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géopolitique - Page 436

  • CYBERATTAQUE « RUSSE » : ÉTATS-UNIS ET ROYAUME-UNI SONT DES ARROSEURS ARROSÉS

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    Une belle histoire à la John Le Carré, version 2018.

    Ne partez pas. Je vous promets qu’il n’y aura aucun jargon techno dans ce papier, mais juste une belle histoire à la John le Carré, version 2018.

    Il était une fois un organisme américain d’espionnage mondial, la NSA. Celle-ci, on le sait désormais, a implanté des mouchards partout dans le monde. Dans toutes les infrastructures informatiques auxquelles elle a pu avoir accès. Dans tous les serveurs, tous les routeurs. Mais aussi, parfois… dans votre ordinateur. En utilisant une porte dérobée – une faille dans la sécurité de Windows -, la NSA a pu, pendant des années, capturer des données privées et même, dans certains cas, utiliser l’ordinateur infecté pour en infecter d’autres, etc.

    En l’occurrence, la faille de Windows – baptisée « EternalBlue » – avait été découverte par la NSA en 2012. Celle-ci avait bien évidemment décidé de ne pas avertir Microsoft, afin que la faille… en reste une.

    Le problème, c’est que le monde souterrain de l’Internet a fini par entendre parler d’« EternalBlue »… jusqu’à ce que des hackers s’en emparent.

    Or, on le sait aujourd’hui, l’énorme cyberattaque de 2017, dans laquelle des milliers d’ordinateurs à travers le monde se sont retrouvés cryptés et bloqués en attente du paiement d’une rançon, s’est infiltrée dans les ordinateurs… par la porte « EternalBlue ».

    D’après Sean Sullivan, un conseiller en sécurité chez F-Secure interrogé par Ars Technica, les pirates ont obtenu des informations sur la faille « EternalBlue » dès le début de l’année 2017 et se sont immédiatement mis à développer le code qui devait l’exploiter. La date des fichiers qui constituent NotPetya le prouve.

    Alors, forcément, les États-Unis – et leur fidèle alliée, la perfide Albion – s’offusquent aujourd’hui ! La Russie ! Ça ne peut être que la Russie ! Et soyons plus précis, même : le Washington Post a des preuves, hein, c’est l’armée russe qui est derrière tout ça !

    Maintenant, vous voulez rire ? Vous la voulez, la « preuve » de la CIA citée par le Post ?

    Ils se fondent sur un seul indice : le fait qu’un cabinet comptable ukrainien ait été le « patient zéro » (la première victime) du virus. Un peu léger, comme « preuve », pour impliquer l’armée russe, et plus particulièrement le GRU, non ?

    La méthode d’implantation du bout de code était purement géniale : il a suffi aux pirates d’infecter un site Web dont ils savaient qu’il serait visité par leur cible (le site délivrait des mises à jour de logiciels de comptabilité et des informations sur les taux de taxe, etc.).

    Durant ses fameuses Conversations avec Poutine, Oliver Stone interrogea le tsar sur les attaques informatiques subies par les USA durant la campagne de l’élection présidentielle de 2016. Pouvait-on y voir la main de la Russie ? Poutine nia mollement, sans plus.

    En fait, peu importe qui est à l’origine de NotPetya. Ce qui compte, c’est que cette attaque fut rendue possible en 2017 par une faille découverte et exploitée par la NSA depuis 2012. Et la dernière fois que j’ai vérifié, la NSA n’était pas un organisme russe…

    http://www.bvoltaire.fr/cyberattaque-russe-etats-unis-royaume-uni-arroseurs-arroses/

  • Pourquoi Poutine « permet-il » à Israël de bombarder la Syrie ? (Le Saker)

