géopolitique - Page 683
-
Michel Raimbaud : « L'arc de crise africain »
-
Au bord de la guerre et de l’effondrement économique
Paul Craig Roberts, homme politique américain, économiste et journaliste, sous-secrétaire au Trésor dans l’administration Reagan, se livre ici à un violent réquisitoire contre les néoconservateurs étatsuniens qu’il dénonce comme très influents sous le régime Obama. Polémia
« Toute l’humanité est menacée par une poignée d’hommes et de femmes mal installés à des postes de pouvoir à Washington »… « De toute évidence, la formule néoconservatrice est une formule pour la guerre finale. »
Au cas où un de mes lecteurs me demanderait si je peux leur donner quelques bonnes nouvelles. La réponse est : pas si je dois vous mentir comme le font «votre» gouvernement et les médias traditionnels. Si vous voulez de fausses « bonnes nouvelles » vous avez besoin de retourner dans la matrice. En échange de moins de stress et d’inquiétude, vous serez conduits inconsciemment vers la ruine financière et l’Armageddon nucléaire. Si vous souhaitez être prévenus, et peut-être préparés à ce que «votre» gouvernement vous apporte, et avoir une quelconque petite chance de réorienter le cours des événements, lisez et soutenez ce site. C’est votre site. Je connais déjà ces choses. J’écris pour vous.
Les néoconservateurs, un petit groupe de fauteurs de guerre fortement alliés avec le complexe militaro-industriel et Israël, nous a donné l’invasion de la Grenade (1) et les Contras dans l’affaire du Nicaragua (2). Le Président Reagan les a congédiés, et ils ont été poursuivis mais par la suite graciés par le successeur de Reagan, George Bush.
Installés dans les think-tanks et protégés par l’argent israélien et le complexe militaire/sécurité, les néoconservateurs ont resurgi sous l’administration Clinton et ont conçu l’éclatement de la Yougoslavie, la guerre contre la Serbie et l’expansion de l’OTAN aux frontières de la Russie.
Les néoconservateurs ont dominé le régime George W. Bush. Ils ont contrôlé le Pentagone, le Conseil National de Sécurité, le Bureau du Vice-Président, et bien d’autres choses. Les néoconservateurs nous ont donné le 11 Septembre et son camouflage, les invasions de l’Afghanistan et de l’Irak, le début de la déstabilisation du Pakistan et du Yémen, l’AFRICOM, l’invasion de l’Ossétie du Sud par la Géorgie, la disparition du Traité ABM, l’espionnage inconstitutionnel et illégal des citoyens américains sans mandat judiciaire, la perte des protections constitutionnelles, la torture et les manquements du pouvoir exécutif vis à vis de la loi, du Congrès et du pouvoir judiciaire. En bref, les néoconservateurs ont jeté les bases pour la dictature et pour 3ème Guerre Mondiale.
Le régime Obama n’a tenu responsable de crimes aucune personne du régime Bush, créant ainsi un précédent qui met le pouvoir exécutif au-dessus de la loi. Au lieu de cela, le régime Obama poursuit les dénonciateurs qui disent la vérité sur les crimes du gouvernement.
Les néoconservateurs restent très influents sous le régime Obama. A titre d’exemples, Obama a nommé la néoconservatrice Susan Rice comme conseillère en sécurité nationale. Obama a nommé la néoconservatrice Samantha Power comme ambassadrice américaine aux Nations Unies. Obama a nommé la néoconservatrice, Victoria Nuland, en tant que Secrétaire d’Etat adjoint. Le bureau de Nuland, en collaboration avec la CIA et les ONG financées par Washington, a organisé le coup d’Etat des USA en Ukraine.
Le néoconservatisme est la seule idéologie politique existante. C’est l’idéologie America über alles. Les néoconservateurs croient que l’Histoire a choisi les Etats-Unis pour exercer leur hégémonie sur le monde, ce qui rend leur pays «exceptionnel» et «indispensable». Obama lui-même l’a tout autant déclaré. Cette idéologie donne aux néoconservateurs une énorme confiance, tout comme la conclusion de Karl Marx disant que l’Histoire avait choisi les travailleurs pour être la classe dirigeante, avait donné confiance aux communistes des premières heures.
Cette confiance en eux-mêmes rend les néoconservateurs téméraires.
