Le retrait des troupes de l’ISAF [en français, Force internationale d'assistance et de sécurité, FIAS] et ses conséquences telles que le transfert complet des responsabilités en matière de sécurité aux forces afghanes, la situation sécuritaire, politique et sociale du pays, la corruption endémique ainsi qu’une présence sans cesse réaffirmée des Talibans laissent entrevoir un avenir sombre pour l’Afghanistan.
Sentiments populaires : espoirs déçus, lassitude et résignation
Si ces abus ont pu renforcer un fort sentiment de lassitude au sein de la populations afghane, cette dernière ne perçoit pas nécessairement le conflit et les enjeux en présence de manière binaire ou simple. Des facteurs comme l’appartenance ethnique, le parcours de vie (guerre, exil, origine urbaine ou rurale, niveau d’éducation, etc…), le statut social, l’expérience au contact d’étrangers et des réalités économiques ou politiques du nouvel Afghanistan entrent en jeu de manière complexe. L’incertitude de la population quant à son avenir est forte et celle-ci se sent souvent prise en otage par un gouvernement corrompu et une présence militaire étrangère devenus aliénants ainsi que par les anciens seigneurs de guerre et les Talibans, responsables des tragédies et malheurs des trois décennies passées. Cet apparent désespoir et l’aspect militaire ou sécuritaire du conflit (qui bénéficie d’une grande couverture médiatique) ne doivent pas masquer ses causes ou aspects historiques, politiques, identitaires, sociaux et économiques ainsi que les réalités humaines [120]. Le conflit en Afghanistan ne se résume pas à une approche binaire ou manichéenne et l’ensemble de ces éléments interagissent de manière complexe, donnant souvent l’impression d’être un cercle vicieux dont il est peu aisé de sortir. La reconstruction et le développement du pays sont cruciaux et ne peuvent s’inscrire dans une perspective de court terme : la fermeture des équipes provinciales de reconstruction de l’ISAF a été une mauvaise nouvelle mais on ne doit pas oublier qu’avant et après 2014, les efforts les plus soutenus ont été et resteront ceux fournis par les différentes agences ou programmes de l’ONU, certains États étrangers et de nombreuses ONG afghanes ou étrangères [121].
La perception de la population à l’égard de la présence étrangère est à l’image de son bilan, complexe et parfois paradoxal. On peut reconnaître certains bienfaits du changement de régime et de la présence étrangère tout en étant lassé, désespéré ou hostile face à certains de ses aspects et face aux réalités du nouvel Afghanistan. De nombreux Afghans sont révoltés contre des abus ayant été commis par des soldats étrangers ou le gouvernement mais aussi contre les attentats, actes terroristes ou attaques menés par les Talibans : de janvier à octobre 2012, 2300 civils afghans ont perdu la vie et dans la plupart des cas les responsables sont les insurgés [122]. La population afghane est la première victime du conflit et l’année 2012 ne l’a pas épargné. Le 6 juin 20 civils furent tués par des attaques kamikazes dans la province de Kandahar [123]. Le 14 août des attentats similaires coûtèrent la vie à 48 personnes et en blessèrent 130 dans les provinces de Nimroz et Kunduz [124]. Le 26 octobre, 41 personnes furent tuées et 56 autres blessées par un kamikaze devant la mosquée de Maimana (province de Faryab) [125]. Le 23 novembre la capitale provinciale du Wardak fut touchée par une attaque suicide des Talibans ôtant la vie à deux civils et en blessant 90 autres [126].