    Une fois n'est pas coutume sur ce site : un petit "cours" de géostratégie (traduction de l'anglais par nos soins)
    Y.S.
    Pourquoi Poutine « permet-il » à Israël de bombarder la Syrie ?
    Par The Saker
    Informationclearinghouse a récemment publié un article de Darius Shahtahmasebi intitulé « Israël continue de bombarder la Syrie et personne ne fait quoi que ce soit ». Suite à cette publication, j'ai reçu un courriel d'un lecteur me posant la question suivante : « Pourquoi Poutine permet à Israël de bombarder la Syrie ? Je suis choqué par les actions de Poutine - est-ce que Poutine soutient l'entité sioniste, comme si de rien n'était. J'apprécierais vos commentaires à ce sujet. Aussi - j'ai entendu, mais je n'ai pas pu confirmer, que les immigrants juifs russes en Palestine occupée sont les plus ardents persécuteurs des Palestiniens - il font beaucoup de choses pour devancer Netanyahu. Pouvez-vous commenter s'il vous plaît ? ». Dans son article, Darius Shahtahmasebi se demande pourquoi le monde ne fait rien pour arrêter les Israéliens (« Pourquoi l'Iran, la Syrie et/ou le Hezbollah au Liban n'ont-ils pas répondu directement ? »). Mon lecteur est plus spécifique et se demande pourquoi Poutine ( ou la Russie) ne fait pas que «permettre» à Israël de bombarder la Syrie, mais peut-être même soutient l'entité sioniste.
    Je vois souvent ce genre de question dans les courriels et dans les commentaires, alors je voulais aborder cette question aujourd'hui.
    Premièrement, nous devons examiner certaines hypothèses critiques impliquées par cette question. Ces hypothèses sont les suivantes:
    > Que la Russie peut faire quelque chose pour arrêter les Israéliens
    > Que la Russie devrait (ou même est moralement obligée) de faire quelque chose.
    Permettez-moi de commencer en disant que je suis catégoriquement en désaccord avec ces deux hypothèses, en particulier la deuxième. Prenons-les une par une.
    Hypothèse n ° 1: la Russie peut arrêter les attaques israéliennes contre la Syrie.
    Comment ? Je pense que la liste des options est assez évidente ici. Les options russes vont de l'action diplomatique (protestations et condamnations privées ou publiques, tentatives de résolution du CSNU) à une action militaire directe (abattre des avions israéliens, les «balayer» avec un radar de combat pour tenter de les effrayer ou au moins, essayer d'intercepter des missiles israéliens).
    Essayer de raisonner avec les Israéliens ou d'écouter l'ONU a été tenté par de nombreux pays pendant des décennies et s'il y a une chose qui ne fait aucun doute, c'est que les Israéliens se foutent de ce que quelqu'un a à dire. Donc, leur parler n'est qu'un gaspillage d'oxygène. Qu'en est-il de les menacer ? En fait, je pense que cela pourrait fonctionner, mais à quel risque et quel prix ?
    Tout d'abord, alors que j'ai toujours dit que les forces terrestres de Tsahal sont plutôt mauvaises, ce n'est pas le cas de leurs forces aériennes. En fait, dans ce registre ils sont plutôt bon. Maintenant, si vous regardez où sont les défenses aériennes russes, vous verrez qu'elles sont toutes concentrées autour de Khmeimim et de Tartous. Oui, un S-400 a une portée très longue, mais cette portée dépend de beaucoup de choses, y compris la taille de la cible, sa section radar, ses capacités de guerre électronique, la présence d'avions spécialisés EW, l'altitude, etc. Les Israéliens sont des pilotes expérimentés qui sont très opposés au risque, donc ils font très attention à ce qu'ils font. Enfin, les Israéliens sont très conscients de l'endroit où se trouvent les Russes et où se trouvent les missiles. Je pense qu'il serait assez sûr de dire que les Israéliens s'assurent de garder une distance de sécurité minimale entre eux et les Russes, ne serait-ce que pour éviter tout malentendu. Mais admettons que les Russes ait une chance d'abattre un avion israélien - quelle serait la réaction israélienne probable à un tel carton ? Dans cet article, Darius Shahtahmasebi écrit : « Est-ce parce qu'Israël aurait bien plus de 200 armes nucléaires toutes « pointées sur l'Iran », et il y a peu de choses que l'Iran et ses alliés puissent faire face à une telle menace » Je ne vois pas les Israéliens utiliser des armes nucléaires contre les forces russes, cependant, cela ne signifie nullement que les Russes, lorsqu'ils traitent avec Israël, ne devraient pas considérer le fait qu'Israël est une puissance armée nucléaire dirigée par des mégalomanes racistes. Concrètement, cela signifie : « La Russie (ou tout autre pays) devrait-elle risquer un affrontement militaire avec Israël au sujet de quelques camions détruits ou d'une décharge d'armes et de munitions » ? Je pense que la réponse évidente est clairement «non».
    Alors que c'est le genre de calculs que les États-Unis ignorent (du moins officiellement - d'où le chahut contre la RPDC), la Russie est gouvernée par un homme sain et responsable qui ne prend pas pour habitude de se laisser mener dans un conflit. Décision russe par exemple de ne pas riposter coup-pour-coup contre la destruction du SU-24 par les Turcs. Si les Russes n'ont pas riposté contre les Turcs abattant un de leurs propres avions, ils ne vont sûrement pas attaquer les Israéliens lorsqu'ils attaquent une cible non russe !
    Il y a aussi des problèmes factuels à considérer : même certains systèmes de défense aérien russes sont très avancés et pourraient abattre un nombre X d'avions israéliens ; néanmoins, ils sont loin d'être assez nombreux pour empêcher toute l'armée de l'air israélienne de les saturer. En fait, Israël et le CENTCOM ont tout simplement un tel avantage numérique sur le contingent russe relativement petit qu'ils pourraient tous les deux dépasser les défenses russes, même s'ils subiraient des pertes dans le processus.
    Alors oui, les Russes pourraient probablement arrêter une ou quelques attaques israéliennes, mais si les Israéliens décidaient de s'engager dans une campagne aérienne soutenue contre des cibles en Syrie, il n'y a rien que les Russes pourraient faire sans partir en guerre contre Israël. Donc, ici encore, un principe stratégique très fondamental s'applique pleinement : vous ne voulez jamais commencer un processus d'escalade que vous ne contrôleriez pas et que vous ne pourriez pas gagner. Cela signifie simplement que si les Russes ripostent, ils perdent, et les Israéliens gagnent. C'est vraiment simple et les deux parties le savent (ce n'est pas le cas du stratège de salon).
    Et cela demande un regard critique sur la deuxième hypothèse:
    Hypothèse n ° 2: La Russie a le devoir moral d'arrêter les attaques israéliennes contre la Syrie
    C'est celui qui me déconcerte le plus. Pourquoi dans le monde quelqu'un pourrait-il penser que la Russie doit quelque protection que ce soit à n'importe qui sur la planète ?! Pour commencer, quand est-ce la dernière fois que quelqu'un est venu à l'aide de la Russie ? Je ne me souviens de personne au Moyen-Orient ayant offert son soutien à la Russie en Tchétchénie, en Géorgie ou, d'ailleurs, en Ukraine ! Combien de pays du Moyen-Orient ont reconnu l'Ossétie du Sud ou l'Abkhazie (ce que l'on peut mettre en perspective avec le cas du Kosovo !) ? Où était « l'aide » ou « l'amitié » musulmane ou arabe envers la Russie lorsque des sanctions ont été imposées et que le prix du pétrole a chuté ? Dite-moi - comment exactement les « amis » de la Russie lui ont-ils exprimé leur soutien par exemple au sujet du Donbass ou de la Crimée ?
    Quelqu'un peut-il m'expliquer pourquoi la Russie a une obligation morale envers la Syrie, l'Iran ou le Hezbollah alors qu'aucun pays musulman ou arabe n'a fait quoi que ce soit pour aider le gouvernement syrien à lutter contre les Takfiris ? Où est la Ligue arabe ? Où est l'Organisation de la coopération islamique ?!
    N'est-ce pas un fait que la Russie a fait plus en Syrie que tous les pays de la Ligue arabe et de l'OCI combinés ?!
    Où les Arabes et les Musulmans du Moyen-Orient ont-ils ce sentiment de droit qui leur enjoint qu'un pays lointain qui est confronté avec beaucoup de problèmes politiques, économiques et militaires doit faire plus que les voisins immédiats de la Syrie ?!
    Poutine est le président de la Russie et il est d'abord et avant tout responsable devant le peuple russe à qui il doit fournir une explication pour chaque victime russe et même chaque risque qu'il prend. Il me semble qu'il a tout à fait raison lorsqu'il agit en premier lieu pour défendre les gens qui l'ont élu et personne d'autre.
    Soit dit en passant, Poutine était très clair sur la raison pour laquelle il dirigeait une intervention militaire russe (très limitée) en Syrie : protéger les intérêts nationaux russes, par exemple en tuant des cinglés de Takfiris en Syrie pour ne pas avoir à se battre contre eux sinon dans le Caucase et le reste de la Russie. À aucun moment et en aucun cas, aucun officiel russe n'a fait référence à une quelconque obligation de la Russie envers la Syrie ou envers tout autre pays de la région. Certes, la Russie a soutenu le président Assad, mais ce n'était pas à cause d'obligations envers lui ou son pays, mais parce que les Russes ont toujours insisté sur le fait qu'il était le président légitime de la Syrie et que seul le peuple syrien avait le droit de décider de le maintenir à son poste ou de le remplacer. Et, bien sûr, il est dans l'intérêt national de la Russie de montrer que, contrairement aux États-Unis, elle se tient aux côtés de ses alliés. Mais rien de tout cela ne signifie néanmoins que la Russie est désormais responsable de la protection de la souveraineté de l'espace aérien ou du territoire syrien.
    En ce qui me concerne, le seul pays qui a fait plus encore que la Russie pour la Syrie est l'Iran et, au lieu de gratitude, les pays arabes « remercient » les Iraniens en conspirant contre eux avec l'aide des USA et d'Israël. Hassan Nasrallah jour parfaitement son rôle lorsqu'il déclare que tous ces pays sont des traîtres et collaborateurs de l'Empire Anglo-sioniste.
    Il y a quelque chose de profondément immoral et hypocrite dans ce gémissement constant, implorant que la Russie devrait faire plus alors qu'en réalité la Russie et l'Iran sont les deux seuls pays à faire quelque chose de significatif (avec le Hezbollah, bien sûr!).
    Je vais tâcher de maintenant répondre à quelques questions type :
    Question n ° 1 : mais la Syrie, l'Iran et le Hezbollah ne sont-ils pas des alliés russes ?
    Oui et non. Objectivement - oui. Formellement - non. Cela signifie que si ces trois entités ont des objectifs communs, elles sont également indépendantes et ont des objectifs qui ne sont pas partagés par d'autres. De plus, elles n'ont pas de traité de défense mutuelle et c'est pourquoi ni la Syrie, ni l'Iran, ni le Hezbollah n'ont riposté contre la Turquie lorsque les Turcs ont abattu le SU-24 russe. Si certains en doutent, je dirais que cette absence de traité de défense mutuelle formelle est une très bonne chose ne serait-ce que parce qu'elle empêche les forces russes ou iraniennes en Syrie de devenir des forces « triphasées » qui, si l'une d'entre elles était attaquées, exigerait une réponse immédiate des autres. Dans une situation extrêmement dangereuse et explosive comme le Moyen-Orient, la flexibilité offerte par l'absence d'alliances formelles est un gros avantage pour toutes les parties impliquées.
