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culture et histoire - Page 1672

  • Programmes de gauche et hotte du Père Noël

    Toute politique, toute volonté de réforme en France se heurte à un mur. Largement mythique, il a été maçonné à partir d'un dogme : le tout petit document de 6 pages, rédigé par quatre staliniens en 1944, Pierre Villon tenant la plume, pour servir de programme commun socialo-communiste. Appelé au départ "les Jours Heureux" la Mémoire a entériné faussement ce tract comme "programme du CNR". Sous cette appellation certains l'invoquent aujourd'hui encore, de préférence sans l'avoir jamais lu.

    Il ne semble donc pas inutile de revenir, dans le cadre de cette chronique, sur sa dissection, sur sa genèse et sa fonction mensongère.

     

    Si l'on observe l'histoire de la gauche française, elle n'aura produit en effet, en deux siècles d'agitation, que quatre "programmes communs". À la lecture, ils se révèlent moins dissemblables que ce que l'on pourrait croire. Guère de vrais changements depuis le manifeste de la Montagne de 1849 jusqu'au programme commun de 1972, en passant par le programme du rassemblement populaire de janvier 1936 et le fameux texte des "Jours Heureux" de mars 1944.

     

    On notera à ce sujet une remarque édifiante de Claire Andrieu : "Dans les premiers jours de septembre 1944, les Français libérés découvrirent l'existence d'un « programme du CNR »." (1)⇓

     

    Le CNR était passé le 11 septembre 1944 sous le contrôle de Saillant. Compagnon de route du parti communiste, (2)⇓ ce dirigeant cégétiste sera en 1946 l'un des instrument de son basculement complet de la centrale dans la dépendance du parti. Il sera le cofondateur avec son homologue russe Kouzntesov de la fameuse Fédération syndicale mondiale d'obédience soviétique… (3)⇓

     

    C'est en 1942 en effet que l'unificateur de la résistance intérieure Jean Moulin désira faire formuler par un comité des experts les perspectives de gouvernement de la France libérée. Ce groupe de travail clandestin recruta essentiellement 9 membres. Presque tous allaient jouer un rôle important dans l'après-guerre, sous les Quatrième et Cinquième républiques. Citons ainsi Alexandre Parodi, Pierre Lefaucheux qui dirigera la régie Renault, Michel Debré, le professeur de droit Paul Bastid ou René Courtin, futur administrateur du Monde.

     

    Cette équipe ne comportait aucun communiste. Elle produisit notamment un Rapport sur la politique économique d'après-guerre synthétisé en novembre 1943 par Courtin. Seul ce texte de 113 pages pourrait à la rigueur être tenu pour un "programme" de la Résistance intérieure, puisqu’il avait été communiqué pour accord à tous les mouvements. Mais ce fut pour le court-circuiter que les communistes conçurent le document de 6 pages auquel on ose faire encore référence aujourd'hui.

     

    Jean Moulin avait été arrêté en juin 1943 dans des conditions dont les historiens débattent encore aujourd'hui. L'une des clefs de l'énigme repose à la fois sur sa relation aux communistes et sur le revirement tactique de la politique de Staline à partir de 1943. Celle-ci consistera dès lors à se débarrasser de l'étiquette sulfureuse du Komintern et à se délester d'une bonne partie de ses anciens alliés "antifascistes", anciens compagnons de route recrutés à la faveur de la guerre d'Espagne. Le plus significatif d'entre eux, Willy Münzenberg, avait été assassiné par les agents du NKVD pendant la période d'alliance soviéto-allemande. (4)⇓

     

    Certes, longtemps encore, le PCF cherchera à "plumer la volaille" socialiste en acceptant tactiquement de lui proposer un "programme commun" etc. Et il y parviendra au début de la Quatrième république ! Ne perdons jamais de vue que jamais les Français n'ont vraiment voté en majorité pour les marxistes, malgré les poussées de socialismes étatistes dont la plus forte se manifeste en 1945, avec 49,6 % pour l'addition socialo-communiste aux législatives du 21 octobre 1945, mais quand même une majorité de 50,4 % en faveur de  leurs adversaires, démocrates-chrétiens, radicaux et libéraux.

     

    Dès les élections suivantes, le 2 juin 1946, le pourcentage socialo-communiste passe à 47 %. Il ne cessera de diminuer. En un quart de siècle, des législatives de 1945 à l'élection présidentielle de 1969 la gauche marxisante était donc passée d'une influence de 49,6 % à 31 % (Duclos + Defferre-Mendès + Rocard + Krivine). Et le bloc socialo-communiste s'est largement fissuré.

     

    On comprend mieux pourquoi en 1971 Mitterrand a dû reconstruire un "nouveau" parti socialiste : celui dont Hollande fait figure d'héritier. Il avait été conçu dans une perspective d'alliance avec les "stals", lesquels s'effondrèrent dans les années qui suivront.

     

    Le prix à payer se soldera, dès l'année suivante, par le "programme commun". Ce document, qui semble extravagant lorsqu'on le relit de nos jours, avait été rédigé et négocié en 1972 sous l'influence de Chevènement. Il commencera à être appliqué, et il aura largement contribué à ruiner la France, à partir de 1981.

     

    Le PCF continuera, du point de vue électoral, sa descente aux enfers. Mais du point de vue programmatique et syndicaliste, il ne se porte pas aussi mal qu'il le mériterait.

     

    Les survivants impuni du stalinisme peuvent donc remercier les deux Pères Noël et autres rédacteurs de "programmes communs". Et chacun doit mesurer aujourd'hui que le traineau de ces bonshommes rouges, à la source de ce que l'on veut figer aujourd'hui comme un "modèle français", ne venait pas de Finlande.

