culture et histoire - Page 1905
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La gauche est une salle d'attente pour le fascisme :
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Méridien Zéro - Diabolisation, nouvelle inquisition, pensée unique
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“Stendhal rebelle et fidèle” (2ème partie) par Dominique Venner
Je poursuis mes réflexions malséantes sur Stendhal, commencées le 26 février. Le prétexte était le 230ème anniversaire de la naissance de l’écrivain. J’avais commencé d’expliquer mon attrait métapolitique pour l’auteur du Rouge et le noir. Je poursuis.
En maints passages La Chartreuse de Parme, est le plus politique des trois grands romans de Stendhal, l’histoire aventureuse ne dissimule qu’à grand peine le brûlot révolutionnaire. Mais le lecteur d’aujourd’hui n’y prête plus attention, puisque l’ancien contenu a perdu son pouvoir subversif. Dès les premières lignes, le ton est pourtant donné. Elles décrivent sans précaution et avec un enthousiasme batailleur l’entrée des troupes de Bonaparte à Milan, le 15 mai 1796. L’imaginaire duché de Parme, qui sert de cadre au roman, est un condensé de corruption et de bigoterie, dans lequel un lecteur français averti d’aujourd’hui peut reconnaître l’anticipation de ce qu’il a sous les yeux.
Publié en 1839, alors que le courant bonapartiste et libéral avait conquis droit de cité, ce roman passa inaperçu. Quelques années plus tôt, Stendhal s’était inquiété des risques éventuels. Ainsi, avait-il jugé prudent de différer la publication de Lucien Leuwen, roman resté inachevé, dont le héros, un jeune officier bonapartiste, ressemble comme un frère à un jeune spectateur idéaliste du film Der Untergang (La Chute, 2004). Sous-lieutenant de lanciers, réduit à ne sabrer que des bouteilles dans une petite ville de province mal pavée, Lucien Leuwen crie son amertume : “Quelle gloire! Mon âme sera bien attrapée lorsque je serai présenté à Napoléon dans l’autre monde. Sans doute me dira-t-il, vous mouriez de faim pour faire ce métier-là? – Non, général, je croyais vous imiter“…Même tonalité dans Le Rouge et le Noir publié en 1830. Né dans un milieu pauvre, engagé vers 1820 comme précepteur des enfants du riche et peu sympathique M. de Rênal, Julien Sorel est contraint de dissimuler son admiration pour l’Empereur déchu s’il veut conserver sa place. Venu trop tard pour “être tué ou général à trente ans“, ne pouvant construire son existence par le rouge de la gloire militaire, il ne lui reste d’autre voie que le noir de la carrière ecclésiastique; la prudence cauteleuse au lieu de la fougue guerrière. A l’horizon, une mitre d’évêque s’il a su plaire et se courber, ou la morne perspective d’une cure de campagne… Stendhal a résumé le sentiment de cette déchéance dans sa correspondance privée : « Comment voulez-vous que deux cent mille Julien Sorel qui peuplent la France et qui ont l’exemple de l’avancement du tambour duc de Bellune, du sous-officier Augereau, de tous les clercs de procureur devenus sénateurs et comtes de l’Empire », ne nourrissent pas des rêves de révolte?
La nostalgie de l’épopée est soulignée par la présence de quelques demi-solde qui entrent en scène à l’occasion d’affaires d’honneur, par exemple comme témoins dans les duels. De même, l’avocat de Julien Sorel est-il un ancien capitaine de l’armée d’Italie.
Dans le frémissement des romans de Stendhal, le lecteur attentif découvre sans peine la philosophie morale de l’écrivain sous l’enveloppe de ses héros. Primitivement, chacun d’eux recherche l’aventure, le succès, la gloire et un amour romanesque, mais certainement pas le bonheur. Au final, il choisissent le parti de la hauteur quel que soit le prix. Pendant un temps, ils se laissent convaincre de pactiser avec l’époque par d’habiles mentors, cyniques et parfois même sympathiques (M. de La Mole, le comte Mosca, la Sanseverina, le banquier Leuwen), qui s’efforcent de leur apprendre les règles du jeu social. « Crois ou ne crois pas ce qu’on t’enseignera, explique à Fabrice la Sanseverina, qui s’est mise en tête d’en faire un évêque, mais ne fais jamais aucune objection. Figure-toi qu’on t’enseigne les règles du jeu du whist; est-ce que tu ferais des objections aux règles du jeu du whist ? » Que leur demande-t-on? Seulement d’oublier de penser afin de respecter les tabous de l’époque. La réussite, la fortune, les honneurs sont à ce prix. Ils semblent s’y résoudre. Puis vient un sursaut inattendu de fierté, manifestation de leur goût du geste inutile et de la position sacrifiée. Stendhal fait dire à la jeune et amoureuse Mathilde de La Mole, modèle de dignité et d’énergie : « Je ne vois que la condamnation à mort qui distingue un homme. C’est la seule chose qui ne s’achète pas ». Dans le défi, le héros stendhalien retrouve sa véritable nature.
A l’issue d’un procès où ses éclats l’ont voué à l’échafaud, Julien Sorel refuse de faire appel de sa condamnation. Mieux vaut mourir que déchoir. De façon imprévisible, Lucien Leuwen assume la faillite de son père et vend tous ses biens pour rembourser les créanciers de sa famille. Fabrice, lui, choisit de revenir volontairement en prison. Chacun à sa façon refuse de transiger alors que tous les autres le font autour d’eux. Ce sont des purs dans une époque de canailles.
Dominique Venner http://fr.novopress.info
Source : le site internet de Dominique Venner.
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“Stendhal rebelle et fidèle” (1ère partie) par Dominique Venner
J’ai laissé passer l’anniversaire de la naissance de Stendhal (Henri Beyle), voici 230 ans, le 23 janvier 1783 à Grenoble. Mais je vais me rattraper, ayant éprouvé depuis très longtemps une vive dilection pour l’auteur du Rouge et le noir, et pour des raisons qui sont métapolitiques autant que littéraires.
