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culture et histoire - Page 1854

  • Julien l'Apostat (331 - 363) La mauvaise réputation

    L'empereur Julien l'Apostat a régné à peine dix-huit mois sur l'empire romain. Son surnom vient de ce qu'il aurait répudié le christianime pour revenir à la religion païenne. Cela lui a valu de la part des historiens une mauvaise réputation, largement imméritée.

    Le neveu de Constantin le Grand

    Julien a six ans quand, à la mort de son oncle Constantin le Grand, premier empereur chrétien, des soldats massacrent les membres de la famille impériale qui ne sont pas issus de Constantin. Son éducation est confiée à un eunuque qui l'initie aux grands classiques de la culture grecque et lui donne la passion de la lecture.

    En 341, son cousin, l’empereur Constance, envoie Julien et son frère au fond de l’Anatolie, dans la forteresse de Macellum en Cappadoce. Ils ont accès à une bibliothèque contenant les classiques de la philosophie grecque. À partir de 347, Julien est autorisé à revenir à Constantinople, puis à Nicomédie en 351. En 354 Constance convoque Julien à la cour impériale de Milan, puis l’envoie plusieurs mois à Côme. Alors que des courtisans l’accusent de complicité avec son frère Gallus, qui s’était révolté et avait été exécuté sur ordre de Constance, c’est l’impératrice Eusébie, épouse de Constance, qui sauve Julien.

    Parisien d’adoption

    Durant l'été 355, Julien peut suivre des cours de philosophie à Athènes, où il côtoie Basile de Césarée et Grégoire de Nazianze. Ce dernier sera plus tard un de ses adversaires les plus féroces. À la fin de l’année, il est rappelé à Milan où l’empereur lui fait épouser sa soeur Hélène et le présente à l'armée avec le titre de César, c'est-à-dire vice-empereur.

    Puis il l’envoie en Gaule, où cet intellectuel se révèle excellent administrateur et stratège efficace. Travailleur acharné, il apprend le latin et se soumet à un dur entraînement militaire.

    Fin juin 356, il fait lever le siège d'Autun, et prend le contrôle de Cologne sur le Rhin, dont il relève les fortifications. Impressionnés, les Francs demandent à traiter avec Julien, qui réside à Sens ; mais les Alamans profitent de la dispersion de ses forces pour attaquer la ville, où il l’assiègent pendant un mois.

    À partir de 357, Julien s’installe à Lutèce, sur l’île de la Cité, facile à défendre. Il dit alors que l’eau de la Seine est aussi agréable à voir qu’à boire.

    Seul empereur romain à avoir été parisien, il apprécie tellement l'endroit qu’il y passe ses hivers. Enceinte, son épouse Hélène rentre en Italie où elle met au monde un garçon mort-né. Elle décède vers 358, et Julien, qui ne se remariera pas, s'entoure d’amis païens, tels Oribase, son médecin personnel et le Gaulois Salutius, qui devient son plus proche conseiller.

    Après une grande victoire à Strasbourg, contre les Alamans, il exerce un pouvoir incontesté et repousse aussi les attaques des Francs.

    Mais en 360, l'empereur Constance, jaloux de son prestige et menacé par les Perses, exige que Julien lui envoie deux légions en renfort. En majorité Gaulois, ses soldats refusent de partir et se rassemblent à Lutèce pour le proclamer Auguste. Julien décide alors d’aller conquérir Constantinople.

    Empereur réformateur

    Constance ne l'attend pas et meurt en novembre 361. De son lit de mort, il transmet le pouvoir à Julien.

    Aussitôt ce dernier promulgue un édit de tolérance de toutes les religions, y compris celles des juifs et des chrétiens dissidents.

    Mais quelques mois plus tard, en 362, il interdit aux chrétiens d'enseigner. Puis, il tente de réformer le paganisme sur le modèle de l’Église catholique et crée une hiérarchie des cultes autour du Dieu Soleil. Il écrit un pamphlet intitulé Contre les Galiléens, où il proclame que les Juifs et les Hellènes sont semblables, et il ordonne la reconstruction du temple de Jérusalem.

    Après avoir réorganisé la lourde administration impériale, en réduisant en particulier le personnel du palais, il va s'installer à Antioche pour y préparer l’invasion de la Perse. Mais là, il se heurte à la nombreuse population chrétienne de la ville, qui lui manifeste son hostilité.

    Empereur combattant

    Au printemps 363, Julien se lance dans une vaste expédition militaire qui le mène victorieusement jusqu'à Ctésiphon, la capitale perse. Mais accablé par la chaleur et la politique de la terre brûlée des Perses, il doit battre en retraite et, le 26 juin 363, est mortellement blessé au combat. Selon le philosophe Libanios, il aurait été assassiné par un soldat romain chrétien. Mais cette version est démentie par l'historien Ammien Marcellin, qui était présent et rapporte : « Au moment où Julien, oublieux de toute précaution, se précipitait témérairement au combat en levant les bras, et à grands cris, pour bien faire entendre que c'était la débâcle et la panique chez l'ennemi, et pour exciter ainsi la fureur des poursuivants, ses gardes blancs dispersés par l'effroi lui criaient de tous cotés d'éviter la masse des fuyards comme on fait pour l'écroulement incertain d'un toit qui menace ruine ; mais soudain, une lance de cavalerie (equestris hasta) égratigna la peau de son bras, lui transperça les côtes, et se ficha dans le lobe inférieur du foie » (XXV, 3, 6.).