Durant le « surge » initié par Barack Obama et au cours des trois dernières années le Helmand a vu le déploiement de plusieurs dizaines de milliers de Marines et a connu de terribles combats. La reconquête de certaines régions comme les districts de Marja et Nad Ali – d’anciens bastions talibans – a permis d’améliorer le contexte sécuritaire local (routes mieux entretenues et plus sûres qu’auparavant) et en apparence la vie des populations locales mais ces dernières sont pourtant peu optimistes [127]. De nombreux anciens, paysans, instituteurs et fonctionnaires locaux restent mécontents à l’encontre du gouvernement afghan et sont convaincus qu’après le retrait des troupes étrangères, les Talibans reviendront car les forces de sécurité afghanes ne pourront pas sécuriser la région [128]. Les 6500 Marines déployés dans le Helmand (21000 l’année dernière dans cette province et celle de Nimroz) feraient face à des Talibans affaiblis: ces derniers en seraient réduits pour le moment à menacer certains habitants et à envoyer des mollahs radicaux prêcher le Djihad dans certaines mosquées afin de recruter de nouveaux combattants [129].
Le mécontentement des populations locales à l’encontre du gouvernement de Kaboul est fort: ce dernier est vu comme hypocrite et étant à l’origine de la corruption qui gangrène le pays [130]. La politique anti-drogue et à géométrie variable de Hamid Karzaï est particulièrement critiquée par les paysans du Helmand (qui fournit environ 40% de l’opium dans le monde): la production et le trafic d’opium continuent alors que les fermiers qui y renoncent se plaignent de ne recevoir aucun soutien de la part des autorités locales [131]. Ces dernières sont aussi fréquemment accusées de profiter de la production et du trafic d’opium [132]. Haji Atiqullah, chef de la puissante tribu pachtoune des Barakzaï, a expliqué que suite au « surge » des forces américaines le contrôle du gouvernement central s’est étendu à un nombre croissant de districts du Helmand (aucun avant le « surge ») mais a jouté que « les forces afghanes ne pourront pas tenir cette région, à moins que les étrangers n’arrivent à se débarrasser de la corruption au sein du gouvernement afghan, ainsi qu’au niveau des districts et des provinces » [133].
La paupérisation des paysans du Helmand pourrait les pousser à cultiver de nouveau le pavot et à chercher la protection de groupes insurgés ou criminels : Marja pourrait ainsi rapidement retrouver son statut de centre du trafic d’opium qu’elle avait perdu suite au « surge » [134]. Un ancien dénommé Ahmad Shah a ainsi expliqué à Alissa Rubin que « Des millions et des millions de Roupies pakistanaises étaient échangées chaque jour au bazar. Les gens étaient si riches qu’en quelques années un paysan pouvait se permettre d’acheter une voiture. (…) Nous avons fait partie des efforts d’éradication menés par le gouvernement mais s’ils avaient pu fournir au fermier une compensation, nous aurions pu justifier notre acte. Mais le gouvernement a échoué à nous fournir une compensation et à moins qu’il le fasse, les gens se retourneront contre nous ou rejoindront l’insurrection, et seront contre le développement, comme ils le furent sous les Talibans » [135]. En dépit des programmes financés par des pays étrangers, de nombreux paysans n’arrivent pas à subvenir aux besoins de leurs familles et se remettent à cultiver le pavot. Les efforts déployés afin de lutter contre ce trafic et de saper le financement des Talibans semblent être vains: les champs de pavot ont été déplacé dans des zones semi-désertiques et les fermiers s’adonnant à leur culture sont désormais protégés par les insurgés [136].
Le « surge » a cependant permis d’améliorer les routes ainsi que la sécurité des transports, ce qui a eu pour effet de redonner un certain souffle aux activité économiques et marchés locaux [137]. A Marja, le « surge » avait aussi permis l’embauche de 1400 villageois chargés par les Marines d’assurer une fonction sécuritaire mais ce fut temporaire et un millier d’hommes sont désormais au chômage : poussés par la pauvreté, ces derniers pourraient se rapprocher de groupes criminels ou talibans [138]. Ce problème s’est trouvé accru par la fermeture de 21 postes avancés et le renvoi par le Ministère de l’Intérieur afghan de la centaine de policiers qui les occupaient [139].
