Comme tous les bons capitaines, Benoît XVI ne se la joue pas « mouche du coche », s'acharnant là où les résultats sont bons, dans les pays de ce que l'on appelait encore récemment le Tiers monde. Il se porte au défaut de la Muraille. Il se bat là où la défaite menace, là où la déroute n'est pas loin, je veux dire : en Europe.
La Vieille Europe a été le continent où le christianisme s'est trouvé un berceau. Il est en train d'y mourir. Le but du général d'année qu'est Benoît XVI est d'éviter les soins palliatifs, tellement pratiqués sur le terrain, dans les regroupements paroissiaux et les enfermements diocésains. Il faut de l'air. Il faut repartir à la conquête du monde, et en particulier du monde occidental, surtout de la Vieille Europe qui végète dans l'athéisme pratique. Il faut créer des événements pour réveiller la malade de son coma spirituel.
C'est dans cette perspective que le 24 mars prochain, à Paris, Ville Lumière, Ville de la Culture, Benoît XVI organise - depuis Rome semble-t-il - ce qu'il a voulu appeler le Parvis des gentils. Etrange manifestation ! Elle aura lieu à l'UNESCO, à la Sorbonne et à l'Académie française. Info ou intox ? Je me suis laissé dire, par un des responsables de l'opération, que le pape apparaîtrait en direct de Rome SUf la façade de Notre Dame de Paris, répondant aux questions qui lui sont posées par le public. Il s'agit d'un « coup » formidable et sans précédent, mais aussi d'une réalisation qui risque d'en intriguer plus d'un. Dans l'organisation de la manifestation, cela a été mon premier étonnement : on ne retrouve pas la dernière née des organisations curiales, la Commission pour la nouvelle évangélisation. C'est la Commission pontificale pour la culture qui est chargée de cette Journée, avec à sa tête le tout récent cardinal Gianfranco Ravasi, responsable de la Commission pontificale pour la culture, celui qui a remplacé le cardinal Poupard. C'est que le Parvis des gentils n'est pas, à proprement parler, un acte d'évangélisation. Pour comprendre de quoi il va s'agir, il faut s'interroger sur Ie nom que le pape a choisi pour cette fête de la culture. Le Parvis des gentils, c'était, au temple de Jérusalem, la partie réservée aux non-juifs. Il s'agit donc pour l'Eglise de sortir d'elle-même et d'aller à la rencontre des païens qui le souhaitent. Mais cette rencontre doit être préparée. Ce « parvis des gentils » se veut un lieu du « dialogue avec ceux à qui la religion est étrangère, à qui Dieu est inconnu et qui, pourtant, ne voudraient pas simplement rester sans Dieu, mais l'approcher au moins en tant qu'Inconnu ». On reconnaît l'allusion « au Dieu inconnu » lancé par saint Paul aux Athéniens lors de son fameux Discours sur l'Aréopage. « Vous ne le savez pas, vous qui êtes les plus religieux des hommes, mais c'est lui que vous adorez ».
Pour arriver à une telle prise de conscience, le chemin n'est pas simple. Dans un article publié par l'Osservatore romano, Mgr Ravasi s'en explique de la façon suivante, nous donnant vraisemblablement la perspective papale : « Il faut que l'athéisme comme la foi se soumette à une purification de leurs concepts originels : le premier doit retrouver son idéalisme de base, le second éviter le dévotionalisme et le fondamentalisme. Ce n'est que dans ces conditions que la rencontre pourra se faire, comme un vrai duo ayant pour fin l'harmonie et non tel un duel où les deux partis s'affronteraient à l'arme blanche ». Mais ajoute le nouveau cardinal, « les deux parties ne doivent en aucun cas renoncer à leur identité propre ». « Hors de toute métaphore, elles ne doivent pas se décolorer dans un vague syncrétisme idéologique ».