    Épitaphe

    Julien fut le seul successeur de Constantin 1er à ne pas pratiquer la nouvelle religion. On lui prête ce mot apocryphe au moment de sa mort : «Tu as vaincu, Galiléen !», le Galiléen en question n'étant autre que le Christ.

    L'empereur mérite mieux que cette mauvaise réputation. Jeune général toujours victorieux, mort au combat à 33 ans, il fut le plus intellectuel des empereurs romains, avec Marc Aurèle, son modèle.

    Julien a étudié l’astronomie dans les traités de Ptolémée. Il citait de mémoire Homère, Platon et Plutarque, et savait s’entourer des meilleurs esprits de son temps : Ammien Marcellin, le dernier grand historien latin, Libanios, le dernier grand rhéteur grec, Oribase, le dernier grand médecin de l’Antiquité, et le préfet philosophe Salutius, qui jouissait d’un tel prestige que l’armée lui proposa deux fois l’empire, à la mort de Julien, puis à celle de son successeur Jovien.

    Claude Fouquet

    Julien ou la mort du monde antique

    Claude Fouquet est l'auteur d'une passionnante biographie de l'empereur Julien : Julien, La mort du monde antique (1985, réédition : L'Harmattan, 2009, 366 pages, 32,50 euros).

    Julien, La mort du monde antique (Claude Fouquet, L'Harmattan, 2009, 32,50 euros)«Quand, avec l’aide de Pierre Grimal, j’ai entrepris d’évoquer le destin de l’empereur Julien, c’est parce que, malgré la distance des siècles, je croyais comprendre les sentiments d’un homme qui voyait autour de lui s’effondrer les valeurs qu’il aimait. Mais au fur et à mesure que j’ai lu ses écrits et ceux de ses contemporains, je me suis aperçu que, loin d’être uniquement rétrospective, sa pensée était fortement imprégnée de christianisme, et que l’interprétation qu’il donnait de la pensée antique était proche de celle des Pères de l’Église, ses condisciples à Athènes, tels Grégoire de Nazianze, Basile de Césarée, et aussi de celle de Jean Chrysostome, rencontré à Antioche. Curieusement, il avait les qualités d’un saint chrétien : chasteté comprise. C’est sur le modèle de l’Église qu’il chercha à fédérer les cultes païens, qui avaient toujours été indépendants jusque-là» (Claude Fouquet).

    http://www.herodote.net

  • Savants nazis : les Français et les Anglais se sont servis aussi

    « Les quelques privilégiés qui connaissaient l’existence du Bureau des Projets Spéciaux du général SS Kammler, admettaient qu’il constituait l’instrument d’étude et de mise au point le plus avancé du IIIe Reich »

    Entretien avec Louis-Christian Gautier, auteur de Le secret de l’anti-gravité. À l’ombre du IIIe Reich et de la Nasa (éditions Dualpha)

    propos recueillis par Fabrice Dutilleul

    Vous abordez un sujet délicat : l’appropriation par les Américains et les Soviétiques des savants du IIIe Reich à la fin de la IIe Guerre mondiale…

    Il n’y a pas qu’eux : Britanniques et Français se sont aussi « servis ». Tous les Alliés s’emparèrent des savants du IIIe Reich et s’approprièrent ainsi tous leurs travaux, recherches… et découvertes ! Parmi ces prises de guerre figuraient les recherches sur la gravité, effectuées par le général SS Hans Kammler qui rendait compte directement et uniquement au Reichführer de l’Ordre noir Heinrich Himmler.

    Comment avez-vous été amené à écrire ce livre ?

    À la demande du rédacteur en chef de la défunte revue Aventures de l’Histoire. C’est un fouineur qui m’a adressé un ouvrage qu’il s’était procuré je ne sais comment, dont le titre pourrait approximativement se traduire par : « À la recherche du point zéro, le périple d’un homme pour découvrir le plus grand des secrets depuis l’invention de la bombe atomique. » Si, dans mon adolescence, je prenais un certain plaisir à la lecture des romans de science-fiction – en particulier ceux de Peter Randa, père de mon éditeur auquel j’en profite pour rentre hommage – je suis devenu depuis un historien « pur et dur », et c’est d’abord en rechignant que j’ai entrepris de traduire le document de référence, mais je ne prends pas parti au sujet des théories exposées.

    Les chercheurs américains refusaient de reconnaître cette science révolutionnaire…

    En effet, les Nationaux-socialistes eurent une approche de la science et de l’ingénierie totalement différente de celle des autres, car leur idéologie était également basée sur une vision du monde différente.
    La gravité constitue la plus importante source d’énergie potentielle. Un engin qui l’utiliserait pourrait atteindre la vitesse de la lumière. Les Américains ont-ils maîtrisé toutes les technologies tombées entre leurs mains ? C’est ce que chercha à savoir le Britannique Nick Cook, journaliste aéronautique réputé. Son enquête le mena ainsi jusqu’aux terribles camps de concentration qui furent en quelque sorte le « moteur » de la production de cet « État dans l’État », comme Speer avait qualifié la SS. C’est en leur sein que travailla le Bureau des Projets Spéciaux du général Kammler. Les quelques privilégiés qui en connaissaient l’existence admettaient qu’il constituait l’instrument d’étude et de mise au point le plus avancé du IIIe Reich. Pour le constituer, on avait écrémé tout ce que le pays possédait comme chercheurs de haut niveau, sans se préoccuper s’ils avaient ou non des liens avec le Parti. Une fois recrutés, ceux-ci étaient soumis à un secret rigoureux et leurs activités protégées par des spécialistes du contre-espionnage appartenant à la SS.