Dans le Helmand, les Talibans ont pu être affaiblis par le « surge » mais ils continuent de contrôler la grande zone désertique de l’ouest et le gouvernement peine à s’affirmer dans certains districts du nord [140]. Dans les faits, si le nombre d’actes de violence a décliné d’un peu plus de 50% de 2011 à 2012 dans les districts de Marja, Garmsir et Sangin; celui-ci était en 2012 dans les provinces du nord à un niveau au moins égal à celui de 2011 [141].
Quand les Talibans s’en prennent aux écolières
Depuis quelques années le nord de l’Afghanistan n’est plus épargné par les attaques talibanes. Les insurgés entendent montrer qu’ils sont partout chez eux et aptes à frapper toutes les cibles qui représentent de près ou de loin l’autorité du gouvernement de Kaboul. Les Talibans ont diversifié leur mode opératoire et n’ont pas hésité à s’en prendre à plusieurs reprises à des enseignants ainsi qu’à des écolières. Ces actes qui ont choqué une partie de la population afghane et ont sérieusement écorné l’image des Talibans ne sont pas marginaux. Le 22 juin 2012, 100 étudiantes de l’école Hazrat Imam Zada Yahya (province de Sar-i-Pul) sont tombées malades suite à un possible empoisonnement et le 23 juin, le même incident frappait 94 élèves féminines de l’école Sorkhak à Sar-i-Pul [142]. Une « substance ou un gaz toxique » a été dispersé dans les salles de classe de cette école et a causé de nombreuses nausées, maux de tête, fièvres, éruptions et vertiges parmi les jeunes filles [143].
Cet incident est le dixième de ce type depuis avril 2012 et des actes similaires se sont produits dans les provinces du Takhar, de Khost, Bamyan, Kaboul et du Nangarhar [144]. Le 17 avril 2012 une douzaine d’étudiantes de l’école Dabiristan de Rustaq (Takhar) sont tombées malades après avoir bu de l’eau mais les analyses menées suite à cet incident ne purent prouver que cette eau avait été empoisonnée [145]. Le 23 mai, 8 jeunes filles du collège Bibi Hajera de Taloqan (Takhar) ainsi que trois de leurs professeurs et un membre du personnel étaient hospitalisés suite à ce qui semblait être un empoisonnement [146]. Quatre jours plus tard ce bilan s’élevait à 40 étudiantes empoisonnées et au cours de la même semaine, entre 74 et 120 fillettes de l’école Aahan Draaw subirent le même sort [147]. Le 2 juin, deux douzaines d’écolières et de collégiennes de l’école Bashir Abad de Taloqan furent à leur tour empoisonnées et hospitalisées [148]. Le jour suivant, dans le district de Farkhar (Takhar), l’intoxication de 65 jeunes filles du collège Nahid Shahid mena à l’arrestation de quatre suspects dont une femme d’origine pakistanaise [149]. Le 5 juin, 60 écolières du district de Rustaq (Takhar) furent également empoisonnées et les forces de sécurité afghanes procédèrent à l’arrestation de 11 suspects dont un chef de groupe en raison de leur possible implication dans cette vague d’attaques sournoises [150].
Une guerre civile imminente ?
