloyale envers un moyen commerce qui ne peut pas rivaliser... Et qui devra licencier non pas des étudiants, mais des salariés chargés de familles lorsque l’ouverture des grandes enseignes aura été généralisée. De toute façon, on ne réglera pas le problème du revenu des étudiants en déstructurant la société. Quant à l’argument économique, il ne tient pas : on ne dépense que ce qu’on a, dimanche compris. Et on peut changer des habitudes artificiellement imposées. D’ailleurs, un pays comme l’Autriche, qui est impitoyable sur le principe du repos dominical, a un taux de chômage — 4,7 % — à faire pâlir la France — 11 % !

    Le projet de budget pour 2014 est lui aussi une agression à l’égard des familles, principalement des classes moyennes. L’UMP, là encore, ne manque pas d’air en accusant le gouvernement d’étrangler les Français : Sarkozy a passé son quinquennat à créer de nouvelles taxes tout en délaissant la politique familiale. Mais il est vrai que, Hollande regnante, le paradis socialiste se transforme en enfer fiscal : abaissement du plafond du quotient familial, suppression de la réduction d’impôt pour frais de scolarité et de l’exonération fiscale des majorations de retraite pour charges de famille, hausse des taux de TVA, non-indexation des aides au logement (APL)... Jamais les familles françaises, et parmi elles les plus nombreuses, n’auront été autant punies d’assurer le renouvellement des générations et donc l’avenir de la société. Il est vrai que l’Europe a déjà prévu de remplacer la démographie nationale par l’immigration, une politique de grand remplacement que Manuel Valls a décidée de favoriser en revenant aux 100 000 naturalisations annuelles du sarkozysme triomphant (2007-2010). On comprend qu’il s’attaque avec un mâle accent aux Roms... Si évidemment il ne s’agit pas de nier les graves problèmes, y compris en termes de délinquance et de criminalité, que posent certains membres de ces populations dont le mode de vie est « en confrontation » (dixit Valls) avec celui des Français , comment ne pas voir qu’ils sont l’arbre qui cache la forêt, d’autant que le pays légal — PS et UMP réunis — n’a pas l’intention de remettre en cause l’ouverture totale des frontières européennes au 1er janvier 2014 ? Manuel Gaz est le ministre de l’esbroufe, sauf quand il s’agit de harceler et de priver de leurs droits civiques les défenseurs de la famille et de la société française.

    Nous revenons à notre sujet initial et, malheureusement, craignons de devoir encore le faire souvent... tant que la France sera en république. Mais le cynisme de Hollande a passé la mesure ces dernières semaines. Rappelez-vous : s’agissant de l’extension de la procréation médicalement assistée (PMA) des couples hétérosexuels — excusez le pléonasme, rendu nécessaire par la loi Taubira — médicalement stériles aux paires féminines qui le sont, elles, structurellement, Hollande avait déclaré le jeudi 28 mars sur France 2 qu’il « respecterait » l’avis du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) sur le sujet. D’aucuns y avaient vu alors une façon d’enterrer le projet... C’était sans compter sur le manque de scrupule d’un président par défaut qui dirige l’Etat comme il dirigeait le PS : en jouant sur les « courants ». Aussi n’a-t-il pas hésité à faire main basse sur ce même CCNE en en changeant vingt-deux membres sur trente-neuf à l’occasion d’un renouvellement obligatoire de sept d’entre eux : non content d’évincer, sans même les prévenir, les représentants des religions, il y a désigné des amis personnels, tel Jean-Pierre Mignard, et des personnalités dont la compétence se résume à être proches des courants sociétalistes les plus « progressistes », telle la sénatrice PS Michel Meunier. N’est- ce pas dans la suite logique du traitement scandaleux réservé aux représentants des religions, principalement à Mgr Vingt-Trois, lors de leur audition sur le « mariage pour tous » devant l’Assemblée nationale ? Une nouvelle composition bienvenue également pour les avis que ce même CCNE sera bientôt invités à rendre, n’en doutons pas, sur l’euthanasie ou la GPA — pour les paires masculines.