Pour faire avancer leur agenda, les néoconservateurs usent de propagande sur les populations des États-Unis et des états vassaux de Washington. Les « presse-titués » livrent les mensonges des néoconservateurs au public crédule: la Russie a envahi et annexé les provinces ukrainiennes; Poutine a l’intention de reconstituer l’empire soviétique; la Russie est un état de gangsters sans démocratie; la Russie est une menace pour les pays baltes ; la Pologne et toute l’Europe nécessitent un renforcement militaire US/OTAN sur les frontières avec la Russie; la Chine, un allié russe, doit être militairement contenue par de nouvelles bases navales et aériennes américaines autour de ses frontières et par des contrôles de ses voies maritimes.
Les néoconservateurs et le président Obama ont rendu tout à fait clair que les Etats-Unis n’acceptent pas la Russie et la Chine comme pays souverains avec des politiques économiques et étrangères indépendantes des intérêts de Washington. La Russie et la Chine ne sont acceptables qu’en tant qu’états vassaux, comme le Royaume-Uni, l’Europe, le Japon, le Canada et l’Australie.
De toute évidence, la formule néoconservatrice est une formule pour la guerre finale.
Toute l’humanité est menacée par une poignée d’hommes et de femmes mal installés à des postes de pouvoir à Washington.
La propagande anti-Russie est passée à la vitesse supérieure. Poutine est le « nouvel Hitler ». Daniel Zubov rend compte d’une conférence conjointe tenue par trois think-tanks américains. Cette conférence a accusé la Russie des échecs de la politique étrangère de Washington.
Lisez cet article pour voir comment fonctionnent les néoconservateurs pour contrôler les explications. Même Henry Kissinger est attaqué pour avoir dit la vérité évidente que la Russie a un intérêt légitime en Ukraine, une partie des terres longeant la Russie sont situées dans la sphère légitime d’influence russe.
Depuis le régime Clinton, Washington a agi contre les intérêts russes. Dans son livre à paraître, Mondialisation de la guerre: la longue guerre de l’Amérique contre l’humanité le professeur Michel Chossudovsky présente une évaluation réaliste du niveau de proximité jusqu’auquel Washington a amené le monde vers sa disparition dans une guerre nucléaire. Ce passage est tiré de la préface :
« La ” Mondialisation de la guerre ” est un projet hégémonique. Des opérations militaires et de renseignement majeures et secrètes sont en cours simultanément au Moyen-Orient, en Europe de l’Est, en Afrique subsaharienne, en Asie centrale et dans l’Extrême-Orient. L’agenda militaire américain combine à la fois des théâtres d’opérations majeurs et des actions secrètes orientées vers les États souverains déstabilisateurs .
En vertu d’un agenda militaire mondial, les actions entreprises par l’Alliance militaire occidentale (US-OTAN-Israël) en Afghanistan, au Pakistan, en Palestine, en Ukraine, en Syrie et en Irak sont coordonnées aux plus hauts niveaux de la hiérarchie militaire. Nous ne fonctionnons pas en opérations militaires et de renseignement désordonnées. En Juillet-Août 2014 l’attaque sur Gaza par les forces israéliennes a été menée en étroite consultation avec les États-Unis et l’OTAN. A leur tour, les actions en Ukraine et leur calendrier coïncidaient avec le déferlement d’attaque sur Gaza.
Aussi les entreprises militaires sont étroitement coordonnées avec un processus de guerre économique qui consiste non seulement à imposer des sanctions sur les pays souverains mais aussi dans des actes délibérés de déstabilisation des marchés financiers et monétaires en vue de saper les économies nationales des ennemis.
Les Etats-Unis et leurs alliés ont lancé une aventure militaire qui menace l’avenir de l’humanité. Au moment où nous mettons sous presse, les forces des États-Unis et de l’OTAN ont été déployées en Europe orientale. En vertu d’un mandat humanitaire une intervention de l’armée américaine se déroule en Afrique subsaharienne. Les États-Unis et ses alliés menacent la Chine avec le «Pivot vers l’Asie» du Président Obama.
Par ailleurs des manœuvres militaires sont menées aux portes de la Russie, lesquelles pourraient conduire à une escalade.
Les frappes aériennes américaines engagées en Septembre 2014 et dirigées contre l’Irak et la Syrie sous le prétexte de s’en prendre à l’État Islamique sont parties d’un scénario d’escalade militaire s’étendant de l’Afrique du Nord et de la Méditerranée orientale à l’Asie centrale et du Sud. L’alliance militaire occidentale est dans un état de préparation avancé ».
« Et ainsi soit la Russie »
Comme je l’ai souvent remarqué, les Américains sont un peuple insouciant. Ils ne sont tout simplement pas au courant. Supposons qu’ils soient au courant, supposons que toute la population ait compris le danger, quelque chose pourrait-il être fait, ou les Américains insouciants sont-ils tombés sous le contrôle de la police d’état que Washington a créé ?
