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culture et histoire - Page 1527

  • Quand les Celtes mesuraient le temps

    Le calendrier celtique remonte à des époques extrêmement éloignées. Il était transmis de bouche à oreille.

    Les Druides furent les gardiens jaloux du calcul traditionnel des jours, des mois, des années et de l'évolution des saisons.

    De la façon dont les Celtes subdivisaient l'année et les saisons, il ne nous reste plus que de rares indications, souvent peu objectives, qui nous viennent d'auteurs latins comme César ou Pline. Mais nous disposons aussi de quelques témoignages directs, très intéressants. Beaucoup d'encre a coulé après la découverte de fragments de calendriers gallo-romains en 1807 près du lac d'Antre, dans le Jura français et, en 1897, à Coligny, dans l'Ain. L'étude approfondie de ces restes nous révèle que le calendrier celtique remonte, pour ce qui est de son élaboration, à des époques extrêmement éloignées et, pendant des siècles, il a été transmis de génération en génération, exclusivement sous forme orale. C'est ainsi que le calcul des jours, des mois et des années, la cadence des fêtes au cours de l'année et le cycle des saisons, constituent une partie importante du vaste patrimoine des traditions celtiques, jalousement gardé par les Druides, ces prêtres qui étaient en quelque sorte les dépositaires de la sagesse dans le monde celtique. Les Druides étaient les seuls à connaître les vertus des plantes, à utiliser l'alphabet, à maîtriser les forces de la nature et à prévoir le cours d'événements et phénomènes naturels.

    La doctrine numérique de Pythagore

    D'après d'anciennes sources, les Druides étaient aussi des philosophes et ils connaissaient la doctrine numérique de Pythagore: c'est la preuve qu'ils possédaient un niveau de culture raffiné et qu'ils savaient accepter les apports culturels d'autres civilisations sans dénaturer la leur. Il semblerait que ce soient bien les Druides qui aient inventé le calendrier des Celtes et gardé ses secrets pendant des siècles. Selon les chercheurs, il est possible de distinguer deux phases d'élaboration du calendrier celtique: une très ancienne phase, puis une autre, plus récente et plus complexe, laissant transparaître l'influence d'autres civilisations, surtout latine et grecque. La phase la plus ancienne de l'élaboration de ce calendrier est aussi la moins connue.

    Grâce à des études très poussées en archéo-astronomie, il a été possible de faire remonter ses origines à l'Age du Bronze. Ce genre de calendrier était établi d'après le lever du soleil, sur cette base, les dates les plus importantes de l'année étaient les solstices et les équinoxes. Ce fait a amené certains chercheurs à en conclure que déjà à l'Age du Bronze l'année était divisée d'après le nombre de jours pendant lesquels le soleil se trouvait en déclinaison +16° ou -16°. Puisque cela se vérifie aux alentours du 2 février (-16°), du 5 mai (+16°), du 6 août (+16°) et du 2 novembre (-16°) ces quatre jours devinrent les points de repère de l'année et on leur associait les fêtes principales qui marquaient ainsi les changements des saisons. Les fêtes, liées à des cultes et à des rites ancestraux avec la Terre et les éléments naturels, furent plus tard christianisées par l'Eglise Catholique qui entendait ainsi déraciner à tout prix le paganisme et l'héritage du monde celtique. Elles furent modifiées dans leur nom et leur signification, mais malgré ces changements, elles sont encore aujourd'hui bien vivantes, témoignage d'un lien plus étroit que jamais, et tout à redécouvrir, entre notre culture et celle de nos ancêtres celtiques.

    Imbolc et Beltaine, Lughnasad et Samain

    La fête de Imbolc était célébrée le 2 février ; celle dédiée au dieu de la lumière se tenait le 5 mai. Le 2 février on célébrait la fête de Imbolc, fête qui a survécu jusqu'à nos jours et qui est plus connue sous le nom de "Chandeleur". Quant à la fête de Beltaine, elle était célébrée le 5 mai et était dédiée à Bel, le dieu celtique de la lumière. Parfois elle était aussi appelée Cetsamain, qui signifie "début de la chasse". Comme cette date désignait l'apogée du printemps, c'était la fête de la liesse et de la musique : les jeunes dansaient et chantaient autour de l'arbre sacré en tapissant le sol de fleurs pendant que dans les champs on allumait des feux. Plus tard la date du 5 mai fut déplacée au 1 mai ; en Italie, elle est toujours célébrée sous le nom de Calendimaggio (Calendes de mai).

    Le 6 août c'était la fête de Lammas, appelée aussi Lughmasa ou Lugnasad dans la tradition britannique; en Italie, cette fête correspond au 15 août et est connue sous le nom de Ferragosto. Enfin, Samain, qui inaugurait le long hiver celtique. Elle tombait le 2 novembre, était dédiée au culte du feu et entretenait des liens très étroits avec le culte des morts. Peut-être l'Eglise catholique choisit-elle le 2 novembre pour la commémoration des morts justement à cause de cette tradition ancestrale, dans le but évident d'éteindre tout souvenir du paganisme, en lui procurant une nouvelle signification, toute chrétienne.

    Le Calendrier de Coligny

    Les meilleures informations directes sur le calendrier celtique sont connues grâce à une table en bronze découverte à Coligny et qui date de la fin du IIième siècle après Jésus-Christ. La table, dont ne subsistent aujourd'hui que des fragments, fut gravée par les Druides pour préserver leurs connaissances astronomiques et leurs traditions du danger que la conquête romaine de la Gaule représentait, en quelque sorte pour que ces connaissances ne soient pas perdues à jamais. Ce calendrier témoigne d'une connaissance avancée des normes qui régissent les mouvements des astres et prouve que les Celtes, contrairement à ce qu'affirment péremptoirement les panégyristes de la culture latine, maîtrisaient des notions astronomiques et mathématiques fort avancées.