     

    JG Malliarakis

    http://www.insolent.fr/2013/12/programmes-de-gauche-et-hotte-du-pere-noel.html

     

    Apostilles

    (1) cf. livre collectif sous la direction de cette historienne "Les Nationalisations de la Libération" Presses de la FNSP, 1987, page 53
    (2) cf. L'Humanité du 24 mai 1947 :"à Lyon devant 50 000 manifestants, Louis Saillant déplore le renvoi des ministres communistes."
    (3) cf. L'Huma du 26 septembre 1945.
    (4) cf. le chapitre que nous lui consacrons dans notre "Alliance Staline-Hitler"

  • Préface à la Question Libérale

    Il y a déjà un an, Thibault Isabel livrait dans le n°50 de la revue Rébellion une étude comparée des mentalités chinoises et européennes dans laquelle il brossait rapidement le portrait de l'homme archaïque européen, cet homme d'avant la rupture épistémologique de la Grèce classique, à savoir l'irruption de l'idéalisme mathématique pythagoro-platonicien.
    Selon Isabel, l'homme archaïque européen n'est pas mû tant par un logos hypertrophié et a-priorique - quoiqu'il ne s'agisse pas ici de récuser le logos en tant que tel, qui existe au coeur de notre identité et fait souvent la preuve de son efficacité - que par son instinct, sa mètis, vertu odysséenne par excellence, cet art de se fondre dans son environnement et d'en saisir les sens afin de conduire plus justement sa route, ce que l'on pourrait appeler une "boussole empirique". Cette faculté de l'homme archaïque est pour Isabel une piste réflexive vers un renouveau intellectuel européen et populaire. La vision est juste. En ces temps de chaos et de rupture, alors même que les solutions anciennes sont oubliées et que les modernes s'effondrent, que la scission d'avec plusieurs siècles de marche flamboyante est consommée, que l'européen est plus que jamais face à l'abîme de la connaissance et qu'il lui faut résolument sauter, la mètis peut, à défaut du recours à Dieu qui sauva les Méditations Métaphysiques, incontestablement, nous guider.

     

    C'est donc sous l'angle de la mètis qu'il faudra aborder les quelques développements qui suivent. Nous sommes, de par notre naissance, des modernes et même, osons nous l'avouer, des libéraux. En ce que nous sommes déterminables, nous pouvons espérer - et, par tous les dieux, nous réussirons - fonder une renaissance socialiste, nationale et européenne de vertu et d'honneur. Mais en ce que nous sommes déterminés nous ne pouvons nous illusionner en croyant pouvoir être, sans mauvais jeu de mot, libres de tout libéralisme. Des siècles de modernité et d'assimilation des thèses libérales auto-justificatrices nous ont placé dans la quasi impossibilité de revenir sur la génèse de la révélation moderne et à plus forte raison d'en sortir. Les axiomes libéraux, devenus au fil des ans notre lait maternel ne peuvent être contredits par aucun des instruments cognitifs qu'ils ont eux-même produits. La pensée socialiste scientifique elle-même, principalement le second Marx, en ce qu'elle voulut faire du contre-libéral sur les bases mêmes de la Révolution moderne et de la scienza nuova ne put s'affranchir du Génie libéral et, pour rejoindre cet auteur, répéta son essor pour s'achever en farce.
    Quasi impossibilité certes. Impossibilité non. Impossible n'est pas français !
    Du moins devons-nous prendre conscience de la difficulté de l'entreprise et des risques inhérents à la chute libre intellectuelle. Le recul péniblement gagné nous place dans le néant et nous ne pouvons être véritablement certains de nous être complètement dégagés du prêt à penser fourni par les axiomatiques libérales. Forts malgré tout de ces incertitudes, et de cette humilité, nous allons tenter d'éclairer quelque peu ce qui fut, et demeure, l'esprit du libéralisme afin de jeter une voie de plus vers l'avenir.
    En avant ! Vers la victoire !

     

    (A suivre...)

     

    Antoine  08/10/2012
  • Les assassinats politiques en France sous les présidences de Georges Pompidou et de Valéry Giscard d’Estaing

    29 mars 1971 : Mario Bachand, militant du FLQ, est assassiné à Saint-Ouen.