Je ne pense pas qu’il y ait beaucoup d’espoir dans le peuple américain. Le peuple américain ne peut pas dissocier un leader véritable d’un factice, et les élites dirigeantes privées ne permettront pas à de vrais leaders d’émerger. En outre, il n’y a aucun mouvement organisé en opposition avec les néoconservateurs.
L’espoir vient de l’extérieur du système politique. L’espoir est que le château de cartes ainsi que les marchés truqués érigés par les décideurs politiques pour le bénéfice du 1% s’effondrent. David Stockman considère ce résultat comme très probable. L’effondrement que Stockman voit arriver est le même effondrement que j’avais signalé. En outre, le nombre de cygnes noirs (3) qui peuvent produire l’effondrement sont quand même plus nombreux que ce que Stockman identifie correctement. Certains organismes financiers s’inquiètent d’un manque de liquidité dans le revenu fixe (obligations) et sur le marché des produits dérivés. Barbara Novack, co-présidente de Black Rock, exerce un fort lobbying pour un mécanisme de sauvetage des produits dérivés.
L’article de David Stockman est important. Lisez-le jusqu’à ce que vous compreniez, et vous en saurez plus que la plupart de tout le monde :
http://www.lewrockwell.com/…/david…/duck-and-cover%E2%80%A8/
Beaucoup vont se demander : si la richesse du 1% est vulnérable à l’effondrement économique, la guerre va-t-elle être lancée pour protéger cette richesse et va-t-on reprocher aux Russes ou aux Chinois les difficultés qui submergent la population américaine ? Ma réponse est que le type d’effondrement que j’attends, et que David Stockman et sans doute d’autres attendent, présente le gouvernement dans une telle instabilité sociale, politique et économique que l’organisation d’une grande guerre devienne impossible.
Alors que l’impuissance politique du peuple américain et que la vassalité du monde occidental n’impose aucune contrainte sur Washington, l’effondrement économique entraîne des révolutions et la disparition de l’ordre existant.
Et aussi difficile serait-il pour les gens de survivre à l’effondrement, les chances de survie restent plus élevées que dans le cas d’une guerre nucléaire.
Paul Craig Roberts, 13/12/2014
Notes :
(1) http://fr.wikipedia.org/wiki/Invasion_de_la_Grenade
(2) Contrats Nicaragua
(3) référence à la « théorie du cygne noir » désignant un événement imprévisible qui a une faible probabilité de se produireTraduction : Rochelle Cohen
Source : Paul Craig Roberts – Institute for Political Economy (version originale en anlais)
Agence Info Libre (version en français)http://www.polemia.com/au-bord-de-la-guerre-et-de-leffondrement-economique/
Lien permanent Catégories : actualité, économie et finance, géopolitique, international 0 commentaire -
Gaz et rouble : les deux dernières victoires de Vladimir Poutine
La guerre bat son plein entre le camp occidental et la Russie. Et c’est Vladimir Poutine qui est en passe de remporter les deux dernières batailles de l’année : celle du rouble, après celle du gaz.
Gaz : l’UE se tire une balle dans le pied
Tout a commencé par un projet de gazoduc, le South Stream, qui devait mener à l’Europe, via la Bulgarie, ce gaz russe dont le vieux continent a un impérieux besoin.
Le seul hic du projet, piloté à 50% par le russe Gazprom, c’est qu’il voulait absolument éviter le transit par l’Ukraine, pays à hauts risques en pleine décomposition économique, politique, géopolitique, militaire.
Pressée par les États-Unis, promoteurs de sanctions disciplinaires contre à peu près tous ceux qui ne leur prêtent pas allégeance, la Commission européenne tergiversa tant et si bien que Vladimir Poutine ne se le fit pas répéter deux fois :
« Puisque la Commission européenne n’en veut pas, eh bien nous ne le ferons pas, et nous réorienterons nos ressources énergétiques vers d’autres régions du monde. »
Grande bénéficiaire : la Turquie qui va hériter dans l’affaire, non seulement du terminal, mais aussi d’une remise de 6 % sur les prix et de la joie mauvaise de contrôler le robinet qui doit acheminer le précieux liquide vers cette Union européenne qui ne veut pas d’elle.
Grandes victimes : la Bulgarie, électron sacrifié de l’UE, comme quelques autres pays limitrophes de l’ex-URSS, mais aussi les compagnies occidentales parties prenantes du projet (l’allemande Wintershall, la française EDF, l’italienne ENI) et, partant, tous les pays membres de cette Union européenne qui s’est stupidement tirée une balle dans le pied.