La ligne de crête est difficile. Cette perspective évoque le dialogue étonnant entre le cardinal Ratzinger, près d'être élu pape et l'éditorialiste athée Paolo d'Arçais, édité depuis chez Payol. Il y avait là deux personnages de parfaite bonne foi. Aucun des deux n'essayait de convaincre l'autre, mais le cardinal consentait à se mettre en cause face au journaliste. J'ai l'impression que le parvis des gentils sera quelque chose comme ce dialogue, En plus grand. Et (cela nous intéresse) en France. Les esprits chagrins diront que ce « dialogue » comme tous les autres, ne sert à rien. En réalité, il s'agit, je crois, pour Benoît XVI, dans cet effort de purification, de déminer le terrain de la Culture et de montrer que, dans ce registre, le christianisme est au moins à égalité avec cet athéisme rationaliste qui, depuis quelque deux siècles, prétend au Monopole de l'intelligence. D'une certaine façon, le discours du pape au Centre des Bernardins relève justement de ce genre de démarche. Benoît XVI ne tente pas de convertir les athées. Il cherche simplement à ne pas leur laisser la vedette. Il me semble que dans la Reconquista spirituelle qui s'amorce, ce Parvis des gentils pourrait bien être la première étape nécessaire. On se plaint tellement que les prêtres manquent d'imagination dans l'œuvre de l'évangélisation. Le pape leur montre l'exemple. Loin de l'autocritique stérile, mais sans s'encombrer non plus des mille et une casseroles dont on tente ces derniers mois d'affubler l'Eglise, en toute liberté, en toute intelligence, Benoît XVI, le pape théologien, propose une rencontre à la régulière avec les athées d'Occident. Il n'est pas indifférent que Paris, siège mondial de l'UNESCO, soit aussi le lieu choisi pour cet échange d'un genre nouveau. J'avoue que je suis impatient de voir comment se dérouleront ces formidables Assises, où s'affronteront, « pour la première fois en un véritable duo », la foi et la raison. Je n'ai qu'une objection, je me la fais souvent vis-à-vis de ce qui vient de Rome : c'est peut-être trop intelligent ! En tout cas, on ne pourra pas dire que ce pape de 83 ans manque d'ambition et d'imagination.
Joël Prieur : monde et vie 11 décembre 2010
religion - Page 265
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- Parvis des gentils - Benoît XVI au rendez-vous de l'intelligence
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Mali : l’indécision française peut-elle déboucher sur la création d’un « Sahélistan » ?
Au mois de janvier 2012, au Mali, la résurgence d’une crise née au moment des indépendances, imposait de fixer l’abcès afin d’éviter sa dissémination et pour ensuite le traiter en profondeur à travers trois volets :- Politique, en prenant en compte la légitime revendication des populations nordistes, notamment celle des Touareg,- Diplomatique, en faisant comprendre à l’Algérie que si ses intérêts régionaux n’étaient à l’évidence pas ceux de la France, les nôtres ne s’effaceraient pas devant les siens,- Militaire, en appuyant les Touareg contre les groupes islamiques qui, à l’époque, totalisaient moins de 300 combattants qui avaient commis l’erreur de sortir de la clandestinité désertique pour se rassembler à Gao et à Tombouctou.Au lieu de cela, dans la plus totale indécision doublée d’un manque absolu de vision géostratégique, la France :- S’est réfugiée à l’abri du principe de l’intangibilité des frontières,- A cédé devant les exigences algériennes de non intervention,- A camouflé sa pusillanimité derrière l’argument d’une « action » de la CEDEAO, ce « machin », ce « volapuk », cette tour de Babel, dont l’efficacité militaire relève de la méthode Coué,- A laissé les islamistes liquider militairement les Touareg.Le résultat de cette addition de démissions décisionnelles est qu’un incendie limité pouvant être rapidement éteint, notamment au moyen d’une de ces opérations « discrètes » que nos forces savent encore si bien mener, est aujourd’hui devenu un foyer régional de déstabilisation. En effet :1) Le Mnla ayant été militairement défait et repoussé vers la frontière algérienne, les islamistes qui ne risquent plus d’être pris à revers sur leur flanc nord ont désormais toute la profondeur saharienne pour manœuvrer. Quant à leur flanc ouest, il semble également s’ouvrir car au sein des tribus arabes de Mauritanie, certains, de plus en plus nombreux, commencent à se poser des questions…2) Sur le flanc oriental la situation leur devient également de plus en plus favorable car le chaos en retour se fait sentir en Libye où tout le sud du pays est mûr pour devenir un nouveau Mali. Quant au sud de la Tunisie, la contamination y a largement commencé.3) La contagion n’est plus qu’une question de temps au Tchad et au Darfour cependant qu’un continuum fondamentaliste est en passe de