Comment son jeune ministre qui a construit tout son profil en décalage par rapport à lui, en pointant les erreurs de son prédécesseur, notamment par rapport aux foules de la Manif pour tous (LMPT) de 2013 dont, disait-il, il n’avait pas aimé « l’humiliation » que Hollande leur avait infligée, comment Emmanuel Macron a-t-il pu remonter dans pareille galère ?
Pourtant, les signaux d’alerte – pour employer une expression décidément à la mode – étaient nombreux : mobilisation lors des états généraux de bioéthique, mise en garde de l’Académie de médecine, voix discordantes dans la majorité.
Sans compter l’annus horribilis des manifestations gilets jaunes. Et la réforme des retraites, délicate, à mener.
Tout cela aurait dû conduire le Président et le gouvernement à renoncer à ce projet, en juin.
Les réponses des états généraux et l’engagement du Président de ne légiférer que s’il y avait consensus leur fournissaient d’ailleurs une noble porte de sortie et pouvaient leur faire espérer un regain de popularité dans certains secteurs de l’opinion.
Désormais, avec le succès incontestable de la mobilisation de dimanche, Emmanuel Macron s’est attaché, pour toute l’année qui vient, le boulet LMPT au pied : quelle erreur… Les organisateurs, forts de cet acte I réussi, ont donné rendez-vous à leurs troupes, qui ont des réserves, pour cinq autres manifestations, la prochaine étant fixée au 1er décembre prochain.
Quel cauchemar pour Emmanuel Macron… Pour un Président et un gouvernement affaiblis après la crise des gilets jaunes, c’est une très mauvaise nouvelle.
Ils ont délibérément ouvert un nouveau front social, après les hôpitaux, les policiers, les paysans. Emmanuel Macron prend ainsi le risque de suivre à la lettre le chemin de François Hollande, de perdre ainsi le reliquat d’aura qui l’en distinguait.
En termes d’image, c’est potentiellement ravageur.
Même s’il parvient, comme en 2013, à faire voter sa loi, le conflit laissera des traces. Et nous savons tous que François Hollande ne se remit jamais politiquement de cette mobilisation LMPT.
La présidente de LMPT ne s’y est pas trompée dans son discours d’hier : « Cette manifestation, c’est un avertissement au gouvernement. Ouvrira-t-il le dialogue ou restera-t-il, comme Hollande en 2012, dans le mépris ? »
L’alternative est posée, et la tenaille de la hollandisation est en train de se refermer sur un Emmanuel Macron qui a vraiment manqué de sens stratégique en s’entêtant avec cette loi de bioéthique et cette PMA sans père.
Mais, pour Emmanuel Macron, la hollandisation est également montée d’un cran, ce week-end, avec l’attaque islamiste de la préfecture de police de Paris et la gestion calamiteuse de toute l’affaire par Christophe Castaner.
Hollande était mort politiquement, dès 2013, des coups reçus de LMPT puis, en 2015, malgré la com’ déployée, des massacres islamistes de Charlie et du Bataclan. Le manque de réaction forte de l’exécutif après cette attaque historique donne aux Français la même impression d’un pouvoir dépassé et impuissant.
Pascal Célérier
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