Rouble : les réserves de la Russie
L’autre bataille livrée par Vladimir Poutine s’est déroulée sur le front monétaire, avec une attaque spéculative d’envergure qui fit gravement chanceler un rouble affaibli par la crise pétrolière et les sanctions européennes. Jacques Sapir explique très bien la manœuvre, classique, sur son blog :
« On achète du dollar en vendant des roubles, ce mouvement fait chuter le rouble, puis on revend ces dollars, provoquant une légère remontée, mais à un niveau inférieur à celui auquel on les a acheté. Le spéculateur est ainsi gagnant. Songeons qu’il a pu acheter des dollars entre 63 et 65 roubles et les vendre entre 77 et 72 roubles. »
En passant, certains visaient probablement à couler l’économie russe dans son ensemble. Mais c’était compter sans les ressources dont dispose la Russie (et qui font cruellement défaut aujourd’hui au camp occidental) :
des réserves de change solides à la Banque centrale russe : 420 milliards, soit un ratio de 12,5 % (contre 1,26 % à la Fed US) ;
un stock d’or conséquent pour soutenir la monnaie nationale : 6 % de la masse monétaire russe (contre... 0 % à la Fed) ;
une dette publique très faible : 9% du PIB, soit en proportion dix fois moins que la France.
Dès le mercredi 18 décembre, la Russie puisait dans ses réserves et parvenait à inverser la courbe descendante du rouble avec un redressement spectaculaire de +13 % en une seule journée, qui allait se poursuivre à un niveau moins soutenu mais assuré jusqu’à la fin de la semaine (+23,9 % au total). Imaginez la tête des spéculateurs, avec leurs monceaux de dollars achetés entre 63 et 65 roubles... et n’en valant plus que 58,5 !
La lente et chaotique recomposition géopolitique du monde
Remporter des batailles ne vous assure évidemment pas de gagner la guerre. D’autant que toute bataille fait des dégâts chez tous les combattants, vainqueurs compris. Vladimir Poutine le reconnaissait aisément dans une conférence de presse tenue à Moscou le jeudi 18 décembre.
Mais, face à une situation fort périlleuse, il venait de démontrer une nouvelle fois sa capacité de réaction. Et de ressouder encore un peu plus les rangs du camp des émergents, avec en pleine tourmente monétaire un soutien réaffirmé de la Chine à la Russie.
Par delà les élucubrations confondantes de bêtise d’une propagande occidentale puérile, ainsi va la lente et chaotique recomposition des équilibres géopolitiques du monde.Le Yéti Politis :: lien
-
Le choc des conceptions du monde
La pensée métaphysique, issue du monothéisme et qui s’achève dans l’humanisme, a voulu définitivement nommer l’être, le « connaître », et, par là fixer les valeurs. La métaphysique, rompant avec la philosophie grecque pré-socratique, a pensé l’être-du-monde comme un acquis, comme une valeur suprême. Elle a envisagé l’être comme Sein (Être-en soi) et non commeWesen (Être-Devenir). Le mot français « être », ne rend pas ce double sens. Rechercher — et prétendre trouver — l’être comme Sein (einai en grec), c’est le dévaluer, c’est commencer une « longue marche vers le nihilisme ». La philosophie de l’Esprit (Geist; le noûs platonicien) prend le pas sur la philosophie de la vie et de l’action, sur la « création », la poiésis. Toute une anthropologie en découle : pour la conception-du-monde de la tradition métaphysique et humaniste, l’humain est un être achevé puisqu’il participe de valeurs suprêmes (Dieu, notamment, ou des « lois », des « grands principes moraux ») elles-mêmes achevées, connaissables, stables, universelles. « Il n’y a plus de mystère dans l’être » dit alors Heidegger. Enfermé dans les essences et les principes, l’humain perd son mystère : c’est l’humanisme précisément. Toute possibilité de dépassement de l’humain par l’homme doit être abandonnée. Les « valeurs » humaines, prononcées une fois pour toutes, courent alors le risque de la sclérose ou du tabou.