s’établir avec les islamistes de Boko Haram du nord Nigeria.Ainsi donc, le « Sahélistan », fantasme il y a encore quelques mois, devient-il peu à peu réalité. L’une de ses forces est qu’il s’agit d’une résurgence historique ramenant directement aux jihad sahéliens du XIX° siècle qui enflammèrent la totalité de la région depuis le Soudan à l’Est jusqu’au Sénégal à l’Ouest[1]. Or, l’islamisme sahélien de 2012 s’abreuve à cette « fontaine de rêve » fermée par la colonisation. Comment cette réalité inscrite dans la longue durée peut-elle être comprise par des journalistes ou des politiciens esclaves de l’immédiateté et de leur inculture ? Comment pourrait-elle l’être par ces « africanistes » élyséens dont la principale activité semble être de torpiller les informations que les militaires font « remonter » depuis le terrain ?Dans le Sahel, au cœur de ce qui fut notre « pré carré », ceux qui inspirent la politique de la France ont donc laissé s’écrire le même scénario que celui que nous avons connu dans la région des Grands Lacs et qui peut être exposé en quatre points :1) Une erreur d’analyse reposant sur la priorité donnée aux postulats idéologiques aux dépens des réalités géographiques, anthropologiques et historiques.2) L’absence de toute véritable stratégie de défense.3) Le tropisme de l’abandon de nos alliés ou amis.4) La place laissée libre à des acteurs extérieurs. Dans le cas présent, l’Algérie et les Etats-Unis qui attendent le moment propice pour intervenir, mais à leur manière. Les conséquences de l’incompétence hexagonale seront alors camouflées sous l’alibi facile de « complot anglo-saxon » contre les intérêts français...Alors que tout ce qui se passe dans la zone concernée nous est connu, alors que nous savons tout, et au-delà, de ceux qui la déstabilisent, alors que nous y disposons de tous les réseaux utiles, alors enfin que, parfaitement immergées, nos forces auraient pu rapidement « régler » le problème, l’Elysée a laissé la situation lui échapper.Faut-il s’en étonner quand la tête de l’Etat dodeline entre indécision et repentance ?Bernard Lugan http://bernardlugan.blogspot.fr23/11/12
[1] Voir à ce sujet les pages 431-452 ainsi que les cartes de mon Histoire de l’Afrique des origines à nos jours. 1246 pages, Ellipses, 2010. L’ouvrage peut être directement commandé ici.
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Parution du nouveau numéro de la revue L’HÉRITAGE
24 novembre 2012Une très bonne nouvelle : nous apprenons que la revue L’Héritage (« revue d’études nationales ») reprend sa parution après une pause, et que son nouveau numéro est tout juste disponible !
Nous vous invitons à découvrir ce numéro 8. Vous pouvez l’acheter en ligne ici, le commander par chèque ou le trouver dans les « librairies amies ».
32 pages (format A4), intégralement en couleur, pour 4 euros. Cette revue nationaliste se préoccupe d’analyse et de science politiques, de philosophie, d’histoire, d’identité, de la face cachée des choses, de spiritualité, etc.
Un numéro dense et très intéressant dont voici le sommaire :
Editorial
Politique : Hollande et Jeanne d’Arc – Thibaut de Chassey
Philosophie : le De Regno de saint Thomas d’Aquin – E.H. le Bouteiller
Mondialisme : la fondation Bertelsmann – Pierre Hillard
L’imposture du « 19 mars 1962 » – Jacques Meunier
Sainte Jeanne d’Arc, la Bierge des combats – Jean Dartois
Histoire nationaliste : la Cagoule – Erwin Vétois
Le sacre des rois de France – Louis Lefranc
Il y a 50 ans : Roger Degueldre – José Castano
Louis-Ferdinand Céline – Isabelle de Rancourt
Lieux à part : Cluny – Christine Dol.Et l’édito du directeur :
« Les idées mènent le monde
Chers lecteurs,
après un trop long sommeil, votre revue revient, quelque peu modifiée. La formule va évoluer et vous voyez avec ce numéro – le premier d’une nouvelle série – les prémices de cette mutation.
Nous souhaitons recentrer L’Héritage sur la politique, et en particulier sur les idées. C’est le combat pour celles-ci qui prime : elles mènent le monde, dit-on, et aujourd’hui les idées fausses mènent notre société à la ruine et à la mort.La revue va désormais, sous une parution que nous espérons régulière et plus fréquente, traiter davantage et principalement de philosophie, d’analyse et d’histoire politiques. Elle reviendra aussi bien sûr sur notre histoire nationale, sous un rapport permettant au lecteur de faire un lien avec le monde d’aujourd’hui, qui – pour le meilleur et pour le pire – est issu du passé. Les changements que l’on constate ne sont pas spontanés.
Ainsi, l’année 2012, par les anniversaires marquants auxquels elle nous a confrontés, nous a poussés à évoquer en ces colonnes quelques faits passés, sans bien sûr négliger celle qui est née il y a six cents ans pour sauver notre nation : Sainte Jeanne d’Arc.
