L’Angleterre a été frappée pour la sixième fois depuis 2005 par la barbarie terroriste. Hier soir à Manchester, un individu déclenchant selon toute probabilité sa ceinture d’explosifs à la fin d’un concert de la chanteuse pop Ariana Grande, a causé la mort de 22 personnes (dont des enfants). On dénombre également une soixantaine de blessés. Une tuerie imputée à l’Etat Islamique qui a suscité l’indignation générale. L’auteur du massacre a été affublé du qualificatif de « Kamikaze » par les médias, terme impropre et insultant pour les pilotes japonais qui à la fin du second conflit mondial faisaient le sacrifice de leur vie pour empêcher l’invasion de leur pays en se précipitant sur des bateaux militaires… Le terrorisme, la recherche de relations pacifiées sont des problématiques au cœur de l’actuel déplacement de Donald Trump au Proche-Orient. Devant une cinquantaine de chefs d’Etats musulmans à Ryad (Arabie saoudite), les appelant à bouter hors des mosquées les prêcheurs de haine, comme devant ses interlocuteurs à Tel Aviv et Jérusalem (il rencontre aujourd’hui le président palestinien Mahmoud Abbas à Bethléem), le président américain a surtout martelé devant ses interlocuteurs sunnites comme juifs un discours très virulent contre l’Iran.
Régime iranien accusé par le nouveau locataire de la Maison blanche de propager le terrorisme via son soutien au Hamas et au Hezbollah libanais , dont la branche militaire (et non le parti) , a été placée en 2013 sur la liste des organisations terroristes par les ministres européens des affaires étrangères. Autre reproche et non des moindres, Téhéran est aussi accusé (depuis plus de dix ans) de constituer une menace nucléaire pour ses voisins des pétromonarchies alliées à Washington et pourIsraël… Un discours trumpiste en tout point similaire a celui qui est tenu par les Etats Hébreu et saoudien. Saoudiens et Qataris qui sont pourtant eux aussi directement pointés du doigt, pour l’aide - ou à tout le moins leurs agissements ambigus - qu’ils apportent aux terroristes djihadistes en Irak en Syrie, en Afrique subsaharienne … Les attaques de M. Trump interviennent au moment ou électeurs iraniens viennent pourtant de réélire un « modéré », le président sortant Hassan Rohani, dans un pays certes toujours dirigé par le guide suprême de la Révolution, Ali Khamenei.
En Israël Donald Trump a ainsi tenu à marquer une rupture avec Barack Obama, favorable à un rapprochement avec Téhéran, qui entretenait des relations très froides avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. Au-delà du symbole – il a été le premier président américain en exercice à se recueillir devant le mur des Lamentations, à Jérusalem – M. Trump a martelé un discours sur « les liens indestructibles » qui unissent les deux pays. Alliance renforcée , a-t-il expliqué, par le même ennemi commun iranien. Une situation qui ouvre la voie, veut-il croire, à une convergence entre pays arabes et l’Etat hébreu pour contrer la puissance iranienne.
« Les Etats-Unis et Israël peuvent affirmer d’une même voix que l’Iran ne doit jamais posséder une arme nucléaire, jamais, et qu’il doit cesser le financement, l’entraînement et l’équipement meurtrier de terroristes et de milices, et qu’il doit cesser immédiatement » , a notamment déclaré Donald Trump. « Je veux que vous sachiez combien nous apprécions le changement dans la politique américaine à l’égard de l’Iran que vous avez énoncé si clairement » s’est félicité M. Netanyahou. Discours du chef d’Etat américain qui illustre l’action sur le terrain de l’aviation américaine qui a attaqué la semaine dernière, pour la première fois en Syrie, des formations militaires pro-iraniennes luttant contre les milices islamistes.
Le président israélien Reuven Rivlin a affirmé de son côté que « nous devons nous assurer (…) de ne pas nous réveiller dans un cauchemar, avec l’Iran, le groupe Etat islamique et le Hamas à nos frontières. Pour pouvoir rêver, nous devons nous assurer que l’Iran soit hors de nos frontières, hors de la Syrie, hors du Liban ». Le ministre israélien du Logement et ancien commandant militaire de la région sud, le général Yoav Galan , déclarait au lendemain de l’attaque chimique attribuée (certainement à tort) aux forces loyalistes syriennes que « le temps est venu d’assassiner (Bachar) el-Assad. C’est aussi simple que cela… ».