D’où la séparation, qui s’est toujours remarquée dans l’histoire, entre les valeurs proclamées avec emphase par les philosophies monothéistes et humanistes, et les comportements auxquels elles donnaient lieu. Sur le plan religieux, l’enfermement de l’action humaine dans des « lois », et le caractère infini mais fini à la fois du Dieu suprême, que l’on sait être définitivement omnipotent, tend a transformer le lien religieux en relation intellectuelle, en logos, compromettant à la longue la force des mythes. Spinoza, Leibniz, Pascal et Descartes offrent des exemples de cette transformation de la métaphysique religieuse en logique; il faut se souvenir de l’amor intellectualis dei de Spinoza, de la déduction des attributs de Dieu chez Leibniz, de l’intelligibilité de Dieu pour toute raison, affirmée par Descartes, ou, allant encore un peu plus avant dans le nihilisme religieux, du paradigme marchand du pari sur le divin de Pascal. Bernard-Henri Lévy avait parfaitement raison, en proclamant conjointement son biblisme et son athéisme, dans Le Testament de Dieu, de se dire fidèle à la religion métaphysique hébraïque, creuset des autres monothéismes, la première à avoir formulé la préférence du logos sur le muthos.
Perpétuel interrogateur
Au rebours, la tradition grecque qui commence avec Anaximandre de Samos et Héraclite, et qui serpentera, en tant que conception-du-monde implicite dans toute l’histoire européenne jusqu’à Nietzsche, se refuse à nommer l’être. Celui-ci est pensé comme Wesen (être-en-devenir) comme gignesthai (devenir transformant), mais n’est jamais défini. Le mot grec pour « vérité », nous explique Heidegger, est alèthéia, ce qui signifie « dévoilement inachevé ». La vérité n’y est point celle du Yahvé biblique, « Je suis l’Un, je suis la Vérité ». Est vérité ce qui est éclairé par la volonté humaine, cette volonté qui soulève le voile du monde sans jamais faire advenir au jour la même réalité.
Dans la philosophie grecque, comme chez Heidegger, des mots innombrables sont utilisés pour « penser l’être ». On ne pourra jamais répondre à la question de l’être, comme on ne pourra jamais connaître 1?« essence du fleuve », perpétuellement changeant, qui coule sous le pont. Le monde, dans son être-devenir, reste alors toujours l’« Obscur », et l’homme, un perpétuel interrogateur, un animal en quête constante de l’« éclairement ». L’hominité, nous dit Heidegger, est caractérisée par le deinotaton, l’« inquiétance »: inquiéter le monde, c’est le questionner éternellement, le faire sortir et se faire sortir soi-même de la quiétude, cette illusion de savoir où l’on est et où l’on va.
Cette conception-du-monde se représente l’humain, perpétuel donneur de sens, en duel avec le monde, qui se dérobe à ses assauts, et qui demande, pour se laisser partiellement arraisonner, toujours de nouvelles formes d’action humaine, de nouveaux sens, de nouvelles valeurs, qui seront à leur tour transgressées.
Sacré et ouverture-au-monde
La mythologie grecque qui nous offre le spectacle de combats entre des dieux inconstants et des guerriers humains jamais découragés, toujours ardents dans leur passion de violer les lois divines pour préserver leur vie ou les lois de leur communauté, constitue l’aurore de cette conception européenne du monde. Une fin de l’histoire, par la réconciliation avec le divin métaphysique, enfin connu, lui est profondément étrangère. Cette conception-du-monde est la seule qui autorise à envisager la fondation d’un surhumanisme : l’humain, passant de cycles historiques de valeurs en cycles historiques de valeurs, transforme à chaque étape épochale la nature de sa Volonté-de-Puissance selon le processus de l’Éternel Retour de l’Identique. Le cosmos reste un mystère, il est l’« obscur en perpétuel dévoilement », comme, de manière singulièrement actuelle, l’envisage aussi la physique moderne. Le mythe reste présent au cœur du monde ; cette impossibilité voulue et acceptée de connaître et de nommer l’être du monde, confère à celui-ci un caractère aventureux et risqué, et à l’action humaine la dimension tragique et solitaire d’un combat éternellement inachevé. Le sacré, au sens le plus fort, peut alors surgir dans le monde : il réside dans cette distance entre la volonté humaine et la « dérobade » du monde, bien visible d’ailleurs dans les entreprises scientifiques et techniques modernes. Le sacré n’est pas réservé à un principe (moral ou divin) ou à un attribut substantiel de l’être (un dieu), mais il habite par le fait de l’homme, le monde. Le sacré s’apparente à un sens donné par l’humain à son entour : le monde, nous dit Hölderlin, est vécu alors comme « nuit sacrée ». Il n’y a plus lieu de se rassurer en recherchant l’« essence de l’être », prélude à la fin de l’histoire, puisque l’homme de cette conception grecque du monde désire l’inquiétude. Il s’assume ainsi comme pleinement humain, c’est-à-dire toujours en marche vers le sur-humain, puisqu’il se conforme à son ouverture-au-monde ( la Weltoffenheit dont parlait Gehlen) inscrite dans sa physiologie et éprouvée par la biologie moderne.
