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culture et histoire - Page 1853

  • L’absurdité ou la fin de l’Algérie Française, par Jean Faure

    Commençons par définir l’absurdité et l’absurde. D’après le dictionnaire Paul Robert, en six volumes, « absurde » signifie « qui viole les règles de la logique, de la raison ». Selon Lalande (Vocabulaire de la Philosophie) : « l’absurde doit être distingué du non-sens ; car l’absurde a un sens, et est faux, tandis que le non-sens n’est probablement ni vrai ni faux. »Un certain nombre d’écrivains ont examiné le monde absurde ou les situations absurdes. Il faut remonter à la Grèce antique pour trouver l’absurde dans le mythe de Sisyphe. Un terrible châtiment est infligé à Sisyphe qui est condamné à faire rouler éternellement un rocher sur une pente pour atteindre le sommet d’une montagne, alors qu’il sait que dès qu’il est parvenu à son sommet, le rocher retombera. Et Sisyphe devra recommencer éternellement son ascension jusqu’au sommet.
    Selon Albert Camus, qui a écrit une œuvre intitulée « Le Mythe de Sisyphe », le mythe signifie que l’on vit une situation absurde, répétitive, dont on ne voit jamais la fin ou l’aboutissement. Quatre œuvres de Camus ont été écrites sur le thème de l’absurde : « Le Mythe de Sisyphe », « L’étranger », « Caligula » et « La peste ».
    Selon notre grand écrivain d’Algérie, l’homme est le seul vivant à prendre  conscience  que le monde est  silencieux, et que jamais ce dernier ne répondra à nos appels de la  raison.  C’est en cherchant un sens à son existence que l’homme s’est dénaturé, car la nature ne lui répond pas. D’où ce sentiment de l’absurde, qui résulte d’une séparation de l’homme et de la nature.  « L’absurde nait de cette confrontation entre l’appel humain et le silence déraisonnable du monde. »
    C’est en prenant conscience de ce silence qu’il ressent un sentiment d’absurde. Camus nous dit que l’absurde fait partie de la vie et que chercher à le supprimer conduit  à nier la vie, comme c’est le cas pour le suicide.  Il parvient même à penser que Sisyphe arrive à être satisfait de son destin, par ce qu’il en prend conscience, assume cette douloureuse épreuve avec courage et lucidité, ce qui lui permet de surpasser sa douleur. Sisyphe n’est pas celui qui pousse indéfiniment son rocher, mais une personne lucide et courageuse, quelle que soit sa corvée. Camus arrive même à imaginer Sisyphe heureux. Il refuse le poids de l’absurde sur la vie. Et ce refus provoque la révolte. « Ce n’est pas la révolte elle-même qui est noble, mais ce qu’elle exige », a écrit Camus dans « L’homme révolté ». Dans ce livre, il écrit : « Qu’est-ce qu’un homme révolté ? C’est un homme qui dit non. Mais s’il refuse, il ne renonce pas, c’est aussi un homme qui dit oui, dès son premier mouvement. » Il faut être révolté pour goûter pleinement de la vie.
    D’autres écrivains se sont aussi intéressés à l’absurde.
    Eugène Ionesco, né en Roumanie, a écrit des œuvres  théâtrales ayant pour sujet l’absurde : La Cantatrice chauve, Les chaises, Le Rhinocéros et La Leçon.
    Louis Ferdinand Céline écrivit : Voyage au bout de la nuit, qui révèle l’absurdité du monde, de la première guerre mondiale qu’il a qualifiée « d’battoir international en folie ».
    Kafka a aussi écrit des romans traitant de l’absurde, en particulier La métamorphose, qui est l’histoire absurde d’un homme qui se réveille un matin transformé en scarabée ; Le Château, où le personnage principal vient d’un pays lointain pour un emploi de géomètre-arpenteur, et à qui on répond que l’on a pas besoin de lui  puisque toutes les mesures ont été effectuées ; Le Procès, qui relate l’histoire d’un homme, qui,  à la barre des accusés, ne sait pas pourquoi il est accusé.
    Il convient de faire remarquer que Camus a consacré un chapitre du Mythe de Sisyphe à Kafka.
    LA SITUATION ABSURDE DE LA FIN DE L’ALGÉRIE FRANÇAISE
    L’arrivée de De Gaulle après la révolution du 13 mai 1958 avait donné un grand espoir aux Pieds-Noirs et aux Musulmans fidèles à la France. Après avoir déclaré au monde entier qu’il était partisan de l’Algérie Française « de Dunkerque à Tamanrasset », il changea sa politique en se déclarant pour l’indépendance de notre belle Algérie, violant ainsi la constitution de la 5ème République qu’il avait fait faire pour lui-même.
    C’est à l’époque où le plan Challe obtenait d’excellents résultats sur le domaine militaire, le FLN étant pratiquement vaincu, qu’il décida d’établir une rencontre entre les représentants de l’État français et certains dirigeants du FLN.
    Cela a abouti à ce qu’on a stupidement appelé « les accords d’Évian ». En effet, ces accords signés par les deux belligérants ne devaient être respectés que par la France, les terroristes ayant déclaré, dès la signature de ces accords, qu’ils ne les respecteraient pas.
    C’est à cette époque (1961-1962) que l’absurde situation commença du côté français, aussi bien dans l’Armée, chez  les Pieds-Noirs, et chez les Harkis et les Musulmans qui étaient pour la France. Cette époque totalement absurde eut pour résultat de créer une division au sein de l’Armée, c'est-à-dire  entre les troupes d’élite (Parachutistes et Légionnaires) et les troupes du contingent qui n’avaient qu’un objectif : la quille, c’est-à-dire rentrer dans leurs foyers  en métropole.
    La raison principale de cette absurdité était que l’Armée Française avait pratiquement vaincu le FLN, et que la France, dans ces « accords » avait la position d’une armée vaincue. Nous avons tellement été dominés politiquement à Évian, que de Gaulle accepta de laisser la Sahara à l’Algérie avec toutes ses réserves d’hydrocarbures, estimées être bien supérieures à celles du golfe persique.  C’était vraiment absurde !
    Étant vainqueurs nous avons agi comme des vaincus. Le Sahara pouvait, si nous l’avions gardé, nous apporter une indépendance énergétique pour plusieurs dizaines d’années. Nous aurions même eu un fort excédent, ce qui nous aurait permis d’exporter du pétrole et du gaz.
    Cette terrible absurdité consécutive à l’attitude stupide de celui qui avait déclaré à des officiers, lors de la tournée des popotes du 3 au 5 mars 1960 : « Le combat va durer longtemps. Mais il n’y aura pas de Diên Biên Phu en Algérie. L’indépendance de l’Algérie est une absurdité ». Il faut signaler aussi cette autre absurdité : après les « barricades », 200 officiers furent mis aux arrêts de rigueur, plus de 500 furent mis en congé spécial, 500 furent rayés des cadres de l’armée et 1300 démissionnèrent en 1961.
    D’ailleurs, Camus avait écrit : « Les accords d’Évian sont une absurdité. »
    Lors de la seconde tournée des popotes, de Gaulle a déclaré à des officiers : « Moi vivant, le drapeau vert et blanc ne flottera jamais sur Alger. » Une absurdité de plus, et un mensonge de plus !
    Tout le monde sait que de Gaulle est mort après l’indépendance de l’Algérie. Comme le dirait Monsieur de la Palice : De Gaulle était donc vivant à l’indépendance de l’Algérie.
    Messmer n’a pas hésité à dire à de Gaulle que : « La grande majorité (des officiers) ne comprend pas la politique du général de Gaulle. »
    Puis, d’absurdités en absurdités, la révolte se déclencha aussi bien dans l’Armée que chez les Pieds-Noirs.
    LA RÉVOLTE
    Il y eut d’abord le putsch des généraux Challe, Salan, Zeller et Jouhaud, qui ne dura que trois jours, Challe ayant refusé que sang français coule dans un affrontement entre les putschistes et les gaullistes.
    Puis ce fut la révolte de l’OAS qui dut combattre, à la fois, le FLN et les forces gaullistes (gendarmes mobiles et CRS).
    Ce fut ensuite une des dernières phases de cette révolte avec les condamnations et exécutions de certains officiers putschistes.
    Lorsque Salan fut condamné à la prison à perpétuité, le 23 mai 1962, de Gaulle a déclaré : « Nous sommes un pays complètement décadent. N’importe qui serait condamné à mort en Grande-Bretagne, en Allemagne ou aux États unis, mais en France, on vous envoie jouer au ballon dans la cour de la prison de Tulle. »
    La fusillade du 26 mars 1962, que l’on pourrait qualifier de génocide, vint encore endeuiller notre Algérie. Sur un ordre du pouvoir gaulliste, des tirailleurs furent installés pour arrêter la marche pacifique et silencieuse des Algérois qui voulaient soutenir le quartier de Bab el Oued qui était victime d’une attaque des forces gouvernementales. Des avions T6 sont même passés à l’offensive en larguant des bombes et en utilisant des mitrailleuses. J’ai pu observer ces attaques du boulevard Bru, d’où je voyais toute la ville. Ces attaques m’ont fait penser à l’attaque par les nazis du ghetto de Varsovie.
    La marche des Algérois vers Bab el Oued fut attaquée à la mitrailleuse et au fusil-mitrailleur par des tirailleurs qui n’avaient pour mission que de stopper cette marche pacifique, sans utiliser leurs armes.
    Il y eut plus de 100 morts au voisinage de la Grande Poste, et plusieurs milliers de blessés. Je puis apporter mon témoignage, m’étant trouvé au voisinage de cette tuerie, mais ayant eu la chance de ne pas me trouver dans l’axe des tirs. Cette tuerie fut l’un des prémices de la fin de notre Algérie. De Gaulle voulait nous prouver que nous devions accepter sa politique.
    Puis ce fut la fin de notre belle Algérie. L’exode de plus d’un million de Pieds-Noirs et de quelques milliers de Harkis, qui purent être sauvés grâce à des officiers français qui n’ont pas obéi aux ordres de notre sanglant dictateur, mais qui ont préféré obéir à leur conscience.
    En conclusion, il semble nécessaire de citer encore Albert Camus :
    « La vérité jaillira de l’apparente injustice. » (La peste, Albert Camus)
    « La liberté, seule valeur impérissable de l’histoire. » (L’homme révolté, Albert Camus)¢
    Références
    1 – Œuvres complètes, Albert Camus
    2 – Eugène Ionesco Wikipédia fr.wikipedia.org/wiki/Eugène_Ionesco
    3 – Louis Ferdinand Céline Wikipédia fr.wikipedia.org/wiki/Louis-Ferdinand_Céline
    4 – Absurde http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Absurde&oldid=88616606

    http://www.francepresseinfos.com/

  • Dostoïevski et les violences illuminées du Parti socialiste

    par Nicolas Bonnal.

    — Nous savons qu’un doigt mystérieux a désigné notre belle patrie comme le pays le plus propice à l’accomplissement de la grande œuvre.