    Parallèlement, Hollande a coupé les vivres au Haut Conseil à l’intégration, qui avait préconisé, en avril dernier, l’interdiction du port du voile islamique à l’université, au profit du nouvel Observatoire de la laïcité, présidé par Jean-Louis Bianco et auquel Jean-Marc Ayrault a nommé, le 22 septembre, Dounia Bouzar, ancienne membre du Conseil français du culte musulman qui, dès le le lendemain, dans le magazine Challenges, a déclaré que la France, Etat laïque, « doit remplacer deux fêtes chrétiennes par Yom Kippour et l’Aïd »... Ou comment, sous prétexte du contraire, favoriser le communautarisme, en déstructurant toujours davantage la société française par la négation de ses racines chrétiennes. Pierre Bergé et Jacques Attali, inspirateurs du pouvoir, y sont eux aussi publiquement favorables. Là encore, le libéralisme, sachant qu’il a dans le PS un allié idéologique, favorise la déchristianisation de la France : à peine Hollande élu, en juin 2012, le congrès de l’Association nationale des DRH, qui est dans l’orbite du MEDEF, n’a-t-il pas demandé au ministre du travail de supprimer trois fêtes chrétiennes, en vue de favoriser le communautarisme au sein de l’entreprise ?

    Ceux qui, tout en se disant patriotes et « sociaux », ne comprennent pas combien le rétablissement économique du pays est solidaire de la lutte pour la cohésion sociale n’ont rien compris. Un pouvoir financier apatride a trouvé dans l’Etat PS, qui s’instaure, un complice zélé pour mettre le peuple français en coupe réglé. Nous combattrons l’un et l’autre sans aucune faiblesse.

    François Marcilhac - L’AF 2871

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Editorial-de-L-AF-2871-VERS-L-ETAT

  • L'Occident abandonne les chrétiens en terre d'islam

    Franz-Olivier Giesbert écrit dans Le Point sous le titre "le syndrome d'un impensé raciste" :

    "C'est une des grandes nouvelles de l'année : si l'Occident défend encore, ici ou là, quelques minorités ethniques persécutées de par le monde, il semble avoir décidé de faire passer par profits et pertes les tueries de chrétiens en terre d'islam. Par fatigue ou honte de soi, ou les deux, nous fermons les yeux.

    Deux poids, deux mesures. La semaine dernière, alors que le monde entier se focalisait sur l'attaque d'un centre commercial de Nairobi, au Kenya, qui a fait 69 morts, un attentat-suicide faisait plus de 80 morts devant une église de Peshawar, au Pakistan. C'est peu de dire que le massacre pakistanais est passé inaperçu : il a été zappé. Il y a là quelque chose d'hallucinant qui relève de la psychanalyse.

    La vie des chrétiens d'Orient, d'Afrique ou d'Asie compte-t-elle pour quantité négligeable ? C'est une question que l'on est en droit de se poser quand on voit la place que nos chers médias accordent aux tueries et aux discriminations dont les catholiques ou les protestants sont l'objet sur la planète : rien ou presque, à quelques heureuses exceptions près. [...]

    Cachez ces crimes qu'on ne saurait voir : c'est notre tartuferie qui nourrit le choc des civilisations. Puisque leurs forfaits ne sont ni punis ni même dénoncés, les djihadistes et les salafistes se croient autorisés à continuer. Ce n'est pas faire de l'islamophobie que de dire cela. Il y a aujourd'hui, notamment en France, une tendance à accepter ce qu'on refuse, depuis belle lurette, Dieu merci, aux catholiques. Pis encore, il y a aussi une forme de résignation devant les crimes et les folies des intégristes musulmans au Pakistan et ailleurs. A croire que l'islam n'est pas une religion comme les autres et qu'il porterait le mal en lui, alors que les islamistes le défigurent."