J’ai mis longtemps à comprendre pourquoi j’avais toujours tant aimé Lucien Leuwen, Julien Sorel et Fabrice Del Dongo. Pourquoi, parmi tous les romans de Faulkner, j’avais élu L’Invaincu, au point d’y revenir au moins une fois l’an. Et pourquoi j’avais lu et relu avec le même enthousiasme Les récits de la demi-brigade de Giono. Oui, pourquoi ces lectures si différentes éveillaient-elles la même jubilation euphorique ? Qu’avaient donc en commun leurs héros ? La révélation me fut apportée un jour que je lisais un peu plus attentivement et sans doute avec l’œil de l’historien les premières pages de La Chartreuse de Parme, l’entrée de Bonaparte à Milan.On ne pouvait s’y tromper. Derrière ce roman d’amour, de cape et d’épée, Stendhal avait laissé parler un cœur très engagé. A leur façon et au nom de causes très différentes, chacun des personnages des romans que je viens d’évoquer montre autant d’attrait pour les causes perdues que de mépris pour des vainqueurs installés et satisfaits.
Un esprit français est sensible plus qu’aucun autre sans doute à de telles connivences. Nous avons cumulé tant de guerres civiles et de proscriptions, avant et après 1789, que nous sommes quelque peu vaccinés contre le respect sans discussion des institutionnels. Le mépris qu’inspirent des vainqueurs peu estimables, éveille par contraste de l’attrait pour les vaincus et le courage malheureux. Il en fut ainsi pour les Sudistes après la guerre de Sécession et pas seulement sous la plume de Margaret Mitchell. Sur la scène russe d’après 1917, les Blancs ont plus de charme que leurs adversaires victorieux de la guerre civile. Certains vaincus de la Libération ont joui de cette faveur dans l’imaginaire des “Hussards”, peloton caracolant d’étincelants et jeunes écrivains de la génération suivante. Ceux-là ne se sont jamais vraiment expliqués sur leur penchant pour Stendhal. Pourtant, chez celui-ci, on trouve le même mélange excitant d’insolence, d’incivisme et de bonheur.
Malgré une carrière militaire qui excéda peu une grosse année, l’ancien sous-lieutenant de dragons de l’armée d’Italie resta jusqu’à sa mort habité par une invincible nostalgie de l’aventure napoléonienne. Un athéisme précoce contribua à son aversion pour le conformisme et la bigoterie de la Restauration.
« Il se piquait de libéralisme, disait son ami Mérimée, et était au fond un aristocrate achevé. » Lui-même n’en disconvenait pas : « Je me soumets à mon penchant aristocratique après avoir déclamé dix ans de bonne foi contre toute aristocratie. » Stendhal jouait sur les mots. Son « penchant aristocratique » n’est pas un effet de l’âge. C’est une disposition native qui lui a toujours fait chérir les comportements chevaleresques et les mœurs raffinées, plus que cette caricature d’aristocratie qu’était la bonne société de 1820 ou de 1830, mélange de nouveaux riches prétentieux, de ci-devant campés sur leur vindicte, et de dévots enrôlés dans cette police de la pensée qu’était la « Congrégation ».
Le climat moral de l’époque stendhalienne est peu différent du nôtre. Seulement, le glissement sémantique, dû à l’écoulement du temps, brouille les perspectives. Il suffit de les éclairer pour que tout se mette en place. Comme jadis dans le monde soviétique finissant, les ancienne idées révolutionnaires se sont muées en opinions conservatrices. Le qualificatif “républicain” qui définissait un dangereux conspirateur vers 1830, désigne cent cinquante ans après un bourgeois rangé. Mais sous les étiquettes changeantes, les hommes, eux, ne changent pas. Comme l’expliquait le banquier Leuwen à son fils, pour réussir en politique et dans le monde, il faut être “un coquin”. Toutes les époques ont eu leurs bien pensants et leurs conformistes prêts à expédier au bûcher les insolents et les réfractaires un peu trop remuants et nuisibles aux coquins. Pour décrypter ce qu’il y a de permanent dans les romans de Stendhal, il suffit de remplacer le qualificatif “libéral” par l’un des sobriquets réservés plus tard aux indociles, et alors tout s’éclaire. En leur temps, puisqu’ils étaient des insoumis, Julien Sorel, Lucien Leuwen et Fabrice del Dongo étaient nécessairement des “jacobins”. Aujourd’hui, on les désignerait sous je ne sais quelle appellation malséante dont les gazettes abondent.
Dominique Venner http://fr.novopress.info
source :
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Colonisation culturelle des Français de souche : droite et gauche main dans la main
Une pétition en ligne vient de voir le jour sur internet pour interdire l’apprentissage du coran dans les écoles françaises. L’instigatrice, Chantal Rageot, explique ce qui a motivé sa démarche : « Je viens d’apprendre que mon petit fils de 10 ans, en école primaire, est obligé d’apprendre le coran et qu’il sera noté sur ce en fin d’année scolaire« .
Que les chantres de la laïcité au gouvernement introduisent l’enseignement obligatoire du coran dans l’école de la République française, voilà qui est curieux…C’est toujours cette assimilation à l’envers que veulent promouvoir nos dirigeants : ce n’est plus l’étranger qui doit adopter les codes culturels de son pays d’accueil, mais l’autochtone qui se doit d’apprendre ou d’adopter les usages de celui qu’il accueille. En bref, l’assimilation à l’envers est une forme de colonisation culturelle dans laquelle l’indigène doit apprendre la langue de ses colonisateurs. N’est-ce pas Jean-François Copé qui avait fait lui-même cette suggestion, en appelant de ses voeux l’apprentissage de la langue arabe en cours ? :
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La gauche contre les valeurs
La gauche institutionnelle, aujourd'hui solidement installée à la tête de l'État, semble déterminée à bouleverser patiemment tous nos repères ancestraux au nom d'une conception de la modernité toute acquise aux dogmes du matérialisme ambiant.