    Question n ° 2 : cela signifie-t-il que la Russie ne doive rien faire ou soutiendrait même Israël ?
    Bien sûr que non ! En fait, Netanyahu s'est même rendu à Moscou pour faire toutes sortes de menaces mais il est rentré chez lui sans rien obtenir (les sources russes rapportent même que les Israéliens ont fini par s'accrocher avec leurs homologues russes). Rappelons ici quelque chose qui pourtant devrait être évident pour tout le monde : l'intervention russe en Syrie a été un désastre total et absolu pour Israël (j'explique cela en détail dans cet article). Si les Russes avaient eu une quelconque affection pour les intérêts israéliens, ils ne seraient jamais intervenus en Syrie ! Cependant, ce refus de laisser Israël dicter les politiques russes au Moyen-Orient (ou ailleurs) ne signifie nullement que la Russie puisse simplement ignorer le pouvoir très réel des Israéliens, non seulement à cause de leurs armes nucléaires, mais aussi à cause de leur de-facto contrôle du gouvernement américain.
    Question n ° 3 : alors qu'est-ce qui se passe réellement entre la Russie et Israël ?
    Comme je l'ai expliqué ailleurs, les relations entre la Russie et Israël sont très complexes et à plusieurs niveaux et rien entre ces deux pays n'est vraiment noir ou blanc. D'une part, il existe en Russie un puissant lobby pro-israélien auprès duquel Poutine s'est frotté au fil des années, mais seulement par très petites étapes et progressivement. La clé pour Poutine est de faire ce qui doit être fait pour faire avancer les intérêts russes mais sans déclencher une crise politique interne ou externe. C'est pourquoi les Russes font certaines choses, mais plutôt tranquillement.
    Tout d'abord, ils rénovent les défenses aériennes syriennes vieillissantes non seulement avec des mises à jour logicielles, mais aussi avec du matériel plus récent. Ils entraînent aussi, bien sûr, les formations militaires syriennes. Cela ne signifie pas que les Syriens pourraient fermer leur ciel aux avions israéliens, mais que progressivement les risques de frapper la Syrie augmenteraient chaque mois. Premièrement, nous ne sommes peut-être pas capable de le remarquer, mais je suis convaincu qu'une analyse minutieuse du type d'objectifs que les Israéliens cherchent à atteindre diminueront en importance et perdront de la valeur, ce qui signifie que les Syriens deviendront de plus en plus capables de défendre leurs atouts les plus importants.
    Deuxièmement, il est assez évident que la Russie, l'Iran et le Hezbollah travaillent en synergie. Par exemple, les Russes et les Syriens ont intégré leurs défenses aériennes, ce qui signifie que les Syriens peuvent maintenant « voir » beaucoup plus loin que ce que leurs propres radars leur permettraient de faire. En outre, considérons le nombre de missiles de croisière américains qui ne sont jamais parvenus à la base aérienne syrienne que Trump a voulu bombarder : il est plus ou moins admis maintenant que c'était le résultat des contre-mesures russes EW.
    Enfin, les Russes « couvrent » clairement le Hezbollah et l'Iran politiquement en refusant de les considérer comme des parias, ce qu'Israël et les États-Unis ont toujours exigé. C'est pourquoi l'Iran est traité comme un acteur clé dans le processus de paix parrainé par la Russie alors que les États-Unis et Israël n'y sont même pas invités.
    Donc, la vérité est simple : les Russes ne s'opposeront pas directement aux Israéliens, mais ce qu'ils vont faire, c'est renforcer tranquillement l'Iran et le Hezbollah, ce qui est non seulement beaucoup plus sûr mais aussi beaucoup plus efficace.
    Conclusion
    Nous vivons dans une société viciée et dysfonctionnelle qui, après des décennies de domination américaine, confond la guerre et l'agression avec la force, ce qui implique la notion qu'un « grand pays » puisse se livrer à des saccages violents sur une base tout à fait légitime. Selon cette notion, il faut toujours avoir recours à la force militaire pour riposter à toute attaque. Je soutiens que les dirigeants russes et iraniens sont beaucoup plus sophistiqués que cela. Il en va de même pour la direction du Hezbollah. Rappelez-vous quand les Israéliens (avec la complicité évidente de certains membres du régime syrien, d'ailleurs) ont assassiné Imad Mughniyeh ? Le Hezbollah a promis de riposter, mais jusqu'à présent, presque une décennie plus tard, ils ne l'ont pas fait (ou, du moins, pas officiellement). Certains diront que les menaces du Hezbollah étaient des mots creux - je ne suis pas du tout d'accord. Quand Hassan Nasrallah promet quelque chose, vous pouvez le confier à la banque. Mais les dirigeants du Hezbollah sont suffisamment sophistiqués pour riposter quand le moment est venu et selon leurs propres termes. Et pensez aux Iraniens qui, depuis la Révolution islamique de 1979, ont été dans le collimateur des États-Unis et d'Israël et qui n'ont jamais donné à l'un d'entre eux le prétexte d'attaquer.
    Lorsque vous êtes beaucoup plus puissant que votre adversaire, vous pouvez être stupide et répondre par la force brute et stupide. Au moins pour le court à moyen terme. Finalement, comme nous le voyons aujourd'hui avec les États-Unis, ce genre de stupidité agressive se retourne contre l'agresseur et finit même par être contre-productive. Mais quand vous êtes plus petit, plus faible ou même juste en train de récupérer votre force potentielle, vous devez agir avec beaucoup plus de prudence et de sophistication. C'est pourquoi tous les adversaires de l'Empire anglo-sioniste (dont le Hezbollah, la Syrie, l'Iran, la Russie, la Chine, Cuba, le Venezuela) font tout leur possible pour éviter d'utiliser la force contre les Anglo-sionistes quand bien même elle serait amplement méritée. La seule exception à cette règle est Kim Jong-un qui a choisi une politique de menaces hyper-inflationnistes qui, bien qu'éventuellement efficace (il semble avoir déjoué Trump, au moins jusqu'à présent) est aussi très dangereuse à tel point qu'aucun des pays de la Résistance ne tient à y prendre part.
    Les Russes, les Iraniens et le Hezbollah sont tous des adultes « cultivés » (en termes politiques), et Assad apprend très vite, ce qui fait qu'ils comprennent tous qu'ils ont affaire à un « singe avec une grenade à main » (cela vaut aussi bien pour Israël que pour les dirigeants américains) qui combine une personnalité désagréable, un caractère versatile, un cerveau primitif et une grenade à main assez grande pour tuer tout le monde dans la pièce. Leur tâche est de neutraliser ce singe avant qu'il ne puisse dégoupiller. Dans le cas des frappes israéliennes sur la Syrie, la responsabilité première engageant une réponse d'une manière ou d'une autre incomberait soit sur la cible des frappes (habituellement le Hezbollah), soit sur la nation dont la souveraineté a été violée (Syrie). Et les deux pourraient, en théorie, riposter (en utilisant des missiles tactiques par exemple). Pourtant, ils ont choisi de ne pas le faire, et c'est l'approche sage et correcte. Quant aux Russes, ce n'est simplement pas leur affaire.
    Premier appendice :
    Encore une chose. Ne vous méprenez pas : la propension israélienne (et américaine !) à utiliser la force comme substitut à la diplomatie est un signe de faiblesse et non de force. Plus précisément, leur usage de la force ou la menace de l'usage de la force est le résultat de leur incompétence diplomatique. Alors que pour l'esprit non averti, l'usage systématique de la force peut apparaître comme une expression du pouvoir, l'histoire montre que la force brutale peut être vaincue lorsqu'elle n'est pas contestée directement, mais par d'autres moyens. Ceci est, par nécessité, un processus lent, beaucoup plus lent qu'une « victoire rapide » (pour la plupart entièrement théorique), mais néanmoins inéluctable. En termes purement théoriques, l'utilisation de la force peut avoir à peu près n'importe lequel des résultats suivants : défaite, impasse, victoire coûteuse ou relativement indolore. Ce dernier cas est extrêmement rare et l'utilisation de la force suppose principalement l'un des autres résultats. Parfois, l'utilisation de la force est vraiment la seule solution, mais je soutiens que le dirigeant politique avisé n'y recourra que lorsque toutes les autres options auront échoué et que des intérêts vitaux seront en jeu. Dans toute autre situation, une « mauvaise paix est préférable à une bonne guerre ».
    Deuxième appendice :
    Contrairement aux hallucinations des néocons, la Russie n'est absolument pas une « URSS renaissante » et Poutine n'a aucun désir de reconstruire l'Union Soviétique. De plus, il n'y a pas de mesure constitutionnelle significative en Russie pour de tels plans « impériaux » (enfin, il y a toujours des fous partout, mais en Russie, ils sont, Dieu merci, une minuscule minorité sans pouvoir). En outre, la nouvelle Russie n'est certainement pas une « anti-USA » dans le sens où elle essayerait de contrer toute manœuvre impériale ou hégémonique américaine. Cela peut sembler évident à beaucoup, mais j'ai tellement de questions sur les raisons pour lesquelles la Russie ne fait pas plus pour contrer les États-Unis en Afrique, en Amérique latine ou en Asie que je pense qu'il est, hélas, important de rappeler à tous le droit international et le bon sens : les problèmes du pays X doivent être traités par le pays X. La Russie n'a pas plus de légitimité que les Etats-Unis pour « résoudre » les problèmes du pays X. En outre, les problèmes du pays X sont généralement mieux traités par les voisins immédiats de celui-ci, et non par les superpuissances messianiques mégalomanes qui estiment devoir « faire avancer le projet » parce qu'ils sont « indispensables » ou parce que le « destin manifeste » leur impose la responsabilité de « diriger le monde ». Toute cette terminologie n'est que l'expression d'une mentalité « impériale » [guillemets ajoutés par nous – NIL] pathologique et délirante qui a coûté à la Russie et à l'Union Soviétique un prix absolument terrifiant en argent, en énergie, en ressources et en sang (par exemple, l'intervention soviétique en Afghanistan était justifiée par le devoir internationaliste de l'Union Soviétique et du peuple pour aider une « nation fraternelle »). Alors que ce genre d'absurdité est encore à 100% d'actualité dans les pauvres vieux États-Unis, il est absolument rejeté dans la Russie moderne. Pour l'entière crédibilité personnelle de Poutine vis-à-vis du peuple russe, même s'il ne pouvait pas exclure d'intervenir militairement, il n'aurait jamais cherché à surveiller la planète entière, à moins que des intérêts vraiment vitaux ne soient menacés (la Crimée était un cas si rare). Certains déploreront cela, je m'en réjouis personnellement, mais la vérité est que « les Russes ne viennent pas ».