La guerre civile est un des scénarios possibles. Il suffit de se souvenir du retrait de l’Armée Rouge en 1989 et de la manière dont les Moudjahidines se sont combattus afin d’entrevoir comment une nouvelle guerre civile pourrait éclater. Celle-ci pourrait dans un premier temps opposer les forces gouvernementales et des milices à des forces talibanes élargies. L’intégration des Talibans au processus politique, loin d’apaiser ce possible conflit, pourrait au contraire l’aggraver en accélérant l’apparition de groupes armés anti-talibans ou opposés au nouveau pouvoir mis en place. Les factions afghanes susceptibles de combattre reposeront sur les lignes de fracture religieuse, ethnique et clanique : ainsi pourront apparaître des factions pachtounes rivales (ce qui est déjà le cas au sein du mouvement taliban ou des milieux pachtounes loyalistes), des factions ouzbèkes, turkmènes, tadjikes et hazaras. Comme par le passé chacun de ces groupes recevra un soutien étranger que ce soit de pays voisins (Pakistan, Iran, Inde, anciennes républiques soviétiques d’Asie Centrale, Chine) ou plus lointains (Qatar, Arabie Saoudite, États Unis, Russie) et ceci contribuera à une intensification ainsi que complexification du conflit : l’Iran pourra soutenir les persanophones comme les Tadjiks ou les Hazaras chiites, le Pakistan continuera de soutenir les Pachtounes, l’Inde se rangera aux côtés des groupes non-pachtounes ou hostiles au Pakistan alors que la Russie, le Tadjikistan, l’Ouzbékistan et le Turkménistan se poseront en protecteurs des Tadjiks, Ouzbeks et Turkmènes. Il ne faut pas oublier que ces lignes de fracture n’ont pas toujours été nettes dans le passé et qu’il pourrait en aller de même à l’avenir : durant les années 90 et plus particulièrement après l’instauration de leur régime, les Talibans n’ont pas été uniquement soutenus par de nombreux Pachtounes mais aussi, pour raisons religieuses, par certains Aymaqs et Tadjiks [151].
Le clivage ethnique et religieux reste cependant un facteur de conflit important et chaque communauté se souvient des atrocités commises à son encontre durant la guerre civile des années 90 ou sous le régime des Talibans. Les Hazaras n’ont pas oublié le massacre des leurs dans le quartier d’Afchar-Mina à Kaboul par les miliciens wahhabites de Sayyaf et celui de 400 de leurs semblables par les Talibans à Yakaolang ainsi que les longues humiliations passées. Les Pachtounes ont encore à l’esprit la manière dont le général ouzbek Abdul Rashid Dostom dynamitait des fagots humains et écrasait avec ses blindés les prisonniers pachtounes dans la forteresse de Shebergan. Le clivage religieux s’est aussi exprimé durant les années 90 par les attaques visant les Hazaras, les combats opposant le Hezb-e Wahdat chiite au Ittihad-e Islami sunnite de Sayyaf ou aux combats opposant divers groupes sunnites entre elles (ex. : Dostom à Hekmatyar, Massoud à Hekmatyar) [152].
En 2007 le contentieux opposant les nomades Kuchis aux Hazaras et portant sur l’utilisation de pâturages (des éléments ethniques et religieux sont aussi à prendre en compte) dégénéra en un conflit armé persistant de nos jours. Le 26 mai 2012 des Kuchis attaquèrent et brûlèrent des maisons et écoles du district de Behsud où les Hazaras sont majoritaires (province du Nangarhar) [153]. Le 3 juin 2000 Kuchis équipés d’armes automatiques et de RPG s’en prirent à la vallée de Kajab (province du Wardak) qui est principalement peuplée de Hazaras [154]. L’armée afghane dut intervenir et ces affrontements causèrent entre 3 et 11 victimes, la destruction d’une mosquée, de 4 magasins et de 19 habitations ainsi que la fuite massive des villageois hazaras [155]. En mai Karzaï avait rencontré des représentants hazaras et à la mi-juin, l’envoyé spécial adjoint de l’ONU Nicholas Haysom rencontrait à son tour le gouverneur du Wardak ainsi que des délégués kuchis et hazaras afin de tenir des pourparlers de paix dans la ville de Maidan Shar [156].