    Au fil de la lecture, on se passionne pour cette véritable enquête policière…

    Il faut suivre l’auteur britannique dans l’espace et dans le temps. C’est aussi la personnalité de celui-ci qui, dans le cadre de la « critique externe » du document, a suscité mon intérêt : Nick Cook était consultant aérospatial à la revue Jane’s Defense Weekly. Or, le Jane’s est une référence internationale en matière de défense et d’armement. Un de ses collaborateurs ne pouvait être un fumiste intégral. Mais je dis et répète que je me refuse à prendre parti : j’ai abordé le sujet d’un point de vue strictement historique.

    Vous ne prétendez donc pas révéler le secret de l’anti-gravité ?

    Pas plus que celui des Templiers, ni l’emplacement de leur trésor, sujets sur lequel j’avais jusqu’alors le plus publié.

    Le secret de l’anti-gravité. À l’ombre du IIIe Reich et de la Nasa de Louis-Christian Gautier, 216 pages, 23 euros, éditions Dualpha, collection « Vérités pour l’Histoire », dirigée par Philippe Randa.

    http://euro-synergies.hautetfort.com/

  • Livre : La guerre inachevée (Afghanistan, 2001-2013)

    Afghanistan 2001-2010. Chronique d’une non-victoire annoncée ne passa pas inaperçu lors de sa sortie éditoriale en mars 2010. Etude pionnière en histoire immédiate sur ce sujet brûlant, cet essai du professeur Jean-Charles Jauffret fut récompensé par le prix du livre de Verdun en novembre de la même année. Ses mérites étaient d’ouvrir la voie d’un vaste champ d’étude pour les historiens désireux de poursuivre ce sillon, tout en présentant au grand public l’engagement des soldats français, les enjeux autour de cette guerre et les perspectives envisageables pour en sortir de la meilleure façon possible. Ce travail rencontra - nous pouvons en témoigne- plus qu’un succès d’estime auprès de nombreux militaires français engagés dans le conflit, qui trouvèrent pour la première fois dans la littérature grand public, un ouvrage s’attachant à retranscrire aussi fidèlement que possible la situation sur le terrain. Il est vrai que Jean-Charles Jauffret, spécialiste de l’histoire militaire coloniale et directeur du master « Histoire militaire, Défense et géostratégie » à l’IEP d’Aix-en-Provence, est l’un des grands connaisseurs universitaires du monde militaire.  

    C’est donc avec une certaine impatience que nous nous apprêtions à découvrir la nouvelle édition revue et augmentée de cet ouvrage, titré La Guerre Inachevée. Afghanistan 2001-2013. Une courte introduction souligne d’emblée au lecteur l’ambition de ce volume. Elle est de mener une réflexion sur ce conflit et de faire un bilan de l’engagement français. C’est un témoignage érudit sur une histoire en train de se faire. Elle en expose aussi les limites inhérentes à cet exercice : « [personne ne sait pas] comment tout cela risque de finir » (p 12). Enfin, elle pose une série de questions importantes sur la pertinence des modèles historiques à étudier pour penser la contre-insurrection à l’ère post-coloniale. Elle s’interroge sur l’efficience des différentes réponses (politiques, diplomatiques, militaires, humanitaires, etc.) développées par l’Occident en Afghanistan, face à un adversaire dont les succès sont immanquablement le miroir de nos faiblesses. Encore faut-il vouloir prendre le temps de les observer…

    Les principales analyses qui ont fait la réussite du premier opus sont toujours présentes. Bien entendu, elles ont été enrichies par les derniers prolongements du conflit. De l’histoire de l’Afghanistan à une analyse géopolitique de la région, en passant par une description de la nature, des techniques et des procédures d’un adversaire « polymorphe », l’auteur balaie de nombreux champs. Il n’oublie pas de proposer à la sagacité du lecteur une analyse dans le temps des étapes de ce conflit depuis 2001, tout en incluant un long développement sur l’engagement français. A la veille de leur retrait, l’historien propose de faire le bilan des actions des forces françaises sur le terrain. Il met en lumière l’émergence d’une culture de guerre qui s’est forgée au contact de ce théâtre d’opération exigeant. Il emprunte d’ailleurs certains aspects de son imaginaire aux conflits coloniaux, dont nous voyons à nouveau se diffuser le langage parfois fleuri. Terrain d’expérimentations tactiques et technologiques de tout ordre, cette « campagne d’Afghanistan » deviendra-t-elle celle qui aura vu la dernière génération du feu ? Dans tous les cas, nous pouvons d’ores-et-déjà affirmer que cette génération, forgée par une expérience commune des opérations interarmes en situation de guerre, est celle qui œuvre dans  les opérations actuelles au Mali.