    Parti des banques et des médias, le PS se veut aussi un parti d’avant-garde, un parti refondateur de notre France et de l’espèce humaine.

    On se doutait que la destruction de la famille et l’achat de nouveau-nés, encouragés par les temps globalisés qui courent, ne rencontreraient pas un grand écho public ; surtout si une loi destinée à favoriser les théories d’avant-garde illuministe et les intérêts d’un lobby surreprésenté dans la mode et les médias, les affaires et la politique (et ce de la gauche à l’extrême droite maintenant) heurtait de front une énorme majorité de la population. Mais on n’osait présager ce qui allait se passer : le passage à tabac du petit peuple contestataire et familial.

    Je ne réside pas en France, je n’en ai pas le cœur. Je peux témoigner qu’à l’étranger les médias n’ont rien dit, et qu’ils ont à peine insisté sur les… milliers de manifestants (les milliers de manifestants ??? On est bien gardés partout.)

    J’ai eu plusieurs amis et amies arrêtés et tabassés par la police ; des gardes à vue, des nuits au poste, des charges, des gazages fondés sur des théories de la conspiration (nous on s’affronte à la réalité de la conspiration, ce n’est pas la même chose) ; c’est d’autant plus étonnant qu’il s’agissait non pas de militants musclés mais de gentils pères et mères de famille, des cathos comme il faut, comme disent les médias officiels avec leur mépris raciste et ricaneur. Il devait même y avoir des bobos au sens strict, des petits laïcs avec leur bonne famille. J’ai même su que de bons petits étudiants pourtant gentiment conditionnés par la lecture de Luther King ou Mandela avaient aussi été tabassés. On a balancé le gaz (changer le mot, comme chez Orwell) sur les mères et leurs enfants, et comme on avait tort, on s’est acharné sur les victimes, ce qui est dans la logique de ces temps post-libéraux (fonctionnaires, retraités, assistés, c’est vous qui nous ruinez et pas l’euro !) et post-démocratiques : on vous prendra vos sous, vos vies, vos idéaux. Paris est en état de siège et l’on se doute que les Invalides, le Champ de Mars et les quartiers traditionnels ne seront plus les mêmes. Les forces spéciales seront prêtes. Un ground zero se prépare, c’est bon pour les sondages, car les socialistes qui ont mis tout le monde à bout en quelques mois, ont encore quatre années à tirer, et ils ne se sont pas près de se tirer, même s’ils ne s’en tireront pas comme ça. Entre deux tenues et deux partouzes, ils nous préparent un sale coup à la manière des méchants des péplums hollywoodiens. Un grand incendie de Rome, arrosé à l’hélium ?

    L’important est de haïr le peuple dont l’ordre mondial vous adonné la charge ; et le traiter en conséquence. Le gouvernement sera francophobe ou ne sera pas. C’est comme ça qu’après un ministre deviendra commissaire européen ou bossera pour les pétroles ou Goldman Sachs.

    L’arrogance, la muflerie, la vulgarité et la mauvaise foi du sous-ministre en charge ne connaît pas de limite. Je le soupçonne, ce membre actif du club milliardaire et conspirateur des Bilderbergs, de guetter la salive à la bouche le moment où il y aura des morts pour interdire entre autres toute manifestation, cette dernière tradition française et populaire. Il criera alors à la conspiration intégriste, en appellera à Dan Brown et incriminera la filière tchéchène pour faire plaisir à son copain Obama (un libéral est toujours un lèche-bottes, remarque aussi Dostoïevski). On ouvrira des camps, sans doute, pour enfermer les ennemis de la liberté. Ils sont 99%. On n’est plus à ça près dans la démocratie-marché, cette société qui considère que la civilisation est un marché ou plutôt un centre commercial ; que les populations sont remplaçables ; et que les élections ne sont plus même nécessaires là où elles se font gênantes.

    Le ministre à matricule avait morigéné il y a un an les journalistes les plus soumis du monde, comme FOG, au motif que ces derniers avaient bêlé avec les moutons du paysage médiatique américain lors d’une arrestation-spectacle. On a vu que ce pauvre DSK n’était pas si innocent que cela, et que les socialistes sont des innocents aux mains sales, pour reprendre un titre célèbre. Pour les taxes et le sexe, les socialos sont des champions ; pour trafiquer les feuilles de vigne des impôts aussi.

    Les socialistes sont des bourgeois illuminés, comme les avocats guillotineurs de la Révolution, avec un certain nombre de tares sociales et sexuelles, et ce sont aussi des possédés. Adorateurs des contes de fées et comptes en banque, personne ne les a mieux expliqués que Dostoïevski dans son meilleur opus : « J’ai remarqué, me faisait-il observer un jour, que tous ces socialistes fanatiques, tous ces communistes enragés sont en même temps les individus les plus avares, les propriétaires les plus durs à la détente ; on peut même affirmer que plus un homme est socialiste, plus il tient à ce qu’il a. »

    La folie de la théorie du genre qui ne repose sur rien de moral ni même de scientifique (je mets la science après la morale ; j’ai encore le droit ?) mais seulement sur des fantaisies de psychanalystes est aussi présente dans l’œuvre du grand maître russe : le despotisme marche de concert avec l’aberration idéologique. Rappelez-vous 93, les nouveaux prénoms de la révolution, le nouveau calendrier, les nouveaux cultes. Avec ces illuminés, on n’a jamais fini.

    Mais rappelez-vous que dans Fourier, dans Cabet surtout, et jusque dans Proudhon lui-même, on trouve quantité de propositions tyranniques et fantaisistes (ou fantastiques) au plus haut degré.

    Dostoïevski annonce aussi les bric-à-brac déments de notre enseignement avancé, de nos magistrats investis par le trotskysme et de l’avant-garde idéocratique qui rêve de parader dans les soirées milliardaires et phil-entropiques : « Le précepteur qui se moque avec les enfants de leur dieu et de leur berceau, est des nôtres. L’avocat qui défend un assassin bien élevé en prouvant qu’il était plus instruit que ses victimes et que, pour se procurer de l’argent, il ne pouvait pas ne pas tuer, est des nôtres. Les écoliers qui, pour éprouver une sensation, tuent un paysan, sont des nôtres. Les jurés qui acquittent systématiquement tous les criminels sont des nôtres. Le procureur qui, au tribunal, tremble de ne pas se montrer assez libéral, est des nôtres. »

    Frapper la mère de famille et gazer son bébé devient la blague du salon rose et le devoir du CRS briefé et conditionné ; tout comme détaler devant les racailles de banlieue et encenser le criminel moyen qui en somme ne fait que son devoir rousseauiste de redresseur des torts sociaux. Dali disait déjà aux surréalistes qu’il serait « plus amusant » de faire sauter les pauvres. Et Dostoïevski : « Savez-vous combien nous devrons aux théories en vogue ? Quand j’ai quitté la Russie, la thèse de Littré qui assimile le crime à une folie faisait fureur ; je reviens, et déjà le crime n’est plus une folie, c’est le bon sens même, presque un devoir, à tout le moins une noble protestation. »

    Le plus inquiétant est que des canards bourgeois ont encensé le ministre en question ; que le monde sagouin et subventionné de la presse écrite s’acharne contre les deux millions de français descendus dans la rue ; et que la folie absolue de la bourse et de la spéculation accompagne cette descente aux enfers de la politique, de la justice et de la morale. La destruction par la dette et l’euro – créé à cet effet – de l’emploi et du patrimoine français attend la destruction de ce qui reste de la famille et la nature.

    Le plus inquiétant aussi est que la dégénérescence des partis politiques de droite et d’extrême-droite censés jadis représenter une France réelle et non plurielle, conservatrice et non moderne, interdit de songer à une alternance crédible dans quatre ans ou moins maintenant… Jamais la démocratie parlementaire si souvent en crise dans notre histoire n’a semblé aussi courte, aussi inadaptée, aussi dérisoire. Il va falloir que le peuple des parents et des enfants prenne son destin en main laissant la matraque aux ministres et les prébendes aux autres malotrus.

    On n’en a pas fini avec la nuit ; pas celle du moyen âge bien sûr, mais celle des temps modernes et illuminés.

    Les mesures proposées par l’auteur pour supprimer le libre arbitre chez les neuf dixièmes de l’humanité et transformer cette dernière en troupeau par de nouvelles méthodes d’éducation, – ces mesures sont très remarquables, fondées sur les données des sciences naturelles, et parfaitement logiques.

    http://francephi.com

  • Léon Daudet : Le dernier imprécateur

    1992 mérite d'être « une année Daudet ». Pour le centenaire de l'édition de son premier roman, Haeres, et le cinquantenaire de sa mort, voici que paraÎt un énorme récueil de ses Souvenirs et polémiques, ainsi qu'une superbe biographie de, François Broche, qui arrive à son heure, celle d'un jugement enfin dépourvu de passion sectaire. Il fallait arracher « le gros Léon » à ses ennemis comme à ses partisans, tous pareillement obsédés par le fait qu'il fut probablement le premier polémiste de son siècle et que son style reste terriblement marqué par des passions qui voisinaient parfois le délire.
    Réduire Daudet à cette caricature de furieux truculent est une trahison. Daudet est beaucoup plus que Daudet. Le personnage se situe entre Gargantua et Ubu-roi ou du moins Ubu royaliste. Par toutes ses fibres familiales et sentimentales, il appartenait sans nul doute à ce XlXe siècle qu'il s'obstinait à déclarer « stupide » et fut avant tout, beaucoup plus qu'un conservateur, un réactionnaire, c'est-à-dire un homme qui juge, qui dénonce et qui hurle. Pas méchant bougre quand il ne s'agissait pas de la chose publique, mais vite emporté par son tempérament et ses phobies. Cet écrivain prolixe entre tous risque souvent d'apparaÎtre inactuel. C'est bien dommage à notre époque de grisaille et de conformisme cafard.
    Léon Daudet fut toute sa vie obsédé par les problèmes de l'hérédité. C'est d'ailleurs le titre de son premier bouquin, Haeres, paru voici tout juste cent ans, où l'on découvre le regard du clinicien plus que du romancier.
    Personnellement, il est le fils d'un père, de famille ardèchoise, devenu provençal par la grâce d'une écriture mistralienne :
    Alphonse Daudet, dont tous les écoliers connaissent au moins les Lettres de mon moulin. La famille de sa mère, Julia Allard, est d'origine bretonne et tourangelle. « Chez les Allard, on était républicain et tout à fait indifférent en matière religieuse, alors que chez les Daudet, on marquait une préférence pour "le double flambeau balzacien" : la religion et la monarchie », écrit François Broche.
    L' enfant qui naît à Paris, le 16 novembre 1867, dans le quartier du Marais, mêlera hardiment une liberté d'esprit aux limites de l'anarchisme, assortie d'un fort tempérament de bon vivant, avec un engagement civique qui fera de lui le champion du « nationalisme intégral ».
    Le mélange est assez détonnant, surtout si l'on y ajoute une incroyable facilité de plume, qui le conduira à écrire cent vingt-cinq livres et des milliers d'articles, dont son éditorial quotidien dans L'Action française. Sans compter les discours, car il sera aussi un habitué des estrades.
    La silhouette à la Falstaff de cet admirateur de Shakespeare, auquel il consacrera un de ses meilleurs essais, est inséparable des réunions monarchistes du début du siècle et de l'entre-deux-guerres. Le temps alourdira sa forte corpulence, aux limites de l'obésité. Quant à son profil, il fera la joie des caricaturistes, qui accentueront un certain aspect levantin. Il se montrera d'ailleurs antisémite avec une telle monomanie que certains, à commencer par quelques Israélites, prétendront qu'il devait être quelque peu juif.