    25 février 1972 : Pierre Overney, militant de la Gauche prolétarienne (GP), est tué par un vigile de l’usine Renault de Billancourt.
    13 novembre 1972 : le journaliste syrien Khodr Kanou est assassiné à Paris par Septembre noir.
    8 décembre 1972 : Mahmoud al-Hamshâri (OLP) est blessé par le Mossad à Paris ; il décède en janvier.
    6 avril 1973 : l’Irakien Basil al-Qubaysi est abattu par le Mossad à Paris.
    28 juin 1973 : l’Algérien Mohammed Boudia, lié au FPLP palestinien, est tué à Paris.
    26 août 1973 : assassinat à Paris de l’opposant tchadien Outel Bono.
    14 novembre 1973 : disparition du financier propalestinien Antoine Kamouth.
    19 décembre 1974 : l’attaché militaire uruguayen, le colonel Ramon Trabal est tué à Paris ; le meurtre est revendiqué par la « Brigade internationale Raul Sendic ».
    29 mars 1975 : le vice-consul de Yougoslavie est grièvement blessé à Lyon.
    27 juin 1975 : deux inspecteurs de la DST, Raymond Dous et Jean Donatini, ainsi que leur informateur libanais, Michel Moukharbal, sont tués par Carlos, rue Toullier, à Paris.
    3 juillet 1975 : assassinat à Lyon du juge François Renaud, qui enquêtait sur les connexions du SAC. Cela donnera matière à un film d’Yves Bonnet, avec Patrick Dewaere, Le juge Fayard.
    8 octobre 1975 : l’attaché militaire adjoint de l’ambassade d’Espagne, le capitaine Garcia Plata Valle est grièvement blessé par la « Brigade internationale Juan Manot ».
    24 octobre 1975 : assassinat de l’ambassadeur de Turquie, Ismaïl Erez, et de son chauffeur, revendiqué par un « Commando des justiciers du génocide arménien ».
    11 mai 1976 : l’ambassadeur de Bolivie, Joaquin Zenteno Ayana, est assassiné à Paris par la « Brigade internationale Che Guevara ».
    14 juillet 1976 : Joachim Peiper, ancien colonel SS, est retrouvé mort dans l’incendie de sa maison, dans la nuit du 13 au 14 juillet, à Traves (Haute-Garonne), après une fusillade. Le meurtre est revendiqué par « Les vengeurs. Comité Résistance et déportation ».
    2 novembre 1976 : Homayoun Keykavoussi, chef d’antenne de la Savak à l’ambassade d’Iran à Paris, est grièvement blessé par la « Brigade internationale Réza Rezai ».
    24 décembre 1976 : assassinat du prince-député Jean de Broglie, cofondateur du parti giscardien.
    3 janvier 1977 : Mahmoud Sâleh, représentant de l’OLP à Paris, est assassiné par le Mossad.
    23 mars 1977 : Antoine Tramoni, l’agent de surveillance de chez Renault meurtrier du militant maoïste Pierre Overney en 1972, est assassiné par les NAPAP.
    7 juillet 1977 : la « Brigade internationale Mohamed el-Ouali » (du nom de l’ancien chef du Front Polisario) blesse à coup de revolver l’ambassadeur mauritanien Ahmed Ould Ghanahallh.
    2 décembre 1977 : Laïd Sebaï, gardien de l’Amicale des Algériens en Europe, confondu avec le président de l’association, Abdelkrim Gheraieb, est assassiné par un « commando Delta ».
    18 mars 1978 : mort du dirigeant du Front national François Duprat, dans l’explosion de sa voiture piégée, alors qu’il s’apprêtait à publier un livre dévastateur pour d’autres dirigeants d’extrême droite.
    4 mai 1978 : assassinat d’Henri Curiel, dans son immeuble de la rue Rollin à Paris, revendiqué par un « commando Delta ».
    2 juillet 1978 : Agurtzane Arregui, réfugiée basque, est assassinée à Saint-Jean-de-Luz ; son mari, Juan José Extabé, est gravement blessé.
    11 juillet 1978 : Jean-Louis Lin, militant occitan, lié à Mahmoud Sâleh, est retrouvé noyé dans la Seine.
    25 juillet 1979 : assassinat à Cannes, d’une balle dans la tête, de Zouheir Mohsen, chef de l’organisation Saïka et du département militaire de l’OLP.
    3 août 1978 : assassinat d’Ezzedine Kellak, représentant de l’OLP à Paris, par un tueur lié à Abou Nidal.
    21 décembre 1978 : José Miguel Beñaran Ordenana, alias « Argala », chef de l’ETA, est tué à Anglet par le Bataillon basque espagnol (BVE), dirigé par Jean-Pierre Cherid.
    13 janvier 1979 : le réfugié basque José Miguel Pagoaga alias « Peixoto », est grièvement blessé à Saint-Jean-de-Luz par le BVE.
    11 mars 1979 : Javier Larrañaga, alias « Peru », est tué à Bayonne par le BVE.
    25 juin 1979 : Enrique Gomez Alvarez, alias « Korta », est tué à Bayonne par le BVE.
    2 août 1979 : Juan Lopategui Carrasco, alias « Pantu », est tué à Anglet par le BVE.
    13 septembre 1979 : Justo Elizaran, réfugié basque, est tué à Biarritz par des truands bordelais au service des services espagnols.
    20 septembre 1979 : Pierre Goldman est assassiné à Paris ; le meurtre est revendiqué par un groupe « Honneur de la police ».
    27 octobre 1979 : Robert Luong est assassiné à Villeneuve-sur-Lot, à l’instigation du président du Gabon, Omar Bongo.
    30 octobre 1979 : l’ex-ministre du Travail Robert Boulin est retrouvé mort dans un étang de la forêt de Rambouillet.
    22 décembre 1979 : Yilmaz Coplan, conseiller de presse à l’ambassade de Turquie, est assassiné sur les Champs-Élysées par le « Groupe de résistance arménien ».
    1er février 1980 : assassinat à Paris de Joseph Fontanet, ex-ministre de l’Education nationale.
    4 juin 1980 : assassinat à Paris de Jorge Cedron par des agents de la junte argentine.
    14 juin 1980 : assassinat à Paris, par le Mossad, du savant atomiste égyptien Yahya al-Meshad, qui travaillait pour l’Irak de Saddam Hussein.
    28 et 29 juin 1980 : Francisco Javier Martin Eizaguirre et Aurelio Fernandez Caro, militants du Parti communiste espagnol reconstitué, sont assassinés en région parisienne par le BVE.

     3 octobre 1980 : un attentat du groupe Abou Nidal contre la synagogue de la rue Copernic, à Paris, fait quatre morts et trente blessés.

    23 novembre 1980 : le BVE mitraille un bar d’Hendaye, tuant deux réfugiés basques (José Camio et J.P. Aramendi) et en blessant neuf autres.
    30 décembre 1980 : José Martin Sagardia, alias « Usurbil », est tué à Biarritz dans l’explosion de sa voiture piégée par le BVE.
    4 mars 1981 : Resat Morali et Ari Tecelli, diplomates turcs, sont assassinés à Paris, près de la Bastille, par l’Armée secrète arménienne de libération (ASALA).
    23 avril 1981 : Xabier Aguirre Unamuno est grièvement blessé par balles, à Paris, par le BVE.
    Roger Faligot, Histoire de la 5ème République
  • La « refondation » de l’Ecole ? Les étapes de la dégradation organisée de l’Education Nationale.

    UNE REVOLUTION ABOUTIE

    «La révolution française n’est pas terminée, il faut l’achever »…C’est ce que le ministre de l’Education nous a déclaré urbi et orbi.

    Il s’y est employé !