L’histoire de l’Afghanistan a aussi montré qu’il existe de manière profonde un clivage entre un monde rural traditionnel et un monde urbain un peu plus sensible aux influences modernes ou étrangères (mais aussi entre les zones montagnardes tribales des Pachtounes et le pouvoir central de Kaboul). Il faut noter que le sentiment religieux s’est renforcé au sein de la population et est devenu plus fort que par le passé, notamment en milieu urbain et à plus forte raison si on prend comme référence les années 60, 70 et 80 qui virent l’existence d’une certaine classe moyenne éduquée et même d’une élite laïque [157]. Le poids des traditions et du religieux s’est accru en milieu urbain pour des raisons liées à l’évolution générale du contexte politique afghan mais aussi suite à un exode rural important (la population de Kaboul a longtemps été de quelques centaines de milliers d’âmes et les infrastructures de la ville ainsi que la topographie pouvaient accueillir idéalement 1 million d’habitants ; Kaboul compte désormais dans les 5 millions d’habitants).
De nombreux Afghans ne veulent pas revivre les horreurs du passé, notamment la jeunesse éduquée, et beaucoup pensent que l’aggravation de ces divisions pourraient mener au démembrement de leur pays, ce qui serait perçu comme une catastrophe (au cours des siècles récents, aucun empire n’a jamais pu démembrer l’Afghanistan mais il est vrai que l’Empire britannique a pu cependant annexer les territoires tribaux de Peshawar – le Pachtounistan – suite aux traités de Gandamak en 1879 et établir la fameuse « ligne Durand » suite au traité conclu avec le monarque afghan Abd-ur-Rahman en 1893). Face à ces risques de division on peut opposer l’existence d’un fort patriotisme voire nationalisme parmi les Afghans s’exprimant par un respect profond du drapeau, de l’histoire du pays mais aussi par la foi islamique. Le problème ici est plutôt de savoir comment chaque communauté définit elle-même ces éléments, une possible identité afghane et surtout le rôle et poids politiques qu’elle souhaite exercer ou que d’autres groupes voudront bien lui laisser exercer.
Conscients de leur force, du contexte afghan, de la perception de ce conflit en Occident et du retrait imminent des forces de l’ISAF, les Talibans ne sont pas pressés de négocier et ont décidé de mener une guerre d’usure. Celle-ci repose en partie sur l’infiltration des forces de sécurité et des institutions afghanes afin de saboter et décrédibiliser le projet politique porté par Hamid Karzaï et ses alliés étrangers [158]. Après le retrait des troupes de l’ISAF « les Talibans renforceront leur emprise sur le sud du pays et utiliseront les revenus tirés de l’opium afin de financer une potentielle guerre civile contre les villes où le pouvoir du gouvernement vacille » [159]. Le Secrétaire à la Défense Leon Panetta avait récemment affirmé que les attentats et les actes de félonie commis récemment par les Talibans étaient des actes désespérés mais Ismaïl Khan et d’autres anciens chefs de l’Alliance du Nord pensent au contraire que le « surge » initié par Washington n’a pas permis d’améliorer la situation sécuritaire en Afghanistan [160].
Les attaques du 15 avril 2012 à Kaboul imputées à des Talibans soutenus par le réseau Haqqani et visant le parlement, le quartier général de l’ISAF et plusieurs ambassades (notamment celles de Grande Bretagne, Allemagne et Russie) [161], celles de l’automne 2012 contre le quartier diplomatique de Kaboul ou de l’hiver 2012 contre le quartier général de la Police des Frontières à Kaboul (quartiers de Wazir Akbar Khan et Darul-Aman) ne sont pas un baroud d’honneur mais des actes qui, au-delà de leur but symbolique, ont montré la capacité des insurgés à frapper le coeur du pouvoir de manière très organisée et coordonnée. Des attaques furent simultanément lancées par les Talibans dans les provinces du Logar, de la Paktya et de Nangarhar [162]. Le 21 juin ce fut au tour d’un hôtel de Qarga (environs de Kaboul) et de ses clients d’être la cible des insurgés: l’affrontement dura 20 heures et coûta la vie à au moins 22 personnes [163]. La veille une attaque kamikaze contre un convoi de l’ISAF à Khost avait coûté la vie à 25 personnes (dont 3 soldats de l’ISAF) et et en avait blessé 30 [164].