    La médecine et la littérature avant la politique
    La politique pourtant, au début d'une carrière fulgurante, le tente moins que la médecine qu'il étudiera, jusqu'à sa thèse de doctorat exclue, et que la littérature, où il ne se montrera pas inférieur à son illustre père, dans des registres très différents.
    Il est dans sa jeunesse bambocheur, gastronome, cocardier, nietzschéen et plus admirateur de Clemenceau et même de Gambetta que du général Boulanger. Pourtant, ce garçon, doué comme pas un, est finalement influençable. Il rencontre beaucoup d'écrivains chez son père et il sera toujours séduit par quelques plumes alertes Drumont avant tout, puis Barrès et enfin Maurras. Mais aussi Zola pour un temps, Proust pour toujours et Céline sur le tard. Il aura même pour « chère patronne » Juliette Adam, qui lui mettra au cœur, à jamais, « une haine lucide de la Bête allemande ». Son antigermanisme rencontre son antisémitisme pour le lancer très tôt dans une campagne contre « l'espionnage juif allemand », qui lui tiendra finalement lieu toute sa vie de ligne de conduite politique.
    Un premier mariage raté avec la petite-fille de Victor Hugo sera suivi d'une union réussie avec sa cousine germaine, surnommée « Pampille » ; elle sera pour beaucoup dans sa conversion, somme toute tardive, au double service du trône et de l'autel.
    Même si l'affaire Dreyfus le verra au premier rang des défenseurs de l'armée, il reste assez insolite dans la cohorte des bien-pensants. En 1895, il déplore qu'on ne puisse être « à la fois napoléonpremiériste, anarchiste et socialiste » ! Cette future idole des camelots du roi ne se défendra jamais d'une certaine sympathie pour les révolutionnaires de la bande à Bonnot.
    Quant à ses démêlés avec l'Eglise, ils sont « hénaurmes », à l'image du personnage. Il commet dans sa vie une bonne quarantaine de romans, effroyables mélos où les situations scabreuses abondent. Ces petits bouquins, considérés comme pornos, sont presque tous inscrits à l'Index. Il s'en console en se recommandant de Rabelais. Ces gauloiseries de carabin le rendent plutôt sympathique, mais n'ajoutent rien à sa gloire littéraire.

    Un patriotisme exacerbé
    Sorti finalement grand vaincu de l'affaire Dreyfus, il va se rattraper pendant la Grande Guerre, où l'Union sacrée lui permet d'être du côté du pouvoir et de jouer un rôle de « procureur du roi », inlassable dénonciateur des pacifistes, qualifiés de traîtres à longueur de colonnes. Avec le recul du temps, on peut estimer que ses pires ennemis furent souvent les hommes les plus lucides de leur époque, à commencer par Caillaux et même par Briand. Il n'en a cure et son patriotisme exacerbé conduit ce royaliste à soutenir le jacobin Clemenceau, pour la seule raison qu'il a érigé le bellicisme intransigeant comme seule ligne de conduite.
    Curieusement, il est difficile de détester un polémiste si outrancier qu'on finit par ne plus le prendre au sérieux. Il fait rire et pourtant provoque des blessures inguérissables. Il a compris que le ridicule peut tuer au moins politiquement. Et que le mensonge est une arme efficace. Peu lui importe, puisqu'il sert une « bonne cause ».
    Député plus sérieux qu'il n'y paraît, de 1919 à 1923, polémiste d'un rare courage physique, capable de défendre à coups d'épée ses idées, ses humeurs et ses excès, travailleur inlassable, il trouve encore le temps de mener des bagarres de rues, de partager la table de ses collègues de l'académie Goncourt et de lire tous les livres qui paraissent.
    Un terrible événement va bouleverser sa vie en novembre 1923, la mort mystérieuse de son fils Philippe. Ce drame lui inspirera sans nul doute la plus hasardeuse et la plus déchirante de ses campagnes de presse. Il se retrouvera en prison pour diffamation, s'évadera dans des circonstances rocambolesques, vivra deux ans en exil en Belgique, reviendra, amnistié, en triomphateur. Mais un ressort est brisé à jamais, même s'il travaille jour et nuit, Gomme s'il voulait s'étourdir. Le réveil de l'Allemagne et la montée inéluctable de la guerre l'accablent, alors que les événements viennent vérifier ses avertissements.
    Après la défaite, il rejoint L'Action française, repliée à Lyon, et défend jusqu'à sa mort, à Saint-Rémy-de-Provence, le 30 juin 1942, l'idée de « la France seule ».
    Ses romans sont aujourd'hui illisibles, ses pamphlets ont terriblement vieilli, mais ses livres de critique littéraire ont quelque chose de prophétique. Ses recueils de souvenirs restent, sans aucun doute, le meilleur de son œuvre. Ils sont datés et pourtant ne datent pas. Derrière l'imprécateur, excessif et injuste, apparaît le témoin capital d'un demi-siècle de vie nationale.
    Jean Mabire : National Hebdo du 15 au 21 octobre 1992.

    François Broche : Léon Daudet, le dernier împrécateur, 468 pages, 23 photos, Robert Lattont.
    Léon Daudet : Souvenirs et polémiques, 1 400 pages, Collection « Bouquins », Robert Lattont.

  • Cernunnos.

    Cernunnos est un nom d'Hermès. Il est le Gardien des portes des Trois Mondes. Hermès désigne les yeux du dieu. Quand l'homme voit avec les yeux du dieu, alors il comprend les messages des Trois mondes. Il ne lit aucune lettre de plus, aucune image de plus – il voit, tout simplement, ce qu'il avait sous les yeux depuis toujours, toujours déjà présent.
     
    Recevoir un message des Trois mondes est voir. Cernunnos est celui qui contemple la forêt, les jambes croisées, selon la posture hiératique du sage des bois, l'ermite, l'homme suprêmement sage et suprêmement sauvage. La forêt est une image du monde, est microcosme. Il s'y trouvent les chemins de la vie, les croisements saints, les mystères des chemins ouverts parmi les ronces, les lents regards des fleurs. Il s'y trouvent les ruisseaux et les étangs empruntés de brumes.
     
    Le secret de la puissance.
     
    Ils s'y trouvent les troncs moussus des arbres qui vivent là depuis la naissance du monde. Leur écorce est l'image de la peau de l'antique Dragon. L'homme qui sait le Dragon sait l'entière histoire du monde, et des hommes. Il a bu le lait noir de la connaissance aux lèvres des Maîtres, au cœur de la forêt, au centre du monde marqué par la poussée des roches vers le Ciel.
     
    Comme la sainte colonne de feu d'Arunachala.
     
    Cernunnos enseigne les mystères du Temps apparu après la chute et la mort du Dragon. Le temps est figuré par le serpent ouroboros. La Vie est un cercle. On sort du Suprême, et on revient vers le Suprême. L'axe du monde est une flèche vers le suprême, le centre invisible du Serpent. Cernunnos tient le serpent déroulé, en vainqueur des cercles, mais aussi en homme de la périphérie, en homme qui a choisi la Voie du Dragon et bu le jus, le venin issu des cuisses de la Jusquiame mystique.
     
    Il a été plongé dans l'eau noire des ténèbres, et se tourne vers la Lune, image tremblante et mobile du Soleil invaincu – image de ce monde. Les mots sont comme la lune – rien ne s'y trouve au suprême degré. Lors de l'invocation, quelque chose s'ajoute secrètement aux mots – et de la boue, fait de l'or.
     
    Sans souffle les mots ne sont rien.
     
    Il a bu la mort, et il vit ; il a maîtrisé le serpent qui est désormais à son service, comme les autres puissantes bêtes sauvages qui vivent en lui. Il est la puissance et la volonté de puissance qui jaillissent dans la forêt au printemps, l'odeur musquée des feuilles mortes et des marais, le puissant parfums des feuilles et des fleurs, les eaux et les rosées, la sueur salée, le sperme et la cyprine. Il est à la fois tueur, puissance de génération sauvage, maître des rapts, tonnerre et terreur. Il porte à la main la puissance torque qui soumet les vaincus. Il est le messager de la nécessité unique, du trépas, père de la douleur.
     
    Ce qui est détruit est ce qui vit. Le monde est fait de cycles qui se sédimentent. Rien n'est jamais perdu à jamais.
     
    Cette torque qui soumet les vaincu par le cou gracile est signe de règne, du règne de l'Empire. Celui qui se plie à la nécessité de fer des dieux, si visible dans la violence des chasses sauvages, dans les crocs du loup, est aussi le roi de ce monde. Le guerrier porte ainsi la torque, comme la femme puissante, la torque d'Or.
     
    Il est libre par amour du destin, comme le Cerf. Il n'est libre que par l'amour du destin. Il n'est vivant que par l'âpre mort et le goût du sang. Il n'a plus guère de peur pour avoir affronté la terreur de la chair.
     
    Il sait qu'il mourra comme les bêtes de la forêt – ni plus ni moins. L'éternité réside dans l'instant. L'idée puissante se montre dans les couleurs et les formes des forêts, présente mais insaisissable, comme l'évoque l'art de l'arabesque. Elle se montre comme le Serpent et enroule ses énigmes comme les anneaux du Serpent. Elle est la fleur sur les ronces, et déchire l'âme qui veut les traverser, par la solitude et les épines tranchantes. Elle porte des fruits et encercle, elle envoûte et étouffe.
     
    Tel est le secret de Cernunnos. C'est dans la soumission que se trouve l’élévation, dans l’acceptation que se trouve le secret de la plus haute révolte.
     
    (Un autre secret se prononce au sujet de sa mélancolie. Ce sujet est abordé dans le Livre des deux principes.)
     
    Cernunnos est l'indomptable et le suprême raffinement – comme l'Archange, le tueur du Dragon, mais aussi le combat entre l'Ange et le Dragon – le Dragon lui-même, car on ne combat valablement, enfin, que contre soi-même.
     
    Mais peu nombreux sont les hommes qui se cherchent eux mêmes – et combien peu ceux qui se cherchent eux-même pour se tuer.
     
    Tel est le règne, telle est la puissance, telle est la gloire.
     
    - J'ai longuement médité aux côtés de Cernunnos, dans les fumées des encens.
     
    Vive la mort !