  • La nouvelle politique militaire des États-Unis – attention – danger !

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    Qu’y a-t-il de nouveau dans la politique militaire et nucléaire américaine rendue publique par le Pentagone le vendredi 2 février dernier ? (1)

    • Un accroissement des dépenses militaires américaines, du « Déjà vu » (2)
    • Le développement de nouvelles armes nucléaires tactiques de faible capacité et de portée limitée.
    • La menace d’utiliser ces armes nucléaires létales contre un État non nucléarisé.
    • La menace d’utiliser ces armes létales le premier (et non plus en riposte à une attaque nucléaire) et contre n’importe quel pays où qu’il se trouve sur la planète.

    Quels pays sont visés par le gouvernement américain par cette nouvelle politique belliqueuse ?

    • La Russie en tant que fournisseur d’énergie et bras armés de la superpuissance économique et financière chinoise, son alliée (3).
    • La Chine en tant que première puissance concurrente de l’Amérique économique – financière – boursière et militaire.
    • La Corée du Nord en tant qu’allié et terrain de confrontation par procuration entre les deux géants se battant pour l’hégémonie mondiale.
    • L’Iran en tant que fournisseur d’hydrocarbure à la Chine et en tant qu’État récalcitrant tenant tête aux visées hégémoniques américaines. Ainsi l’Iran refuse de faire du dollar américain la seule devise de son commerce international.
    • L’Union européenne alliée des États-Unis qui reçoit cet ultimatum « Vous êtes avec nous dans cette aventure belliqueuse nucléarisée ou vous êtes contre nous ! » Or, les États européens risquent d’être à nouveau sur la ligne de front comme lors des deux guerres mondiales précédentes et il n’est pas du tout certain que le Grand capital européen mondialisé souhaite jouer la tête de Turc à une troisième reprise.
    • Tous les pays du monde grands et petits, alliés ou ennemis des États-Unis, que le Pentagone menace ainsi de représailles nucléaires s’ils osent résister à son hégémonie délétère.
    • Le peuple américain lui-même, si jamais en réaction à sa misère grandissante il osait résister et se soulever contre ses geôliers.