    Le calendrier de Coligny est un calendrier lunaire qui s'étale sur une période de 5 ans, totalisant 62 mois; 5 mois comptaient 29 jours et 7 mois en comptaient 30, pour un total de 355 jours. La non correspondance avec l'année normale de 365 jours était corrigée en insérant, au long du cycle de 5 ans, deux fois un mois supplémentaire de 30 jours: une fois au début de la première année et une deuxième fois au milieu de la troisième année. Dans le calendrier de Coligny les 62 mois du cycle sont disposés en 16 colonnes comprenant chacune trois ou quatre mois. Les mois sont numérotés de 1 à 12, pendant que les jours de chaque mois sont subdivisés en quinzaines et précédés par des abrégés qui en indiquent la nature: D (jour), MB (bonne journée), AMB (mauvaise journée). Devant chaque jour il y avait un trou dans lequel on plantait un petit bout de bois pour signaler le jour en cours. Au début du mois apparaissait le nom du mois suivi par le terme MAT(U), complet, pour les mois de 30 jours, ou le terme ANM(ATU), incomplet, pour les autres mois.

    Les prêtres connaissaient la doctrine numérique de Pythagore. Une journée était calculée, comme le font encore aujourd'hui les Juifs et les Musulmans, de coucher de soleil à coucher de soleil. Le mois débutait à la pleine lune. Les noms des mois et leur position reflètent le lien profond des Celtes avec la Terre et les saisons agricoles. L'année commençait au mois de Samonios (chute des semis qui correspondait à octobre/novembre), c'est-à-dire quand, à l'arrivée de l'automne, les noix et leurs coquilles tombent des arbres.

    Le cycle celtique des mois

    Suivaient, dans l'ordre: Dumannios (les plus sombres profondeurs, novembre/décembre), Riuros (temps froid, décembre/janvier), Anagantinos (temps de rester à la maison, littéralement: incapable de sortir, janvier/février), Ogronios (temps de la glace, février/mars), Cutios (temps des vents, mars/avril). A la fin du premier semestre, tous les 5 semestres, on intercalait un mois supplémentaire appelé Mid Samonios. Avec Giamonios (exposition des bourgeons, avril/ mai) commençait le deuxième semestre suivi par Simivisonios (temps de la lumière, mai/juin, quand le soleil est à son zénith), Equos (temps des chevaux, juin/juillet, idéal pour les voyages), Elembivos (temps des réclamations, juillet/août quand, à l'occasion des foires, on fêtait les mariages et on présentait les cas à débattre devant les juges), Edrinios (temps d'arbitrages, août/septembre, quand on tranchait les litiges) et Cantlos (temps des chants, septembre/octobre, quand les poètes s'installaient dans les villages pour y passer l'hiver).

    Outre les tables de Coligny et du Lac d'Antre, il y a plus de trente ans, en 1967, ont été retrouvés d'autres fragments d'un calendrier celtique dans le sanctuaire de Villards d'Héria. Tout ce matériel constitue la preuve irréfutable de l'importance que les Celtes attachaient à la subdivision de l'année et à leur rapport, franc et direct, avec les saisons et les éléments de la nature dont dépendait la vie de leur civilisation. Les fêtes que nous célébrons aujourd'hui, les noms de nos territoires et de nos villes et la langue que nous parlons révèlent des matrices celtiques certaines. Et malgré les millénaires d'histoire et les différentes dominations, chacune apportant sa propre culture, notre lien avec la civilisation celtique reste extrêmement vivant et irréfutable. Aujourd'hui plus que jamais.

    Elena PERCIVALDI.

    (article issu de La Padania, Milan; trad. Franç.: LD)

    Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1998

    http://vouloir.hautetfort.com/archive/2014/06/09/celtes-temps.html

  • Prêtres et guerriers

    « En vérité le combat où nous sommes engagés se joue toujours plus clairement entre les puissances de la vie et celles de la mort. Les preux s’y tiennent épaule contre épaule, comme les chevaliers des temps jadis. » Ernst Jünger

    Car il est temps de surgir de la boue pour s’engager vers de nouvelles aurores. J’ai donc choisi de reconnaître la symbolique si vivante au cœur de laquelle prêtres et guerriers s’appellent et se répondent dans une conspiration sacerdotale. Mais comme la génération est jeune ! Les îles du symbolisme, d’abord qu’on ne les effleurera qu’au large du siècle, ne se livreront an regard que sur les cartes marines des belles maturités. La jeunesse littéraire du siècle semble ne jamais naviguer que dans les eaux territoriales des influences légères et éphémères. Chris-crafthors-bord s’y brûlent la politesse négligemment. Choisir avant tout, selon la moralité des nécessités impérieuses, l’austérité d’une voilure pleine de vent, les solitudes exigeantes de la haute mer. Pourquoi le plus vif, comme le plus doux de l’existence ne s’écriraient-ils pas selon ce seul regard, au détachement suffisamment joyeux pour demeurer toujours tragique !

    Cher Alain de Benoist, c’est en songeant à notre belle conversation sur les dangers de nos solitudes, au sein de la lumière enténébrée de tout engagement comme au cœur des ténèbres illuminées de tout isolement, que je réponds à votre désir d’évoquer ici Ernst Jünger. Aux hommes qui ont choisi de ne point ironiser sous l’influence lugubre d’un nihilisme désormais planétaire, nulle alternative : nous devons aux civilisations que nous portons en nos mémoires et en nos quêtes l’élan le plus ardent hors des tranchées, dans la solitude la plus lumineuse. Mille poètes-guerriers, depuis les origines, plumes, pinceaux, burins pour seules armes d’attaque, tentent de s’acharner sur ces rivages insensés de la Beauté pour prendre l’île d’assaut. Mais pour quel au-delà d’interrogations ? Pour que survivent l’écriture, et toute conduite artistique inspirée, il faut que se lèvent les drapeaux noirs des grandes méditations. Ces passions qui forgent nos rêves, dans la nostalgie d’hier et le salut de demain, devraient ainsi suivre les voies alchimiques de la transmutation du FEU en LUMIÈRE.