    A retenir tout particulièrement, les riches développements consacrés aux étapes de l’engagement militaire occidental en Afghanistan. L’auteur démontre comment les efforts entrepris sous la présidence Obama par les généraux McChrystal et Petraeus, pour reproduire un « surge »  à l’irakienne, se soldent par des échecs que peine à masquer par la communication de l’OTAN. En outre, depuis le 2 mai 2011, l’élimination physique d’Oussama Ben Laden ouvre une porte de sortie pour une coalition, qui précipite les opérations de transferts d’autorité à l’ANA dès l’été. Ce travail de  chronologie, de mise en cohérence et d’analyse des événements successifs, constitue une plus-value certaine de cette version actualisée. Enfin, la lecture de l’ensemble du chapitre concernant l’engagement français, qu’il concerne les différentes phases militaires, la culture de guerre ou l’hommage aux blessés et aux morts, est très fortement recommandée (p 205-253). L’auteur retient particulièrement la date du 30 décembre 2009 et la prise en otage des deux journalistes de France 3 en Kapisa, comme étant celle d’un coup d’arrêt aux opérations de contre-insurrection dans la zone de responsabilité française. Enfin, cet essai se ponctue par une analyse des solutions qui auraient pu être mises en avant pour garantir l’avenir de ce pays où tout est désormais possible, entre le spectre du retour de la guerre civile et l’espoir d’une paix possible.

    Soyons clair, la lecture de cet ouvrage remanié nous semble indispensable pour tout historien souhaitant traiter de la guerre en Afghanistan. Comme son prédécesseur, il pose des bases  très solides (chronologiques, thématiques, etc.) pour de futures analyses sur le conflit, enrichies par d’autres sources. Les annexes contiennent un lexique appréciable pour qui souhaite comprendre le langage militaire contemporain, nourrit de sigles et autres termes issus du sabir « otanien ». Une bibliographie succincte et un recueil de sources sont aussi présents. Pourtant, on peut regretter la suppression de la chronologie présente dans la première édition, mais cet outil, consubstantiel du travail de l’historien, a disparu sans doute au profit de notes de bas de pages plus abondantes et fournies. Toutefois, l’éditeur a fait le choix de reléguer celles-ci en fin d’ouvrage, ce qui a tendance à rendre la lecture parfois un peu inconfortable. Enfin, une carte de l’évolution des implantations militaires françaises et quelques illustrations iconographiques auraient pu être un « plus » appréciable pour le lecteur non spécialiste.

    En conclusion, et en période de promulgation imminente du Livre Blanc, cet ouvrage de référence vient aussi souligner l’échec d’une stratégie s’appuyant, au final, essentiellement in fine (en dépit de l’activité inlassable des troupes présentes sur le territoire) sur la neutralisation (arrestation, élimination) de chefs insurgés par les forces spéciales. Elle vise à garantir une meilleure transition de la responsabilité aux forces de sécurité afghane et à permettre aux forces occidentales de se désengager. En portant l’effet majeur sur l’insurrection (et non sur la population), loin d’éteindre les causes d’un conflit, elle en alimente paradoxalement le foyer. A l’heure où la tentation du repli sur soi est partout présente, l’Afghanistan rappelle aussi que le « tout forces spéciales » ne peut être la solution unique pour garantir les futurs succès des armes de la France, l’alpha et l’oméga d’une politique de défense. On sait bien depuis la bataille d’Alger qu’au cœur de la problématique de la contre-insurrection demeure la question de la « fin et des moyens » et de nos valeurs. La guerre en Afghanistan n’aura pas permis, malheureusement, de trancher ces épineuses questions.

    Christophe Lafaye http://theatrum-belli.org

    Editions Autrement, Paris, 2013, 352 p, 24 €.

    Nous avons demandé à Jean-Charles Jauffret de bien vouloir répondre à quelques questions complémentaires :

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  • Le vrai visage de Louis-Philippe

    Le Figaro Magazine - 25/09/2010
    Trop révolutionnaire pour les royalistes, trop royaliste pour les révolutionnaires, Louis Philippe peine à trouver sa place dans l'histoire de France. Une biographie lui rend justice.
     
    De son vivant, des caricatures de Daumier (la célèbre poire...) aux formules assassines de Chateaubriand dans les Mémoires d'outre-tombe, il avait déjà mauvaise image. La postérité a poursuivi Louis-Philippe de sa vindicte, le prenant en tenaille entre les nostalgiques du légitimisme, pour qui il était un usurpateur, les tenants du bonapartisme, qui le méprisaient comme un souverain sans gloire, et les hérauts de la République, aux yeux desquels il était un affameur du peuple. De nos jours, le personnage tendrait à être oublié.

    Les historiens, pourtant, revisitent la monarchie de Juillet. L'an dernier, un universitaire anglais, Munro Price, brossait de Louis-Philippe un portrait empreint de sympathie (1), démontrant que son règne fut le moment où les institutions françaises se rapprochèrent le plus du modèle britannique. Et voici le livre d'Arnaud Teyssier. Issu de Normale sup et de l'ENA (dont il préside l'association des anciens élèves), haut fonctionnaire, professeur associé à l'université Paris I Panthéon-Sorbonne, celui-ci s'est fait connaître, après quatre volumes d'une Histoire politique de la France, par des biographies de Lyautey et de Péguy. Il s'attache aujourd'hui à retracer l'itinéraire du «dernier roi des Français», dans des pages où l'intelligence du propos le dispute à la qualité du style : un bonheur de lecture (2).