    Michel Janva

  • Derrière l'excision : Le procès de l'immigration (arc 1999)

    Le mardi 2 février 1999 s'est ouvert devant la cour d'assises de Paris le procès d'Hawa Créou, une "forgeronne" malienne, accusée d'avoir pratiqué quarante-huit excisions sur des petites filles âgées de un mois à dix ans. Figurent à ses côtés 27 parents (dont seulement trois hommes) des enfants excisées. Pour la première fois, c'est rune des victimes, Mariatou Koita, qui est à l'origine du procès.
    Hawa Gréou, dite « Marna Gréou » a 52 ans. Elle est installée en France depuis 1979 - depuis vingt ans, donc - pourtant elle s'adresse à la cour dans son dialecte soninké. Comme elle, la trentaine de parents qui comparaissent pour avoir fait appel à ses services d'exciseuse ont recours à un interprète. Pour l'occasion, les femmes ont revêtu leurs pagnes colorés, marque d'appartenance à la communauté malienne, sénégalaise ou mauritanienne. Toutes, en réalité, comprennent fort bien le Français et sont parfaitement capables de se faire comprendre dans notre langue, notamment lorsqu'il s'agit d'aller demander l'aide des services sociaux, mais pas question de le montrer au tribunal. Sans doute sur le conseil de leurs avocats.« En fait, dit l'un des membres de la CAMS (Commission pour l'abolition des mutilations sexuelles), elles sont très rusées, elles ne prennent dans notre culture que ce qui les intéresse et savent très bien tirer parti du système. Elles font des ménages, elles ont toutes la télé, etc, mais elles continuent de vivre exactement sur le modèle africain. Il y a toujours la première, la deuxième, la troisième épouse, voire davantage. Elles continuent ainsi, lorsque le mari décède, à devenir la énième épouse de son frère ou de son cousin, mais elles savent très bien utiliser notre législation sociale. Si elles sont l'épouse coutumière, elles sont au regard de notre loi (qui réfute officiellement la polygamie mais en réalité la finance) des mères célibataires et perçoivent toutes les aides en tant que telles ». Contrairement à ce qu'elles prétendent devant le tribunal, Marna Gréou en tête, toutes ces femmes savent également fort bien que l'excision est interdite en France. Néanmoins, elles continuent de la faire pratiquer, mais « en prenant des précautions » : on fait cela pendant l'été, quand les voisins français sont en vacances, histoire qu'ils n'entendent pas les cris de la petite fille qu'on mutile sur un coin de table. De même, on pratique ici l'excision sur des bébés alors que la coutume locale veut qu'elle soit faite entre 6 et 15 ans, parfois même juste avant le mariage. D'où, disent les médecins, l'ignorance de nombre de jeunes Africaines nées en France sur leur état. Elles n'en prennent parfois conscience que lors d'un premier rapport sexuel, lorsque, comme le rapporte un médecin, « leur copain leur dit "Va chez le médecin, tu n'es pas normale ! " ».
    Le refus d'Intégration
    Bien au-delà de la condamnation d'une pratique jugée barbare, ce qui ressort de tout cela, c'est, bien plus que l'échec d'une politique, le refus évident de ces populations à s'intégrer dans notre société. Refus encouragé par les discours lénifiants sur le multiculturalisme. Car l'idéal poursuivi par toutes nos grandes consciences, militants aussi bien de la régularisation systématique des clandestins que de la tolérance du voile à l'école - cela au nom du respect des minorités - c'est l'avènement de la "société Benetton". Une société bigarrée, faux Eden de peaux métissées et de boubous chamarrés, où toutes les pratiques sont tolérables et finalement encouragées au nom des bienfaits du pluri-ethnisme et du multiculturalisme. Cette philosophie a pourtant, depuis belle lurette, atteint les limites de son absurdité : tout est là, sous nos yeux, qui montre quotidiennement qu'encourager les particularismes ethniques ne conduit qu'à l'anarchie.
    L'anarchie, justement, a déjà, en maints endroits, supplanté l'état de droit: ce sont les guerres tribales qui mettent le feu chaque jour à nos banlieues, c'est l'excision toujours pratiquée dans les squatts et les HLM, la discrimination imposée par le voile à l'école, le coût social de la polygamie ou encore le poids sur la Sécurité Sociale d'une prise en charge médicalisée des rituels coutumiers. Sur le même principe, pourquoi alors ne pas tolérer demain, sur le territoire français, que les intégristes musulmans lapident les femmes adultères, tranchent les membres des voleurs à la tire ou répudient leur épouse sans autre forme de procès ?
    La conclusion que tirent les associations parties-civiles dans le procès de l'excision, c'est que « seule fonctionne la peur du gendarme ». Le seul point qui compte, disent-elles, c'est « le positionnement par rapport à la loi ». Durant les longues heures d'audition des mères africaines et de leur exciseuse, « pas un seul mot n'a été prononcé sur la douleur ou la perte de sexualité », tout est sur le registre « on ne savait pas ». C'est faux, bien sûr, puisque non seulement Mama Gréou avait déjà été condamnée en 1994 à un an de prison avec sursis. D'autre part, soulignent les militants des associations qui travaillent en PMI (Protection maternelle et infantile) et sont au contact quotidien des populations immigrées, l'information sur le sujet est intensive depuis vingt ans.
    La conclusion est donc évidente : il faut, sur ce sujet comme sur celui de la délinquance, faire appliquer la loi. Toute la loi et rien que la loi.
    La peine encourue ici - par les parents et l' exciseuse -, au titre de l'article 312 de la loi du 2 février 1981, est de quinze années de réclusion criminelle.
    Marie-Claire ROY National Hebdo du 11 au 17 février 1999