    Guerriers et prêtres, telles sont les dernières figures qui s’imposent. Le long de la Colline du Retour, là où brûlent, sous les torches des preux, toute conduite et toute écriture mondaines, l’humanité bernanosienne ne cesse de répondre — selon ce rythme immense et inachevé des chants de grande profondeur — à l’honneur jüngerien. Quatre-vingt dix ans, marcheur solitaire dans les bois enneigés de Wilflingen, guerrier adolescent et prêtre argenté au milieu des ruines, c’est ainsi que j’ai saisi, l’hiver dernier, la lumière aurorale dans quoi se lève le beau visage d’Ernst Jünger — et de son écriture. À partir d’une méditation sur Jünger, en écho s’impose Bernanos. D’une rive à l’autre, il nous appartient de faire passer au travers des mentalités mondaines les cinquantes pages du manuscrit de l’hôtel Majestic comme les pauvres cahiers d’écolier de la papeterie de Pirapora : Les enfants humiliés, prière des pauvres, inaccessible aux nantis. Rien, à jamais, ne sera donc séparé. Aux fronts insurrectionnels qu’ouvre Jünger, dans la mémoire guerrière de son œuvre, répondent les autels qu’élève Bernanos, l’exilé. Mais aussi, les royaumes de l’un appartiennent à l’autre. À n’importe quel prix, l’écriture doit demeurer. Jünger, Bernanos, dans nos veilles les plus ardentes, nous apprennent à ne rien craindre.

    La création a le visage des brûlures joyeuses

    Si Jünger, selon une compréhension ultime de l’écriture, écrit La Paix par l’expérience de La guerre, notre mère, procédant ainsi à la transmutation du feu en lumière, il semble qu’en Bernanos se soient retrouvées toutes les humilités insolentes d’une prêtrise authentique, soulignant ainsi l’élan insurrectionnel de la prière. Car rien, à jamais, ne sera séparé. En ces temps de la fin, l’homme d’écriture n’a qu’un repaire : en ce lieu d’écartèlement entre les puissances insurrectionnelles du guerrier et les pouvoirs spirituels du prêtre, dans une CONSPIRATION SACERDOTALE face au nihilisme de la chute. Oui, en vérité, tout se crée à flanc de coteaux, dans les forêts sombres de l’épreuve, là où Nietzsche-Zarathoustra conseille, non pas le travail, mais la lutte, non pas la paix, mais la victoire ; là où la sérénité de la création a le visage des brûlures joyeuses.

    Cependant, en tout instant et en tout lieu, la mort, par excès de mondanité. Ce que je sais, c’est qu’aux ambitions du visible s’opposera toujours l’accomplissement de l’invisible. Nul régime ne tordra le cou à cette loi universelle, à cette certitude christologique. Pour faciliter avant tout l’émergence des moralités intérieures dans les mondes artificiels du visible, la démocratie porte en elle sa propre mort par impuissance existentielle. Les moralités intérieures : l’Être porte en lui sa propre désespérance, et le reste, sa chute, ses élévations. Feu et lumière, en ce siècle de nuit, voilà l’essentiel de ce qui nous torture et indéfiniment nous embrase. Que le feu de nos fascinations appartiennent à l’Âme, aux passions émotionnelles qu’elle avive en toute blessure intime, et que la pauvre lumière de nos méditations procède de l’Esprit, des pouvoirs rigoureux d’élévation dont il est l’éternel dépositaire, telle est la seule dynamique existentielle qui doit nous faire traverser les obscurantismes des temps devenus, en tout domaine, TOTALITAIRES.

    D’une main à l’autre, au cœur des forêts occultes, les rebelles aux traits émaciés se passent les torches : petit-fils spirituel de Morand et prince comploteur de l’Europe Galante, Michel Bulteau, dans sa livraison de printemps de ses Maximes indéfendables, fonde à son tour son écriture sur une méditation jüngérienne : « Le feu, écrit-il, sépare les chemins de terre et d’eau. Avec ses mains bleues et vertes il repousse les livres qui tombent comme des larmes ». Car telle est la perversité du feu, quand une écriture de haute méditation devrait régner comme source vivante de toute lumière, inlassablement et dramatiquement rejetée au profit des effervescences tumultueuses de la matière et du sang. 1914, dernière guerre de sang ; 1939, guerre de matière, et ce doit être enfin la montée européenne d’une subversion pro-gaullienne qui régénérera le mythe du combat en lutte spirituelle.

    Soit. Mais nul aveuglement : l’honneur demeure dans la boue, dans le sang et dans le feu des tranchées. Qu’on ne cherche pas, pour reprendre Bernanos, la perversité du feu en ces fronts de l’Avant même si à tout moment la tragédie les couvre de son manteau de soie noire. Moins que les ténèbres du feu, qui peuvent encore porter en elles leur propre illumination intérieure de courage et d’honneur — en un mot : d’élévation —, ce sont ces ferveurs souterraines de l’Âme, ces impulsions sourdes des peuples, qui nous guident, fiévreusement, à toute extrémité totalitaire QUELLE QU’ELLE SOIT ET DANS N’IMPORTE QUEL BUT.