  • Critique de Il Mito del Sangue de Julius Evola

    Critique de Il Mito del Sangue de Julius Evola Ce petit volume est une histoire du racisme, depuis les théories du comte de Gobineau et de Vacher de Lapouge, puis de Houston Stewart Chamberlain, jusqu’aux nouveaux développements qu’il a reçu récemment en Allemagne et qui y ont revêtu le caractère d’une doctrine en quelque sorte « officielle ». Le terme de « mythe » n’est pas pris ici dans le sens d’une simple fiction imaginative, mais dans celui d’une « idée qui tire principalement sa force persuasive d’éléments non rationnels, une idée qui vaut par la force suggestive qu’elle condense, et, par suite, par sa capacité de se traduire finalement en action ».

    L’auteur, s’efforce d’ailleurs d’être aussi impartial que possible dans son exposé, bien que, naturellement, il ne dissimule pas les contradictions qui existent entre les diverses conceptions dont l’ensemble constitue le racisme, et que parfois il laisse même deviner les critiques générales qu’il aurait à leur adresser, critiques qui portent surtout sur le caractère « naturaliste » et « scientiste » qu’elles présentent dans la plupart de leurs aspects.

    A vrai dire, la notion même de race est assez difficile à préciser, d’autant plus qu’on est en tout cas forcé de reconnaître qu’actuellement il n’existe nulle part de race pure ; ce qui est plutôt singulier, d’autre part, c’est que les races ou soi-disant telles qu’envisagent les anthropologistes et les préhistoriens, dont les travaux sont plus ou moins à la base de toutes les théories en question, n’ont plus absolument rien à voir avec les races qui furent reconnues traditionnellement de tout temps ; il semblerait que le mot soit pris là en deux sens totalement différents.

    Un point, par contre, ou ces théories se sont totalement rapprochées des données traditionnelles, c’est l’affirmation, si longtemps perdue de vue en Occident, de l’origine nordique ou hyperboréenne de la civilisation primordiale : mais, là encore, bien des confusions et des interprétations fantaisistes ou hypothétiques se mêlent, dans des ouvrages comme ceux d’Herman Wirth par exemple, à la reconnaissance de cette vérité.

    Tout cela, au fond, et même dans les éléments valables qui s’y rencontrent, ou, si l’on préfère, dans la façon dont ils sont traités, relève donc certainement bien plutôt de la « recherche » moderne que de la connaissance traditionnelle ; et c’est bien pourquoi le point de vue « naturaliste » qui est essentiellement celui des sciences profanes, ne saurait guère y être dépassé ; quant à savoir ce qui sortira finalement de ce véritable « chaos » d’idées en fermentation, c’est là, assurément, une question à laquelle l’avenir seul pourra apporter une réponse.

    René Guénon http://www.voxnr.com

    Notes :

    René Guénon, Compte rendu de livre, Editions Traditionnelles, Juillet 1937.

  • La Cause des Blancs trop souvent trahie

     

    130517

    Nous vivons vraiment sous une écœurante république. Ce régime destructeur écrase même en nuisance celle des petits hommes qui l'incarnent. Voilà ce que confirmait, une fois encore, la conférence présidentielle du 16 mai. Et, de toute manière, hélas, notre époque restera longtemps marquée par sa très grande capacité d'imposture.

    Or, tout cela ne s'est abattu sur ce pauvre pays, ni par hasard ni par un sortilège qui demeurerait inexplicable. Il nous faut donc accepter de revisiter le legs le plus lourd du passé de la France. On doit dès lors observer les stigmates imposés par la Révolution de 1789, par la Terreur de 1793 et par l'affreuse aventure qui s'achève en 1815. Seul cet examen permet de comprendre à quelles sources puisent à la fois la gauche, qui s’en prévaut, et la droite qui s'y englue.

    Or, les réseaux un peu artificiels qui monopolisent l'actuelle opposition n'osent guère s'interroger sur la part de rejet qu'appelle cet héritage.

    La parution du quatrième et dernier volume de "l'Histoire de la Vendée militaire" de Jacques Crétineau-Joly nous en donne, au contraire, une magnifique occasion. Cette immense enquête, à la fois passionnée, méticuleuse et passionnante, toujours précise et documentée, nous ramène aux éléments fondateurs de la droite française.

    Beaucoup plus qu'avec l'Allemagne, c'est la comparaison avec l'Angleterre qui s'impose. Au-delà des vicissitudes que ce pays a connues lui-même, au-delà des tribulations que la politique ministérielle de Londres a imposé aux royalistes, et que Crétineau-Joly expose sans fard, on peut, on doit constater que cette nation a largement bénéficié, pour elle-même, de son rejet des illusions idéologiques du continent.

    À cet égard, le grand roman manifeste de Disraëli, "Coningsby", permet de mesurer, en effet la distance qui sépare les conservateurs anglais de ceux qui, en France, se nommèrent si longtemps les "modérés".

    En Grande Bretagne l'horreur de la révolution de Paris a conduit et construit l'évolution des "tories". Ceux-ci étaient apparus au cours de la Restauration stuartiste du XVIIe siècle. Au cours du XVIIIe siècle, époque dominée par les "whigs", ils restèrent largement dans l'opposition. Ils deviendront un parti officiellement constitué à l'avènement de Victoria en 1837. (1)⇓

    Entre-temps, ils avaient rallié ceux des anciens "whigs", comme Edmund Burke et William Pitt lui-même, qui avaient compris où menait le jacobinisme de la puissance adverse et de ses rares sympathisants outre-Manche. (2)⇓

    En France aujourd'hui encore, au contraire, on a pu voir lors des récents rassemblements contre la Loi Taubira de cet hiver des manifestants classés "à droite" qui coiffaient le bonnet phrygien.

    Cette pseudo-droite s'est séculairement employée à mettre à l'écart les véritables défenseurs de l'ordre naturel et des libertés. L'embargo et la répression frappèrent successivement les royalistes, requalifiés légitimistes sous Louis-Philippe, puis les catholiques, etc.

    Cette exclusion accompagna, au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, la lente conquête culturelle "républicaine". À noter que ce mot fourre-tout est devenu de plus en plus signe de ralliement autour des mots d'ordre et des exclusives du grand-orient de France, officiellement rallié à l'athéisme à partir de 1877.

    Or ce phénomène d'épuration par strates historiques successives n'épargne pas les règnes, pourtant si réparateurs à tant d'égards de Louis XVIII et de Charles X. Un chapitre essentiel de Crétineau-Joly, malgré sa pointe d'amertume est précisément consacré à cette Ingratitude de la Restauration. (3)⇓

    L'auteur conclut par ce constat : "Le 29 juillet 1830, elle se voyait en face des barricades et des pavés de l’insurrection victorieuse. La Restauration mourait parce qu’elle n’avait pas voulu vivre." (4)⇓

    JG Malliarakis http://www.insolent.fr/

    Apostilles

    1. ce que décrit "Coningsby" c'est la genèse de ce parti, assemblage et alliance de classes autrefois antagonistes, à l'époque de la "Jeune Angleterre".
    2. tel Charles Fox baron Holland (1749-1806). Cet ancien ami du duc d'Orléans, admirateur de la révolution, fut un des artisans de l'éphémère paix d'Amiens de 1802. Sur les contacts entre les "Patriotes" de Nantes et les amis de Fox à Londres cf. Crétineau-Joly "Histoire de la Vendée militaire" tome III "Les chouans" 1793-1799 pages 43-47.
    3. cf. Crétineau-Joly "Histoire de la Vendée militaire" Tome IV "La Cause des Blancs" 1801-1832 chapitre VII pages 307-348
    4. cf tome IV p. 348
      Rappel des quatre tomes de "l'Histoire de la Vendée militaire" par Jacques Crétineau-Joly : Tome Ier "La Grande Guerre de 1793" 432 pages 29 euros ; Tome II "De la Terreur au Concordat" 1794-1799 502 pages 29 euros ; ; Tome III "Les Chouans" 1793-1799 484 pages 29 euros ; Tome IV "La Cause des Blancs" 1801-1832". .
  • Roland Dumas : un ancien ministre dénonce la dérive américaine et coloniale de la diplomatie française

     

    par Nicolas Bonnal

     

     

    :: Texte en russe

     

    Roland Dumas est un homme très connu en France et dans le monde de la diplomatie, même s’il est mis à l’écart par les sbires du nouvel ordre mondial. Héros de la Résistance à l’Allemagne nazie, il a ensuite été un très grand avocat qui s’est illustré dans la défense des peuples colonisés. Homme de gauche à l’époque où ce mot avait un sens, il fut l’ami et le ministre du Président Mitterrand, qui exerça ses fonctions en France de 1981 à 1995. Roland Dumas exerça quant à lui de nombreuses fonctions importantes, et notamment celle de Ministre des Affaires étrangères de 1988 à 1993. Sa politique était marquée par son équilibre, son humanisme et ses positions amicales envers le monde arabe et musulman, que la France sur ordre d’Israël et des Etats-Unis achève de détruire aujourd’hui, comme à l’époque de l’expédition du Canal de Suez en 1957. Ses positions lui ont valu l’opposition farouche du « lobby qui n’existe pas » (Serge de Beketch) et de la presse qu’il contrôle. Mais M. Dumas a insisté bravement et résisté, comme pendant la Guerre. Cet homme de culture amateur d’art a gardé le courage du mousquetaire.

     

    Roland Dumas s’insurge donc depuis 2007 surtout contre l’incroyable inflexion de la diplomatie française qui a pris un tour fascisant et colonialiste avec Nicolas Sarkozy, actuellement conférencier pour Goldman Sachs et voyageur de commerce du Qatar (au sens strict du terme). La France a fait la guerre partout pour des intérêts privés et coloniaux qui ne sont pas les siens. On retrouve le virage néo-totalitaire de l’Europe actuelle : on travaille pour les banquiers contre les peuples.

     

    Dans son dernier livre intitulé "Coups et blessures : 50 ans de secrets partagés avec François Mitterrand", l’ancien Ministre des Affaires étrangères Roland Dumas parlait déjà de ses souvenirs auprès de l’homme, mais dénonce également l’ingérence israélienne dans les affaires françaises : « Les Israéliens en font à leur guise en France, et manipulent les services de renseignements français (DST) comme bon leur semble ». Il évoquait ensuite les circonstances qui ont entouré la visite du chef de l’Organisation de la Libération de la Palestine (OLP) Yasser Arafat en France à la fin des années 80, assurant être lui-même l’architecte des relations avec le leader palestinien. Selon Roland Dumas, Mitterrand n’était pas contre l’idée de le rencontrer mais craignait la réaction du « lobby juif » : « Le lobby juif, comme l’appelait Mitterrand, oeuvrait ardemment. Les pressions étaient très fortes lorsque j’ai annoncé que je comptais rencontrer Arafat durant sa visite au Parlement européen en septembre 1988. J’ai obtenu du président Mitterrand, après de pénibles tractations, la permission de l’accueillir. Après m’avoir répété ses mises en garde, il m’a dit : "bon d’accord, mais tu en assumeras la responsabilité..." Peut-être voulait-il insinuer par-là ma démission si les choses tournaient mal ». M. Dumas ajoute : « Je ne suis pas d’accord avec la politique israélienne, j’ai toujours été fidèle au principe d’équilibre instauré par le général de Gaulle au Moyen-Orient. Les peuples arabes ont droit au respect. La politique israélienne actuelle, inspirée des activités proches des sionistes, ne suit pas le bon chemin ».