Pour être tout à fait juste et honnête on ne peut pas considérer le « surge » ou les opérations anti-talibanes comme des coups d’épée dans l’eau dans la mesure où l’action militaire de l’ISAF ou de l’ANA a affaibli de manière sérieuse mais non-décisive les insurgés. L’offensive de la mi-mai 2012 visant 300 Talibans dans le Farah permit d’en éliminer 20 (6 soldats périrent) et le 2 juin les troupes de l’ISAF et de l’ANA en éliminèrent 26 autres [165]. Une dizaine de jours plus tard des combats et une frappe aérienne de l’ISAF permirent la suppression de 20 autres insurgés dans le district de Sangin (province du Helmand) [166].
Le 28 juin deux villages du district de Kamdish (Nouristan) furent attaqués par quelques centaines d’insurgés et provoqua l’intervention des forces de sécurité afghanes : un des villages fut entièrement brûlé et l’affrontement coûta la vie à 8 civils, 6 policiers mais aussi 25 Talibans (parmi lesquels quelques ressortissants pakistanais) [167]. Les frappes aériennes menées en août par l’ISAF dans le Kunar ont eu un impact certain sur les forces talibanes locales : le 3 août 18 Talibans étaient neutralisés dans le district de Watapur, le 7 ce fut au tour de 12 autres terroristes (dont la moitié d’origine pakistanaise) dans le district de Marwara puis le 18, à celui de 52 insurgés dans le district de Chapa Dara [168].
Le 28 septembre une opération anti-talibans de 6 jours fut lancée dans le Wardak et permit l’élimination de 30 Talibans, parmi lesquels 5 de leurs commandants [169]. Le 15 octobre une attaque aérienne de l’OTAN tua 17 insurgés (dont 15 étaient vraisemblablement originaires du Pakistan) dans la province de Ghazni [170]. En décembre 2012 le Logar fut le théâtre d’une imposante traque menée par plus de 1000 soldats et débouchant sur l’élimination et la capture de nombreux combattants talibans [171]. Sur le court terme l’importance de ces opérations et leur impact sur la guerrilla talibane ne doivent pas être sous-estimés mais dans le long terme et en prenant en compte le retrait de 2014 ainsi que ses conséquences politiques, on peut clairement douter de leur caractère ou effet décisif.
L’hypothèse d’une guerre civile et le scénario catastrophe qui l’accompagne sont devenus extrêmement plausibles dans la mesure où un rapport militaire confidentiel adressé l’année dernière aux commandants des troupes de l’ISAF a confirmé ces sombres perspectives. Compilant les résultats de 27 000 interrogatoires menés en 2011 sur 4000 prisonniers talibans par des militaires américains sur la base de Bagram, ce document intitulé « State of the Taliban » évoque le fait que des membres des forces de sécurité afghanes ont vendu leurs armes et véhicules aux insurgés, ont échangé des renseignements avec ces derniers et auraient même conclu des accords de cessez-le-feu ponctuels ainsi qu’en prévision de l’après-2014 [172]. Le gouvernement pakistanais et l’ISI seraient toujours autant liés aux Talibans dont ils connaissent le moindre chef et les moindres activités [173].