Avec une constance idéologique qui n'a d'égal que son aptitude à dissimuler ses intentions véritables, la gauche a décidé d'anéantir les fondements séculaires qui structurent en profondeur la société française. Au fil de réformes "sociétales" habilement programmées, une puissante offensive souterraine est à l'œuvre : celle-ci demeure dès lors bien peu perceptible par une opinion publique largement anesthésiée par la propagande libertaire du système politico-médiatique en place.
Un projet subversif
Les signes récents qui se multiplient ici ou là nous persuadent en tous les cas de la détermination des activistes de la gauche institutionnelle, aujourd'hui solidement installée à la tête de l'État, à bouleverser patiemment tous nos repères ancestraux au nom d'une conception dévoyée de la modernité, en réalité toute acquise aux dogmes permissifs du matérialisme ambiant. Au cœur de ce projet politique subversif, un objectif domine : la destruction méthodique du cadre anthropologique qui configurait depuis toujours la conception universelle de l'homme, dans le but inavoué de promouvoir l'émergence d'un homme nouveau qui serait dépouillé des attributs de son irréductible dignité. Contre l'avis de la majorité silencieuse des Français, le pouvoir socialiste s'apprête à adopter la loi autorisant le "mariage" entre personnes homosexuelles, en attendant de faire inscrire dans notre droit ses inévitables prolongements législatifs, de la procréation médicalement assistée à la gestation pour autrui : après avoir fait son entrée discrète dans les manuels scolaires dès la rentrée 2011, la théorie anglo-saxonne du gender - qui récuse la différence naturelle des sexes pour mieux promouvoir une conception déstructurée de la sexualité - trouve ici une formidable consécration normative. Pour convertir les esprits, surtout les plus vulnérables, les prosélytes ne manquent pas à l'appel : appliquant par avance les consignes de son collègue au gouvernement, Vincent Peillon, ministre de l'Éducation nationale, qui invitait début janvier 2013 les recteurs d'académies à « s'appuyer sur la jeunesse pour changer les mentalités », Najat Vallaud-Belkacem n'a-t-elle pas su, en ministre zélé, porter la bonne parole dans l'enceinte des établissements scolaires dès octobre 2012 pour y vanter les mérites du "mariage" homosexuel auprès de nos chères têtes blondes ?
Sans père ni mère
Puisque pour certains enfants le terme de parent remplacera sous peu ceux, beaucoup moins neutres, de père et mère - non sans que ce séisme législatif ne bouleverse par ailleurs les règles de la filiation -, pourquoi, dans la foulée, ne pas profiter de cet effet d'aubaine, au nom de la "lutte contre les stéréotypes", pour débaptiser l'école maternelle et remplacer son appellation, comme le suggère Sandrine Mazetier, député PS, par la dénomination de "première école" ou celle d "’école élémentaire" qui neutraliserait enfin toute « charge affective maternelle » ? Témoignant d'une volonté sournoise d'abolir toutes les différences, y compris et surtout dans le champ sémantique, cette proposition passablement surréaliste a pour elle, malheureusement, d'être en cohérence avec l'esprit du temps présent : n'est-ce pas, en effet, sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy que l'usage administratif du mot "mademoiselle", au parfum si suranné, fit les frais de cette détestable "novlangue" à raison de son caractère jugé "discriminatoire" ? George Orwell, encore et toujours...
Toponymie revisitée
Pour nos gouvernants socialistes, la mutation anthropologique doit s'accompagner d'une révolution toponymique qui épouserait une mémoire historique "revisitée", exclusive autant que possible de toute allusion à l'histoire de l'Ancien Régime ou au passé colonial de la France. La refonte controversée de nos manuels scolaires, expurgés ces dernières années des références traditionnelles aux événements marquants de l'histoire de France ou de toute lecture chronologique de notre passé, encourage bien des municipalités socialistes à normaliser leur toponymie, à l'exemple de la municipalité de Rouen qui a débaptisé récemment le "Salon Louis XVI" de l'hôtel de ville pour le renommer "salon République", postérité révolutionnaire oblige ; car nul ne doit ignorer que la France est bien née sous X en 1789 ! Sous le prétexte commode d'attribuer le nom du poète Aimé Césaire, alors disparu, à un lieu de la ville de Gonesse, n'a-t-on pas vu dans le même esprit les édiles socialistes de cette commune du Val d'Oise, quelques années plus tôt, profiter de la circonstance pour débaptiser au passage la place maréchal Lyautey, dont le nom est assurément beaucoup moins conforme au politiquement correct ?
Le droit de vote des étrangers
En relançant récemment la question du droit de vote des étrangers non communautaires aux élections locales, le pouvoir socialiste exhume, enfin, dans un dessein purement électoraliste, une promesse de campagne présidentielle qui heurte profondément les traditions républicaines de la France. Sur cette question éminemment symbolique, on oublie trop souvent que le droit de vote a toujours été, en France, indissociable de la citoyenneté que seule confère, en droit, la qualité de ressortissant français. Alors que, sous l'effet anxiogène d'une immigration devenue incontrôlable, la population de notre pays se recompose en profondeur - altérant par là-même l'homogénéité des traits culturels d'une civilisation encore marquée par sa dimension catholique traditionnelle - le maintien légitime du lien indissoluble entre le droit de vote et la nationalité demeure vital : concevoir autrement le droit de vote serait donc porter ouvertement atteinte aux ressorts d'un "pacte républicain" depuis toujours ordonné au bien commun. De fractures anthropologiques en ruptures consommées avec les traits authentiques de notre civilisation, jusqu'où ira donc la frénésie dogmatique d'une oligarchie socialiste qui se sait cependant bien peu soutenue par une base militante davantage préoccupée par les questions économiques et sociales ? Nul ne le sait encore mais, avec une droite parlementaire frileuse, qui peine à tenir un discours véritablement décomplexé sur toutes ces questions capitales, il y a urgence à réagir intensément pour ceux qui, refusant pareilles dérives mortifères, entendent ne pas se soumettre à la dictature du relativisme absolu : les partisans résolus d'un conservatisme éclairé doivent désormais prendre le maquis, dans l'action politique comme dans le débat des idées, en demeurant fidèlement attachés au credo des valeurs spirituelles et morales de la France.