    La « refondation » de l’Institution scolaire nous vient de loin…en effet ! Aboutissement d’un plan révolutionnaire qui a vu le jour en 1793, cette refondation n’a pu trouver son accomplissement qu’après avoir emprunté les méandres liées aux contraintes historiques, institutionnelles et sociologiques, les révolutionnaires ayant dû procéder par étapes et en sous-main pour abattre au fur et à mesure et méthodiquement tous les obstacles et triompher de toutes les résistances, usant de tous les stratagèmes à leur portée pour tromper la confiance du peuple et arriver à métamorphoser l’institution scolaire, lieu d’instruction et de formation intellectuelle en lieu de vie, centre d’activités et de loisirs, aboutissant ainsi à la mise en oeuvre du principe révolutionnaire de la « tabula rasa ».

    La « refondation » de l’Ecole que notre ministre voudrait nous présenter comme une reconstruction du système éducatif en est donc son plus absolu contraire : il s’agit de son complet démantèlement.

    BREF HISTORIQUE

    En 1793, deux projets de loi ont été présentés à la Convention : celui de Le Pelletier de Saint-Fargeau repris par Robespierre qui, estimant que le peuple n’avait pas besoin d’être instruit – qu’il suffisait de les occuper à des activités manuelles dans les champs ou les manufactures – était basé sur l’activité de l’enfant. Celui de Condorcet qui estimait, quant à lui, que le peuple devait être instruit car la société en avait besoin pour pouvoir fonctionner dans de bonnes conditions, il était donc basé sur l’instruction ce qui, en cela du moins, n’était pas très révolutionnaire.

    Aucun de ces deux projets n’a été voté mais ils ont tous les deux constitué la base de projets appliqués ultérieurement et simultanément, ces deux conceptions s’étant toujours affrontées au sein même de l’institution scolaire.

    Bien que différentes initiatives aient vu le jour au cours d’un XIXème siècle très « chahuté » institutionnellement, le premier projet global d’une Ecole de la République à avoir été mis en œuvre fut inspiré de celui de Condorcet par le ministre de l’Instruction publique de la IIIème République Jules Ferry, dans son projet de loi déposé le 15 mars 1879.

    Basé sur l’instruction du peuple, il était par ailleurs, expressément déclaré anti-clérical, se proposant d’affranchir les consciences de l’emprise de l’Eglise. L’Ecole publique se fixait donc comme objectif de se substituer à l’Ecole privée.

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  • La « refondation » de l’Ecole ? Du Plan Langevin-Wallon à nos jours.

    Suite de l’article « la refondation de l’Ecole ? les étapes de la dégradation organisée de l’Education Nationale. »

    Comment le crypto-système s’y est pris pour aboutir à la métamorphose planifiée de cette institution dont la nature est totalement contraire aux souhaits du peuple et à l’intérêt de la Nation?

    D’une part, en créant les conditions pour que les enfants deviennent inaptes à appréhender les connaissances et la formation intellectuelle antérieurement exigées pour pouvoir prétendre par la suite que ce qui est demandé est trop difficile, qu’il faut réduire les exigences et changer le système, d’autre part, en créant des perspectives en trompe-l’oeil pour abuser le peuple.

    DIFFERENTES ETAPES D’APPLICATION DU PLAN LANGEVIN-WALLON

    Comment rendre les enfants inaptes à appréhender des connaissances dans de bonnes conditions ? en utilisant des méthodes pédagogiques ineptes. Alors que la pédagogie recouvre l’ensemble des méthodes destinées à apprendre, les « pédagogies nouvelles » ont été inventées pour empêcher d’apprendre.

    Le décérébrage par les méthodes dites « pédagogiques » s’est ainsi fait dès les années 50 , notamment par la généralisation des méthodes globales de lecture qui, aujourd’hui encore, sont très majoritairement utilisées mais sous des appellations autres – « visuelles, auditives, intégratives, par hypothèse… ». Ces méthodes constituent l’outil majeur de destruction de l’intelligence. Basées sur la mémoire et non sur la logique, elles grippent durablement le cerveau des enfants. A noter que le concepteur de cette méthode, Nicolas Adam, précepteur dans les familles aristocratiques, savait bien ce qu’il faisait. Lorsqu’il a conçu cette méthode en… 1787 (un hasard sûrement…) il a déclaré : «… éloignez des enfants les alphabets et tous les livres français et latins, amusez-les avec des mots entiers à leur portée… ».

    Tout est dit.

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  • Pierre Hillard : "La France a perdu sa substance vitale en 1789"

    Je vais peut-être étonner certains qui disent que la France s’est suicidée en s’engageant en faveur de la construction européenne. En fait, les origines de notre chute sont plus lointaines. La France a perdu sa force vitale… en 1789. Notre pays disposait d’un atout majeur : l’indépendance du pouvoir royal (monarchie « absolue » : ab solutus signifie « être délié ») par rapport au monde de la finance. Le 17 juin 1789, le Tiers Etat s’est déclaré Assemblée constituante donnant officiellement le pouvoir au peuple, en fait la bourgeoisie d’affaires. Cette bourgeoisie française affairiste est désormais au pouvoir avec les ramifications directes vers Londres et la famille Rothschild.

    L’intermède napoléonien vide la France de son sang. En 1815, la France est à genoux et elle ne s’est plus relevée. Est-ce un hasard de constater que l’alignement de notre politique sur celle de l’Angleterre date de cette époque. Le processus d’affaiblissement se poursuivant, il s’agit selon la doxa européiste, de dissoudre la France pour qu’elle ne soit plus qu’un simple espace géographique.

    Nous devons regarder l’histoire de France et du monde sur une époque longue. En fait, 1789 est la conséquence logique issue de la Renaissance et de la Réforme, début XVIè siècle, matrices de l’idéologie maçonnique à partir de 1717. Primauté de l’homme, matérialisme outrancier, morale évolutive, idéologies de substitution, dissolution des nations, mélange des populations et montée en puissance d’une agapé inversée infernale caractérisent ce long processus lancé il y a 500 ans en passe de se concrétiser en ce début de XXIè siècle dans le cadre d’un monde orwellien.