  • Pierre Le Vigan: un ouvrage en perspective

    Propos recueillis par Jean Pierinot

    Jean Pierinot : Vous préparez un nouveau livre. Sur quoi portera-t-il ?
    Pierre le Vigan
    : Sur la pensée politique en Europe depuis le XVème siècle donc sur la constitution de la philosophie politique moderne. Il y sera beaucoup question de la naissance de la forme nation, de l’Etat, de son rôle, de la question de la médiation. L’homme peut-il être présent au monde directement, immédiatement? Je ne le pense pas. Je pense que l’homme est au monde en tant que membre d’une collectivité politique et populaire. L’Etat est l’aspect premier du politique mais il ne résume pas tout le politique. Tout le peuple n’est pas dans l’Etat. L’Etat peut même se retourner contre le peuple. Or l’homme appartient toujours à un peuple et existe en tant qu’acteur politique. L’Etat devrait donc, idéalement, être l’Etat des citoyens.

    Jean Pierinot : Vous écrivez beaucoup et sur beaucoup de sujets. Pourquoi et comment ?
    Pierre le Vigan : Beaucoup de sujets m’intéressent. Beaucoup de sujets sont liés. Difficile de réfléchir sur la guerre sans s’intéresser, parmi des milliers d’autres exemples possibles, à la théorie des trois cerveaux – qui doit d’ailleurs être discutée et non acceptée sans nuances. Difficile de s’intéresser à la pensée politique sans s’intéresser à la littérature, et bien sûr à l’histoire. Difficile de s’intéresser à la philosophie sans être attentif aux questions de la religion et des religions. En outre, toutes ces questions sont intéressantes par elles-mêmes.
    Il se trouve en outre que je suis par tempérament un intellectuel en chemin. J’ai le goût d’arpenter le territoire des idées. Je n’ai jamais été un homme de chapelle, ni un doctrinaire, pas même un théoricien (et pourtant il en faut car les théories sont des appuis pour la réflexion). Je suis un homme de points de vue. C’est assez normal car quand on chemine, on multiplie les points de vue. C’est bien entendu une limite mais les limites sont faites pour être éventuellement déplacées mais pas niées.
    Jean Pierinot : Vos thèmes ont-il un rapport avec votre formation ?
    Pierre le Vigan
    : J’ai une formation d’économie, urbanisme et droit public (que j’ai enseigné un temps). Je l’ai complétée en histoire, géographie, et, plus tard, – ce qui est assez éloigné des domaines précédents – en psychopathologie. Ce dernier domaine a bien entendu un lien avec la philosophie, qui est un de mes centres d’intérêts depuis les années 80, n’ayant par ailleurs pas le moindre diplôme en ce domaine.