    Quand Louis-Philippe vient au monde, en 1773, Louis XV est roi de France ; quand il meurt, en 1850, Louis-Napoléon Bonaparte est président de la République et sera empereur deux ans plus tard. L'Ancien Régime, la Révolution, le Consulat, l'Empire, la Restauration, sa propre monarchie, la République et les prémices du second Empire : l'ultime capétien ayant régné sur la France a connu tous les régimes par lesquels s'est opéré le passage de l'ancienne à la nouvelle société. Chacune incarnant une part de lui-même, il fut dès lors écartelé.

    Fils aîné de Louis Philippe Joseph, duc d'Orléans, et de Louise Marie Adélaïde de Bourbon-Penthièvre, Louis-Philippe descend deux fois de Louis XIII et quatre fois de Louis XIV, et il épousera une parente : ce prince est pleinement un Bourbon. Elevé avec sévérité par Mme de Genlis, baigné par l'esprit des Lumières, il accueille la Révolution avec enthousiasme, à l'instar de son père. En 1792, il prend part aux batailles de Valmy et de Jemmapes. Mais le durcissement des événements intérieurs l'inquiète : en vain, il incite son père à partir et tente de le dissuader de voter la mort de Louis XVI. Au printemps 1793, afin d'éviter l'arrestation, il passe la frontière comme Dumouriez.

    Refusant de combattre contre la France, mais mal accepté par les émigrés en raison de ses idées avancées, le nouveau duc d'Orléans se réfugie successivement en Suisse, en Allemagne du Nord et en Scandinavie, puis séjourne aux Etats-Unis. De retour en Europe, il réside en Angleterre puis en Sicile, après son mariage, en 1809, avec la fille du roi de Naples : Marie-Amélie, épouse à laquelle il sera inébranlablement fidèle, lui donnera huit enfants.

    Les malheurs de l'exil poussent Louis-Philippe à se rapprocher de ses cousins de la branche aînée, auxquels il donne des gages de loyauté. Ceux-ci le considèrent cependant avec suspicion, voyant en lui le fils de Philippe-Egalité, et un rival potentiel.

    Lors de la Restauration, il rentre en possession des biens de sa famille, mais reçoit un accueil froid aux Tuileries. Partageant son temps entre le Palais-Royal et Neuilly, Louis-Philippe adopte un style de vie bourgeois qui n'est pas feint, veillant personnellement à l'éducation de ses fils, élèves au lycée Henri-IV. Si le duc d'Orléans répugne au complot, il fréquente des libéraux. « Il était obsédé, souligne Arnaud Teyssier, par la nécessaire adaptation de la monarchie et de ses institutions aux mœurs du temps .» Il faut avoir ce préalable en tête pour comprendre le règne de Louis-Philippe, sur lequel l'auteur s'étend longuement.

    En juillet 1830, en décidant de gouverner par ordonnances, Charles X veut se débarrasser de l'opposition parlementaire : le vieux roi n'avait pas compris qu'on avait changé d'époque. Cette erreur lui coûte sa couronne et fournit sa chance à Louis- Philippe. Alors que la révolution gronde à Paris, celui-ci accepte le trône que lui présentent Laffitte, Perier et Thiers. D'abord lieutenant-général du royaume, il devient roi des Français le 7 août : « Nous sommes les derniers rois possibles en France », dit-il à sa femme.

    Au cours de ses dix-huit ans de pouvoir, Louis-Philippe s'emploie à arracher la France à la guerre civile qui la guette depuis la Révolution, et à maintenir la paix extérieure. De ce dernier point de vue, sa politique, sagement pacifique, prend à rebours l'opinion publique, alors belliciste, et la conquête de l'Algérie apparaît comme un dérivatif pour une armée hantée par le mythe impérial.

    Si la monarchie de Juillet forme une période d'essor économique, les fruits n'en sont pas répartis politiquement. En approuvant son ministre Guizot, qui refuse toute réforme électorale, a fortiori le suffrage universel, le roi commet à son tour une grave erreur, puisqu'il se prive d'une assise populaire. En 1848, en dépit d'incontestables réussites, le régime est balayé par l'émeute, et le monarque, victime du romantisme révolutionnaire, contraint à l'exil.

    Louis-Philippe a échoué à établir une Constitution stable, remarque Arnaud Teyssier. Toutefois, méditant sur la longue durée qui va de 1789 à nos jours, l'historien observe que le souverain a échoué « comme tous ceux qui l'ont précédé et comme échoueront encore la plupart de ceux qui le suivront ». Au fond, le dernier roi des Français n'est pas parvenu à terminer la Révolution. Mais termine-t-on jamais une révolution ?

    Jean Sévillia http://www.jeansevillia.com
    notes :
    (1) Editions de Fallois, 2009.
    (2) Louis-Philippe, d'Arnaud Teyssier, Perrin.

  • Vendredi 17 mai, soirée Printemps Français à la Traboule

    Vendredi 17 mai, soirée Printemps Français à la Traboule

    LYON (NOVOpress) - Vendredi 17 mai à Lyon, soirée Printemps français à la Traboule, à partir de 20 heures. Au programme : de nombreux intervenants, récapitulatif des différentes manifestations, diaporamas. Restauration sur place.

    http://fr.novopress.info

     

  • J’étais trotskiste, j’ai rejoint la droite nationale…

    Gofman1.jpgLongtemps, Patrick Gofman fut trotskiste. Tendance PCI. Comme Lionel Jospin, Jean-Christophe Cambadélis ou Jean-Luc Mélenchon. Il y a presque trente ans, il est passé de l’autre côté de la barricade, apportant sa plume à divers organes de ce qu’il est convenu de surnommer la droite nationale. Dans Trotskisme dégénéré, il revient sur les folles années de sa jeunesse. Sans nostalgie ni repentance.