Karim Ouchikh Président exécutif de Souveraineté, indépendance et Libertés (SIEL)
Action Française 2000 février -mars 2013 -
14 avril 972 : empire d'Occident, empire d'Orient
En épousant à Rome, le 14 avril 972, la princesse grecque Théophano, Othon II peut espérer unir, réunir, deux empires qui représentent l'un et l'autre la tradition romaine. Une tradition qui continue, cinq siècles après la décomposition de l'empire romain, à faire flamboyer l'imaginaire des peuples européens.
L'empire, disparu d'Occident à partir de 476, a survécu dans le cadré de l'empire byzantin. l'empereur régnant à Constantinople s'intitule « empereur des Romains » et les Byzantins, pourtant héritiers directs de la culture hellénique, se désignent fièrement eux-mêmes, en grec, par le nom de «Romaioi» (quand l'Islam à submergé, au VIIe siècle, les territoires byzantins d'Asie et d'Afrique, les musulmans ont adopté le terme de Roumis pour désigner leurs ennemis originaires d'Europe). Les Byzantins affirment leur qualité d'héritiers et continuateurs de Rome à travers des symboles (l'aigle) et une titulature : le souverain byzantin revendique le titre d'« empereur des Romains » et dénie à tout autre que lui le droit de porter ce titre. C'est pourquoi Charlemagne, couronné empereur d'Occident en 800 et donc restaurateur de la dignité impériale en Europe de l'Ouest, se contente, par souci diplomatique, de prendre dans sa correspondance officielle avec Byzance le titre d« 'empereur Auguste »... Ses successeurs font de même et lorsque l'un d'entre eux, Louis Il, enfreint la règle et se prétend "empereur des Romains", il suscite force protestations venant de Constantinople.
Après la décadence de l'empire carolingien, au cours du IXe siècle, l'institution impériale ne renaît en Occident qu'en 962 lorsque le roi de Germanie Othon 1er, fils d'Henri 1er l'Oiseleur, est couronné empereur à Rome par le pape Jean XII. Othon bénéficie d'une grande popularité grâce à sa victoire du lechfeld (955) sur les Hongrois, nomades pillards venus d'Asie et qui ont agressé pendant des décennies l'Europe occidentale. Othon le libérateur, incarnant l'identité germanique, rassemble sous son autorité l'Allemagne et l'Italie du Nord, tout en se faisant le tuteur d'une papauté affaiblie par la médiocrité morale de plusieurs pontifes successifs (ainsi Jean XII « se fait remarquer, note Marcel Pacaut dans son Histoire de la papauté, par son amour de l'argent et ses aventures galantes »).
Héritier du titre impérial à la mort de son père (973) Othon Il « n'en avait hérité ni l'énergie, ni la perspicacité, ni l'aptitude à dominer les événements » (Robert Folz, La naissance du Saint-Empire). Mais il subissait, beaucoup plus que lui, la fascination de l'idée romaine de l'Empire. Il n'hésita pas à prendre le titre d« 'empereur Auguste des Romains », ce qui était une façon de s'affirmer le véritable successeur des Césars. Mais aussi, du coup, un défi à Constantinople. Hanté par la nécessité de contrôler l'ensemble de l'Italie, Othon Il voulait reprendre le sud de la péninsule, exposée aux incursions des Arabes venus d'une Sicile qu'ils occupaient depuis 827. Défait par eux en 982, Othon Il préparait la revanche lorsqu'il mourut l'année suivante. Sa veuve Théophano assuma la régence au nom du jeune Othon III.
Nièce de l'empereur byzantin Jean Tzimiscès, Théophano se révéla une femme de grande énergie. Elle donna à son fils une formation soignée, tant sur le plan politique que culturel. À travers elle le monde romano-germanique et le monde grec pouvaient se rejoindre. Ce grand projet devant être réduit à néant, en 1054, par le schisme marquant le divorce définitif entre l'Église latine et l'Église grecque.
P. V National Hebdo semaine du 10 au 16 avril 1997 -
Vae victis - Ce soir...
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Ils n’aiment pas la France, ils attaquent sa culture et sa langue
Soumise à l’Otan, à l’OMC, au FMI, aux cénacles bruxellois la France est aussi devenue largement une colonie américaine, victime collatérale dans notre système mondialisé des escrocs et de menées perverses de certaines grandes banques anglo-saxonnes, largement responsables de la crise de 2008. Français victimes plus largement de l’ultra libéralisme, issu de l’organisme yankee génétiquement modifié, qui pousse par nature à la destruction des nations et des enracinements. Nous subissons pareillement avec la complicité de nos « élites » qui ne sont plus guère françaises que de nom, une new-yorkisation dans le domaine culturel et une californisation dans le domaine sociétal, totalement étrangères au génie français, aux valeurs helléno-chrétiennes de la véritable civilisation européenne.
Exemple parmi d’autres, c’est ainsi à cette caricature de cinéaste propagandiste planétarien, Steven Spielberg – ce qui ne retire rien à son incontestable savoir-faire - qu’a été donné cette année la présidence du festival de Cannes. Un choix audacieux ont avancé sans rire quelques pontes du cinéma « français » . Le grand Claude Autant–Lara n’en fini pas de se retourner dans sa tombe…
Si le cinéaste Français Eric Rochant affirmait il y a quelques années que «le Front National est le seul parti révolutionnaire français », il est bien combattu comme tel de même que notre pays est bien la cible d’une offensive privilégiée du monde de la finance apatride. La France pays des droits de l’homme, des Lumières, porteuse du message laïc universel est invitée à montrer l’exemple du multiculturalisme, du grand mélange mondial duquel accouchera le mutant idéal : l’homo consumerus-hermaphrodite-lobotomisé.