    Pierre Hillard 

    Source : Démocratie Royale

    http://la-dissidence.org/2013/12/23/pierre-hillard-la-france-a-perdu-sa-substance-vitale-en-1789/

  • L'intouchable ordonnance de Villers-Cotterêts

    « Il importe de rappeler l’actualité de l’ordonnance royale de Villers-Cotterêts ».
    ♦ La signature du Pacte d’avenir pour la Bretagne par le premier ministre fut entourée de nombreux errements, de fond et de forme. L’engagement en faveur de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires en est un particulièrement grave, selon Alexis Jouhannet, membre fondateur du Cercle Raymond Poincaré (Sciences-Po Rennes).
    Le diable est souvent dans les détails et, en politique, il s’y réfugie presque toujours. Il s’y plaît d’autant plus que les méandres de notre riche et complexe langue lui sont accueillants. Le français se prête en effet volontiers aux approximations linguistiques intéressées, quand la mode en politique est au louvoiement. Mais au-delà de sa pratique, le statut du français comme seule et unique langue officielle en France semble également l’objet des manigances de ses contempteurs qui, par leurs assauts, aimeraient atteindre le modèle républicain actuel et ses idéaux tels que nous en avons hérité, en ébranlant un de ses illustres piliers : sa langue. Plusieurs éléments de l’actualité placent en effet, directement ou indirectement, la langue française sous les feux de la rampe et nous invitent à en repenser l’importance en tant que ciment de la nation.
     **
     Le premier ministre Jean-Marc Ayrault était à Rennes vendredi 13 décembre pour signer solennellement le mal-nommé « Pacte d’avenir » pour la Bretagne, visant à octroyer à la région deux milliards d’euros d’aides afin de traverser les difficultés que rencontre le modèle économique régional. Le nom de cette initiative pose d’abord problème en soi : un pacte est un accord entre deux entités égales, ce qui n’est pas le cas de l’État et d’une de ses vingt-sept régions. Et lorsqu’il consiste à simplement actionner une énième fois la sénescente pompe à argent public, il relève plus d’une politique facile de court terme que d’une véritable stratégie « d’avenir ». La novlangue, fille du primat de la communication sur la réflexion en politique, a ses raisons que la raison ignore. Par ailleurs, le premier ministre n’a pas semblé craindre manquer à ses devoirs en s’exprimant en breton lors de son allocution, et en paraphant un document officiel de la République française étonnamment rédigé, du moins dans ses premières pages, en français et en breton. Il frôlait là la forfaiture, par désinvolture ou inconscience, en agissant en totale méconnaissance de l’article 2 de la Constitution de la Ve République qui prévoit que « la langue de la République est le français ». D’aucuns diront que le ridicule, lui, ne fut pas que frôlé… Mais au-delà de ces préoccupations économiques et de ces errements langagiers, ce qu’il importe de retenir de ce déplacement est le message politique qu’il a subrepticement véhiculé, à défaut de l’avoir franchement annoncé.
    D’une pierre deux coups
    Le premier ministre s’est donc déplacé symboliquement en Bretagne pour signer un engagement gouvernemental en faveur de la région. Il répond par là, on le sait, aux revendications des travailleurs, syndicalistes et élus locaux qui, unis par un même bonnet rouge, ont vigoureusement dénoncé les dégâts que la politique économique du gouvernement socialiste cause sur une économie régionale déjà en difficulté. Mais il n’a pas échappé à M. Ayrault, fin observateur ou mal conseillé, que les cohortes de manifestants bretons réunis à Carhaix ou à Quimper comprenaient également en leur sein un certain nombre de manifestants autonomistes voire indépendantistes bretons dont les revendications étaient bien différentes de celles de leurs voisins. L’écho national que s’offrait cette fronde hétéroclite, en s’attaquant notamment aux portiques de la funeste écotaxe, fut en effet une vitrine de choix pour ces groupuscules régionalistes, qui ont ainsi pu remettre au goût du jour leurs récurrentes – et heureusement marginales – revendications en faveur d’une Bretagne plus autonome politiquement, voire, pour les plus téméraires, purement et simplement indépendante. Et au premier rang de leur entreprise se trouve la revendication linguistique en faveur du breton, fer de lance d’un projet identitaire bancal visant à créer ex nihilo une identité régionale englobante en imposant notamment la langue locale dans l’espace public, même là où elle ne fut historiquement jamais parlée, comme à Rennes par exemple.
    Aussi Jean-Marc Ayrault a-t-il choisi ce vendredi 13 de faire d’une pierre deux coups : signer le « Pacte d’avenir » pour répondre aux revendications majoritaires en matière d’économie locale, et annoncer la remise à l’ordre du jour de la ratification de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires, pour flatter les réclamations minoritaires en matière d’autonomisme régional. Ce texte, signé par M. Jospin au nom du gouvernement français en 1999, n’a en effet jamais été ratifié, du fait de son incompatibilité avec plusieurs points fondamentaux de la Constitution du 4 octobre 1958.
    La Charte européenne des langues régionales et ses enjeux
    Cette charte a pour objectif de contraindre les États qui la ratifient à reconnaître les communautés linguistiques minoritaires en leur sein et à leur accorder des droits, notamment celui, consacré aux articles 9 et 10 du texte, de pratiquer leur langue tant dans la vie privée que dans la vie publique, donc dans leurs relations avec toute autorité publique. Elle entre ainsi en contradiction notamment avec l’article 1er de la Constitution française, qui dispose que « la France est une République indivisible », son article 2 susmentionné, et le principe constitutionnel d’unicité du peuple français, rappelé à maintes reprises par le Conseil constitutionnel au sujet de la Corse ou de la Nouvelle-Calédonie. Par sa position constante sur le sujet, le Conseil d’État a, quant à lui, plusieurs fois été amené à souligner l’incompatibilité de cette charte avec notre Constitution. S’il avait déjà assuré la prévalence du français en matière administrative en rejetant en 1985 la recevabilité d’une requête déposée en breton (arrêt du 22 novembre 1985, « Quillevère »), le Conseil d’État s’est depuis clairement exprimé, par les avis du 24 septembre 1996 et du 5 mars 2013 notamment, sur la contradiction qui émergerait entre les droits différenciés que consacrerait l’application de la charte, et l’égalité républicaine des citoyens en droits. La ratification de ce texte n’est donc ni envisageable sans modification substantielle de notre Constitution, ni souhaitable au vu du coup fatal qu’elle porterait au pilier républicain qu’est l’unité du peuple français.