    Votre témoignage sur ce passé trotskiste est sans complaisance ni repentance. Déjà, c’est digne. Nonobstant, on sent chez vous le besoin, à un moment de votre adolescence, d’entrer en religion…
    Il serait non seulement indigne mais aussi stupide de se repentir d’avoir eu 18 ans ! Et puis c’était tellement plus marrant de bâtir une secte incendiaire, de terroriser les adultes, plutôt que d’étudier docilement, d’être un « bon sujet », comme dans la comtesse de Ségur.

    À vous lire, il y aurait dans le communisme et sa version trotskiste une sorte de dimension eschatologique. Vous attendiez le « Paradis sur Terre » et pratiquiez les confessions publiques plus ou moins forcées.

    « L’autocritique » à laquelle vous faites allusion était plutôt stalinienne et maoïste. Ce qui ne fait aucun doute, ce sont les emprunts de Lénine au christianisme, parfois mot à mot : « Hors du Parti, point de salut ! » L’ex-séminariste Staline, pendant la guerre civile : « J’ai ramené tel régiment à la foi orthodoxe ! »

    Le gaullo-pompidolisme immobilier, malgré ses augustes racines résistancialistes, valait-il toujours forcément mieux ?

    Non seulement il ne valait pas mieux, mais il nous qualifiait d’enragés sans bien comprendre que la rage nous venait de son affairisme, de son hypocrisie, de son oppression conservatrice…

    Vous voilà désormais relégué dans un autre champ politique alternatif, celui du « Mouvement national », notion qu’on trouve sous votre plume et dont nous vous laissons l’entière responsabilité. D’un château l’autre ?

    Pourquoi « relégué » ? Je suis heureux d’aider tout le mouvement national, sans adhérer à aucune de ses composantes. Mon retour à la patrie est sincère et même enthousiaste. Un soir, Jean-Marie Le Pen m’achète un exemplaire de mon Dictionnaire des emmerdeuses (Grancher), le lendemain, le mouvement Synthèse nationale, opposition « de droite » composée d’anciens transfuges du FN, publie Le Trotskisme dégénéré. Oui, d’un château, d’une joie, d’une liberté l’autre…

    À lire votre livre, il y a beaucoup d’humour et de colère sous votre plume. Lequel de ces deux sentiments prédomine-t-il en cette jolie journée de printemps ?

    On a assez répété que « l’humour est la politesse du désespoir ». En cette belle journée de printemps français, j’oscille en chantant de la colère plaisante à la blague furibonde !

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    Entretien de Nicolas Gauthier avec Patrick Gofman

    http://fr.altermedia.info

  • Alain Gérard : Vendée, les archives de l’extermination

    massacres Vendée
    Le Massacre des Lucs-sur-Boulogne, vitrail de l’église paroissiale.

    L’historien Alain Gérard vient de publier les archives des témoignages sur les massacres subies par les habitants de l’ouest de la France pendant la Révolution. La majorité de ces archives viennent des révolutionnaires eux-mêmes, les victimes étant mortes, et les rescapés peu ou pas du tout lettrés, sauf de rares exceptions.

    Ce que fait remarquer l’historien c’est que des « générations d’historiens ont eu beau scruter les archives à la recherche de l’ordre écrit décisif qui réintégrerait l’impensable dans un semblant de logique commune. Et ils ont bien trouvé des éléments dont il faudra tirer parti, mais il faut bien l’admettre : personne n’a, à ce jour, découvert d’ordre écrit adressé par le Comité de salut public ou par la Convention à Carrier de noyer les rescapés de la Virée outre-Loire, ni à Turreau de détruire l’ensemble de la population vendéenne. Vous voyez bien, triomphent les négationnistes, il n’y eu que des violences, regrettables certes, mais inséparables des guerres civiles, à replacer dans le contexte des mentalités du temps et des luttes de factions : ces gens ont été victimes des circonstances.

     

    Mais si effectivement aucun ordre écrit d’extermination n’a été donné, comment comprendre que Carrier, Turreau et d’autres aient pu s’en faire les agents, en un temps où tout général et même tout représentant en mission se sait étroitement surveillé ? Comment de surcroît interpréter le reflux, à partir de 1794, de la terreur exercée en Vendée, au moment où justement la Révolution glisse massivement vers la Grande Terreur, qui sera officialisée par la loi du 22 prairial ? Et d’abord, pourquoi l’émergence d’un système aussi affranchi du droit et de l’humanité, et qui ne peut s’expliquer par les circonstances, puisqu’à l’intérieur les factions sont vaincues et que la situation est rétablie sur les frontières ? La Vendée, parce que c’est le lieu où la terreur a exercé ses plus grand ravages, pourrait bien constituer le lieu privilégié par où observer ses mécanismes intimes ».

    Cette recherche est d’autant plus intéressante que la chose s’est répétée puisque d’autres négationnistes font remarquer qu’on n’a trouvé aucun ordre écrit d’Hitler ordonnant l’extermination des juifs.

    L’historien nous guide dans une réflexion où « le déni précède le crime » : « Alors que le moindre tyran est censé endosser ses forfaits, ce qui est neuf ici, c’est que le déni précède le crime » et invente « le massacre démocratique ».