Dans cette logique de domination du mondialisme sous drapeau anglo-saxon, nous pouvons compter sur les collabos qui actionnent les différents rouages du Système, pour apporter leur aide servile à cette défrancisation accélérée constate Bruno Gollisch.
Il est ainsi tout sauf anodin que soit présenté avant la fin du mois en Conseil des ministres, le projet de loi sur l’enseignement supérieur et la recherche (ESR), défendu par son ministre, l’ex député PS Genevieve Fioraso, qui aura pour conséquence de marginaliser l’emploi de la langue française dans l’enseignement supérieur et la recherche.
L’article L. 121-3du code de l’éducation indique que « la langue de l’enseignement, des examens et concours, ainsi que des thèses et mémoires dans les établissements publics et privés d’enseignement est le français, sauf exceptions justifiées par les nécessités de l’enseignement des langues et cultures régionales ou étrangères, ou lorsque les enseignants sont des professeurs associés ou invités étrangers ».
Or, l’article 2 du projet de loi ESR prévoit cet ajout : « ou lorsque les enseignements sont dispensés dans le cadre d’un accord avec une institution étrangère ou internationale tel que prévu à l’article L. 123-7 ou dans le cadre de programmes bénéficiant d’un financement européen ».
Concrètement, cette précision pour anodine qu’elle apparaisse, aura pour effet d’augmenter les possibilités d’emploi de l’anglais en France, et plus largement de porter un coup à la diversité linguistique en Europe dans la communication entre enseignants de nos différents pays.
Pire encore, le 12 février dernier, 36 sénateurs du groupe socialiste ont déposé une proposition de loi « relative à l’attractivité universitaire de la France » L’article 6 de celui-ci (un ajout à l’article L. 761-1 du code de l’éducation) indique que «(…) la langue de l’enseignement, des examens et concours, ainsi que des thèses et mémoires, dans les établissements d’enseignement supérieur, peut être une autre langue que le français. Pour les étudiants ne justifiant pas d’une connaissance suffisante du français, lorsqu’ils suivent une formation dispensée dans une langue étrangère, cette dérogation est soumise à l’obligation de suivre un cursus d’apprentissage de la langue et de la culture françaises ».
Ainsi, un étudiant français ou étranger effectuant ses études en France, aura la possibilité de suivre son cursus intégralement en anglais ! Et ce, Bruno Gollnisch l’a souvent constaté en tant que professeur, alors même que de nombreux étudiants arrivent à l’université avec de grandes lacunes dans la maîtrise de leur langue maternelle française, notamment à l’écrit.
Certes, il est de plus en plus indispensable pour de nombreux jeunes français, de maîtriser une langue étrangère. Mais cette prépondérance voulue d’une caste anglophone portée au pinacle sera un message désastreux envoyé à travers le monde à tous les francophones, les francophiles et autres amoureux et défenseurs de la culture française.
Ils apprendront que des élus français dépositaires d’un part de la souveraineté populaire, habités par un masochisme antinational et une mentalité de soumis, signent eux-mêmes une reddition en rase campagne devant l’hégémonisme de l’anglo-américain.
Le Français a-t-il vocation dans quelques décennies, dans un siècle, à n’être plus uniquement qu’une langue étudiée par une poignée d’érudits et de passionnés…comme le latin et le Grec ? Langue morte d’un pays en sursis que les autochtones auront fui ou qui, selon la sombre prophétie de Jean Raspail, seront encore visibles dans quelques réserves…
Redisons le, il n’est pas encore trop tard pour emprunter le chemin de la résurrection nationale, mais le temps nous est compté et ce coup d’arrêt aux menées du mondialisme doit être donné. Ici et maintenant !
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La spécificité russe sur la scène internationale
Jean Geronimo, docteur en économie, expert des questions économiques et stratégiques russes, Université Pierre Mendès France de Grenoble, est auteur de « La Pensée stratégique russe, Guerre tiède sur l’échiquier eurasien. Les révolutions arabes et après ? » (Sigest, 2012). Il évoque dans l‘interview ci-dessous, et que nous publions sur Contre-Info à sa demande, la pensée stratégique et les nouveaux défis de cette Russie post-communiste.
Pourquoi cette seconde édition, sous-titrée : « Les Révolutions arabes, et après ? » ?
Je voulais expliquer la spécificité de la position russe sur la scène internationale, au regard de l’évolution géopolitique récente accélérée par le « mirage arabe » et, dans ses grandes lignes, verrouillée par la gouvernance néo-libérale sous leadership américain.
Cette évolution touche, d’une manière plus ou moins directe, les intérêts nationaux de la Russie – élargis à sa proche périphérie, la Communauté des Etats indépendants (CEI), qui couvre prés de 99% du territoire de l’ex-URSS. En la définissant comme son « Etranger proche », la Russie veut montrer à l’Occident que la CEI reste sa zone exclusive de responsabilité et, par ce biais, dissuader ses velléités expansives.
Fondamentalement, mon livre vise à présenter la réaction russe face aux doubles menaces constituées par le futur bouclier anti-missiles américain et la propagation du « Printemps arabe », au-delà de son cadre régional. A la base, il y a une totale incompréhension de l’Occident global sur le comportement russe, perçu à travers le prisme désuet de la Guerre froide. Cette seconde édition enrichie du livre, recentrée sur l’imminence d’un « hiver islamiste » – selon l’expression de Poutine –, s’efforce d’éclairer ce point particulièrement délicat.