    La transmutation du feu en lumière

    Le fascisme mussolinien, l’Allemagne hitlérienne, le néo-surréalisme éclaté de Mai, jusqu’en ses prolongements d’aujourd’hui si habilement récupérés, ne furent ainsi jamais touchés par la grâce de la lumière. Car une telle écriture des destins est si solitaire ! Il semble que les flammes bleues et vertes des conflits armés brûlèrent jusqu’à Yalta — et leurs braises, quoi qu’on en dise, n’en finissent pas de couver en nos demeures intérieures dévastées, en nos âmes torturées par toutes les passions dignes des jeunes hommes bien élevés.

    De ces rivages, si vite la proie de tous les désastres intimes, et politiques, sont toujours chassées l’ordonnance rigoureuse de l’Esprit, la lumière par quelques preux extirpée du feu à pleines mains, par les mains pleines de l’écriture — comme le furent, du monde, les fulgurances du Christ. En ces nuits de Walpurgis, en ces temps et en ces lieux de ténèbres, plus que jamais la moralité des nécessités impérieuses exigerait qu’on se retire dans les forêts jüngeriennes de la Paix, aux confins des profonds silences et des solitudes immenses, pour y deviner enfin la symbolique de la transmutation du feu en lumière.

    La stricte ordonnance du règne de la douleur

    Il y va des seules finalités rédemptionnelles qui nous importent. De la même façon qu’en 1940, Georges Bernanos écrivait : « Nous n’avons certainement pas raté la guerre, on ne rate jamais la guerre, il n’y a que le premier pas qui coûte, le premier et le dernier, mais nous avons totalement raté la rédemption de la guerre ». Écrire, et lire, cette transmutation rédemptionnelle, bien sûr, ne procèdent que d’une faiblesse : « Pour accomplir le nécessaire, écrit Jünger, il nous faut l’expérience ». Or nous, nous sommes une génération littéraire dépourvue de passé ! Seuls nos aînés les plus proches, parmi les plus bouleversants, qui vivent en nous d’une terrible intensité, ont serré contre leur poitrine ensanglantée le plus cruel de l’existence dont l’expérience, en ces arrière-saisons de paix morte, de paix pacifiste, tant nous fait défaut.

    Errant dans leurs propres ténèbres, les jeunes écrivains d’une Europe apocryphe croiront longtemps qu’ils ne seront jamais que des héritiers. Car, encore une fois, à l’orée de toute vie intérieure : la mort, dans une vaste massification de toutes les médiocrités armées. Il faut toujours se souvenir que les premiers loups que le poète pose en travers de son regard sont ceux de la dérision : vingt ans dans ces villégiatures du désespoir, quand s’élève l’incantation voluptueuse d’un dandysme existentiel vers les sortilèges des salons ruinés, et la décadence, toute séduction impudiquement offerte sur la couche du cynisme, déjà.

    L’immaturité philosophique de n’importe quel jeune auteur de droite consiste à barboter en ces adolescences de feu. Après tout, ce n’est jamais qu’un moindre mal. Car il faut toujours se souvenir que l’homme d’écriture, celui qui s’éventre sur les pieux de l’authenticité, arrache un à un les masques qui ornent le beau visage de la douleur. Or, « le règne de la douleur, écrit Jünger, est d’une stricte ordonnance, et l’homme descend pas à pas ses rangs, ses limbes et ses degrés. C’est alors qu’il retourne aux frontières de la vie ; et comme les sources débouchent dans les lacs et puis dans les mers, les souffrances se rassemblent dans des vases profonds dont les lignes s’épurent. De même qu’il existe une conscience pour les pensées, les souffrances prennent des formes qui, se fondant dans une entité supérieure, leur donnent un sens profond ».

    Le rôle princier du passeur clandestin

    Sans doute est-ce ainsi, selon l’ordonnance de la douleur, au creux des vases profonds où toute lumière se recueille — comme jadis, au creux du théâtre grec, se fermentait la tragédie antique — que nous-mêmes demeurons fidèles à la tragédie de ces aînés que nous affectionnons — et en ce sens fidèles à la dialectique de l’écriture qui veut que l’on forge la beauté de demain avec la boue et le sang d’hier. L’essentiel des destins d’aujourd’hui, c’est que nous franchissions les torrents de guerre : surgir du feu, franchir la ligne, accéder aux nouvelles rives, à ces lieux d’ultimité et de plus haute maturité où se féconde toute méditation un tant soit peu sérieuse sur le devenir de l’Être. Jünger, entre autres, a le rôle princier du passeur clandestin.

    Soit. Mais l’homme d’écriture, prêtre et guerrier tout ensemble, brûle le temps de son existence et de son écriture à l’endroit de crucifixion de cette déchirure, entre les deux pôles écartelés de la prière et de l’insurrection. Car, en vérité, si l’écriture doit devenir prière et si nous-mêmes devons accéder aux plus hautes méditations de la prêtrise, en vérité on ne saurait définir la prière de l’écriture autrement qu’insurrectionnelle — au sens où Bernanos, en ses cloîtres, l’élevait — ni appréhender l’insurrection au dehors de son foyer spirituel. Le feu de toute rébellion ne nourrit-il point la lumière de quelque pauvre méditation, de la même façon, note Jünger, que « le salut naît de la souffrance ».

    Saisir la symbolique présente du guerrier pour qu’elle devienne le ferment de tout recueillement spirituel, et métapolitique, ce n’est pas approuver la guerre ; ce n’est pas non plus en attiser la braise encore brûlante, c’est, beaucoup plus humainement, selon le mot de Witold Gombrowicz — « par-dessus tout, l’humain rencontrera un jour l’humain » — croire à la transsubstantiation des valeurs. Ernst Jünger, en 1943, écrit encore : « Ce n’est donc point un hasard si ce monde est de feu : nous vivons dans le creuset de la forge et dans les affres de l’enfantement ».