     

    Dans son livre "Coups et blessures" paru il y a deux ans, Roland Dumas estimait que les révolutions arabes sont l’événement le plus important après la fin du colonialisme et la chute du Mur de Berlin. Leur impact sur Israël serait formidable. Selon lui, l’Egypte était en train de payer le prix de l’humiliation qu’elle avait fait subir au peuple palestinien, et ce, par son laxisme avec les Américains et les Israéliens. L’ancien Ministre des Affaires étrangères s’est aussi longuement attardé sur la Syrie. Il révèle avoir rendu visite à l’ancien Président syrien Hafez al-Assad en 1992, sur une suggestion de Shimon Perez qui était alors chef de la diplomatie israélienne. Il rapporte leur longue discussion sur le Liban, durant laquelle Hafez al-Assad s’était attelé à lui expliquer que le Liban est une terre syrienne et que les problèmes sont dus aux Britanniques et aux Français qui avaient opéré un partage injuste. Dumas affirme qu’il sentait qu’Assad voulait le taquiner sans aller pour autant jusqu’à remettre en question les frontières léguées par le colonialisme. « Bien au contraire, c’est une chose qu’il a refusée, lorsque certains leaders maronites la lui ont suggérée, comme l’a rapporté Karim Bakradouni », un ancien responsable des Phalanges libanaises (Kataëb). Dumas dit aussi avoir connu le Président syrien actuel Bachar al-Assad. Il le qualifie d’ « homme charmant qui détient un esprit plus ouvert que celui de son père, un esprit pétillant, qui ne récuse pas les questions embarrassantes », estimant que les Israéliens se trompent de ne pas négocier avec lui.

     

     

    Je ne crois pas à la bombe iranienne.
    Tout cela n’est que de l’intoxication.

     

    Dans son ouvrage, Roland Dumas consacre tout un chapitre à l’Iran qu’il a, par ailleurs, visité plusieurs fois et où il a rencontré son ancien homologue Ali Wilayati et l’ancien Président Ali Akbar Hachemi Rafsandjani. « La bombe nucléaire iranienne est, à mon avis, à l’instar des armes de destructions massives de Saddam Hussein, c’est-à-dire que je n’y crois pas. Tout ce qui se passe n’est que de l’intoxication. Les tergiversations de la politique française sont dues à des immixtions aux origines connues », a-t-il précisé, signalant que la présence d’Israël aux portes rend toute analyse différente suspecte. Dumas défend le point de vue iranien selon lequel il est nécessaire d’édifier des réacteurs nucléaires pour ses besoins énergétiques puisque son stock en pétrole devrait se tarir dans 60 ans. « Ce qui est vrai est que les Iraniens veulent poursuivre leur programme nucléaire civil et que tous les rapports indiquent qu’il n’y a pas d’armes nucléaires », conclut-il.

     

    Récemment M. Dumas a publié un livre "Sarkozy sous BHL", qui dénonce la criminelle diplomatie de Sarkozy et son inféodation aux desiderata impérieux du NOM. Il l’a fait avec maître Vergès, un autre prestigieux avocat spécialisé dans la défense des peuples coloniaux aussi et dans les causes de droit. Les deux pamphlétaires critiquent le tout-argent de la politique française (qui a toujours existé mais s’est systématisé avec Sarkozy), le retour à la brutalité colonialiste (« nous sommes ramenés des siècles en arrière »), l’influence regrettable de BHL (qui existait aussi selon nous sous Mitterrand !) baptisé « mouche du coche » (La Fontaine), et la dimension irresponsable de personnages comme Sarkozy - son successeur socialiste ne valant hélas pas mieux que lui.

     

    Sur la Palestine, je laisse à ces deux nobles esprits le soin de conclure : « L’humanité se déshonore en laissant tomber le peuple palestinien qui est raisonnable, paisible et ne demande pour lui que ce que les Israéliens ont obtenu pour eux-mêmes. »

     

    Enfin, il est bon d’indiquer que l’un des prochaines cibles de la folle diplomatie française sera l’Algérie : Monsieur Dumas écrit : « Le contentieux entre la France et l’Algérie est durable. Quand vous imaginez que les Français n’ont pas encore souscrit à la proposition de négociations avec l’Algérie sur un contrat d’amitié, parce que trop de blessures sont encore saignantes... Tout est à craindre pour l’Algérie, mais ce sera pour M. Sarkozy un autre "morceau" »...

     

    De la France actuelle, on pourrait dire comme Sartre de l’Amérique, qu’elle a la rage.

    http://www.france-courtoise.info

  • Le siège de Constantinople (1453)-1/2

    La date de 1453 peut-elle marquer, comme certains l'ont fait, la fin du Moyen Age ? De fait, la disparition de l'Empire byzantin survient alors que la Renaissance a déjà commencé en Italie. Depuis un demi-siècle, les érudits byzantins arrivent en nombre en Occident. La conquête de l'Egypte par les Ottomans a davantage de répercussions pour les transactions commerciales, en particulier celles des cités italiennes, que la chute de Constantinople. En Europe, si beaucoup sont choqués par la tombée de la ville, les Etats et les souverains sont préoccupés par des problèmes plus immédiats géographiquement. La papauté essaie de mener la contre-attaque mais sans y parvenir véritablement. En réalité, la chute de Constantinople est importante d'abord pour les deux camps concernés. Les Ottomans assurent la pérennité de leur empire en Europe en prenant la ville. Ils convoitent alors la Roumélie (« le pays des Romains ») de la même façon que les conquistadors espagnols convoiteront plus tard le Nouveau Monde. Pour les Grecs, c'est la fin d'un empire mais pas d'une civilisation, dont le souvenir perdure jusqu'à la renaissance de la Grèce en tant qu'Etat au XIXème siècle.
    Stéphane Mantoux

    Le long déclin de l'Empire byzantin...

    Lorsque l'armée ottomane se presse sous les remparts de Constantinople, en 1453, l'Empire byzantin est alors réduit à une peau de chagrin. La IVème croisade (1204) et le sac de la capitale par les Latins ont brisé l'Etat puissant qu'était Byzance. Quand l'Empire de Nicée reprend Constantinople en 1261, le basileus n'est plus qu'un souverain grec parmi d'autres : l'empire de Trébizonde et le despotat d'Epire, eux aussi grecs, lui sont hostiles. La Bulgarie et la Serbie, émancipées, rivalisent dans les Balkans. Nicée a dû faire appel aux Génois pour reprendre Constantinople aux Latins : les Génois, désormais installés à Galata/Péra sur la rive de la Corne d'Or, monopolise le commerce de l'empire. Au XIVème siècle, Byzance manque de succomber sous les coups des Serbes, de la révolte de la fameuse compagnie mercenaire catalane, tout en étant affaiblie par les épidémies de peste noire. Ironiquement, ce siècle est aussi celui d'une grande vitalité culturelle et intellectuelle. Cependant, l'union avec Rome sur le plan religieux, que certains empereurs tentent de mettre en oeuvre à des fins politiques, pour sauver l'empire, n'est jamais acceptée par le gros de la population byzantine. Constantinople ne compte plus alors que 100 000 habitants (contre un million au XIIème siècle !) à l'intérieur de ses 22 km d'enceinte : les quartiers sont séparés par des espaces en friche ou de jardins. Seule Sainte-Sophie est correctement entretenue par un Empire privé ou presque de ressources financières.
    Source : Larousse.fr
    Manuel II, qui devient empereur en 1391, a été l'otage du sultan turc. Il a même dû commander un régiment byzantin pour participer à la prise de Philadelphie en Asie Mineure, la dernière ville byzantine encore libre dans cette région. Réaliste, il refuse l'union des Eglises qu'il juge inacceptable par la population. Il tente de solliciter l'aide de l'Occident mais la croisade de 1396 s'achève en désastre devant Nicopolis. En 1402, l'armée ottomane s'approche une première fois de Constantinople mais Manuel II est sauvé par l'intervention de Tamerlan, qui met hors-jeu les Turcs pour une vingtaine d'années. Un nouveau siège en 1422 par le sultan Mourad II n'est pas plus concluant. Mais personne en Occident ne se soucie alors du sort de Byzance, livrée à elle-même.
    Manuel II meurt en 1425. Son fils Jean VIII cherche la solution dans l'union des Eglises, alors que la papauté sort enfin du Grand Schisme d'Occident. Au concile de Ferrare/Florence (1438-1439), l'empereur parvient à faire signer un édit d'union à une collation d'écclésiastiques et érudits byzantins, plus ou moins de bon gré. Le pape Eugène IV parvient bien à lancer une croisade, conduite principalement par les Hongrois et par son légat, le cardinal Césarini, mais celle-ci s'achève de nouveau en désastre en 1444, à Varna, face à l'armée du sultan Mourad II. La mort de Jean VIII, en 1448, laisse mal augurer de la survie de l'empire, malgré le renforcement des remparts de Constantinople.
    et la naissance et l'ascension d'un nouvel empire, les Ottomans
    Byzance est de longue date en relation avec les populations d'origine turque. Depuis le VIème siècle, les migrations turques vers l'ouest avaient fourni à l'empire un vivier commode d'alliés de circonstance ou de mercenaires, parfois convertis au christianisme : Khazars -qui eux choisissent le judaïsme, Coumans ou Pétchénègues. Mais la peuplade des Oghouz a, elle, migré vers la Perse et les terres du calife musulman. Les Turcs se convertissent progressivement à l'islam et en 1055, Tughril Bey, le chef de la tribu Seldjouk, domine complètement le califat abasside. Son successeur et neveu, Alp Arslan, inflige aux Byzantins la terrible défaite de Manzikert, en 1071. Les ghazis, combattants de la foi et barons frontaliers seldjoukides, s'installent progressivement en Asie Mineure, dont la population compte désormais de plus en plus de Turcs. Mais les Seldjoukides se querellent entre eux, l'Empire byzantin se ressaisit sous les Comnènes et la première croisade met un coup d'arrêt à l'expansion turque. Celle-ci ne reprend vraiment qu'au XIIIème siècle après le sac de Constantinople. Le sultan de Roum, dont la capitale est Konya, est alors la puissance dominante en Asie Mineure.
    Source : Larousse.fr
    Les Seldjoukides sont pourtant définitivement balayés par l'invasion mongole de 1243. Battus, tributaires du khan, ils ne tardent pas à perdre leur domination sur l'Asie Mineure. Les émirs frontaliers et autres ghazis, au contraire, en profitent pour étendre leur influence en Asie Mineure, à tel point qu'en 1300, Byzance ne contrôle plus que quelques enclaves minuscules sur la rive asiatique des détroits. L'émir de Menteshe, au sud-ouest de l'Asie Mineure, lance des raids maritimes mais doit faire face aux Hospitaliers de Rhodes. L'émir d'Aydin prend le relais et commence à piller la mer Egée. Le prince de Sarakhan règne sur Magnésie et celui de Karasi sur la plaine de Troie. L'émir de Sinope mène ses pirates en mer Noire. A l'intérieur des terres, les émirs de Karaman et de Germiyan se disputent la successsion seldjoukide. Les Karamanides prennent Konya en 1327 et parviennent à se faire reconnaître comme suzerains par la plupart des ghazis. Sauf par un petit Etat fondé dans la seconde moitié du XIIIème siècle en Bithynie, par Erthugrul, un personnage dont on sait fort peu de choses et qui à sa mort, en 1281, laisse le pouvoir à Osman.
    Osman va profiter de sa situation géographique. Il est en effet le seul ghazi frontalier de territoires peuplés de Byzantins, en mesure d'attirer à lui ceux qui sont intéressés par la guerre et le pillage. L'empire ne prête pas suffisamment attention à la puissance d'Osman et un premier corps byzantin est battu entre Nicée et Nicomédie en 1301. Quatre ans plus tard, les mercenaires catalans écrasent à leur tour les Turcs mais se révoltent ensuite contre l'empereur. Osman fournit des mercenaires à l'une et l'autre partie. Il avance jusqu'à la mer de Marmara, conquiert les villes le long de la côte de la mer Noire. Ne disposant pas encore de matériel de siège, car ses soldats sont encore surtout des cavaliers, Osman doit mener de longs blocus. Brousse tombe ainsi en 1326 après dix ans de siège, parce que l'empereur byzantin n'a pu envoyer de secours.
    Cette même année meurt Osman, qui a fait d'un petit émirat turc frontalier la puissance montante en Asie Mineure. Son fils Orhan va consolider l'oeuvre déjà accomplie. Nicée tombe en 1329 après plusieurs années de siège, puis Nicomédie, de la même façon, en 1337. Orhan profite des guerres civiles à Byzance, entre l'empereur-enfant Jean V et ses régents et Jean Cantacuzène, pour expédier des mercenaires qui demeurent ensuite en Thrace. Jean Cantacuzène, monté sur le trône, est renversé en 1355 : Orhan en prend prétexte et envoie l'année suivante un corps expéditionnaire au-delà des détroits, sur la rive européenne, qui s'empare de la Thrace occidentale et d'Andrinople. Il meurt en 1362 : il lègue à son successeur un Etat plus organisé et une armée désormais non plus composée uniquement de cavalerie légère. En effet, il a mis en place une levée locale de type féodal, complétée par des troupes régulières soldées, dont fait déjà partie le régiment des janissaires. Chaque branche a son uniforme et la mobilisation d'un grand nombre d'hommes en armes est devenue beaucoup plus rapide.
     