Depuis la disparition officielle de l’URSS, le 25 décembre 1991, la Russie a le sentiment d’avoir été volontairement marginalisée par l’axe occidental. Au moyen de son levier USA-OTAN, cet axe s’est montré avide de profiter de la faiblesse temporaire de la puissance russe, issue d’une transition post-communiste désastreuse sur le plan économique et rythmée par la terrible « thérapie de choc » imposée par le premier ministre de Boris Eltsine, Yegor Gaïdar. Comme si, selon Andreï Gratchev, ancien conseiller du président Gorbatchev, il y avait eu une volonté inavouée de l’Occident – surtout des Etats-Unis – de voir la Russie post-communiste disparaître de la scène mondiale, en tant qu’acteur majeur, et de la réduire au rang de simple puissance régionale.
Entre 1992 et 1998, après l’application du « modèle de Washington », cette transition néo-libérale en Russie se traduit par une inquiétante décroissance – croissance économique négative, sanctionnée par une compression de prés de 50% du PIB russe sur cette période ! Moscou regrette, aujourd’hui, la volonté occidentale d’étendre son influence en périphérie post-soviétique, considérée comme son pré-carré historique et, en définitive, de renforcer son unilatéralisme armé dans la gouvernance mondiale.
Le vieux rêve gorbatchévien d’un monde post-guerre froide multipolaire, repris par la nouvelle direction russe à la suite d’Evgueni Primakov et poursuivi désormais par Vladimir Poutine, a été brisé.Le discours de Poutine à la Conférence de Munich sur la sécurité en 2007, était-il le symbole d’une inflexion radicale dans la politique étrangère russe ?
Tendanciellement, depuis son arrivée au pouvoir présidentiel, le 30 mars 2000, V. Poutine s’efforce de s’opposer à l’orientation qu’il juge « anti-russe » de la diplomatie occidentale et cela, sur la base de la défense prioritaire de ses intérêts nationaux.
Il le fait en s’appuyant de plus en plus sur un axe eurasien avec la Chine – avec aussi, l’Inde et l’Iran –, surtout depuis la désillusion de 2003 avec l’intervention américaine en Irak, en violation des règles internationales et ce, en dépit de l’opposition sino-russe. Cette orientation eurasienne, catalysée par l’axe sino-russe, est d’ailleurs reprise dans le cadre d’une structure politico-militaire commune, l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS). Depuis 2003, et sous l’impulsion du vieux « soviétique » Primakov, on assiste donc à une inflexion asiatique de la diplomatie russe, en réaction à l’attitude occidentale.
De manière spectaculaire, Poutine a dénoncé l’attitude provocante de l’Occident lors de son célèbre discours de Munich, le 10 février 2007. Il n’accepte pas la sacralisation du « facteur force » – selon son expression – dans la régulation mondiale et dans la stratégie d’ingérence de l’axe USA-OTAN, très politiquement orientée. Il n’accepte pas non plus l’élargissement de l’OTAN à l’ancienne zone d’influence soviétique et l’extension douteuse du bouclier américain ABM, via sa composante otanienne en Europe, aux portes de la Russie. Pour le président Poutine, il s’agit d’une stratégie d’encerclement à finalité politique, consciemment focalisée contre la Russie restée, dans le prisme occidental, l’ennemi héréditaire de la Guerre froide.
En poursuivant le reflux (roll back) de la puissance russe et la neutralisation de son potentiel nucléaire stratégique – via son bouclier anti-missiles –, la politique de l’administration Obama s’inscrit dans une logique atténuée de Guerre froide. Ce faisant, elle oblige la Russie, soucieuse de rééquilibrage stratégique, à renforcer les deux organisations politico-militaires de sa ligne sécuritaire sur l’espace eurasien, l’OCS et l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC).
Au final, la politique américaine apparaît donc, dans la pensée stratégique russe, comme une menace latente majeure – en quelque sorte, « officialisée » par l’avertissement de Munich.Vous parlez de « pensée unique », pour caractériser les analyses dominantes sur les révolutions arabes, pourquoi ?
Oui, le plus troublant est ce relatif consensus sur les « révolutions » arabes qui s’exprime, désormais, de manière unilatérale contre le régime Assad, devenu soudainement gênant – un peu à la manière de feu Kadhafi. Comme un ennemi (idéologique) à abattre.
Pour caractériser cette configuration, associée à une structure d’intérêts relativement complexes et contradictoires, mais motivés par la volonté d’éliminer un « dictateur qui massacre son peuple », Moscou parle de scénario libyen. Par cette expression, la Russie sous-entend la mise en œuvre d’une stratégie manipulatoire soumise à un objectif politique précis visant, en réalité, autre chose que les intérêts légitimes du « bon peuple syrien » et la défense des droits de l’homme, en général.
En référence à l’expérience libyenne, Moscou redoute une possible instrumentalisation d’une résolution de l’ONU avec la complicité tacite de l’OTAN, en vue d’une intervention militaire et réaliser, par ce biais, un vieil objectif de la Guerre froide visant à l’expulser de la région. Selon moi, il y a une volonté délibérée de créer un seuil critique conduisant le « système » (le régime syrien) à surréagir et à « perdre la tête » – pour, à terme, légitimer un devoir d’ingérence. La stratégie de harcèlement continu contre les forces pro-Assad s’inscrit, de manière indiscutable, dans la réalisation de cet objectif. La multiplication des incidents avec la Turquie, plus ou moins suscités par cette dernière, s’explique à partir de cette problématique qui a, il y a peu, justifié l’installation par l’OTAN de missiles Patriot à visée (théoriquement) défensive, à la frontière turco-syrienne. Depuis peu, les prétextes d’une intervention se multiplient – dont celui, redondant, de l’utilisation d’armes chimiques par « celui qui massacre son peuple ».
Et, cela, à partir d’une simple rumeur, allègrement reprise par les médias occidentaux sans la moindre vérification – une fois de plus. Inquiétant.Pourquoi parler d’ « évolutions » arabes, et non de révolutions ?