    L’Europe dans le creuset de la forge occidentale

    Une seule fécondation : l’Europe, dans le creuset de la forge occidentale désignée comme Empire de la Troisième Voie, de la Troisième Voie d’accomplissement spirituel entre le pouvoir glacé de l’Esprit de l’Est et les puissances émotionnelles de l’Âme de l’Ouest. Le reste, l’homme d’écriture — l’homme de la plus haute mémoire — S’EN FOUT. Versailles, Galerie des Glaces, 1919, et les utopies genevoises. On ne saurait rire, rétrospectivement, de l’étroitesse du petit politique, autrement qu’étranglé de sarcasmes. Sanglots et sacrifices, ratifiés sur des traités de théorie, construction de papier, égorgés en plein vol d’élévation. Quand il eût fallu conclure des alliances entre mystique et politique, sacrifices et sanglots achevèrent leur chute dans les corbeilles à papier des fonctionnaires de la S.D.N.

    La Paix, à son tour, manifeste subversif d’un dénouement spirituel du second conflit, circulera sous le manteau, tandis que les Enfants humiliés, traîné par Bruckberger jusqu’au front de Sarre, disparaîtra au cours de la retraite. Ainsi, la construction de l’Europe, à chaud, par quelque voie spirituelle que ce soit, nie-t-elle toujours la création de l’Europe. Versailles ne servit jamais qu’à souligner plus cruellement les discordes nationalistes tandis que Genève, lieu de finition extrême des évolutions rationalistes, s’attachait minutieusement à une besogne d’assureur-conseil. Un quart de siècle plus tard, dans les salons de l’hôtel Majestic, tout était écrit, en un manuscrit de cinquante feuillets, expédié à Rommel par Speidel, à couvert de la plus grande discrétion, pour ce qui concernait enfin une Europe salvatrice, une Europe spirituelle capable des hautes transsubstantiations nécessaires, avec pour fruit de guerre une Pax Europa.

    Rommel le lut, et dit : « Sur de telles bases, nous pourrions travailler dans l’avenir ». Et Jünger, aujourd’hui, d’ajouter : « J’esquissais l’image d’une Europe qui ne pouvait se réaliser que par l’accord des peuples libres, et qui devait définir un nouvel ordre, c’est-à-dire des formes d’existence pour le Travailleur (1), héros du monde moderne. Je dois dire que de cette Europe, on s’éloigne tous les jours davantage. Qu’est-ce que cette nébuleuse de Bruxelles et de Strasbourg, où l’on ne parle que de lait, de vin, et de pommes de terre ? Une dérision ! »

    Mitrailler à vue les ambassades des Ténèbres

    Cette Pax Europa, de nos songes immémoriaux, demeure cependant un cercueil d’explosifs au travers de la passe : USA, URSS s’emploient à les déminer, anges noirs, diables rouges officient activement au culte du matérialiste nihiliste, au culte du nihilisme matérialiste. Quand le tombereau d’ordures, d’obscurantisme et d’ignorance, que nous autres, au cœur de la plus grande mémoire universelle, y déversons allègrement couvre à chaque instant cette œuvre de sape. Qu’on ne s’étonne pas, ainsi, que l’homme d’écriture, surgissant des tranchées, reprenne pour son compte la symbolique du guerrier, et mitraille à vue les ambassades des Ténèbres.

    « Chaque homme est une lumière, écrivait Jünger, et chaque lumière qui s’allume est une défaite des ténèbres. Il suffit d’une bougie pour disperser tant d’ombre ». Certes, en nos ferveurs insurrectionnelles, il nous plaît de bander l’arc de notre écriture pour flécher toute imposture et tout artifice. La souveraineté de l’aventure est aussi inscrite en nos jeunesses, toutes insolences au vent. L’aurore nous appelle à des tâches de feu. Mais quand s’apaise la flamme, que s’élèvent les silences crépusculaires, c’est au bord des falaises que nous songeons à nos pauvres mots qui ne sont jamais que bougies égarées.

    ► Grégoire Dubreuil, éléments n°57-58, 1986.

    ◘ sur l'auteur (1956-2007) : fils des écrivains Jean-Louis & Brigitte Dubreuil, critique littéraire (il relança la revue Matulu), romancier : Un certain bonheur (sous le pseud. de Hugues Montseugny), La jeunesse est lente à mourir (Table ronde, 1984, prix Vitet) ; essayiste : Au large du siècle (Table ronde, 1984).

        1. Pour ce qui concerne la figure du "Travailleur", dans La Paix : « La paix sera gagnée lorsque les forces consacrées à la mobilisation totale seront libérées pour des fins créatrices. Alors s’achèvera l’ère héroïque du Travailleur, qui fut aussi son âge révolutionnaire. Le torrent impétueux s’est creusé !e lit où il deviendra paisible. En même temps le Travailleur, abandonnant son esprit titanesque, se révélera sous de nouveaux aspects, et l’on apercevra son rapport à !a tradition, à la création, au bonheur, à la religion ».

    http://vouloir.hautetfort.com/archive/2014/06/20/bernanos.html

  • La politique n'admet ni l'amateurisme ni le romantisme

    De Frédéric Pichon dans Présent :

    "« La politique est l’art de rendre possible ce qui est nécessaire. »

    Si cette phrase de Richelieu n’est pas “thomiste” elle n’en souligne pas moins l’urgence de deux impératifs :

    - La politique est un art.

    - La politique s’attache non pas aux fins dernières mais à la nécessité.

    La bonne volonté si elle est nécessaire n’est pas suffisante.L’amateurisme ou le romantisme en politique sont des écueils souvent rencontrés dans les milieux de droite. La politique est un art qui suppose une méthode, une connaissance du terrain ainsi que des forces en présence.