    Alain Gérard conclut que « le plus stupéfiant, dans toute cette histoire, est peut-être le silence de Robespierre. Un silence assourdissant, alors que l’examen de ses papiers présenté par Courtois à la Convention le 5 janvier 1795, prouve qu’il est abondamment renseigné sur l’extermination en cours ».

    Pour ce qui est de la lecture de ces massacres, âmes sensibles s’abstenir.

    GÉRARD Alain, Vendée, les archives de l’extermination, éditions du Cvrh, 2013.

    http://histoire.fdesouche.com

  • La théorie du genre : prochaine bataille ? Après Taubira, Peillon ?

    Une analyse d’Yvan Blot. -
    « Il faut être capable d’arracher l’élève à tous les déterminismes : familial, ethnique, social, intellectuel », a déclaré Vincent Peillon. Pour le ministre socialiste de l’Education « le gouvernement s’est engagé à s’appuyer sur la jeunesse pour changer les mentalités, notamment par une éducation au respect de la diversité des orientations sexuelles ». D’où l’importance accordée à la propagande pour la théorie du genre qui sera enseignée, selon la loi Peillon sur la « refondation » (sic) de l’école, dès six ans. Pour le député socialiste Julie Sommaruga, il s’agit de « substituer à des catégories comme le sexe ou les différences sexuelles, qui renvoient à la biologie, le concept de genre qui, lui, au contraire, montre que les différences entre les hommes et les femmes ne sont pas fondées sur la nature, mais sont historiquement construites et socialement reproduites ». Polémia présente ici un texte original d’Yvan Blot décortiquant les origines de la théorie du genre, montrant le rôle des Anglo-Saxons dans sa promotion et la rupture idéologique et géopolitique entre l’Occident et la Russie sur ce sujet.
    Polémia

    La théorie du genre : le triomphe de l’ « immonde »

    Le « mariage pour tous » est une revendication issue de la « gender theory » ou théorie du genre, venue d’Amérique. Le fondateur, John Money, fut responsable du suicide d’un de ses patients qu’il avait voulu faire changer de sexe. Mais la théorie, inspirée aussi d’auteurs français comme Simone de Beauvoir ou Jean Derrida, n’a pas cessé de progresser en Occident, partant du milieu universitaire mais relayé ensuite par des groupes de pression et par les médias.

    Elle affirme que le genre (masculin, féminin) est imposé par la société et n’a rien à voir avec le sexe biologique. Elle est d’essence matérialiste et égalitariste et constitue une idéologie et non un acquis scientifique.

    Critiquée par la majorité de l’opinion (lorsqu’elle en est informée), par les scientifiques (notamment au CNRS en France), par les responsables religieux, elle a de plus en plus force de loi en Occident qui connaît une coupure Est/Ouest croissante. Alors que la théorie du genre modifie le droit familial et assure la promotion de l’homosexualité, la Russie a adopté cette année une loi interdisant la propagande homosexuelle auprès de la jeunesse. Elle a été critiquée pour cela par l’Union européenne (Madame Ashton) et par les Etats-Unis mais elle maintient sa politique en faveur de la famille (création d’une fête de la famille) et de la natalité (capital naissance) malgré l’opposition des Occidentaux et des organisations internationales (le secrétaire général de l’ONU Ban Ki Moon défend la théorie du genre et prône l’arrêt de toute aide aux pays pauvres qui n’adoptent pas des lois en faveur de la « diversité sexuelle », notamment l’homosexualité).

    La théorie du genre, dans sa forme extrémiste, veut supprimer les notions de famille et de lignée, et « déconstruire » la société actuelle au profit d’une société d’individus déracinés interchangeables, conformes au besoin de l’économie mondialisée.

     Yvan Blot http://www.polemia.com
    4/05/2013
    On lira l’analyse approfondie de la théorie du genre par Yvan Blot, en Pdf, Pdf, en cliquant

  • Vies contre profits

    par Joseph Stiglitz

    La Cour Suprême des Etats-Unis vient d’entamer ses délibérations sur une affaire qui met en lumière une question profondément problématique concernant les droits de propriété intellectuelle. La Cour doit répondre à la question suivante : les gênes humains – vos gènes – peuvent-ils être brevetés ? En d’autres termes, quelqu’un peut-il essentiellement être autorisé à détenir le droit de, disons, tester si vous avez un ensemble de gènes qui implique que vous avez plus de 50% de probabilité de développer un cancer du sein ?

    Pour ceux qui sont étrangers à l’univers mystérieux du droit de la propriété intellectuelle, la réponse semble évidente : Non. Vous êtes le propriétaire de vos gènes. Une entreprise peut détenir, au mieux, la propriété intellectuelle sur son test génétique ; et parce que la recherche et le développement nécessaires au développement de ce type de test peuvent entrainer un coût considérable, l’entreprise pourrait à juste titre faire payer le fait de le pratiquer.

    Mais Myriad Genetics, une entreprise basée dans l’Utah, prétend à plus que cela. Elle prétend détenir les droits sur tous les tests visant à rechercher la présence des deux gènes associés au cancer du sein – et a appliqué ce droit de manière impitoyable, bien que leur test soit inférieur à un test que l’Université Yale était disposée à proposer à un prix nettement inférieur.