La recherche de l’être comme Sein, quête de l’absolu métaphysique et moral, peut s’envisager alors comme une entreprise in-humaine, et l’humanisme qui en découle philosophiquement comme une idéologie proprement non-humaine, plus exactement maladive. C’est dans l’historicité (Geschichtlichkeit) et la mondanité (Weltlichkeit), ce que les grecs appelaient le to on (l’étant) et les latins l’existentia, que réside le chemin que nous pouvons choisir de suivre ou de ne pas suivre.
Le suivre, s’enfoncer dans le Holzweg, la sente de bûcheron qui ne mène « nulle part » sinon «au cœur de la forêt sacrée », dont nous parle mystérieusement Heidegger, voilà ce qui est renouer avec l’aurore de la Grèce : reprendre le fil coupé par le christianisme et « la sortir de l’oubli ». La sente ne mène pas vers un bourg, celui où les marchands se reposent, mais, inquiétante, elle s’enfonce vers l’aventure. L’« aventure », c’est-à-dire l’advenir, ce qui, au détour du chemin « surgit du futur » : l’histoire.
Voici donc le sens fondamental de l’entreprise de Nietzsche, puis de Heidegger, et après lui sans doute de bien d’autres : réinstaller, en Europe, à l’époque technique, cette conception-du-monde incomplètement formulée, inachevée par certains grecs, mais le faire sous une forme différente, auto-consciente en quelque sorte, en sachant que même ce travail sera à recommencer. Nous, hommes du soir, de l’Hespérie (Abend-land), (par rapport à cette Grèce des pré-socratiques qui a voulu être l’Aurore d’une conception du monde) un travail nous attend, qui n’a rien de philosophique, au sens intellectuel du terme : rendre auto-consciente, au sein de l’Europe de la civilisation technique, une forme transfigurée de cette conception-du-monde, ou de cette religion-du-monde de l’aube grecque, tirée de l’oubli par Nietzsche et Heidegger. »
Guillaume Faye
Source : Du Haut des Cimes
http://la-dissidence.org/2014/12/14/le-choc-des-conceptions-du-monde/
-
L’Etat islamique abat un avion de la coalition en Syrie et capture son pilote jordanien
En Syrie, l’organisation État islamique détient un pilote jordanien.
Photos à l’appui, le groupe extrémiste le montre entre les mains de ses combattants.
La Jordanie confirme qu’un de ses avions a bien été abbatu mercredi près de Raqqa, une région contrôlée par les jihadistes. C’est la première fois qu’ils frappent un avion militaire de la coalition. L’appareil menait un raid contre des positions de l’organisation lorsqu’il a été abattu, vraisemblablement par un missile sol-air. Le pilote sorti indemne du crash a été aussitôt capturé. La perte de cet avion intervient trois mois après le début des frappes de la coalition en Syrie, le 23 septembre, plus d’un mois après le lancement de la campagne en Irak. -
Conférence: La Serbie et l'UE, destin national et perspectives continentales
-
La Chine offre son aide financière à la Russie en crise
Pékin met en avant le rôle du yuan comme source de liquidités alternative pour les entreprises russes.
Un accord conclu en octobre, en pleine défiance entre Moscou et l’Occident, permet de changer des roubles contre des yuans sans passer par le dollar. Crédits photo : KIM KYUNG-HOON/REUTERS
La Chine a tendu la main à la Russie, en vue d’enrayer la dégringolade de son économie et de limiter les retombées qui pourraient l’affecter. Pékin est prêt à venir à la rescousse de son voisin frappé par la chute du prix du pétrole et les sanctions internationales en offrant une aide économique « dans la mesure de ses moyens », a déclaré le ministre des Affaires étrangères chinois Wang Yi ce week-end. Pour la première fois depuis l’effondrement du rouble, la seconde économie mondiale est sortie de son silence pour officiellement offrir son appui à son allié Vladimir Poutine.
Lundi, le rouble poursuivait sa remontée entamée après la panique de lundi et mardi dernier. Il a repris 24 % depuis le 16 décembre contre le dollar mais perdu 40 % depuis le début de l’année.