    Le Christ lui-même le rappelle : « Quel roi, s'il va faire la guerre à un autre roi, ne s'assied d'abord pour examiner s'il peut, avec dix mille hommes, marcher à la rencontre de celui qui vient l'attaquer avec vingt mille ? S'il ne le peut, tandis que cet autre roi est encore loin, il lui envoie une ambassade pour demander la paix. »

    La politique implique donc un rapport de force et envisage la possibilité de composer avec des personnes ne partageant pas l’intégralité de ses convictions.

    Force est de constater que beaucoup de catholiques dits intransigeants ne réalisent pas que nous vivons dans une époque profondément déchristianisée. S’il reste quelques vestiges culturels et même quelques valeurs chrétiennes sécularisées, l’argument d’autorité ne suffit plus. Les cœurs et les intelligences sont blessés et ce ne sont pas les arguments péremptoires qui feront changer les choses : au contraire.

    Par conséquent,si la politique peut être indirectement un instrument d’évangélisation pour les chrétiens, il ne s’agit pas de sa fin propre.

    La fin propre du politique est la recherche du bien commun. Dans une société profondément éclatée, il s’agit de retrouver ce qui contribue à la concorde des citoyens sans qu’aucuns, en particulier les plus faibles,  ne soient sacrifiés. Bien entendu, il ne s’agit pas de transiger avec la vérité mais pour que celle-ci soit audible, il faut du temps, de la persuasion et de la patience.

    Le rôle du Prince en politique n’est pas de jouer à l’infirmier mais d’éviter les malheurs publics. A l’Eglise, à la société civile, aux associations, aux familles d’assurer les bonnes œuvres et de panser les plaies des corps et des cœurs.

    Quand les catholiques de droite disent qu’il faut défendre les “valeurs”, ils ont tout à fait raison. Mais ils oublient deux choses : la première c’est d’être cohérents et exemplaires auprès de ceux qui souffrent et qui n’ont pas reçu autant qu’eux. Et de ne pas apparaître seulement comme les défenseurs d’un communautarisme en concurrence avec les autres, mais comme les véritables défenseurs de la cité. Car le communautarisme n’est pas seulement une plaie pour le bien commun, il est aussi, s’agissant des catholiques, un obstacle à une véritable évangélisation.

    L’ouvrier d’Hénin-Beaumont ou de Forbach ne fait peut-être pas de la lutte contre le “mariage pour tous” sa priorité, même s’il est fondamentalement contre car comme le disait Orwell, la “morale commune” (ou “common decency”) est plus répandue chez les classes populaires, qui sont plus saines que les élites. Mais il subit déjà les foudres de la mondialisation : délocalisation et immigration de masse. Et c’est sans doute là sa priorité.

    Jaurès lui-même le disait : « A ceux qui n’ont plus rien la Patrie est le seul bien. »

    Or, aujourd’hui, si elle est confrontée à un déclin d’ordre moral, culturel et spirituel, la France s’est vue dépouiller des attributs de sa souveraineté au profit de l’Union européenne et d’une oligarchie financière mondiale (qui va étendre ses pouvoirs avec le traité transatlantique) et de son identité par une immigration de masse encouragée par cette même oligarchie sans scrupule.

    De sorte que les impératifs liés au combat pour les valeurs ne peuvent être dissociés de la défense de la souveraineté de la France, de son identité nationale et de la justice sociale.

    Dans ce dosage, certains  trouveront qu’on n’accorde peut être pas suffisamment leur place aux valeurs. Il leur appartient de les porter sans arrogance et de faire fructifier le talent qu’ils ont reçu par leur baptême."

    Michel Janva

  • La Cristiada des Cristeros

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    Il s’en est fallu de peu pour qu’un long-métrage produit aux Etats-Unis n’ai pas été visible en France : c’est que le catholicisme y est à l’honneur, à travers l’épopée extraordinaire des cristeros. Seule ombre au tableau, le film laisse entendre que c’est pour « la liberté » en général ( ?) que luttaient ces héros, tandis qu’ils mouraient, en vérité, pour la liberté du catholicisme, et surtout pour le Christ-Roi. Mais voici un film qui mérite l’encouragement.

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    « Entre ciel et terre, entre lumière et obscurité, entre foi et péché, seul mon cœur repose, seuls Dieu et mon cœur reposent… » Ces mots s’inscrivent sur l’écran au tout début du film sur un fond de ciel avant que, lentement, la caméra descende du ciel à la terre, découvrant aux yeux du spectateur la place animée d’un village mexicain où la vie semble suivre calmement son cours. 

    Par cette ellipse cinématographique, le cinéaste Dean Wright – qui réalise ici son premier long-métrage après avoir signé la réalisation des effets visuels des deux trilogies cinématographiques à succès Le Seigneur des Anneaux (2001-2003) et Le Monde de Narnia (2005-2010) – choisit de placer tout son film sous le regard de Dieu et pour sa plus grande gloire. L’historien Jean Meyer écrit, à propos de l’histoire des cristeros, qu’il s’agit d’une « grande aventure mystique, sainte et noble ». Auteur de cinq ouvrages sur ce même sujet, son avis peut être considéré comme sérieux. C’est pourquoi, poser la question de savoir si les qualificatifs qu’il emploie peuvent s’appliquer, peu ou prou, au film de Dean Wright apparaît comme une manière intéressante d’aborder son analyse.