    Qu’on ne s’y méprenne pas : l’auteur de ces lignes n’est absolument pas partisan d’un jacobinisme robespierrien pour lequel aucune tête (et aucune langue) ne devrait dépasser. Au contraire. Modeste polyglotte et amoureux de la francophonie, votre serviteur sait bien ce qu’une langue comprend d’affectif et de précieux ; c’est le creuset de toute société humaine, le refuge de traditions et de représentations communes et le ciment d’une fraternité culturelle. Les langues régionales sont les emblèmes d’une mosaïque de sociétés locales unies au fil des siècles dans un projet national commun qui s’en nourrit. Elles font à ce titre partie d’un patrimoine culturel français extrêmement dense qui concourt à la richesse et à la beauté de notre pays, et sont d’ailleurs reconnues comme telles à l’article 75-1 de la Constitution issu de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 : « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».
    Par ailleurs, et de toute évidence, on arguera à raison que l’unité nationale au niveau linguistique est accomplie, la suprématie du français est assurée partout en France, en métropole comme outre-mer, et que les langues régionales ne sont plus des menaces à l’unité nationale. Il conviendrait alors de rappeler que c’est à l’Ordonnance royale de Villers-Cotterêts, signée en 1539 par François Ier, que l’on doit cette enviable situation. Par souci d’assurer l’égalité entre les sujets dans leur relation avec le pouvoir, elle prévoit pour la première fois que la seule et unique langue du droit, de l’administration et de la justice en France est le français.
    L’unité dans la diversité, version française
    Il s’agit donc aujourd’hui de savoir comment perpétuer cette suprématie, tout en évitant la disparition des langues régionales, dont le nombre de locuteurs décroît continuellement, et dont la perte serait un appauvrissement irréversible du patrimoine national, – et humain. Mais contrairement à ce que le premier ministre et d’autres apprentis girondins semblent penser, leur protection et leur promotion ne passent pas par la charte européenne, pour au moins deux raisons. Premièrement, il appartient seul au gouvernement français, et non au Conseil de l’Europe, de prendre ou non l’initiative d’assouplir les mécanismes du monolinguisme en France et de mettre en place cette politique de protection des langues régionales, en généralisant par exemple leur apprentissage facultatif à l’école afin d’en assurer la pérennité dans la société. La seconde raison est que la charte, dans ses objectifs, consacre de nouveaux droits-créances collectifs par lesquels n’importe quelle communauté ethno-linguistique, régionale ou immigrée non-assimilée, peut revendiquer des services et des prestations dans sa langue minoritaire, ce qui s’oppose frontalement aux principes d’indivisibilité de la République, d’égalité devant la loi et d’unicité du peuple français, comme l’avait initialement souligné le Conseil constitutionnel dans sa décision du 15 juin 1999 relative à la signature de ladite charte.
    L’adoption de l’article 75-1 mentionné plus haut avait été âprement discutée au Parlement. Bien qu’il soit juridiquement sans effet, cet article fut dénoncé à l’époque comme une volonté de faire entrer par la fenêtre la perspective d’une ratification de la charte européenne, en contournant la porte décidément bien fermée de l’article 2. Mais le juge constitutionnel, dans son illustre sagesse, s’est empressé d’établir le 20 mai 2011, à la faveur d’une Question prioritaire de constitutionnalité, que cet article 75-1 n’institue ni un droit ni une liberté que la Constitution garantirait. Il est donc désormais clair au niveau constitutionnel que si les langues régionales sont reconnues dans leur intérêt culturel, elles n’ont néanmoins pas vocation à supplanter localement le français en tant que lingua franca.
    Donc en dépit de l’engagement 56 du programme présidentiel de François Hollande, et de la promesse de M. Ayrault, faite à Rennes, d’inscrire à l’ordre du jour prioritaire de l’Assemblée nationale l’examen de la proposition de loi constitutionnelle portant ratification de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires, on peut légitimement penser que cette entreprise ne rencontrera pas l’appui nécessaire à son approbation, que ce soit, selon la voie choisie, par une majorité improbable des trois cinquièmes du Parlement réuni en Congrès ou par un vote positif des Français consultés par référendum. Il est donc à déplorer que le premier ministre, par opportunisme et/ou idéologie, porte sciemment atteinte au cœur du modèle républicain avec cette annonce aussi potentiellement néfaste que probablement infructueuse, le tout pour s’attirer les faveurs électorales de quelques factions à l’approche d’échéances locales.
     **
     Face à de tels desseins, il importe de rappeler l’actualité de l’ordonnance royale de Villers-Cotterêts : une Ordonnance qui fonde l’unité linguistique du pays et promeut, avant l’heure, le français comme un vecteur de liberté, un gage d’égalité et un facteur de fraternité; une ordonnance dont l’esprit doit être défendu, 474 ans après sa publication, face aux tentatives d’importation d’un modèle de vivre-ensemble qui n’est pas le nôtre et qui est contraire à celui qu’assure et promeut la République.
    Alexis Jouhannet,   Cercle Raymond Poincaré (Sciences-Po Rennes) 23/12/2013
    Source :Cercle Raymond Poincaré, le rassemblement des droites à Sciences-Po Rennes.
    http://www.polemia.com/lintouchable-ordonnance-de-villers-cotterets/