Au départ, ces « révolutions » semblent spontanées et répondent au juste désir d’émancipation de peuples longtemps privés de droits et de libertés. « Semblent », car Moscou n’écarte pas l’idée – depuis le début de la crise – d’une main extérieure pour précipiter l’éclosion précoce d’un « Printemps démocratique ». Et, a priori, mes informations personnelles accumulées depuis 2 ans le confirment. Les dés sont, donc, politiquement pipés.
Même dans l’hypothèse de véritables « révolutions », ces dernières ont été progressivement soutenues et guidées de l’étranger au profit, notamment, de puissances ambitieuses enclines à renforcer leur pouvoir régional. Sans parler du rôle trouble des grandes puissances occidentales adeptes, dans un premier temps, d’un encouragement aveugle de la rébellion et, dans un second temps, de son soutien armé. Au nom de droits de l’homme à géométrie variable.
Cette orientation est évidente dans le cas syrien, avec l’implication insidieuse des puissances saoudienne, qatarienne et turque – en totale violation du principe westphalien de souveraineté des Etats-nations. A cela, s’est greffée l’ingérence croissante des services secrets occidentaux. Je préfère donc parler d’évolutions consciemment orientées. Le terme « révolutions » est idéologiquement connoté et traduit un déterminisme excluant toute critique ou vision alternative. C’est la porte ouverte à la pensée unique et, surtout, à la justification morale d’une ingérence politique programmée.Quelle est la position officielle de la Russie sur la Syrie. Et comment mieux la comprendre ?
Officiellement, et conformément aux lois internationales sur la souveraineté des Etats, la Russie ne veut pas s’impliquer militairement dans un conflit interne pour éviter son exacerbation et aggraver le chaos. Et cela, d’autant plus qu’elle sort d’un lourd traumatisme.
Elle n’a pas oublié le « piège afghan » de 1979, tendu par Zbigniew Brzezinski, alors conseiller à la Sécurité du président Carter, pour l’enliser dans un conflit périphérique. La « leçon » afghane – comme plus tard, celle de 1999 en ex-Yougoslavie, avec le bombardement de l’OTAN – est profondément ancrée dans la mémoire stratégique russe. En outre, l’indépendance auto-proclamée du Kosovo, le 17 février 2008, a été ressentie par elle comme une véritable gifle diplomatique. Trop longtemps occultée, la Russie veut désormais s’affirmer sur la scène mondiale et, dans cette optique, elle veut faire de la question syrienne, une « preuve » de son retour comme grande puissance, respectée et écoutée. Pour Moscou, seule une solution négociée permettrait de sortir de l’impasse syrienne – conformément aux accords de Genève, du 30 juin 2012.
Moscou s’efforce donc d’adopter une attitude neutre et équilibrée, privilégiant une reprise du dialogue entre les parties prenantes à la crise, comme pierre angulaire de la future transition démocratique – qu’elle n’exclut pas sans Assad, si le peuple le décide (c’est d’ailleurs, aussi, la position du président syrien). Ce faisant, la Russie s’oppose ouvertement à la coalition arabo-occidentale qui exige, comme préalable incontournable, le départ d’Assad. Un non-sens, auto-destructeur pour la Syrie et donc, pour la région.
Cette configuration explique le veto russe – associé à celui de la Chine – aux résolutions successives du Conseil de sécurité de l’ONU, portées par les membres de cette coalition et structurellement favorables à l’opposition anti-Assad. Comme d’ailleurs, l’information médiatique quotidiennement diffusée par l’Organisation syrienne des droits de l’homme (OSDH) sur la crise syrienne, asymétrique et non contrôlée, donc potentiellement manipulable. Avec, en définitive, une désinformation choquante – la fin justifiant les moyens.
Or, l’extrême hétérogénéité et islamisation de cette coalition ne présage rien de bon sur la transition post-Assad.Vous parlez « d’enjeux cachés » dans le déroulement de la crise syrienne. Pouvez-vous expliquer ?
Aux traditionnels enjeux politiques de contrôle d’une zone névralgique, il y a la volonté de gagner la bataille de l’énergie, via le contrôle des sources et circuits énergétiques majeurs. Par ailleurs, à l’instar d’autres acteurs de la région, le Qatar aurait un projet gazier stratégique passant par le territoire syrien pour « rentabiliser » ses exportations énergétiques et garantir ses débouchés. Le potentiel gazier syrien, a priori considérablement sous-évalué, serait donc un objectif implicite de cette guerre qui ne dit pas son nom et qui est aussi, par ricochets, une guerre contre l’Iran.
Dans le même temps, il y a en effet le désir de toucher l’Iran en affaiblissant un de ses principaux alliés de la région et, par ce biais, fragiliser le nouvel axe du mal émergent Chine-Iran-Russie. Car la puissance économique et politique montante de cet axe eurasien est de plus en plus redoutée par le leadership américain, contraint à une reformulation de sa stratégie dans la région. Nouveau réalisme oblige.
Au final, « l’hyperpuissance américaine », pour reprendre l’expression de Hubert Védrine, doit aussi gérer son déclin économique, aujourd’hui rendu inéluctable par la pression concurrentielle accrue des « émergents ». Ce déclin est accéléré par un interventionnisme politico-militaire de moins en moins soutenable et économiquement épuisant – parfaitement anticipé par Paul Kennedy, en 1987, dans son fameux livre « The Rise and fall of the great powers ».
En conséquence, le redécoupage régional des cartes géopolitique et énergétique se présente comme l’enjeu clé de cette guerre sans nom.A vous suivre, il s’agit aussi d’une « guerre de l’information » ?
Oui, sans aucune ambiguïté. Pour mémoire, rappelons que lorsque G.W. Bush a lancé sa fameuse croisade en Irak en 2003, il a reconnu – et ce n’est pas par hasard – que la première guerre à gagner était celle de l’information. Les révolutions libérales (« colorées ») en zone post-soviétique à partir de 2003, et plus tard, les révolutions arabes depuis 2010, sont une stricte application de ce « principe bushien ».