    Pourquoi cette nouvelle politique militaire est-elle dévoilée à ce moment-ci ? Que cherchent aujourd’hui les États-Unis ?

    • L’establishment financier américain, et un groupe important de généraux, sont aux abois, car ils sont conscients de l’effondrement économique de l’Amérique. Le dollar est menacé et à travers lui l’ensemble de l’échafaudage bancal de l’économie américaine. L’endettement est ahurissant, le déficit commercial titanesque et récurrent, le chômage réel est effarant et la pauvreté s’épand, les tensions sociales palpables et la société précarisée est sur le point d’éclater. Notre webmagazine publie une série d’articles décrivant la misère qui se répand http://www.les7duquebec.com/?s=effondrement 
    • Comme nous le disons depuis une année, Donald Trump n’est pas un isolationniste, mais un mondialiste (4). Les États-Unis renégocient présentement tous ses traités commerciaux avec ses partenaires et concurrents immédiats. Les forfanteries de Donald l’épouvantail ne visent qu’à conditionner les gouvernements concurrents.
    • Cette annonce publique largement médiatisée d’une nouvelle politique belliqueuse, vise à intimider les bourgeoisies du monde entier afin qu’elles s’inclinent, conservent le dollar comme principale devise du commerce international, et se soumettent aux dictats commerciaux étatsuniens (exemple pour le Canada dans l’ALENA, qu’il renonce à la gestion de l’offre, etc.)

    Quelles peuvent être les conséquences de cette nouvelle politique militaire et nucléaire ?

    • Cette annonce ne peut qu’encourager le camp adverse, Chine – Russie – Iran notamment, à se rapprocher et à se lancer dans une course aux armements, qui ne peut qu’être un gaspillage de ressources ce qui accentuera les problèmes économiques qu’engendrent toujours ces dépenses improductives (déficit budgétaire en hausse, endettement croissant, déplacement des investissements mondiaux de la sphère sociale vers la sphère militaire improductive, grève générale de protestation, etc.)
    • Cette annonce a déjà eu l’effet d’encourager le réarmement des pays européens qui pour certains viennent d’annoncer la croissance de leur budget militaire. Sans compter que l’Alliance atlantique (OTAN) sera fragilisée suite à cette mise en demeure américaine aux chancelleries européennes qui ne sont plus dans la situation désespérée du Plan MarshallL’Union européenne est de facto la première puissance économique et commerciale mondiale. Elle risque de se le rappeler et de se crisper face à un allié de plus en plus spoliateur (sic).
    • De nombreux pays déjà nucléarisés, et d’autres pas encore nucléarisés seront poussés à s’équiper d’armes nucléaires de manière à se protéger dans l’éventualité d’un chantage américain à la nucléarisation d’une agression.
    • Bref, comme nous le disons depuis un certain temps, par cette politique le monde se rapproche dangereusement d’une troisième guerre mondiale – en dépit des plumitifs pacifistes utopistes (Voir nos articles sur ce thème www.les7duquebec.com/ ?s=GUERRE

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    Les États-Unis peuvent-ils atteindre leurs objectifs stratégiques par cette nouvelle politique militaire et nucléaire ?

    • Aucunement. Cette politique de menace nucléaire est la suite logique de la politique de menace militaire que les États-Unis appliquent depuis la naissance de cette puissance au XVIIIe siècle. Il ne faut pas oublier que ce pays impérialiste est en guerre perpétuelle sur un continent ou sur un autre depuis son apparition. Les États-Unis n’ont pratiquement jamais été en paix. Certains pensaient qu’ayant été rossé via leurs mercenaires djihadistes stipendiés en Irak et en Syrie, le Pentagone aurait compris et aurait retiré son contingent de soutien aux pseudo islamistes de l’EI. L’administration américaine vient d’annoncer que ses troupes occuperont la Syrie un temps indéfini, comme en Afghanistan ou pourtant leurs soldats d’occupation sont confinés à un petit périmètre dans Kaboul, justifiant les tueries des talibans.
    • Le budget de la « défense » des États-Unis est le plus important dans le monde, et ce depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, et pourtant, depuis leur défaite au Vietnam (1973) les États-Unis n’ont pratiquement jamais gagné une guerre et ne parviennent qu’à tuer des civils en grand nombre et à s’enliser. Plus ils injectent d’argent dans l’armement moins ces dépenses sont efficientes. Le problème de l’armée américaine ce n’est pas son armement insuffisant, ce sont les soldats américains qui n’ont plus le cœur à se sacrifier pour les potentats de Wall Street.
    • Bref, cette nouvelle politique nucléaire est le fruit de l’escalade du désespoir de la part de l’establishment financier américain qui constate l’effondrement éminent de son système économique et financier décadent et ne peut faire autrement que de résister à son essoufflement.
    • Malgré les sacrifices que la classe capitaliste américaine impose au prolétariat américain, et mondial, l’économie de l’Amérique n’est pas concurrentielle et s’effondre alors que de nouveaux prétendants à l’hégémonie, économique d’abord, politique et militaire ensuite (Chine et ses alliés VS Union européenne) s’avancent pour les écarter.

    Conclusions

    Les États-Unis d’Amérique se retrouvent dans la situation ou se trouvait l’Empire britannique après la Seconde Guerre mondiale. L’Empire, sur lequel le soleil ne se couchait jamais, avait deux choix face à la concurrence de son allié américain : résister et le confronter, entraînant le monde dans une nouvelle guerre d’Apocalypse ; ou encore, plier, se ranger, négocier une position privilégiée dans l’économie mondiale post-britannique, ce qui donna la City. Malheureusement, contrairement aux Britanniques, il est peu probable que le Grand capital étatsunien se résigne à cette éventualité.

    NOTES

    1. « Les États-Unis veulent se doter de nouvelles armes nucléaires de faible puissance en réponse notamment au réarmement de la Russie, selon la nouvelle « posture nucléaire » publiée vendredi par le Pentagone. Ces nouvelles armes, qui font craindre aux experts une relance de la prolifération et un risque plus élevé de conflits nucléaires, représentent une « réponse à l'expansion des capacités [nucléaires] de la Russie », a indiqué à la presse Greg Weaver, responsable des capacités stratégiques à l'État-major américain. » http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1081918/pentagone-nou...
    2. https://fr.wikipedia.org/wiki/Forces_armées_des_États-Uni...
    3. https://fr.wikipedia.org/wiki/Arme_nucléaire
    4. http://www.les7duquebec.com/7-de-garde-2/leviction-de-ste...