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  • Barrès reviens, ils sont devenus fous…

    Ces dernières années, le processus visant à éradiquer de notre mémoire collective les hommes politiques, écrivains, essayistes, scientifiques jugés  politiquement incorrect s’est accéléré. C’est vrai dans l’enseignement, le monde de l’édition, les médias bien sûr, mais aussi  dans les communes détenues par la gauche et/ou sous la pression de lobbies divers et variés, dans l’espace public par l’éradication de noms de rues, boulevards, places, écoles, bibliothèques, hôpitaux etc, donnés à des personnalités jugés hors des clous de la pensée unique, progressistepour faire court. Il fallait donc s’y attendre, à Cogolin (Var) le vœu du maire FN, Marc-Etienne Lansade, de dénommer un futur parking du nom de l’homme de lettre, député nationaliste et académicien  Maurice Barrès (1862-1923), a soulevé l’indignation de son opposition municipale, des partis et groupuscules de gauche et autres fraternelles humanistes.

     «Nous sommes en désaccord sur ce choix idéologique d’un membre de l’extrême droite » a ânonné un élu UMPS. Ce monsieur semble ignorer que le nom du lorrain Barrès, arabophile et islamophile comme beaucoup d’hommes de droite de son époque, écrivain apprécié deLéon Blum et dont Louis Aragon avait demandé la réhabilitation littéraire  dès la fin de la seconde guerre mondiale, est honoré notamment dans de grandes villes comme  Neuilly,  Paris,  Metz, Perpignan ou Nancy.

     En décembre 2009, au nom de la soumission au diktat idéologique exercé par certains lobbies, Nadine Morano, alors secrétaire d’Etat à la famille,  avait déjà  tenu à s’excuser publiquement  de tenir une réunion politique sur les terres de l’écrivain précisant qu’il ne s’agissait « pas de réhabiliter Maurice Barrès » !

     Nos bonnes âmes qui s’émeuvent du choix de la majorité municipale FN de Cogolin n’ont bien évidemment jamais protesté pour exiger que soit débaptisé, exemple parmi beaucoup d’autres, les rues portant le nom d’un traître antifrançais et d’un  déserteur comme Maurice Thorez.

     Que reproche-t-on à Barrès ? S’il s’agit de ce qu’il faut bien appeler son antisémitisme,l’honnêteté convient de rappeler que celui-ci fit  très largement place pendant la Grande guerre à  une volonté de fraternisation dans l’épreuve avec les juifs de France .  La fiche que lui consacre wikipedia le rappelle fort justement.  Dans son ouvrage Les familles spirituelles de la France (1917),   il rend hommage au patriotisme de nos compatriotes  juifs tombés au champ d’honneur -Amédé Rothstein, Roger Cahen, Robert Hertz, le rabbin Abraham Bloch« frappé à mort au moment où il tendait un crucifix à un soldat mourant »-,  Barrès « les place au côté des traditionalistes, des protestants et des socialistes comme un des quatre éléments du génie national ».

    L’antisémitisme athée, bien réel, de figures de la gauche comme  Voltaire, Auguste  Blanqui,  Jean Jaurès,  Pierre-Joseph Proudhon  pour ne rien dire de  Karl  Marx, n’empêche pas qu’ils soient toujours célébrés sur les plaques de nos rues.

     D’autres lui reprochent de ne pas s’être engagé en 14  (il avait alors plus de cinquante ans) l’affublant alors du cruel  surnom de « rossignol des cimetières ». Un épisode que rappelait le barrésien  Jean-Yves Le Gallou en mai dernier  sur le blog toujours actif du regretté Dominique Venner,  mettant en exergue les  éditoriaux patriotiques de Barrès dansLa Cocarde avec  la geste d’ « Émile Driant, député, qui avait 59 ans en 1914. Il s’est néanmoins engagé et est mort en héros à la tête de ses chasseurs, au bois des Caures, en retardant de manière décisive l’avance allemande sur Verdun ».Mais gageons que ce bémol là n’est pas celui mis en  avant  par les opposants à la mémoire de Barrès.

    Non, ce que l’on reproche à celui qui fut  surnommé le prince de la jeunesse c’est bien d’êtrele chantre de l’enracinement, de l’énergie nationale. Entendons  nous bien, il y a des aspects potentiellement  problématiques à la pensée barrésienne. En conviant au  dépassement du moi individuel  par le moi lié indissolublement à la nation, par le   culte dupaysage national, il appelle  de ses vœux un  nationalisme intransigeant,  exigeant  le retour des Français sur eux-mêmes,  le  rejet   des  influences étrangères.

     Nous le relevions sur ce même blog en 2010, le compatriote lorrain de Jeanne d’Arc,  mettait déjà en garde de manière prémonitoire contre les conséquences de l’afflux de populations inassimilables voulant « nous imposer leur façon de sentir ». Il rappelait aussi dans « Scènes et doctrine du nationalisme »que  « le nationalisme est acceptation d’un déterminisme » qui fait que « nos ancêtres pensent et parlent en nous. Toute la suite des descendants ne fait qu’un même être ». Bref qu’il n’y a pas de moi véritable sans le « support de la collectivité ».

     Cela peut aussi déboucher sur un nationalisme, il faut aussi en convenir, qui n’est pas celui du FN, soit un chauvinisme haineux, bêtement  raciste et antisémite, qui bouillonna dans ses écrits publiés lors de l’affaire Dreyfus ; quand bien même  il s’agit de les remettre  dans le contexte de la grande violence des affrontements littéraires et politiques de l’époque.