    Source : Memo.fr
    Mourad Ier, qui est le premier à s'intituler sultan, succède à Orhan : après avoir maté quelques révoltes parmi les émirs orientaux, il revient en Europe et isole Constantinople dès 1365 : les faubourgs asiatiques de la ville sont entre les mains des Turcs. C'est seulement alors qu'en Occident, on commence à s'inquiéter de la poussée ottomane contre Byzance. Jean V tente de recruter des troupes en Europe, mais, sans le sou, doit reconnaître le sultan comme son suzerain en 1373 et envoyer comme otage à sa cour son fils Manuel. Mourad Ier n'est gêné que par l'action des Hospitaliers de Rhodes. En 1371, il défait sur la Maritza le roi de Serbie méridionale. Il s'empare de la Bulgarie et de la Macédoine serbe : le roi de Bulgarie, le prince de Serbie septentrionale deviennent ses vassaux. L'immigration turque fait son oeuvre comme elle l'avait déjà fait en Asie Mineure. Thessalonique tombe en 1387. Mourad Ier doit alors affronter le défi posé par les Serbes : ceux-ci sont écrasés à Kosovo, en 1389, non sans que le sultan ait été assassiné avant la bataille par un déserteur. Mourad est le premier souverain ottoman à s'être considéré comme un véritable empereur.
    Son fils Bayezid Ier, auréolé de la victoire de Kosovo, fait tomber la Bulgarie, envahit le Péloponnèse en 1394 et songe, dès 1396, à marcher sur Constantinople. Mais il doit faire volte-face vers le nord pour contrer une nouvelle croisade, qui s'achève en carnage sous les murs de Nicopolis. Le prince de Valachie devient son vassal. Une première tentative contre la capitale byzantine en 1402 échoue devant l'irruption de Tamerlan, descendant de Gengis Khan, qui a fait régulièrement irruption dans l'est de l'Asie Mineure à partir de 1386. L'armée ottomane est écrasée à Ankara, en Anatolie, par Tamerlan, mais l'empire n'est pas détruit : au contraire, la colonisation turque est, vers 1410, plus importante en Europe qu'en Asie Mineure. Mehmet Ier, après de sanglantes luttes de pouvoir, monte sur le trône en 1413. Jusqu'à sa mort, en 1421, il bâtit des forteresses, consolide l'administration et embellit les villes de son empire.
    Mourad II, son fils, un homme profondément pieux, n'en met pas moins le siège devant Constantinople en 1422. Mais l'armé ottomane ne dispose pas, alors, d'un matériel de siège et d'une artillerie suffisamment efficaces pour emporter une agglomération aussi fortifiée, comme cela sera aussi le cas devant Belgrade en 1440. Ce dernier échec rend confiance à l'Occident : le pape monte une croisade avec l'appui des Hongrois qui s'achève en défaite à Varna, sur le Danube. Mourad II abdique ensuite pour se retirer dans la vie contemplative en faveur de son fils Mehmet. Mais dès 1446, les conseillers du sultan le rappellent sur le trône car Mehmet est jugé trop instable, trop autoritaire : une armée turque ravage le Péloponnèse, puis, en 1448, les Hongrois sont de nouveau battus. Ils ne pourront aider Constantinople pendant le siège final. En Asie Mineure, Mourad absorbe les émirats d'Aydin et de Germiyan, tient les Karamanides en respect. Il réorganise les janissaires en un corps composé d'esclaves chrétiens prélevés sur les populations soumises et entièrement formés à la guerre à partir de leur incorporation. Lorsqu'il meurt, le 13 février 1451, il laisse à son fils Mehmet II un héritage qui reste à compléter par l'objectif de longue date des Ottomans : la prise de Constantinople.
    Mehmet II face à Constantin XI : la marche à la guerre (1451-1453)
    Jean VIII était l'aîné de 6 frères. Deux, Andronic et Théodore, sont morts avant lui. Deux autres, Dimitri et Thomas, sont éclipsés par la personnalité de celui qui devient le dernier empereur byzantin, Constantin. Né en 1404, il avait gardé Constantinople pendant l'absence de Jean VIII au concile de Ferrare/Florence, avant de s'effacer devant son autre frère Théodore, qui revendiquait la succession. Devenu despote de Morée, dans le Péloponnèse, il reconquiert l'ensemble de la péninsule à l'exception de quatre villes vénitiennes. En 1444, il avance jusqu'au Pinde, mais deux ans plus tard, l'armée de Mourad II, après sa victoire de Varna, ramène Constantin en Morée. Son deuxième mariage lui a apporté des liens avec les Génois. A la mort de Jean VIII, Constantin est à Mistra. Il est désigné officieusement par l'impératrice-mère Hélène, qui écarte Dimitri et Thomas. Constantin est couronné à Mistra, une première pour un empereur byzantin si l'on excepte l'intermède de Nicée... d'aucuns y verront un problème de légitimité. A la recherche d'une troisième épouse, Constantin XI envoie George Phrantzès à Trébizonde. C'est là que le conseiller apprend la mort de Mourad II et l'avènement de Mehmet, ce qui l'inquiète fortement.
    Mehmet, né en 1432, est le fils d'une esclave turque de Mourad. Dédaigné par son père, il n'en reste pas moins, dès l'âge de 12 ans, le seul héritier possible pour le sultan, si l'on excepte un cousin, Orhan, alors en exil à Constantinople. Mourad envoie une armée de précepteurs pour compenser les lacunes d'une éducation jusqu'alors négligée. Sous la férule d'un Kurde, Ahmed Kurani, ceux-ci enseignent à Mehmet la philosophie et les sciences, aussi bien grecques qu'islamiques. En plus du turc, Mehmet apprend l'arabe, le grec, le latin, le persan et l'hébreu. Quand son père se retire, en 1444, Mehmet doit réprimer des soulèvement en Anatolie. Avec la croisade menée par les Hongrois, le grand vizir Halil Pacha, affolé par les ambitions d'indépendance de Mehmet à l'égard de tout conseil, rappelle son père de son exil contemplatif. Mais après le succès de Varna, Mourad retourne à ses prières. Il faut toute l'insistance d'Halil Pacha pour faire sortir à nouveau Mourad de sa retraite, en raison du mécontentement provoqué par Mehmet dans l'armée, en 1446. Cependant celui-ci, envoyé à Magnésie, prend part dès 1448 à une campagne contre les Hongrois. Il a eu un fils, Bayezid, d'une esclave turque, liaison qui son père désapprouve. Mourad force Mehmet à épouser la fille d'un grand seigneur turcoman, que son fils délaisse. Quand il monte sur le trône, Mehmet II éloigne les conseillers les plus influents de son père tout en gardant à ses côtés Halil Pacha, et en plaçant déjà des hommes à lui comme vizirs, notamment Zaganos Pacha et Shibab al-Din Pacha. Il fait également exécuter son jeune frère pour s'éviter une usurpation potentielle. Mehmet II n'a aucun désir de se rendre populaire, mais son intelligence et sa résolution servent sa première ambition : s'emparer de Constantinople.
    L'empereur byzantin, tout comme ses subordonnés tel le despote de Morée, est alors devenu le vassal du sultan ottoman. La capitale de ce dernier est à Andrinople, en Thrace, à 160 km à l'ouest de Constantinople. L'empire de Trébizonde est dirigé par une famille concurrente et quelques enclaves byzantines voisinent sur le pourtour de la mer Noire autour des colonies génoises. Venise et Gênes sont deux grandes puissances maritimes qui contrôlent la plupart des îles et enclaves côtières importantes en mer Egée et en mer Noire. A Athènes se trouvent les restes de l'ancien empire latin avec une famille dirigeante d'ascendance à la fois italienne et catalane, et liée au royaume d'Aragon, présent dans le sud de l'Italie.
    Quant aux Ottomans, leur pouvoir est encore loin d'être assuré comme il le sera au XVIème siècle. Si les vassaux du nord de l'Anatolie, autour de Sinope, sont loyaux, au sud, les Karamanides n'acceptent qu'avec réticence la suzeraineté ottomane. La Horde d'Or, en se dissolvant, a généré un nouveau khanat en Crimée. Le royaume de Pologne-Lituanie a conquis une partie des terres russes jusqu'au rivage de la mer Noire. Quant à la principauté de Moscou, orthodoxe, l'avenir de Constantinople ne la concerne que de loin et le métropolite a d'ailleurs proclamé l'autonomie de l'église russe par rapport à l'Eglise byzantine...
    En Occident, on se réjouit de l'accession de Mehmet au trône, au vu de ses débuts peu prometteurs. Toutes les ambassades sont bien reçues : le sultan renouvelle les traités avec Venise et la Hongrie, se montre cordial avec les Byzantins, promet d'entretenir le prince Orhan en exil. Mais les ambassadeurs byzantins ont surtout cultivé des relations étroites avec Halil Pacha, que Mehmet garde bon gré mal gré, car il ne lui a jamais pardonné son éviction du pouvoir et le rappel de son père. En Occident, tout le monde se satisfait de cette attitude conciliatrice qui n'est que de façade. La France et l'Angleterre terminent encore la guerre de Cent Ans, l'empereur Frédéric III est préoccupé par son couronnement impérial, et Alphonse V d'Aragon, roi de Naples depuis 1443, cherche à devenir... empereur de Constantinople. Le pape Nicolas V, homme de paix et érudit, sensible à la culture grecque, souhaite avant toute chose l'édit d'union et n'a pas l'appui d'une puissance séculière.