L’offre de services chinoise avait d’abord une portée psychologique, visant à rassurer les marchés paniqués par le décrochage de la devise russe. Elle est un appel du pied en direction de Moscou qui refuse de quémander de l’aide. « Le problème c’est que les Russes sont trop fiers ! », juge Ding Yifan, du Centre de recherche pour le développement, à Pékin. La Russie n’a pas encore actionné un accord de « swap » rouble-yuan portant sur 24 milliards de dollars qui pourrait offrir d’urgence des liquidités à l’économie russe. Cet accord conclu en octobre, en pleine défiance entre Moscou et l’Occident, qui permet de changer des roubles contre des yuans sans passer par le dollar, pourrait être élargi, a laissé entendre le ministre du Commerce, Gao Hucheng. Il contribuerait un peu plus à l’internationalisation de la devise chinoise qui joue déjà un rôle clé dans le commerce sino-russe depuis l’imposition de sanctions occidentales. La Chine est le deuxième partenaire commercial de la Russie derrière l’Union européenne. [....]
La suite sur Le Figaro.fr
http://www.actionfrancaise.net/craf/?La-Chine-offre-son-aide-financiere
Lien permanent Catégories : actualité, économie et finance, géopolitique, international 0 commentaire -
La chute de Mossoul: le complot enfin dévoilé
Un membre de la commission spéciale chargée d’enquêter sur les raisons de la chute de la ville de Mossoul, la capitale de la province de Ninive, au nord de l’Irak, a révélé lundi que certaines personnalités politiques irakiennes ont empêché cette commission d’achever son travail.
Cité par le site d’information iranien Irib, Majed al-Gharawi a expliqué que les personnalités politiques en question ne veulent pas que leur coopération avec le groupe takfiriste Daesh dans la chute de Mossoul soit dévoilée.
Al-Gharawi a fait savoir que cette commission d’enquête, qui a été mise en place sur l’ordre du chef du parlement, a jusqu’à présent interpelé quelques chefs militaires et responsables de la direction de la province de Ninive. Elle doit présenter bientôt les résultats de son enquête au chef du parlement Salim al-Jabouri.
Ce dernier a demandé dimanche à cette commission de faire toute la lumière sur les raisons de la chute de Mossoul, et d’accélérer les efforts pour en trouver les véritables auteurs.
Daesh a pris le contrôle de Mossoul, le 10 juin 2014, avec la coopération du parti Baath (de l’ancien président déchu Saddam Hussein) et du soutien de leurs alliés étrangers, à savoir les Etats-Unis, la Turquie et l’Arabie saoudite.
Avant cette alliance entre Daesh et le parti baathiste, le groupe takfiriste avait essayé de s’emparer de la province d’AlAnbar et de la ville de Samarra, mais ce complot a échoué grâce à la réaction appropriée de l’armée irakienne et des forces populaires.
Mais, selon les rapports irakiens, l’occupation de la ville de Mossoul s’est avérée plus simple, en raison de la trahison du parti baathiste et de quelques militaires corrompus de l’armée irakienne.
Selon Nouri al-Maliki, le vice-président irakien, la chute de Mossoul était le résultat d’un complot, et on ne peut pas dire que l’armée a perdu, mais qu’elle s’est retirée, conformément à des accords passés entre des partis.
Maliki a ajouté que ce qui s’est passé à Mossoul était le résultat d’un accord conclu dans une chambre d’opération commune entre des groupes politiques pour faire tomber cette ville.
Selon ses dires, la tête de cette chambre d’opération commune est Ezzat Ibrahim al-Douri, l’adjoint de Saddam, l’ex-dictateur d’Irak.
A part Al-Douri, quelques responsables de la province de Ninive et des militaires liés au parti baathiste, qui s’étaient infiltrés dans l’armée irakienne sont également accusés de collaboration avec Daesh, dans la chute de Mossoul.
En réaction, le Premier-ministre irakien, Haïdar Abadi, a procédé à une purge au sein de l’armée irakienne, et a mis à l’écart plusieurs généraux et chefs de l’armée.
Soutenus par des pays étrangers, quelques groupes irakiens ont essayé de profiter de l’occasion de la chute de Mossoul pour déclencher une guerre tribale et religieuse, mais ce complot a été mis en échec lorsque les musulmans sunnites ont été visés par Daesh.
Reste à dire que la chute de Mossoul est sans doute le résultat d’un complot, compte tenu des efforts visant à entraver l’enquête en cours.
al manar avec irib :: lien
-
Perte de la nationalité française pour les djihadistes binationaux
Le Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l’islam (CPDSI) a publié récemment un rapport intéressant sur la description de l’embrigadement des djihadistes français. Il tendait toutefois à minimiser la part prise par les jeunes binationaux issus de l’immigration. Ce rapport soulève également la question de la responsabilité individuelle des radicalisés, quelle que soit leur origine. Un certain nombre disparaîtra dans les combats, suite aux frappes de la coalition, y compris françaises, ou pour désertion, tués par leurs propres frères du djihad. Mais nous devons aussi prendre des mesures de prévention des risques, notamment l’empêchement juridique au retour et au maintien dans notre pays.