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  • [VIDEO] Donald Trump face à l’Europe

    Un an après l’élection de Trump, les cartes du jeu international sont rebattues. Alors que l’on imaginait un frein à l’interventionnisme des Etats-Unis, on assiste au contraire. Jean-Loup Izambert offre un décryptage brillant de la géopolitique américaine actuelle.

  • Erdogan se déclare continuateur de l'empire Ottoman

    Le 10 janvier à Istanbul, le président turc Erdogan s'exprimait dans le cadre d'une cérémonie au palais Yildiz pour le centenaire de la mort du Sultan Abdulhamid II.

    Ni le lieu, ni le monarque ne doivent être tenus pour fortuits : ils représentent ce que l'on peut considérer comme les symboles les plus éloignés de notre culture de cet empire que l'on croyait défunt.

    Yildizi Sarayi, le palais de l'Étoile fut certes construit sous la direction de l'architecte italien Raimondo d'Aronco : en fait le 34e sultan de Constantinople craignait les vieilles résidences impériales de Topkapi et de Dolmabahçe qu'il jugeait trop proches du Bosphore et de la Corne d'Or.

    Ce souverain terrible, Abdulhamid II (1876-1909), fils cadet du sultan Adulaziz (1861-1865) a mis en effet un terme à l'œuvre réformatrice de ses prédécesseurs commencée sous le règne d'Abdül-meçid (1839-1861), refusant d'appliquer la constitution, qui n'entrera en vigueur qu'après la révolution jeune-turque de 1908-1909.

    En 1876 il avait obtenu que soit écarté son frère aîné Mourad V. Celui-ci ne régna que 3 mois ; il sera présenté pour fou, alors qu'en fait, adepte de la franc-maçonnerie, il entendait continuer le programme de réformes de ses 3 prédécesseurs, connu sous le nom de Tanzimat. Cette œuvre de réorganisation avait été préfigurée dès 1830 : cette année-là, où fut reconnue l'indépendance de la Grèce, le sultan-calife Mahmoud II (1808-1839) avait publié cette déclaration officielle : "Je fais la distinction entre mes sujets, les musulmans à la mosquée, les chrétiens à l'église et les juifs à la synagogue, mais il n'y a pas de différence entre eux dans quelque autre mesure. Mon affection et mon sens de la justice pour tous parmi eux est fort et ils sont en vérité tous mes enfants."

    Abdulhamid II au contraire cherchera à revenir sur tout ce qui tendait à rapprocher la Turquie de l'Europe.

    S'il n'est mort qu'en 1918, il avait été d'abord relégué dans son palais par la première révolution jeune turque de 1908, puis déposé en 1909 et remplacé nominalement par son frère, le fantoche Reshad effendi qui régnera jusqu'en 1918 sous le nom de Mehmed. Le dernier sultan-calife Mehmed VI (1918-1922) s'enfuira, craignant d'être accusé de trahison après la victoire de Kemal et la proclamation de la république. Lui succédera, mais en tant que 101e calife seulement, de 1922 à 1924, Abdül-meçid II dont la fonction fut abolie au bout de deux ans, les actuels islamistes cherchant à la rétablir.

    Entretemps Abdulhamid II avait créé en 1890 la milice dite "Hamidiyé". Recrutée dans les tribus montagnardes tcherkesses, kurdes, turkmènes, yeuruk et turcs proprement dits, ses principaux exploits consistèrent à massacrer et piller entre 1894 et 1896 les provinces arméniennes, valant à leur maître le surnom de Sultan Rouge. Le génocide arménien, qu'il est toujours légalement interdit d'évoquer en Turquie, ébauché sous ce règne, reprendra sous une forme plus industrielle, sous la direction d'Enver pacha et de Talaat pacha en 1915.(1)⇓

    C'est donc en lui rendant hommage qu'Erdogan, a cru pouvoir déclarer : "la République turque est la continuation de l'Empire ottoman".

    "La République de Turquie, comme nos états précédents qui étaient la continuité de l'autre, est aussi une continuation des Ottomans. Bien sûr, les frontières ont changé. Les formes de gouvernement ont changé. Mais l'essence est la même, le cœur est le même, même de nombreuses institutions restent les mêmes.", a déclaré

    "C'est pourquoi, considère-t-il, le Sultan Abdulhamid est l'un des plus importants, des plus visionnaires et des plus stratégiquement conscients qui ont laissé leur marque au cours des 150 dernières années", a déclaré le président turc qui est allé un peu plus loin en notant:

    "Trop de gens essaient constamment de commencer l'histoire de notre pays depuis 1923. Certaines personnes veulent nous couper de nos racines et de nos anciennes valeurs." 

    JG Malliarakis

    À lire en relation avec cette chronique

    "La Question turque et l'Europe" par JG Malliarakis à commander en ligne aux Éditions du Trident, sur la page catalogue ou par correspondance en adressant un chèque de 20 euros aux Éditions du Trident, 39 rue du Cherche-Midi 75006 Paris.

    Apostilles

    1. Enver pacha interviendra au congrès de Bakou cf. mon petit livre "La Faucille et le Croissant" Islamisme et bolchevisme au congrès de Bakou

    http://www.insolent.fr/

  • Al Nosra abat un appareil russe à Idleb

    Par Antoine de Lacoste

    3034693255.pngPour la première fois depuis le début de l’intervention russe en Syrie (septembre 2015), les islamistes ont abattu un avion russe.

    Il s’agit d’un Soukhoï SU-25 piloté par le major Roman Filippov. Il a réussi à s’éjecter mais en pleine zone ennemie. Vite encerclé par plusieurs dizaines de djihadistes, il s’est courageusement défendu avec son pistolet. Sur le point d’être pris, il a préféré se faire sauter avec une grenade plutôt que d’être pris vivant et de soumettre la Russie à un odieux chantage.

    Son sacrifice n’est pas sans rappeler celui d’un autre officier, Alexandre Prokhorenko, mort en mars 2017 pour la reconquête de Palmyre. Encerclé par des combattants de Daesh, il avait commandé à l’aviation russe une frappe aérienne pour mourir en tuant un maximum d’islamistes.

    Depuis cet incident, les Russes ont ordonné à leurs pilotes de voler au dessus de 5000 mètres, distance à partir de laquelle les missiles sol-air sont inopérants.

    Les Russes ont pu récupérer le corps de leur pilote, ce qui en a étonné plus d’un. L’explication est simple : c’est l’armée turque qui s’en est occupée, ce qui en dit long sur son implantation à Idleb et sur son influence sur les islamistes qui avaient récupéré le corps.

    Les spécialistes russes aimeraient aussi examiner les débris de l’avion afin de déterminer l’origine du missile : fabrication américaine, française ? Plusieurs hypothèses sont envisageables et il est important pour la suite des opérations militaires de connaître le type d’armement dont disposent les combattants islamistes.