    Mehmet ne tarde pas à montrer ses véritables intentions. A l'été 1451, l'émir kamaranide Ibrahim Bey fomente une révolte en Anatolie avec d'autres émirats vassaux des Ottomans. Mehmet arrive promptement avec son armée et Ibrahim Bey doit faire amende honorable. Sur le chemin du retour, le sultan mate une révolte de ses janissaires, accepte certaines de leurs demandes, mais démet leur commandant et place des hommes à lui dans ce corps d'élite. Constantin XI pousse alors l'audace jusqu'à demander un versement plus important pour le prince Orhan. Mehmet garde l'affaire en suspens pour s'en servir comme prétexte. Bloqué dans la traversée des Dardanelles par la présence d'une escadre italienne, il passe le Bosphore au niveau de la forteresse d'Anatolu Hisar, édifiée par Bayezid. En Europe, on est encore en terre byzantine, mais Mehmet se dit qu'il serait fort judicieux d'implanter là une autre forteresse.
    Pendant l'hiver, il fait recruter un millier de manoeuvres et de maçons pour commencer la construction au printemps, à l'endroit où le Bosphore est le plus étroit. Les ambassadeurs byzantins qui viennent se plaindre auprès du sultan sont éconduits et les travaux débutent le 15 avril 1452. Constantin XI fait alors arrêter tous les Turcs à Constantinople. Puis, se ravisant, comprenant qu'il a été trop loin, il envoie une ambassade chargée de cadeaux à Mehmet, qui n'est pas écoutée. Une dernière ambassade en juin tourne à la déclaration de guerre : le sultan fait exécuter les émissaires.
    Le 31 août 1452, Rumeli Hisar, le « coupe-gorge » ou « coupe-détroit », est achevé. Il est pourvue d'une garnison de 400 hommes commandés par Firuz Bey : tout navire passant dans les détroits doit s'acquitter d'une taxe, faute de quoi il risque d'être tiré à vue par les canons turcs expédiant des projectiles de plus de 200 kg ! Mehmet avance alors jusque sous les murs de Constantinople, avec toute son armée. A l'automne 1452, les régiments des provinces de Roumélie rejoignent autour d'Andrinople les troupes d'élite du sultan. Les fabriquants d'armes s'activent tandis que Mehmet étudie les questions militaires, conseillé par un Italien expatrié, Cyriaque d'Ancône, érudit, voyageur et collectionneur d'antiquités. Mehmet s'est également attaché les services d'Urban, un fondeur de canons que l'empereur byzantin a laissé échapper faute de pouvoir lui fournir suffisamment d'argent et de matériaux. C'est Urban qui conçoit les pièces destinées à Rumeli Hisar, puis celles qui doivent détruire les murailles de Constantinople. Le 10 novembre, les canons de la forteresse ouvrent le feu sur deux navires vénitiens qui réussisent à forcer le passage en venant de mer Noire, non sans avoir éprouvé une grande crainte face aux tirs turcs. Le 25 novembre en revanche, le navire vénitien d'Antonio Erizzo est coulé, les survivants sont capturés et empalés sur les rives du détroit. Mehmet ordonne alors à Urban de fabriquer des canons deux fois plus gros, capables de tirer des projectiles de 450 kg !
    Vénitiens et Génois hésitent à dégarnir leurs forces en Italie pour sauver Byzance. Les Vénitiens souhaitent aussi maintenir leurs relations commerciales avec le sultan. A Gênes, on s'inquiète surtout pour la colonie de Galata et pour celles de la mer Noire. Le gouvernement ne s'engage pas mais laisse libre cours aux initiatives privées : on conseille au podestat de Galata de faire profil bas, de ne pas provoquer les Turcs. Le pape voit enfin l'occasion de procéder à l'incorporation de l'Eglise byzantine à l'Eglise de Rome. Le cardinal Isidore, métropolite déchu de Kiev récupéré par l'Eglise romaine, arrive à bord d'une galère vénitienne dès novembre 1452. Il amène avec lui une compagnie d'archers, des fabricants de canons de Naples et a aussi recruté des soldats à Chios. Les 200 hommes d'Isidore sont vus par les Byzantins comme l'avant-garde d'une armée beaucoup plus importante... alors qu'en fait, le peuple et une partie du clergé n'acceptent pas l'union avec Rome. Le 12 décembre 1452, à Sainte-Sophie, le cardinal Isidore officialise l'union entre Rome et Constantinople, mais l'acte est mal vu par la population et même par de grands dignitaires comme Luc Notaras, qui aurait déclaré préférer le turban des Turcs à la mitre des Latins, bien que ces propos soient sans doute apocryphes.
    En janvier 1453, Mehmet II obtient l'approbation de son conseil pour la prise de Constantinople. L'élite ottomane se divise cependant entre les feudataires plutôt partisans d'une guerre frontalière plus ou moins autonome inspirée par la tradition des ghazis, et les hommes du sultan, « esclaves de la Porte », qui lui doivent tout et qui penchent plutôt pour un renforcement de l'Etat toujours plus centralisé. Le sultan Mehmet II a auprès de lui des partisans des deux politiques. Les armées islamiques rêvent de conquérir Constantinople depuis le VIIème siècle. D'ailleurs, Mehmet II et ses prédécesseurs se sont intitulés « sultan des Romains », ce qui montre bien leurs ambitions. Les musulmans plus orientaux appellent fréquemment les Ottomans du noms de « Rumiyun ». Pour jauger le soutien que la population apporte à son entreprise contre Constantinople, Mehmet n'hésite pas à se déguiser en soldat pour parcourir les tavernes d'Andrinople avec ses conseillers.
    Le gouverneur militaire des provinces européennes, Dayi Karadja Bey, reçoit l'ordre de lever une armée pour s'emparer des villes de la côte de Thrace. Les cités au bord de la mer Noire se rendent pour éviter la mise à sac. Sélybrie et Périnthe, sur la mer de Marmara, tentent de résister : elles sont prises, pillées, leurs murailles démantelées. En octobre 1452, Mehmet a envoyé dans le Péloponnèse une armée pour occuper les troupes du despotat de Morée et les empêcher de soutenir Constantinople. Le sultan construit également une flotte : concentrée à Gallipoli, elle regroupe des trirèmes, des birèmes, des fustes, d'autres galères et des navires de transport. Elle est commandée par le gouverneur de Gallipoli, Suleiman Baltoglu. Fin mars, la flotte remonte les Dardanelles et débouche en mer de Marmara, à la consternation des Byzantins. Les chiffres varient selon les sources mais elle comprend au moins 6 galères, 18 galiotes et 16 navires de ravitaillement, avec une myriade de navires plus petits, fustes et autres.
    Au total, l'armée de Mehmet regroupe alors 80 000 soldats réguliers et peut-être 20 000 irréguliers. L'élite est constituée de 12 000 janissaires. Mais si Mehmet se risque à attaquer Constantinople, c'est que ses fondeurs de canons lui donnent enfin la possibilité d'ébranler les murailles. Urban, après avoir fondu le canon de Rumeli Hisar qui coule le navire vénitien, en fabrique un second en janvier 1453. Long de 8 mètres, il est tiré par 60 boeufs et 700 hommes le manoeuvrent. Mehmet assiste au premier tir à Andrinople : le boulet parcourt un kilomètre et demi avant de toucher sa cible.
    En face, Constantin XI s'active frébrilement pour mettre Constantinople en état de défense. Pendant l'hiver 1452-1453, il envoie des navires en mer Egée pour accumuler les provisions. Les défenses de Constantinople sont renforcées, l'argent des églises confisqué pour payer la troupe. La population dégage d'elle-même les douves. Mais les alliés potentiels sont sous la menace du Turc ou se désintéressent du sort de la ville. Le despote Georges de Serbie soutient les Ottomans et envoie même un contingent à Mehmet. Les Vénitiens répondent dès février 1452 qu'ils fourniront seulement des fournitures militaires, rien de plus. La Sérénissime est en effet plus préoccupée de favoriser les relations commerciales avec la puissance montante ottomane que de secourir un empire byzantin déjà considéré comme perdu. Cependant, la colonie vénitienne, dirigée par son bailli Girolamo Minotto, reste pour défendre Constantinople, avec 1 000 hommes et des grands noms de la Sérénissime : Cornaro, Mocenigo, Contarini, Venier. Le médecin de bord Nicolo Barbaro a laissé un des compte-rendus les plus honnêtes du siège. Parmi les Vénitiens, Giacomo Coco, qui commandait l'un des navires ayant échappé à Rumeli Hisar. Cependant, le 26 février 1453, 6 navires et 700 Vénitiens désobéissent à la volonté de Minotto et s'enfuient de Constantinople. Des Génois, Maurice Cattaneo, Jérôme et Léonard de Langasco, les trois frères Bocchiardo, équipent et amènent à leurs frais une petite compagnie de soldats. Le 29 janvier 1453 arrive Giovanni Gustiniani Longo, jeune noble génois, avec 700 hommes, 400 recrutés à Gênes et 300 à Chio et Rhodes. Etant donné qu'il a une réputation de bon défenseur des villes fortifiées, l'empereur le nomme commandant des murailles terrestres avec le rang de protostrator, lui donnant également l'île de Lemnos en récompense de ses services. Gustiniani parvient, tant bien que mal, à obtenir le concours des Vénitiens. La colonie catalane de Constaninople, avec son bailli Péré Julia, participe aussi à la défense. Un aristocrate de Castille, Don Francisco de Tolède, est également présent. Le prince turc Orhan offre ses services et ceux de sa maison à Constantin XI.
    Les Vénitiens sont cependant préoccupés d'assurer la sécurité de leurs convois jusqu'en mer Noire. Gabriele Trevisan est envoyé à Constantinople pour aider à la défense de la ville si nécessaire. Le Sénat vénitien décide aussi d'envoyer deux transports avec chacun 400 hommes, escortés par 15 galères, pour le 8 avril. Les Vénitiens de Crète expédient également deux navires en Eubée commandés par Zaccario Grioni. Finalement, c'est Giacomo Loredan qui prend la tête du convoi destiné à Constantinople. Mais cette flotte ne sera pas rassemblée avant la conclusion du siège.
  • Esclavage : Repentances, exigences et Black mic-mac