    Jean Pierinot : Comment trouvez-vous le temps de lire et d’écrire ?
    Pierre le Vigan : Il se trouve que je travaille dans le domaine du logement social. Je ne suis donc pas un « intellectuel à temps plein ». Je m’occupe notamment de travaux de bâtiment, toutes choses qui ne sont pas très philosophiques (quoi que… je renvoie à l’excellent livre Eloge du carburateur de Matthew B Crawford, sous-titré Essai sur le sens et la valeur du travail. Ed La découverte). Plus jeune, j’ai été, entre autres activités, chargé de cours dans quelques universités et formateur.
    Pour écrire et publier, il n’y a pas d’autres recettes que de travailler énormément. Lire, décrire, écrire, se réécrire. Je consacre une bonne partie de mes congés au travail et prends des vacances courtes voire studieuses. Si on n’aime pas le travail on ne produit pas. Je lis surtout en annotant. J’ai quelques milliers de livres tous lus et annotés depuis les années 1970. Les notes servent de support. Elles obligent à une lecture attentive. Il faut user des livres mais ne pas se laisser user par eux. J’écoute aussi des conférences à la radio ou en téléchargement. L’oralité est en fait d’une exigence souvent supérieure à l’écrit. Lire à haute voix un de ses textes est souvent un test redoutable.
    Jean Pierinot : Un conseil à donner en matière d’écriture ?
    Pierre le Vigan : J’estime avoir encore beaucoup à apprendre. Vous me demandez un conseil, le voilà. : il faut se lancer. Il faut écrire sur des sujets qui vous portent. Il faut à la fois se forcer à écrire assez vite (c’est comme le vélo, si on va trop lentement, on tombe) et s’obliger à se relire maintes fois, à vérifier ses sources, à se faire relire par autrui, à s’assurer qu’on est clair et fluide. Facile à dire, moins facile à faire !

    Les livres de Pierre Le Vigan se commandent à « La barque d’or »

    http://www.voxnr.com/cc/dt_autres/EFlpylAuVVWQnznwgv.shtml

  • Il faut retirer le mondial 2022 au Qatar pour raison d’esclavage

    On peut facilement s’imaginer ce qui se serait passé si des ouvriers, dans des conditions de travail proche de l’esclavage, étaient morts en nombre sur le chantier olympique russe. La condamnation était assurée et le boycott aussi. La France aurait pris la tête de l’indignation internationale contre le vraiment très méchant Poutine.
    Le Qatar aurait-il tous les droits et notamment celui de n’en respecter aucun ?

    La mort d’hommes serait-elle moins médiatique que la lutte contre une prétendue homophobie ? Le président russe, Vladimir Poutine, a assuré que les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi en 2014 se dérouleraient sans discriminations contre les homosexuels, en dépit d’une controverse autour d’une récente loi russe interdisant la “propagande” homosexuelle devant les mineurs.

    « Vous pouvez être absolument certain que la Russie va respecter scrupuleusement les principes de l’olympisme qui interdisent toute discrimination », a déclaré M. Poutine dans une interview à la chaîne de télévision publique Pervyi Kanal. Il n’est pas sûr que les homosexuels soient aussi bien traités dans les émirats du Golfe, mais c’est un autre problème. A quand une déclaration similaire du Qatar sur l’esclavage?