Noam Chomsky démontre, dans ses œuvres, le rôle crucial des stratégies de désinformation dans les démocraties. Pour V. Poutine, l’information a un rôle politique, via l’activité décisive d’ONG à financement étranger dans la structuration et la manipulation de l’opinion publique. Il l’a personnellement vérifié lors des dernières campagnes législatives et présidentielles russes, avec Golos – ONG russe chargée du monitoring des élections, mais très liée aux dollars et donc, aux intérêts américains via National Endowment for Democracy (NED) et United States Agency for International Development (USAID). Pourrait-on imaginer un scénario inverse aux Etats-Unis ? Cela a conduit, fort justement, Vladimir Poutine à renforcer la législation russe contre ces nouveaux « agents d’influence », soutenus de l’étranger – et, dés lors, définis comme des agents politiques.
Dans les années 2000, dans le cadre des « révolutions de couleur », les ONG à financement américain ont eu un rôle clé dans l’arrivée au pouvoir des « libéraux » dans certaines républiques post-soviétiques, comme la Géorgie (2003), l’Ukraine (2004) et le Kirghizstan (2005). En 1989, lors de la révolution polonaise, elles ont aussi joué un rôle non négligeable – avec, encore, le soutien de NED. Troublante inertie.
En conséquence, Poutine définit l’information comme levier des nouvelles stratégies du soft power, moins coûteuses sur les plans politique et économique, mais terriblement efficaces dans le monde inter-connecté d’internet, fondé sur l’immédiateté communicationnelle. « L’hyper-information » mal contrôlée peut, en effet, alimenter des stratégies politiques de déstabilisation des pouvoirs en place. Une telle tentative a été observée au Kazakhstan en décembre 2011, contre le président pro-russe et ami de V. Poutine, Nazarbaïev. A la même époque, ce scénario s’est répété contre le candidat Poutine qualifié, lors des manifestations de rue successives, de nouveau « dictateur soviétique ». Les clichés ont, décidément, la vie (trop) longue.
Le discours de Poutine souligne le danger de futures révolutions portées par le soft power et la manipulation de l’information pour renverser des régimes hostiles, comme cela se passe au Moyen-Orient et bientôt, comme il le redoute, en périphérie post-soviétique. Poutine craint, en particulier, une extension du « Printemps arabe » dans les régions musulmanes de l’espace russe économiquement sous-développées, donc fragilisées et courtisées par les idéologies de l’Islam radical – ce qu’il dénonce comme la menace imminente d’un « hiver islamiste ».
Dans ce cadre, ne pas comprendre la réaction russe relève d’une ineptie intellectuelle.A la fin de votre livre, dans le post-scriptum, vous développez le concept de « Guerre tiède »…
En opposant à nouveau Russes et Américains, via des axes géopolitiques relativement hétérogènes mais structurés autour de la défense d’intérêts communs, cette guerre s’inscrit dans le prolongement d’une forme actualisée et désidéologisée de la guerre « froide ». Structurellement, il s’agit toujours d’une guerre d’influence, par alliés interposés – mais recentrée sur l’économique. C’est ce que j’appelle la guerre « tiède ».
Ainsi, la transition post-communiste du nouvel ordre international est caractérisée par une nouvelle forme de conflictualité bipolaire opposant, dans un terrible face-à-face, l’axe arabo-occidental (soutenu par la Turquie) et l’axe eurasien sino-russe (soutenu par l’Iran). En creux, c’est aussi la question d’un monde post-occidental plus démocratique qui se joue – selon le terme utilisé par Hélène Carrère d’Encausse dans son livre de 2011, « La Russie entre deux mondes ». Cette question est portée par le pouvoir économique et politique croissant des puissances émergentes du 21e siècle, contestant la traditionnelle domination du Nord. Ces puissances, principalement les BRICS, revendiquent leur place dans la nouvelle gouvernance mondiale et ses instances décideuses – ce qui, selon la phraséologie gorbatchévienne, passe par une « Perestroïka internationale ».
Fondamentalement, cette Guerre tiède est axée sur le contrôle des Etats stratégiques, en particulier les « pivots géopolitiques », pour reprendre la terminologie de Brzezinski. Ces Etats « pivots » fondent leur force moins sur leur puissance intrinsèque que sur leur capacité de nuisance et sur leur localisation au cœur d’espaces et de carrefours stratégiques. Zbigniew Brzezinski l’explique fort bien dans son ouvrage majeur, véritable bible de la politique étrangère américaine depuis 1997, « Le grand Echiquier ». De ce point de vue, l’Arabie saoudite peut être considérée, selon moi, comme le nouveau pivot géopolitique de la stratégie américaine sur l’Echiquier arabe.
Aujourd’hui, ce pivot régional est activé contre les intérêts russes au Moyen-Orient, pour poursuivre le reflux de l’ancienne puissance communiste. Par ce biais, Washington transforme la Syrie en pièce maîtresse de cette impitoyable partie d’échecs. Or, en s’appuyant sur le facteur religieux, elle provoque une inquiétante politisation de ce dernier – exprimée par la montée de l’Islam radical, comme vecteur identitaire et accélérateur des « révolutions ». Au final, la crise syrienne cache donc un enjeu géopolitique majeur, médiatisé par de puissants rapports de force.
Au coeur de la Guerre tiède, les coûts collatéraux humains et politiques sont déjà énormes et, sans doute, irréversibles – avec, en particulier, le renforcement de la fracture chiites/sunnites comme levier d’une terrible conflictualité inter-confessionnelle.
Les Révolutions arabes, et après ?« La Pensée stratégique russe. Guerre tiède sur l’échiquier eurasien. Les révolutions arabes et après ? » (Sigest, 2012 – 14,95 e). Préface de Jacques Sapir.