    Une chronique de Claude Lorne -

     

    Il fallait s’y attendre : instituée par Jacques Chirac en 2006, la « Journée de la mémoire de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions » a, cette année, donné lieu au déluge de repentances et de mensonges par omission de la part du pouvoir, et d’exigences ahurissantes de la part des « victimes ».

     

    Motus sur la traite arabo-africaine, les chrétiens razziés et l’esclavage moderne

    Le 12 mai, après ses deux prédécesseurs, François Hollande a battu sa coulpe – sur la poitrine des Français dont la quasi-totalité n’a en rien profité de la traite, au contraire des « dynasties bordelaises » (1), comme l’a rappelé le même jour Jean-Yves Le Gallou sur Polémia (2) – à l’occasion de ce nouveau « devoir de mémoire » pour ce qui a été qualifié de « crime contre l’humanité » dans la loi Taubira de 2005.

     

    Mais pas un mot, bien sûr, de la traite négrière arabo-africaine, sujet d’ailleurs désormais tabou dans nombre d’ « écoles de la République » sous la pression des élèves et des parents musulmans ; et encore moins des « captifs d’Allah » : plus d’un million de chrétiens razziés de la Dalmatie à l’Ecosse par les Barbaresques entre le XVe et le début du XIXe siècle (3). Silence total également sur l’esclavage moderne pratiqué en France même par des résidents, voire des naturalisés, originalres du Maghreb, du Moyen-Orient ou d’Afrique noire. Bien que plus de cent vingt procès soient actuellement pendants de ce chef devant la seule Cour d’appel de Paris, pas question d’ulcérer par un rappel inopportun « ceux qui sont chez eux chez nous », et moins encore les richissimes investisseurs du Golfe arabo-persique.

     

    De l’impudence du CRAN…

     

    En revanche, le CRAN, Conseil représentatif des associations noires de France calqué sur le CRIF, Conseil représentatif des institutions juives de France, a parlé ou plutôt gueulé pour deux. Son nouveau président, le Martiniquais Louis-Georges Tin, a ainsi annoncé en fanfare avoir « assigné en justice la Caisse des dépôts et consignations, la banque d’Etat qui a joué un rôle considérable dans l’esclavage » et s’est ainsi rendue « complice de crime contre l’humanité » en encaissant « des sommes équivalant à 21 milliards de dollars » entre 1825 et 1946 en échange de l’indépendance de Haïti qui aurait ainsi été frappée d’ « une double peine » car « cette rançon a précipité Haïti dans une spirale infernale d’instabilité et de misère ».

     

    En conséquence de quoi la CDC, qui se serait également « enrichie grâce à l’exploitation colonialiste », est sommée « d’abonder à hauteur d’au moins 10 millions d’euros un fonds de dotation pour financer des recherches », sans parler du montant des « réparations », avec intérêts cumulés.

    L’agitateur Tin, par ailleurs militant homosexuel qui s’illustra dès l’Ecole normale supérieure en y créant l’association « Homonormalités » avant de diriger le Dictionnaire de l’homophobie (publié en 2003 aux Presses universitaires de France avec une préface de Bertrand Delanoë), n’oublie qu’une chose : la somme de 150 millions de francs-or que devait acquitter Port-au-Prince avait été fixée conjointement par le président haïtien Pétion et Charles X le 11 juillet 1825 en compensation de l’expropriation et de l’expulsion des colons français, consécutives à la déclaration unilatérale d’indépendance de l’île.

    Cette somme, d’ailleurs ramenée par Louis-Philippe en 1838 à 90 millions de francs, ne paraissait pas extravagante. Haïti n’était-elle pas à l’époque la colonie française la plus riche de toute l’Amérique grâce aux immenses profits résultant d’une industrie sucrière très dynamique et de celle de l’indigo ?

    … à l’hypocrisie de Christiane Taubira

    Mais qu’importent ces « points de détail de l’histoire » ? Le camarade Tin, qui a été à bonne école, celle de « l’industrie de l’Holocauste » (dénoncée par Norman Finkelstein dans le livre éponyme, paru en 2001 aux éditions de La Fabrique), tient à ses indemnisations léonines et, sous couvert de corriger le tir, sa copine Christiane Taubira a aussitôt apporté sa pierre à la stèle de la « mémoire » en préconisant une gigantesque réforme foncière.

    « Il faudrait envisager, sans ouvrir de guerre civile, des remembrements fonciers, des politiques foncières », expliquait le garde des Sceaux dans Le Journal du dimanche. « Il y a des choses à mettre en place sans expropriation, en expliquant très clairement quel est le sens d’une action publique qui consisterait à acheter des terres. En Guyane, l’Etat avait accaparé le foncier, donc là, c’est plus facile. Aux Antilles, c’est surtout les descendants des “maîtres” qui ont conservé les terres, donc cela reste plus délicat à mettre en œuvre. » Mais, ajoutait Mme le ministre en tablant sur la mauvaise conscience systématiquement instillée aux Français, « les temps sont mûrs pour faire cette politique intelligemment et de façon équitable… Cela fait dix ans que je le dis, je crois que c’est vraiment possible. »

    Les Antilles et la Guyane menacées de « haïtisation » ?

    En quelques décennies, du fait de la corruption, de l’impéritie, de l’incompétence et des rivalités sanglantes entre Noirs et Mulâtres, la si enviable prospérité de la « Perle des Antilles » ne fut plus qu’un souvenir et Haïti, indépendante depuis plus de deux siècles maintenant, est devenue l’un des Etats les plus pauvres du monde, ne subsistant, de manière végétative, que de l’aide internationale, des subventions des ONG et de l’argent envoyé au pays par des immigrés (au Canada, aux Etats-Unis et en France) dont l’exode est continu.

    Les « descendants d’esclaves » antillais et guyanais menacés par la redistribution des terres souhaitent-ils vraiment connaître ce glorieux destin ? Et la grande bourgeoise Taubira elle-même qui, dans sa déclaration de patrimoine, faisait état de propriétés en Guyane, est-elle prête à morceler ses terres pour les offrir aux plus pauvres ?

    Mais tout cela n’est que gesticulations même si, au final, celles-ci risquent de nous coûter très cher. Avec sa réforme foncière, le ministre de la Justice essaie de redorer son blason, bien terni en Guyane par sa défense du mariage gay auquel sont opposés presque tous ses compatriotes. Quant à Louis-Georges Tin, son coup d’éclat s’inscrit dans la sombre lutte qui se livre pour la direction du CRAN, entre ressortissants des Dom-Tom et Africains : un tel Black mic-mac (4) que Libération, caution antiraciste s’il en est, titrait le 6 mai sur « Le Cran à l’arrêt et à couteaux tirés ».

    Un front noir plutôt fissuré

    Dès l’annonce de l’assignation de la CDC, le pharmacien d’origine béninoise Patrick Lozès, ancien président du CRAN et aspirant à le redevenir, déplorait « cette dérive qui consiste à réduire la mémoire de l’esclavage à une transaction matérielle et à des considérations financières » et il condamnait solennellement « cette initiative intempestive » qui s’appelle « un rendez-vous manqué avec l’Histoire ». Et toc !

    Cette polémique constitue le nouvel épisode d’un feuilleton dont le clou avait été précédemment la tentative de Madeira Diallo, « militant historique de la cause noire, qui s’était proclamé publiquement président du CRAN » en lieu et place de Tin. Du coup, ce dernier avait, selon Libération, « qualifié la manipulation de “coup d’Etat” et immédiatement saisi en référé le Tribunal de grande instance de Paris », lequel a rendu fin avril un arrêté « faisant défense » à Madeira Diallo d’usurper la présidence sous peine d’une astreinte de 100 euros par infraction constatée.

    Pour M. Tin, le doute n’est pas permis : Diallo n’est que « l’homme de paille » de Lozès aujourd’hui menacé par une enquête de la Brigade de répression de la délinquance économique (BRDE) pour blanchiment et abus de confiance. Lui serait en effet reproché un détournement de subventions publiques, à concurrence de « 130.000 euros perçus entre janvier 2009 et août 2011 sur son compte », ainsi que des « virements de l’ordre de 240.000 euros versés sur le compte de sa société par World Children’s Fund » ; on se demande bien, d’ailleurs, quel était l’intérêt dans cette affaire de cette dernière organisation humanitaire internationale créée par  Joseph Lam, un Chinois originaire de Hong Kong, la protection de l’enfance malheureuse ne figurant pas dans les statuts du CRAN.

    Culpabiliser à tout prix les Français

    Ces sommes ont-elles été détournées pour financer la (très éphémère) campagne de Lozès à la présidentielle de 2012 sous l’appellation « Allez la France »-sic ? En tout cas, on sait qu’une partie importante a été versée en 2007 à la Sofres pour « un coûteux sondage, dans lequel 56% des Noirs de France assuraient subir des discriminations ».

    Voilà à quoi sert notre argent : à financer des opérations destinées à culpabiliser toujours plus les Français. Et tel est aussi l’objectif de Louis-Georges Tin : convaincre les descendants des « colonialistes français » qu’ils sont – et eux seuls – responsables et coupables de la faillite haïtienne et, d’une manière générale, de toutes les banqueroutes, disettes, guerres tribales et autres fléaux ravageant de manière endémique leurs anciennes possessions.

    Claude Lorne http://www.polemia.com
    16/05/2013

     Notes :

    (1) Titre d’une étude de Paul Butel parue en 1991 aux éditions Perrin. Parmi les fondateurs de dynastie : Jacques Adami, Alexandre Jacob, Jacob Azevedo, les frères Bethmann et Eschenauer, M. Hirschfeld, David et Moïse Gradis, la famille Journu-Kappelhoff, Edouard Kerstein, Jacob Mendès (ancêtre de Pierre Mendès-France), Edouard Weiss, etc.
    (2) « Descendants d’esclaves ou descendants de maîtres d’esclaves ? »
    (3) A quand une repentance pour les « captifs en Barbarie » ?
    Giles Milton,
    Captifs en Barbarie, Petite Bibliothèque Payot, 2008 :

    (4) Il ne faut voir aucun racisme dans cette expression : il s’agit du titre d’un film réalisé en 1986 par Thomas Gilou avec une kyrielle d’acteurs noirs dont Cheikh Doucouré, Sidi Lamine Diarra, Khoudia Seye.