    Quand les démocraties du fric, la France en premier, cesseront-elles de faire la danse du ventre devant les émirs de l’or noir ? Ce pays a dépassé les bornes. Dans certains pays qui ont pratiqué l’esclavage, les esclaves ne mourraient pas sur leurs lieux de travail.
    D’après des documents confiés par l’ambassade du Népal à Doha au journal britannique The Guardian, au moins 44 ouvriers népalais employés sur des chantiers de construction des sites de la Coupe du monde 2022 au Qatar sont morts entre le 4 juin et le 8 août. Jeunes pour la plupart, ils ont été victimes d’attaques et insuffisances cardiaques ainsi que d’accidents sur leur lieu de travail. Tous exerçaient dans des conditions d’exploitation qui s’apparentent à de l’esclavage moderne.

    Cet émirat islamique, grand financier des mouvements les plus radicaux comme l’Arabie saoudite d’ailleurs, au Mali comme en Syrie ou en Lybie achète le monde avec son fric. Cela est possible car nous sommes dans un monde où le pognon est le roi et pas seulement celui du pétrole. Ce pays qui se veut moderniste est, au niveau du respect de la personne humaine, l’un des pires.

    Le Comité suprême Qatar 2022, structure chargée de préparer la Coupe du monde, s’est dit « profondément préoccupé par ces allégations visant certains prestataires et sous-traitants du site de construction de Lusail et City considère la question avec le plus grand sérieux ». « Comme tous ceux qui ont vu les photos et lu l’article (du Guardian), nous sommes choqués », a ajouté le Comité organisateur de la compétition. « Il n’y a aucune excuse pour que les ouvriers soient traités ainsi au Qatar ou ailleurs… La santé, la sécurité et le bien-être de tous ceux qui travaillent à la préparation de la Coupe du monde 2022 sont de la plus haute importance pour le Comité d’organisation. Le tournoi doit aider à l’amélioration de la vie des travailleurs au Qatar».

    La monarchie absolue du Qatar, dirigée par le clan Al-Thani, aussi incroyablement mystérieux que fabuleusement riche, ne tient pas plus de statistiques sur les questions de santé et de sécurité qu’elle ne tolère d’élections libres. La CSI a dû se débrouiller pour compter les cadavres par elle-même. Elle à découvert que cette année, pour l’instant, 83 Indiens ont trouvé la mort. Le petit Etat du Golfe sert également de sépulture à 119 ouvriers népalais des travaux publics. Deux cent deux travailleurs émigrés ayant en outre perdu la vie au cours des neuf derniers mois, les observateurs s’estiment en droit d’affirmer que l’on enregistre au moins un décès par jour. Un chiffre qui ne peut qu’augmenter, le Qatar venant d’annoncer qu’il accueillerait 500 000 immigrés supplémentaires, essentiellement en provenance du sous-continent indien, pour construire ses stades, ses hôtels et ses routes avant 2022.

    « On peut avoir des doutes sur les votes du comité exécutif de la Fifa », précise Joseph Blatter aux portes de la fédération mondiale. « Notamment ceux du Brésilien Ricardo Texeira, du Paraguayen Nicolas Leoz, du Qatari Bin Hammam [ancien rival de Joseph Blatter] et de son allié Jack Warner. » Quatre anciens dirigeants exclus de l’institution pour corruption.
    Dans une enquête consacrée au “Qatargate” et publiée en janvier, l’hebdomadaire France Football avait clairement pointé l’implication de la France, évoquant une visite à l’Elysée, le 23 novembre 2010, du prince héritier Al-Thani.

    Quand les » démocrates » ouvriront-ils les yeux sur ce partenaire infréquentable. Jamais sans doute car elles sont des ploutocraties laïques alors que le Qatar est une ploutocratie musulmane.

    Il faut retirer le mondial au Qatar et le pouvoir à l’internationale des ploutocraties.