Ces jeunes sont-ils responsables ou victimes ? Sont-ils récupérables et faut-il chercher à les récupérer ? S’il est louable de tenter d’enrayer leur radicalisation et leur départ par une mesure administrative de retrait du passeport, les impétrants doivent, in fine, assumer leur choix.. Ils ne peuvent plus dire aujourd’hui qu’ils ne savaient pas ce qui les attendait en Syrie ou en Irak !
Dounia Bouzar, directrice du CPDSI, dit elle-même qu’il faut compter sur la prévention, « car une fois que le jeune est endoctriné, c’est très difficile de le déradicaliser ».
-
Les « hedge funds » impatients d’en finir avec l’assouplissement quantitatif
Critiques à l’égard de la politique de la Réserve fédérale, les fonds ont pourtant largement profité de ses largesses.
L’assouplissement quantitatif ou « QE » fait progresser les performances des actifs de manière uniforme, d’après une logique binaire, selon que le fameux interrupteur des risques (« risk on/risk off ») est allumé ou non. Tous les marchés montent indifféremment quand il est enclenché, et inversement. Dans le cadre de ses opérations de soutien, quand la Fed achetait des obligations d’Etat, ce sont notamment les « hedge funds » qui les lui vendaient, d’après une étude (1) Avec cet argent, les fonds ont acheté des obligations d’entreprises ou municipales, des prêts… En clair, c’est la Fed qui a financé la prise de risque des fonds alternatifs pour la bonne cause…
Pourtant les fonds alternatifs sont loin de lui être reconnaissants, comme en témoigne la levée de boucliers qui n’a cessé d’accompagner ses différentes opérations de soutien. Les « hedge funds » reprochent à la Fed d’avoir annihilé la volatilité des marchés. Ils n’ont d’ailleurs cessé de parier sur son déclin jusqu’à aujourd’hui, le signe qu’ils voient enfin poindre la fin de la politique non conventionnelle de l’institution. De quoi, espèrent-ils, retrouver les « marchés d’antan », plus volatils et moins corrélés entre eux que durant la mainmise de la Fed sur la liquidité mondiale.
Globalement, les « hedge funds » ont mal anticipé la chute des taux longs américains, son ampleur et sa durée exceptionnelles. A l’inverse, ils ont été pris de court par les brusques regains de volatilité qui ont parsemé l’après-crise. Ce fut notamment le cas en mai 2013, quand Ben Bernanke, alors président de la Fed, laissa entendre aux marchés qu’il fallait se préparer à la fin de la perfusion monétaire.
Levée de boucliers
Stanley Druckenmiller, l’ancien bras droit de George Soros entre 1988 et 2000, avait déclaré à CNBC qu’en faisant grimper les prix des actifs financiers, la Fed tentait de mener « un des plus grands transferts de richesse des pauvres vers les riches ». Cette stimulation artificielle de l’économie « n’a pas fonctionné pendant cinq ans » et ce sont les générations futures qui « paieront cher » cette erreur de politique monétaire.
Pour Paul Singer, le gestionnaire du fonds Elliott, « le QE, qui ne prépare pas les conditions d’une meilleure croissance », a en outre « introduit des distorsions majeures dans les valorisations de tous les actifs de telle sorte qu’aucun d’eux n’offre plus un couple rendement-risque attrayant ». Paul Tudor Jones, la star du style « global macro » (qui investit sur tous les marchés) avait été encore plus explicite. La politique monétaire de la Fed en bridant la volatilité des marchés les a rendus trop prévisibles. En clair, « elle est devenue aussi ennuyeuse qu’un discours de Joe Biden (vice-président américain) », selon le fondateur de Tudor.
George Soros, le parrain des « hedge funds », s’est déclaré inquiet face à l’adoption « systématique et unanime de l’assouplissement quantitatif », qu’il voit comme des « dévaluations compétitives » déguisées.
Le QE s’avère un « bouc émissaire » commode des contre-performances des fonds alternatifs depuis la crise de 2008. Une contre-performance qui fait débat dans le secteur. Est-ce un tournant historique ou un simple passage à vide ? En faisant diversion, le débat autour du QE évacue cette question de fond.
___________________________________________
Notes :
(1) « Analysing Federal Reserve asset purchases : from whom does the Fed buy ? », Federal Reserve Board