    Les conséquences ont été tragiques : un test approfondi et abordable qui identifie les patientes à haut risque sauve des vies. Empêcher de tels tests coûte des vies. Myriad est l’exemple parfait d’une corporation américaine pour laquelle le profit prend le dessus sur toute autre valeur, y compris celle de la vie humaine.

    Voici un cas particulièrement poignant. Normalement, les économistes discutent de compensations : des droits de propriété plus faibles, dit-on, seraient un frein à l’innovation. L’ironie ici est que la découverte de Myriad aurait de toute façon été faite, compte tenu des efforts internationaux mis en œuvre, et financés par des fonds publics, pour décoder l’ensemble du génome humain qui a été une remarquable avancée des sciences modernes. Les bénéfices sociaux de la découverte antérieure de Myriad ont été minimisés par les coûts imposés par son impitoyable recherche de profit.

    Plus généralement, on admet aujourd’hui que l’actuel système des brevets impose des coûts sociaux conséquents, et ne contribue pas à tirer le meilleur parti de l’innovation – comme le démontrent les brevets de Myriad liés à la génétique. Car après tout, Myriad n’a pas inventé les technologies utilisées pour analyser les gènes. Si ces technologies avaient été brevetées, Myriad n’aurait peut-être pas été en mesure de réaliser sa découverte. Et le contrôle étroit de ses brevets a freiné le développement par d’autres de tests meilleurs et plus fiables pour la recherche de ce gène. Le problème est simple : Toute recherche est basée sur des recherches antérieures. Un système de brevet mal conçu – tel que le nôtre – peut freiner la poursuite des recherches.

    C’est la raison pour laquelle nous n’autorisons pas de brevets dans la recherche mathématique fondamentale. Et c’est pourquoi la recherche démontre que breveter les gènes limite la production de nouvelles connaissances en matière génétique : la plus importante contribution à la production de nouvelles connaissances est la connaissance antérieure, à laquelle les brevets freinent l’accès.

    Heureusement, ce qui motive les avancées les plus significatives en matière de connaissances n’est pas le profit, mais la propre poursuite de la connaissance. Cela est vrai de toutes les découvertes et innovations transformatives – l’ADN, les transistors, les lasers, l’Internet, etc.

    Une toute autre affaire juridique américaine a mis en lumière l’un des principaux dangers du monopole induit par les brevets : la corruption. Dans la mesure où les prix excèdent largement les coûts de production, de considérables profits peuvent être obtenus en persuadant les pharmacies, les hôpitaux, ou les médecins de se fournir chez vous plutôt qu’ailleurs.

    Le procureur du district sud de la ville de New York a récemment accusé le géant pharmaceutique suisse Novartis de faire exactement la même chose en donnant illégalement des dessous de table, honoraires, et autres bénéfices aux médecins – soit exactement ce qu’il avait promis de ne pas faire à la suite d’une affaire similaire qui remonte à trois ans.

    Public Citizen, une association de consommateurs américaine a en effet calculé que rien qu’aux Etats-Unis, l’industrie pharmaceutique a payé des milliards de dollars en conséquences de décisions de justice et d’accords financiers entre les firmes pharmaceutiques et les gouvernements d’états et fédéral.

    Malheureusement, les Etats-Unis et les pays avancés font pression pour un renforcement des régimes de la propriété intellectuelle partout dans le monde. De tels régimes vont limiter l’accès des pays pauvres à la connaissance dont ils ont besoin pour leur développement – et priver de médicaments génériques salvateurs les centaines de millions de personnes qui n’ont pas les moyens de payer les prix imposés par le monopole des firmes pharmaceutiques.

    Cette question est d’ailleurs âprement discutée dans le cadre des négociations continues de l’Organisation Mondiale du Commerce. L’accord de propriété intellectuelle de l’OMC, l’ADPIC (TRIPS en anglais, ndt) avait à l’origine prévu une extension de « flexibilités » pour les 48 pays les moins développés dont le revenu annuel par habitant est inférieur à 800 dollars. L’accord original paraît remarquablement clair : l’OMC devra étendre ces « flexibilités » à la demande des pays les moins développés. Mais alors que ces pays ont fait la demande de ces « flexibilités », les Etats-Unis et l’Europe semblent hésitants à les obliger.

    Les droits de la propriété intellectuelle sont des règles que nous créons – et qui sont supposées améliorer le bien-être social. Mais les régimes de propriété intellectuelle déséquilibrés mènent à des inefficacités – comme les profits obtenus par monopole et une incapacité à maximiser l’utilisation des connaissances – qui freinent le rythme de l’innovation. Et comme le démontre le cas Myriad, ils peuvent aussi entrainer la perte de vies humaines.

    Le régime de propriété intellectuelle américain – et le régime que les Etats-Unis sont parvenus à imposer au reste du monde avec l’accord ADPIC – est déséquilibré. Nous devrions tous espérer que par sa décision dans l’affaire Myriad, la Cour Suprême contribuera à la création d’un cadre plus sensible et plus humain.

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  • 3ème grande marche aux flambeaux en l’honneur de Sainte Jeanne d’Arc à Bordeaux !

    Venez nombreux honorer à Bordeaux, le 1er juin, la sainte de la patrie. Rendez-vous à tous les patriotes à 21h00, devant la Cathédrale de Bordeaux, pour une marche aux flambeaux ! Français levez-vous, notre nation ne doit pas tomber! Ne les laissez pas faire !

    http://www.contre-info.com/