    Les Américains se sont dits « préoccupés », expression diplomatique signifiant quelque chose comme « ça nous est complètement égal ».

    Ce sont pourtant bien eux qui ont, les premiers, armé des insurgés avec du matériel sophistiqué, par le biais de la CIA. La fiction des combattants « modérés » n’a pas longtemps résisté à l’épreuve des faits. La désinformation occidentale a même été jusqu’à inventer le concept d’ « islamiste modéré » ce qui ne manque tout de même pas de sel. Mais il a fallu attendre fin 2015 et le scandale des insurgés entraînés et armés à grands frais par la CIA, passés chez Daesh aussitôt envoyés sur le territoire syrien, pour que cessent les livraisons d’armes.

    Aujourd’hui, personne ne connait la quantité et la qualité des armes en circulation dans la province d’Idleb, mais on peut pressentir que l’élimination des islamistes du dernier territoire qu’ils détiennent en Syrie ne sera pas simple.

    Les progrès de l’armée syrienne, qui a lancé une grande offensive au sud-est de la province, sont d’ailleurs lents et les islamistes savent qu’après Idleb, il n’y a plus rien pour eux. Leur résistance sera donc farouche.

    Ce qui est sûr, c’est que, depuis la mort de leur pilote, les Russes ont accentué leur pression sur les groupes d’Al Nosra (ou Tahrir el Cham comme on dit maintenant). L’aviation pilonne sans cesse les positions islamistes et il est probable que la reprise de la province d’Idleb soit devenue un objectif majeur pour  les Russes et les Syriens.

    Mais pour cela, il faudra s’entendre avec les Turcs. C’est, entre autres, pour cela que les Russes ont laissé les Turcs attaquer les Kurdes à Affrin.  

    Retrouvez l'ensemble des chroniques syriennes d'Antoine de Lacoste dans notre catégorie Actualité Monde.

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  • Erdogan se déclare continuateur de l'empire Ottoman

    Le 10 janvier à Istanbul, le président turc Erdogan s'exprimait dans le cadre d'une cérémonie au palais Yildiz pour le centenaire de la mort du Sultan Abdulhamid II.

    Ni le lieu, ni le monarque ne doivent être tenus pour fortuits : ils représentent ce que l'on peut considérer comme les symboles les plus éloignés de notre culture de cet empire que l'on croyait défunt.

    Yildizi Sarayi, le palais de l'Étoile fut certes construit sous la direction de l'architecte italien Raimondo d'Aronco : en fait le 34e sultan de Constantinople craignait les vieilles résidences impériales de Topkapi et de Dolmabahçe qu'il jugeait trop proches du Bosphore et de la Corne d'Or.

    Ce souverain terrible, Abdulhamid II (1876-1909), fils cadet du sultan Adulaziz (1861-1865) a mis en effet un terme à l'œuvre réformatrice de ses prédécesseurs commencée sous le règne d'Abdül-meçid (1839-1861), refusant d'appliquer la constitution, qui n'entrera en vigueur qu'après la révolution jeune-turque de 1908-1909.

    En 1876 il avait obtenu que soit écarté son frère aîné Mourad V. Celui-ci ne régna que 3 mois ; il sera présenté pour fou, alors qu'en fait, adepte de la franc-maçonnerie, il entendait continuer le programme de réformes de ses 3 prédécesseurs, connu sous le nom de Tanzimat. Cette œuvre de réorganisation avait été préfigurée dès 1830 : cette année-là, où fut reconnue l'indépendance de la Grèce, le sultan-calife Mahmoud II (1808-1839) avait publié cette déclaration officielle : "Je fais la distinction entre mes sujets, les musulmans à la mosquée, les chrétiens à l'église et les juifs à la synagogue, mais il n'y a pas de différence entre eux dans quelque autre mesure. Mon affection et mon sens de la justice pour tous parmi eux est fort et ils sont en vérité tous mes enfants."

    Abdulhamid II au contraire cherchera à revenir sur tout ce qui tendait à rapprocher la Turquie de l'Europe.

    S'il n'est mort qu'en 1918, il avait été d'abord relégué dans son palais par la première révolution jeune turque de 1908, puis déposé en 1909 et remplacé nominalement par son frère, le fantoche Reshad effendi qui régnera jusqu'en 1918 sous le nom de Mehmed. Le dernier sultan-calife Mehmed VI (1918-1922) s'enfuira, craignant d'être accusé de trahison après la victoire de Kemal et la proclamation de la république. Lui succédera, mais en tant que 101e calife seulement, de 1922 à 1924, Abdül-meçid II dont la fonction fut abolie au bout de deux ans, les actuels islamistes cherchant à la rétablir.

    Entretemps Abdulhamid II avait créé en 1890 la milice dite "Hamidiyé". Recrutée dans les tribus montagnardes tcherkesses, kurdes, turkmènes, yeuruk et turcs proprement dits, ses principaux exploits consistèrent à massacrer et piller entre 1894 et 1896 les provinces arméniennes, valant à leur maître le surnom de Sultan Rouge. Le génocide arménien, qu'il est toujours légalement interdit d'évoquer en Turquie, ébauché sous ce règne, reprendra sous une forme plus industrielle, sous la direction d'Enver pacha et de Talaat pacha en 1915.(1)⇓

    C'est donc en lui rendant hommage qu'Erdogan, a cru pouvoir déclarer : "la République turque est la continuation de l'Empire ottoman".

    "La République de Turquie, comme nos états précédents qui étaient la continuité de l'autre, est aussi une continuation des Ottomans. Bien sûr, les frontières ont changé. Les formes de gouvernement ont changé. Mais l'essence est la même, le cœur est le même, même de nombreuses institutions restent les mêmes.", a déclaré

    "C'est pourquoi, considère-t-il, le Sultan Abdulhamid est l'un des plus importants, des plus visionnaires et des plus stratégiquement conscients qui ont laissé leur marque au cours des 150 dernières années", a déclaré le président turc qui est allé un peu plus loin en notant:

    "Trop de gens essaient constamment de commencer l'histoire de notre pays depuis 1923. Certaines personnes veulent nous couper de nos racines et de nos anciennes valeurs.

    JG Malliarakis

    À lire en relation avec cette chronique

    "La Question turque et l'Europe" par JG Malliarakis à commander en ligne aux Éditions du Trident, sur la page catalogue ou par correspondance en adressant un chèque de 20 euros aux Éditions du Trident, 39 rue du Cherche-Midi 75006 Paris.

    Apostilles

    1. Enver pacha interviendra au congrès de Bakou cf. mon petit livre "La Faucille et le Croissant" Islamisme et bolchevisme au congrès de Bakou

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  • Comment les djihadistes sont-ils jugés en Syrie ?

    djihadiste3.jpg

    Le reportage va au-delà de l’illustration. Il a valeur d’expertise. Les reporters racontent leur expérience du terrain.