  • A.F Week-end de formation le 8 et 9 fevrier 2014

    SAMEDI ET DIMANCHE 8-9 FEVRIER 2014

    Formation organisée par la Fédération Provence Alpes Cote d’Azur, en périphérie de Marseille, sur la diversité des moyens de luttes aujourd’hui. 80 ans après les émeutes populaires du 6 février 1934, il s’agit d’orienter toujours davantage notre stratégie vers la prise du pouvoir. Le thème exact des conférences vous sera indiqué très prochainement. Les sections limitrophes sont invitées à mobiliser leurs troupes pour cette session.

    Le dimanche, une visite de Martigues et de la maison de Maurras sera organisée. Pour plus d’informations :

    marseille@actionfrancaise.net

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Marseille-Week-end-de-formation-le

  • Constantes et changements dans l’histoire des conflits

    Constantes et changements dans l’histoire des conflits, bref essai de typologie des déterminants de conflits – par Aymeric Chauprade. Premier chapitre de l’analyse publiée dans Déterminants des conflits et nouvelles formes de prévention (Bruylant, 2013, sous la dir. de S.E. Jean-Pierre Vettovaglia).

    Introduction

    L’un des mérites de la recherche historique est d’avoir démonté tous les modèles explicatifs simples de l’histoire des crises et des conflits. Il s’agit d’emblée de repousser la causalité unique et systématique. Comme le disait Bossuet : « le plus grand dérèglement de l’esprit consiste à voir les choses telles qu’on le veut et non pas telles qu’elles sont ». Si l’idéologie règne en maîtresse incontestée entre 1945 et 1990 dans l’étude des relations internationales conflictuelles, la géopolitique et ses permanences ont, depuis, regagné leur place. Dans ce chapitre introductif de la partie théorique de cet ouvrage, nous tenterons de passer en revue les déterminismes de la géopolitique physique et humaine (persistance de constantes) qui ne constituent pas en soi des sources de conflits mais qui peuvent le devenir au gré des circonstances.

    Nous cherchons à participer à ce que Fernand Braudel appelle le nécessaire « rassemblement des sciences sociales » en vue de nous approcher de la vérité, par la convergence des savoirs. Pour parvenir à se rapprocher de la vérité des causes et de la compréhension du réel, dans leur complexité propre, toutes les sciences sociales doivent en effet  être tour à tour auxiliaires les unes des autres.

    Nous voulons poser comme hypothèse le rejet de tous les modèles d’explication monocausale du monde et considérer que la tentative d’explication d’un conflit contemporain intègre nécessairement  la prise en compte d’une multiplicité de facteurs et de paramètres. Car si les causes des conflits sont profondes et donc anciennes, il faut être capable d’aller à leur recherche jusque dans des temps reculés et il faut les suivre à travers les siècles pour souligner la récurrence de leurs effets. La recherche des déterminants des conflits est donc un aller retour permanent sur l’échelle du temps avec des stations courtes mais aussi des projections dans le passé (causalité continue/causalité discontinue). En un mot, il va s’agir d’observer la réalité dans sa diversité et sa complexité puis d’isoler les facteurs  explicatifs de conflits en soulignant à chaque fois l’insuffisance des explications monocausales et réductrices d’une part et d’autre part la nécessité de relier les facteurs entre eux pour progresser dans la compréhension des conflits. Notre tableau sera évidemment incomplet car comment rendre compte de l’immense richesse et complexité identitaire du monde ?

    L’addition des facteurs ne suffit d’ailleurs pas : encore faut-il savoir les hiérarchiser selon l’originalité propre de chaque conflit étudié.

    Chapitre I  Permanence de la carte, premier déterminisme

    1.1     L’enclavement

    La situation d’enclavement est d’une importance majeure car elle est à l’origine de nombreux chocs entre les peuples. Un État enclavé n’a pas d’accès maritime direct. Il peut disposer d’accès fluviaux mais leur navigabilité est soumise au passage chez les voisins. Ses communications économiques  avec le monde dépendent des relations politiques avec les voisins. La voie aérienne contribue à dédramatiser la situation d’enclavement mais la solution est mineure par rapport au handicap. L’enclavement entraîne souvent une situation de dépendance  à l’égard des voisins. L’ambition première d’un tel état est de sortir de l’enclavement. Cette situation provoque souvent des contentieux sérieux avec les États du voisinage. Il en existe une quarantaine dans le monde dont  le  Laos, la Serbie, le Kosovo, le Lesotho, le Burkina Faso, le Mali, le Niger, la RDC (avec seulement une quarantaine de km de côtes sur la façade atlantique), la Centrafrique, le Rwanda, le Burundi, l’Éthiopie, etc. Un exemple de tentative de désenclavement océanique en Afrique du Nord est celui de l’Algérie qui soutient le Front Polisario dans le Sahara occidental pour s’ouvrir une façade atlantique. On peut aussi signaler les « poussées vers les mers chaudes » de la Syrie à travers le Liban, de l’Irak à travers le Koweït et de l’Ethiopie à travers l’Erythrée et la Somalie tout en se rappelant du « Grand jeu » entre la Russie et l’Angleterre au XIXème siècle, et entre la Russie et les États-Unis au XXème.

    L’enclavement est une situation objective du point de vue territorial et un sentiment subjectif qui peut agir de manière déterminante  sur les comportements politiques des peuples se représentant comme enclavés et vivant un véritable complexe d’obsidionalité. On se sent enclavé et assiégé. Ce sentiment d’étouffement  détermine des velléités de poussées souvent déstabilisantes pour les États voisins (Moldavie, Gibraltar, etc).

    1.2     L’insularité

    Il existe de nombreuses situations de partage d’une île. Il est rare que dans ces circonstances il n’y ait pas refus par l’un des États considérés de la partition de l’île et revendication de l’unité insulaire à son profit (nationalisme irlandais, partage de l’île de Chypre condamnée par les Nations Unies, les îles Hanish du Yémen, l’unité comorienne remise en cause par les séparatisme îliens, celui d’Anjouan et de Mohélie en particulier, l’insatisfaction mauricienne de son héritage insulaire)

    1.3     Topologie, nature du relief

    La topologie a contribué à forger historiquement le rapport et la représentation entre les États et les peuples, rapport et représentation sur lesquelles nous vivons encore largement malgré les progrès de la technique qui diminuent la fonction séparatrice de mers et de déserts et donc la diminution de la pertinence des obstacles naturels. Dans les pays en développement, l’obstacle naturel continue de modeler les rapports  entre États voisins. De nombreux espaces vides, comme les déserts, et nombre de régions forestières ou montagneuses restent éloignées des phénomènes d’accroissements mondiaux des flux. La topologie reste stratégiquement une réalité incontournable.