Par ailleurs, il règne dans les milieux « nationaux » une certaine agitation et une incontestable confusion.
On parle de « fondamentaux », de nouvelles stratégies, mais le débat d’idées semble discret.
La confusion des idées ou même le mépris pour cellesci, au profit d’analyses simplistes ou de courte vue, sont courants et souvent acceptés ; avec, naturellement, de graves conséquences.Le travail doctrinal, la rigueur d’analyse et le respect des grandes lois inhérentes à la condition humaine sont plus que jamais nécessaires pour éviter les écueils ou les combats contre-productifs.
En cette période de la plus haute importance pour la droite nationale – où se dessine son futur visage – il faut, par-delà une nécessaire action qui peut parfois confiner à l’agitation électorale et au « bougisme » médiatique, recréer le débat d’idées et convaincre de la pertinence des positions nationalistes, de la civilisation traditionnelle, du réalisme philosophique et politique.
L’Héritage s’y attellera pour sa part.
Thibaut de Chassey » http://www.contre-info.com
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Johan Livernette - Entretien de présentation (avec Florian Rouanet)
Johan Livernette - Entretien de présentation... par Floriano75011 -
Souffrance à deux vitesses Discussion sous les bombes entre un Palestinien et un Israélien
Mise à jour le mercredi 21 novembre : à ce jour on dénombre 5 morts du côté israélien, et 154 morts dans le camp palestinien de la bande de Gaza. Face aux bombardements ciblés de haute technologie par une aviation et un équipement militaire modernes, près de la moitié des roquettes palestiniennes sont interceptées par les missiles anti-roquettes (Iron Dome) et ne touchent même pas terre.
Interview croisée entre un palestinien et un... par CptAnderson -
Laurent ozon multiculturalisme
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Renaissance catholique communique
Suite à la manifestation contre le mariages homosexuel, Renaissance catholique communique :
Renaissance Catholique se réjouit du succès des manifestations des 17 et 18 novembre contre le projet de loi gouvernemental visant à légaliser le mariage des paires homosexuelles et à leur accorder la possibilité d’adopter des enfants. Le succès de la manifestation du 17 novembre témoigne de la capacité de mobilisation qui est encore celle de l’Eglise de France, l’épiscopat ayant largement soutenu cet évènement. C’est une bonne nouvelle.S’étant associée à la manifestation du 18 novembre initiée par l’Institut Civitas, Renaissance Catholique se réjouit également du succès de cette marche qui a rassemblé, avec le soutien de plusieurs évêques, toutes les personnes désireuses de défendre le mariage naturel mais aussi plus largement l’intégralité du Décalogue. L’unité n’étant pas l’uniformité, chacun a pu manifester dans une grande liberté, selon sa sensibilité propre, avec les associations officiellement présentes. Cet évènement a rassemblé une bonne part des catholiques, souvent divisés par ailleurs, qui se reconnaissent dans l’intégralité du discours de l’Eglise sur la société et sa condamnation de tous les aspects de la culture de mort dénoncée par Jean-Paul II. C’est également une grande joie et un réel motif d’espérance.
La provocation des féministes hystériques de Femen a, en partie, atteint son objectif puisque leur intrusion brutale dans le défilé du 18 novembre, seins à l’air et voile de religieuse en tête, a permis aux médias et à Mme Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, de dénoncer les « agressions d’extrême-droite ». Le quotidien officieux de l’épiscopat, La Croix, sans doute incomplètement informé, sous le titre « Dimanche, un autre défilé aux accents homophobes », dans son édition de lundi 19 novembre, la contre-manifestation des féministes de Femen, mais omet de signaler leur tenue, ou plutôt leur absence de tenue, vestimentaire et ne cite que la journaliste Caroline Fourest qui a vu des journalistes « roués de coups. »
Nous savons depuis longtemps que le catho, comme l’écrit avec humour Pasquin dans l’Homme Nouveau, n’est pas média-compatible : « Si le catho était média-compatible, Jésus aurait fini comme directeur d’une agence de média-training et non pas accroché à une croix entre deux délinquants minables au point de se faire prendre. »
Ainsi lancé le mouvement de protestation contre ce projet de loi, dont les dispositions seraient de toute façon « dépourvues de toute valeur juridique » (Evangelium Vitæ § 71), doit se poursuivre jusqu’à la grande manifestation unitaire du 13 janvier 2013 à laquelle nous serons bien sûr présents paisiblement, sereinement… mais fidèles à ce que nous sommes, plus soucieux du jugement de Dieu sur nos faits et dits, que de celui des médias et des puissants du jour.