     Il faut aussi  se méfier des lectures historiques anachroniques, consistant  à faire dire au passé ce qui n’est perceptible qu’à la lumière d’enseignements postérieurs. Les travaux bien connus et étayés de l’historien israélien  Zeev Sternhell ont fait de Barrès, qui resta fidèle au régime républicain,  parlementaire assidu et respectueux qui  exécrait… le parlementarisme,  l’un des pères intellectuels du fascisme. Il est  rappelé  qu’il fut élu député pour la première fois en 1894 en se revendiquant d’un socialisme nationaliste, certains n’hésitant pas à  inverser les deux termes de l’étiquette…

     Pour notre part, au-delà de la puissance et des fulgurances de son œuvre littéraire,  nous retenons du Barrés politique les éléments intemporels qui parlent au cœur de tous les patriotes français, à savoir que notre identité nationale n’est en aucun cas réductible à   la seule idéologie des droits de l’homme, abstraite et désincarnée.

     Cette conception charnelle, enracinée de la nation et du devenir de notre peuple,  constateBruno Gollnisch, est bien en effet une des différences majeures de notre courant de pensée avec l’idéologie dominante. C’est bien parce que nous voulons rester nous-mêmes,  transmettre ce que nous avons reçu que nous sommes attaqués avec la virulence haineuse que l’on sait.  Etre et durer

    http://gollnisch.com/2014/07/11/barres-revient-devenus-fous/

  • Olivier Dard sur Charles Maurras

    Olivier Dard, professeur à l’université Paris-1 Sorbonne, est venu au Cercle Aristote nous présenter son Maurras.

    Avec lui nous retrouvons l’extraordinaire aventure de l’Action Française qui marqua le début du XX siècle. 

     
  • Parution : Nietzsche : cinq scenarios pour le futur

    Nietzsche prophète ? On l’a dit. Mais on a surtout trop souvent séparé la dimension prophétique du veilleur de Sils Maria de sa dimension de philosophe. C’est l’objet du livre de Philippe Granarolo, tiré d’une partie de sa thèse, travail à la fois érudit et d’une totale clarté. 

    Chateau

    Nietzsche était haruspice, à la manière des Etrusques. Il voyait dans les entrailles de notre monde les signes du monde de demain. La préoccupation essentielle de Nietzsche n’était pas la déploration, fut-ce de la disparition de la noblesse féodale, mais le « devinement » du futur. Dans les différents mouvements de sa pensée – positivisme, classicisme, puis dépassement des deux – Nietzsche ne remet jamais en cause ce qu’il a cru apercevoir, même s’il en conteste ensuite la valeur. Ainsi, il ne remet jamais en cause le projet de Wagner d’unir l’oreille et le regard, la musique et la scène, une nouveauté qui annonce le cinéma du XXe siècle.
    Dans la futurologie de Nietzsche, le plus important est l’idée que l’individu exceptionnel, singulier, échappe au politique. L’individu exceptionnel est ainsi, au-delà de l’actuel effacement du politique, susceptible d’échapper au nihilisme. Il vit « dans son propre système solaire ». Dans Humain trop humain, Nietzsche écrit en ce sens : « Il y a de grands avantages à se faire une bonne fois et dans une large mesure étranger à son temps, à se laisser flotter sur l'océan des conceptions passées du monde. De là, reportant ses regards vers la côte, on en embrassera, pour la première fois sans doute, la configuration d'ensemble, et on aura, au moment de s'en rapprocher, l'avantage de la comprendre mieux en totalité que ceux qui ne l'auront jamais quittée. »
    Philippe Granarolo, Nietzsche. Cinq scénarios pour le futur, L’encre marine-belles lettres, 158 pages, 21 euros.

    Philippe Granarolo présenté par Pierre Le Vigan

    Notes

    Philippe Granarolo a consacré à Nietzsche une thèse de Doctorat d’État ès-Lettres (« Le futur dans l’œuvre de Nietzsche ») soutenue en 1991. Il n’en avait publié jusqu’alors que la troisième partie ( L’individu éternel / L’expérience nietzschéenne de l’éternité, Vrin, 1993 ), L’auteur aime rappeler qu’il appartient à la première génération ayant eu le privilège d’avoir à sa disposition l’intégralité du corpus nietzschéen, ce qui rend possible une rigueur dans les analyses à laquelle ne pouvaient prétendre les commentateurs des générations précédentes.

    source : metamag :: lien

    http://www.voxnr.com/cc/dt_autres/EupuylAZuurTcLgpXs.shtml

  • Baccalauréat : le miracle de Calais ?

    Intéressons-nous à une candidate qui détient, peu ou prou, la moyenne record de cette année.   

    Près de 80 % des candidats au baccalauréat 2014 sont déjà reçus. Ce taux s’améliorera encore à l’issue des épreuves de rattrapage, mardi 8 juillet. Si les résultats baissent légèrement en baccalauréat général (-2,2%) ils sont en hausse importante pour les baccalauréats technologique (+7,4%) et professionnel (+4,9%). On se demande comment, avec un tel niveau de réussite pour ce qui est encore officiellement le premier diplôme universitaire, la France se classe si mal dans les évaluations internationales. Mais plutôt que d’ironiser sur des taux qui ne signifient plus grand chose, intéressons-nous à une candidate qui détient, peu ou prou, la moyenne record de cette année.

    Justine Subocz, élève au lycée Pierre de Coubertin de Calais (62) a obtenu une moyenne de 21/20 au baccalauréat S (scientifique). À ceux qui s’étonnent que l’on puisse avoir une moyenne supérieure à 20, précisons que c’est par le jeu des options que cela peut se faire. Les points supérieurs à la moyenne y sont des points bonus. Ceux qui ont plus de 20 de moyenne sont toujours d’excellents élèves, travailleurs et sérieux, qu’il faut féliciter et montrer en exemple.

    Cette moyenne n’est pas un record absolu. En 2013 Caroline Houriet avait eu son baccalauréat avec 21,18 de moyenne. Elle aussi venait du lycée Pierre de Coubertin de Calais. Et l’année d’avant Océane Evrard, toujours du lycée Pierre de Coubertin, avait obtenu 20,71.

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