Le président iranien Hassan Rohani, lors de la conférence de presse qu’il a tenu vendredi, s’est défendu des accusations portées contre son pays. « Malheureusement, les Américains se trompent toujours concernant notre région : quand ils ont attaqué l’Afghanistan, ils se sont trompés, quand ils ont attaqué l’Irak, ils se sont trompés, quand ils nous ont imposé des sanctions ils se sont trompés. »« Ils se sont trompés en Syrie et si vous connaissez un seul exemple où ils ont agi sans se tromper, dites-le moi. »
« La réunion en Arabie saoudite (avec M. Trump et des chefs d’Etat sunnites, NDLR) était un show qui n’a aucune valeur politique, ni concrète, l’Arabie saoudite a déjà organisé de tels shows par le passé »…Un show au cours duquel le président américain a signé des contrats pour un montant faramineux de 380 milliards de dollars (dont 110 milliards consacrés à l’armement). « Ceux qui ont lutté contre les terroristes sont les peuples irakien, syrien. Les conseillers militaires iraniens les ont aidés (…) et vont continuer à le faire », a encore affirmé M. Rohani, qui a également défendu le Hezbollah. « Ceux qui ont soutenu les terroristes ne peuvent pas les combattre ». « Je ne pense pas , a-t-il ajouté, faisant allusion aux auteurs saoudiens de cet attentat, « que le peuple américain oubliera le sang versé le 11 Septembre (2001) ». « Sachez que lorsque nous aurons besoin techniquement de faire des tests de missiles nous le ferons et nous ne demanderons la permission à personne. Nos missiles sont pour notre défense et pour la paix, ils ne sont pas (faits) pour agresser. »
Bruno Gollnisch l’a souvent rappelé, c’est « l’Europe qui a vendu cette technologie nucléaire à l’Iran » et si « la communauté internationale doit être vigilante, son désir de ne pas voir s’étendre les capacités nucléaires dans le monde, devrait pour le moins s’accompagner d’une réduction des armements nucléaires des pays qui en disposent. Mais il y a des principes qu’on ne peut pas transgresser, l’indépendance des pays membres des Nations Unies en est un. Au nom de quels principes justement peut-on interdire à certains Etats de faire des recherches nucléaires, même en les supposant à vocation militaire, alors qu’on n’interdit pas à d’autres de les faire ? C’est le cas d’autres nations asiatiques que l’Iran comme Israël, l’Inde, le Pakistan ou la Chine… ».
« Quant aux formes d’islamisme les plus radicales et les plus hostiles, elles viennent chez nous d’autres pays que l’Iran » et ce sont les fous d’Allah, qui considèrent également les chiites comme des mécréants à soumettre ou à exterminer, qui ont frappé les populations européennes ces dernières années.
Enfin, on peut comme l’avait déclaré Emmanuel Todd être attaché à la paix, à l’émergence d’un Etat palestinien viable, souverain et à la sécurité d’Israël, tout en notant que la France, l’Europe «( n’ont) pas les mêmes intérêts objectifs que les Etats-Unis » et qu’il serait légitime d’établir avec l’Iran », une nouvelle puissance émergente qui pourrait être « un facteur de stabilité extraordinaire pour le Moyen-Orient », « un partenariat stratégique » du même genre que celui qu’il seraient loisible d’établir avec la Russie . Une éventualité rejetée par Washington, « qui cherche à nous entraîner dans un conflit avec l’Iran », de la même façon que les Américains tentent « d’annihiler la puissance russe ».
Last but not least, nous souscrivons aux inquiétudes exprimées il y a déjà cinq ans, le 8 mars 2012, dans Le Point par Pierre Beylau, soulignant les graves conséquences d’une attaque militaire israélienne, dite « préventive », sur l’Iran pour l’ empêcher de mener à bien son programme nucléaire. « Un bombardement de l’Iran déclencherait une onde de choc incontrôlable : probable blocage du détroit d’Ormuz (avec envolée des cours du brut), embrasement des fronts Hezbollah libanais et Hamas palestinien. Une telle initiative, de l’avis des experts, ne résoudrait rien. Elle ne ferait, au mieux, que retarder le programme iranien. Tout en confortant Téhéran dans l’idée que seule la détention de l’arme nucléaire permettrait de sanctuariser le territoire iranien. C’était déjà l’idée du Shah ». Autant dire qu’une France (idéalement libre et souveraine) devra se garder de tout bellicisme intempestif.
https://gollnisch.com/2017/05/23/iran-savoir-raison-garder/