Sous l'influence de Vico, la vision du théologien inspiré par Bossuet s'appuie sur une analyse précise des lois historiques, des arcanes des peuples et des civilisations. Vico s'interroge sur les origines de l'inégalité et pose les fondements d'une lutte des classes. La religion, la pratique des mariages solennels et l'ensevelissement des morts constituent le patrimoine spirituel d'où naît la civilisation et permettent de distinguer les héros marqués du sceau divin des bestioni, les vagabonds qui n'ont point accès aux mystères. L'histoire ne sera plus que l'effort tenté par les plébéiens pour accéder aux actes de la vie religieuse et se voir reconnaître une nature humaine. Les sociétés, selon Vico, reflètent les « modifications de l'esprit humain », la prépondérance d'une fonction sur les autres : la fonction « poétique » ou inventive, la fonction organisatrice et agissante, enfin la rationalisation et l'esprit critique. Chaque fonction s'incarne dans une classe, et chaque classe dans une élite. Ainsi les anciennes élites sont-elles successivement remplacées par de nouvelles (cf. la théorie de Vilfredo Pareto sur la « circulation des élites »). Mais le remplacement d'une élite par une autre provoque des ébranlements, la ruine progressive des traditions, et l'individualisme anarchique précipite la ruine des sociétés.
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