    Jean Bonnevey

    Source : Metamag.

    http://fr.novopress.info/141896/il-faut-retirer-le-mondial-2022-au-qatar-pour-raison-desclavage/#more-141896

  • UNE DEMOCRATIE DE LA SURVEILLANCE.

    En juin 1967, lors du premier choc pétrolier dû à la troisième guerre israélo-arabe, d’éminents spécialistes prévoyaient la fin des ressources pétrolières à l’aube du XXIème siècle.

    D’autres analystes, chercheurs ou chroniqueurs ont passé leur temps à débattre de l’épuisement des ressources, du trou dans la couche d’ozone et de la protection des espèces en voie de disparition. Et l’on s’interroge pour trouver le meilleur moyen de gérer la diminution des réserves naturelles, alors que le mondialisme permet de tout vendre, de tout acheter et d’y affecter un code-barres.

    Mais ce qui est en voie de disparition, aujourd’hui, c’est le droit du citoyen à la vie privée !

    Les récents scandales dévoilés par Wikileaks, le sieur Snowden et autres affaires liées aux télécommunications, à Internet, aux téléphones mobiles et aux écoutes illégales des services secrets du monde entier, permettent d’affirmer que «la vie privée n’existe plus sur Internet ; il faut tirer un trait dessus.»

    Regardez autour de vous : qu’est-ce que vous voyez ? Des caméras de surveillance, des scanners, des banques de données d’une extrême précision. Mais sont-ils efficaces ?

    Les 100.000 caméras de toutes natures n’ont pas empêché les attentats de Londres le 7 juillet 2005 !

    Pour leur part, les sociétés d’études de marché peuvent connaître toutes les facettes de notre existence, de notre premier pipi matinal, de l’heure exacte à laquelle nous quittons notre domicile, via les puces de nos systèmes d’alarme ; elles nous suivent tout le temps et captent nos faits et gestes grâce aux caméras vidéo des péages d’autoroute, par les données de nos cartes bancaires qui leur donnent le détail de notre déjeuner et de l’apéritif du soir et peuvent nous localiser à chaque instant grâce à notre téléphone mobile.

    Connectez-vous sur n’importe quoi et alors la moindre transaction, la moindre communication est récoltée, enregistrée, archivée par les cookies. Des sociétés privées sont venues trouver le FBI aux USA, pour qu’ils leur donnent accès à leurs dossiers, à leurs informations, moyennant rétributions ! Comme si l’information était un secteur d’activité comme un autre pouvant être privatisée. Et là, on atteint l’émergence d’un nouvel Etat : une république mise à nu, une démocratie de la surveillance !

    Est-ce là un endroit où vous aimeriez vivre ? Méfiez-vous, taisez-vous, des oreilles ennemies vous écoutent !

    Et vous, de quel côté êtes-vous ?

    Ne nous faisons pas d’illusions ; dans un monde semblable, le sacro-saint droit de l’individu à la vie privée n’a pas la moindre chance de survie face aux forces en présence.

    On parle ici des forces de l’Ordre, nationales et internationales, toujours plus inquisitrices ; des cabinets de marketing et des compagnies d’assurance avides de chiffres et de données ; on parle encore ici des nouveaux géants économiques gérant notre santé, mais aussi des millions de tentacules insidieux fouillant notre intimité à chaque fois que les intérêts privés rencontrent ceux de l’Etat.

    En résumé, il s’agit de ceux qui maintiennent l’Ordre et ceux qui veulent prendre tout votre argent.

    Les forces de l’Ordre et les forces du Commerce : quelle sinistre alliance ! Et voilà contre quoi se dresse notre intimité. C’est la grande bataille du siècle qui s’annonce et où les forces en présence sont inégales.

    Alors la question que l’on vous pose aujourd’hui, quelle que soit votre tendance politique, est très simple :«de quel côté êtes-vous ? »

    Pieter KERSTENS. http://www.altermedia.info/france-belgique/atteinte-aux-libertes/democratie-surveillance_86884.html#more-86884