    Découvrez “Profession reporter” dédiée à la question suivante : “Comment les djihadistes sont-ils jugés en Syrie ?”.

  • Trump, « le président le plus extraordinaire de l’histoire américaine » ?

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    Par Fabrice Fanet, colonel (ER) de gendarmerie 

    Philippe Corbé, journaliste correspondant de RTL aux Etats Unis, a récemment sorti un livre sur la présidence de Donald Trump. Si certains passages militants sont évidemment présents, on découvre que Donald Trump est « le président le plus extraordinaire de l’histoire américaine » pour le journaliste.

    Les déclarations et « tweets » de Donald Trump n’ont pas fini de rythmer la jacasserie planétaire entretenue par des médias bavards condamnés à « l’ouvrir pour ne pas être fermés. »

    Qui aurait pu imaginer que des gazouillis (tweets) émis par un Trump, (une trompette ou familièrement un chic type), parviennent à être une carte redoutable dans le jeu du Président des Etats unis d’Amérique afin peut être de remporter la partie, to trump voulant dire jouer atout ?

    A tel point que vient de paraître chez Grasset un livre sur les paroles et les mots de Donald intitulé « Trumpitudes », sous-titré « et turpitudes », pour ceux qui ne voudraient pas comprendre le jeu de mots et ne pas applaudir la condamnation politiquement correcte et universellement convenue de l’indigne squatter de la Maison Blanche. Pensez donc, un milliardaire populiste qui a osé battre une femme « progressiste » soutenue en personne par Obama, le sauveur noir du monde qui, soit dit en passant, n’est pas noir mais métis !

    Et pourtant, la surprise est au rendez-vous dans la préface comme dans la postface de ce livre dans lesquelles Philippe Corbé, journaliste correspondant de RTL aux Etats Unis, est loin de s’abandonner à une dénonciation systématique et primaire des mots du Président Trump. Morceaux choisis.

    Pour l’auteur, « ce sont ses mots qui ont fait de lui le président de la première puissance du monde […] Ceux qui ont cru que ses mots allaient le perdre ont perdu, ceux qui pensait que ce n’était que du bruit n’ont rien entendu, ceux qui ne l’écoutent plus risquent d’être encore surpris. […] La politique, c’est dire des choses aux gens. Lui a su parler et être écouté de ceux qui pensaient qu’on ne les entendait plus. […] Son pouvoir ce sont ces mots […] ces trumpitudes […] tantôt déroutantes, rageuses, cocasses, inspirées, angoissantes, simplistes, crâneuses, créatives, absurdes, menaçantes, narcissiques, mensongères ou grotesques ».

    […]

    « Il faut l’écouter, le lire, résister à la lassitude et à la répétition, car cette matière est fascinante. Quoiqu’on pense des promesses, des accomplissements ou même de la personnalité de Donald Trump, ses mots offrent […] un accès direct, immédiat et souvent sans filtre à sa pensée, ses peurs, ses colères, ses joies, ses ambitions, bref à sa nature intime. Jamais auparavant un homme aussi puissant n’avait pris le risque de laisser ses mots révéler de façon aussi crue qui il était ».

    […]

    « Le 21 juillet 2016 […] le soir du discours aux accents nixoniens du candidat Trump pour clôturer une convention jusque là un peu terne […] j’ai ressenti physiquement, le long de ma colonne vertébrale, jusque sur les poils de mes mains, l’écho puissant de ses mots ».

    Enfin la dernière phrase du livre mais non la moindre : « Un jour, plus tard, quand l’Amérique sera « great again », que ce « carnage américain » [ndlr : expression prononcé par le nouveau président lors de son investiture] aura pris fin comme il l’a promis, on nous demandera, n’aviez-vous pas vu ? N’aviez-vous pas entendu ? Tout est dit. Tout est là. Il suffit d’écouter comment il nous parle. »

    Après ça, on s’attend à lire une analyse honnête et balancée des déclarations et de l’attitude de Donald Trump, et non comme d’habitude une condamnation automatique et systématique.
    « Damned ! », il n’en est rien.
    Le livre est composé comme une chronique totalement à charge décrivant les jours où le président Trump occupe le devant de la scène médiatique.
    Ainsi le dimanche 29 janvier, l’auteur donne en 8 lignes une version très négative du décret sur l’immigration. « Depuis plus de 24 heures, c’est le chaos dans les aéroports où les agents ne savent comment appliquer le décret sur l’immigration signé par le président sans préparation de son application. » En appui de sa description, il cite les opposants à cette mesure, avant de reproduire sans commentaire 2 tweets de Donald Trump.

    Autre exemple (in extenso) où Trump apparaît comme un président dilettante qui réagit face aux Russes avec légèreté ou tout au moins avec un humour déplacé. En outre, Philippe Corbé y affirme péremptoirement que les russes sont intervenus dans l’élection américaine :

    « Jeudi 10 août. Jour 203.

    Masse salariale.

    Donald Trump au Trump national Golf Club, Bedminster, New Jersey

    Vladimir Poutine ordonne que 755 employés des services diplomatiques américains en Russie cessent leur activité, soit plus des deux tiers du personnel. C’est la réponse du Kremlin aux nouvelles sanctions votées par le Congrès après les interventions Russes dans l’élection. Le président trump les a critiquées publiquement, [ndlr : la construction de la phrase est telle que l’on ne sait pas s’il s’agit des sanctions ou des interventions…] et offre aux reporters son commentaire sur cette décision de son homologue russe.

    Trump- je veux remercier parce que nous essayons de réduire notre masse salariale. » 

    En fait, tout au long de cette chronique qui se déroule du 20 janvier au 13 décembre 2017, Donald Trump est décrit sous les traits caricaturaux habituels : un président amateur, vulgaire, dangereux, anormal, raciste, etc.

    Il n’en reste pas moins qu’en prenant de la distance face aux commentaires conformes et convenus de l’auteur (qui n’aurait d’ailleurs pas été publié chez Grasset sans cette révérence au politiquement correct), on peut suivre pas à pas les réactions d’un président hors du commun, « le président le plus extraordinaire de l’histoire américaine » comme l’affirme d’ailleurs Philippe Corbé en page 12.

    Un président aux réactions instinctives et déconcertantes, pragmatiques et approximatives, suscitant l’étonnement positif ou négatif, la crainte ou une certaine admiration devant l’audace, attitudes qui correspondent bien aux descriptions que Philippe Corbé a eu la témérité (ou l’inconscience ?) d’écrire dans la préface et la postface de ce livre et même d’exprimer lors d’une interview vidéo postée sur le site du Figaro. Qu’il lui soit, de ce fait, beaucoup pardonné !

    Fabrice Fanet 07/02/2018

    Trumpitudes et turpitudes, Philippe Corbé, Grasset, 2018

    Crédit photo : Gage Skidmore [CC BY-SA 2.0], via Flickr

    https://www.polemia.com/trump-le-president-le-plus-extraordinaire-de-lhistoire-americaine/