    Espace vide, le désert est souvent représenté comme une zone de séparation entre aires distinctes voire comme une zone d’affrontement. Le Sahara est une zone de séparation et d’affrontement entre l’Afrique du Nord et l’Afrique noire. Parmi les dix États  construits sur des étendues sahariennes – six sont arabes et quatre appartiennent à l’Afrique noire – ceux qui se trouvent sur les franges du Sahara comme le Mali et le Niger sont bâtis sur une opposition Nord-Sud. Les pasteurs nomades arabisés s’y opposent aux populations africaines. D’une manière générale, l’Afrique noire est soumise à la poussée historique  des populations maghrébines et islamisées à travers le Sahara. Un tropisme sahélien pousse l’ensemble des pays du Maghreb – Mauritanie, Algérie, Maroc et Tunisie – vers l’Afrique selon des lignes de pénétration très anciennes  et qui correspondent notamment  aux poussées de l’islam dans la profondeur du continent africain, le long des routes de l’or.[1]

    Par nature extensif, le désert nourrit des forces de poussée. Ce caractère inhérent aux étendues désertiques est en contradiction avec l’idée de fixation des frontières et constitue donc un facteur de conflictualité. Il est difficile de matérialiser les frontières sur l’espace fluctuant des vides spatiaux et lorsque deux États se rencontrent  dans le désert, un conflit peut facilement apparaître (frontières récentes du Sahara, ex-Sahara espagnol)[2].

    En de nombreux points de la planète, des peuples s’affrontent encore pour le contrôle d’espaces désertiques qui ne sont pas nécessairement riches en pétrole, en gaz ou en matières premières. Des hommes se battent pour la maîtrise de l’étendue. A l’heure où nombre d’analyses soulignent la primauté absolue des causes socio-économiques dans les dynamiques d’affrontement, les « ambitions désertiques ou steppiques » appellent à méditer sur la place centrale qu’occupe encore aujourd’hui le territoire dans l’origine des dynamiques conflictuelles. Le « désir de territoire », dont François Thual a décortiqué les mécanismes[3], reste une donnée fondamentale du monde contemporain.

    Un lac peut être international s’il est placé sur la frontière de deux ou plusieurs États. Certains États de l’Afrique des Grands Lacs sont ainsi construits suivant une logique d’accès à un lac et se partagent celui-ci avec d’autres États. Lorsqu’un lac est une frontière, il est aussi un bassin commun de ressources – eau douce, hydro-électricité, pêche, irrigation – qui peut susciter bien des convoitises communes et des difficultés dans le partage. La formation territoriale de l’État du Niger est issue d’un compromis entre les colonisateurs français et anglais qui portait sur le contrôle du fleuve Niger.

    La montagne a ses peuples aux rudes identités qui s’opposent souvent à ceux des plaines plus conquérants. Dans cette opposition à la domination d’une ethnie  ou d’une religion, ou bien des deux à la fois, la montagne a été le refuge des minorités et des hérésies. Le monde arabe de la montagne a en fait largement résisté à la bédouinisation turque, contrairement aux montagnes d’Asie Mineure et des Balkans. L’Atlas saharien d’Algérie, le Haut Atlas marocain, les Aurès d’Afrique du Nord, les massifs du Yémen, d’Oman, les monts du Liban, la montagne alaouite de Syrie, ont, d’une manière ou d’une autre  résisté à la domination de la plaine, soit en conservant leurs modes de vie, soit en accueillant des populations de la plaine  fuyant la domination turque sunnite.

    L’interaction de la climatologie  et de la topologie n’est plus à démontrer. Au climat sont associés des conditions de vie plus ou moins favorables  pour l’homme et son développement. Ces conditions peuvent être des déterminants de conflits[4] dans la mesure par exemple où la chaleur insupportable, les maladies, peuvent provoquer des migrations de populations ou les empêcher comme la mouche tsé-tsé a longtemps arrêté les pasteurs peuls musulmans venus du Nord et par la même occasion la pénétration de l’Islam vers l’intérieur de l’Afrique noire.

    La question du changement de climat n’est pas nouvelle et il existe de nombreux exemples de changements climatiques qui eurent des conséquences importantes sur les sociétés humaines. Fernand Braudel pose très tôt la question du changement climatique dans ses conséquences sur les modes de vie des sociétés humaines.[5]

    La géographie physique constitue la donnée constante qui fonde la continuité de la politique des États. C’est la raison pour laquelle la géopolitique accorde la primauté aux caractéristiques d’enclavement, d’insularité, aux données du relief (montagne, désert)  qui sont elles-mêmes indissociables des données climatiques pour expliquer des comportements nationaux, régionaux ou internationaux et des ambitions avouées ou inavouées, potentiellement sources de conflit. C’est le premier déterminisme géopolitique.

    Aymeric Chauprade

    [1] F. Maurette, « Afrique équatoriale orientale et australe », in Géographie universelle, XII
    [2] A. Chauprade et F. Thual, « Dictionnaire de géopolitique », 2e éd., Paris, Ellipses, 1999, article Maroc
    [3] F. Thual, « Le désir de territoire », Paris, Ellipses, 1999
    [4] D.S. Landes, « Richesse et pauvreté des Nations », Paris, Albin Michel, 1998, p.30
    [5] F. Braudel, « Ecrits sur l’histoire », rééd. Paris, Flammarion, 1984, coll. « Champs », p. 169

    http://www.realpolitik.tv/2013/12/constantes-et-changements-dans-lhistoire-des-conflits/