Le degré d’infiltration des forces de sécurité afghanes est tel que le rapport signale de nombreux cas de « coordination ponctuelle, de partage d’informations ou même occasionnellement d’intégration des forces de sécurité afghanes aux opérations des Talibans » [174]. Les cessez-le-feu informels conclus avec les soldats ou policiers afghans ainsi que les promesses de soutien de long terme faites par ces derniers ont fait que « Les Talibans sont absolument confiants dans leur capacité à vaincre les forces de sécurité afghanes » [175]. La stratégie cruciale, les efforts et les fonds mis en œuvre par l’OTAN en vue de son retrait en 2014 seraient ainsi progressivement sapés: des détenus talibans ont affirmé que des membres de l’ANA et de l’ANP auraient même vendu du matériel militaire provenant de pays occidentaux [176]. Le rapport indique que le bazar de Miranshah (capitale du nord-Waziristan, dans les zones tribales pakistanaises) avait été »inondé de manière croissante par des fusils, pistolets et armes lourdes vendus par les forces de sécurité afghanes »: « Les véhicules et armements étaient à l’origine acquis seulement sur le champ de bataille. Ils sont désormais régulièrement vendus ou donnés par les forces de sécurité afghanes [177].
Enfin, ce document confidentiel a montré que les Talibans sont très confiants. Ces derniers affirment avoir surmonté le « surge » d’Obama, pouvoir défaire les forces de sécurité gouvernementales afghanes après 2014 et considèrent leur retour au pouvoir comme inévitable: « Contrairement aux années précédentes les détenus sont devenus plus confiants non seulement dans leur potentiel, mais aussi dans la justesse de leur cause » [178]. Les Talibans ne croient pas en une issue au conflit qui serait négociée et sont intimement convaincus que Hamid Karzaï ainsi que ses alliés du nord « ont délibérément prolongé le conflit afin de récolter l’aide étrangère et de soumettre les tribus pachtounes du sud » [179].
Les Talibans savent que le temps et le pourrissement du système jouent pour eux. En dépit de leur refus officiel de discuter avec Washington et le gouvernement de Karzaï, certains chefs Talibans ont accepté de rencontrer des officiels américains à Doha (Qatar) à la fin du mois de janvier 2012 et un autre processus de négociations s’est en parallèle tenu en Arabie Saoudite [180]. Les Talibans ont ouvert une représentation à Doha [181] mais sont peu empressés de faire avancer ces négociations avant le retrait total des forces étrangères d’Afghanistan [182]. Les Talibans avaient ainsi déclaré en Janvier 2012 qu’aucun processus de paix ou négociation n’avaient été mis en place, particulièrement avec les États Unis : les représentants des insurgés mirent en revanche l’accent sur l’établissement de mesures de confiance et demandèrent à Washington de relâcher 5 détenus talibans [183]. Ces négociations échouèrent en mars et en novembre les Nations Unies imposèrent des sanctions à l’encontre du réseau Haqqani qui fut aussi inscrit sur une liste noire [184]. Un porte-parole du gouvernement afghan ajouta que le réseau Haqqani ne remplissait pas les conditions ou critères suffisants afin de participer au processus de négociations [185].
La méfiance et le scepticisme quant à ces négociations sont généralisés, plus particulièrement au sein des Tadjiks et Hazaras [186]. Les Hazaras se souviennent encore amèrement du régime taliban et des persécutions qu’ils subirent en raison de leur foi chiite et de leur appartenance ethnique. Les discussions entamées avec les Talibans par Washington et en parallèle par Kaboul ont été âprement critiquées par les Tadjiks, Ouzbeks et Hazaras qui ont décidé de former une sorte de front commun [187]. Moins sceptique ou pessimiste que le leader hazara Mohammed Mohaqiq, le tadjik Ahmad Zia Massoud (dirigeant du Front National Afghan et frère de feu le Commandant Ahmad Shah Massoud) ne croit pas qu’un accord puisse être trouvé avec les Talibans mais pense cependant qu’une plus grande participation doit accompagner les négociations en vue d’une paix [188].
Ces négociations n’ont mené à rien de significatif (si ce n’est l’implication croissante du Qatar et de l’Arabie Saoudite) et à la fin du mois de décembre 2012, le Pakistan relançait son propre processus de négociation en libérant 8 Talibans dont le Mollah Turabi, l’ancien bras droit et ministre de la justice du Mollah Omar (18 autres Talibans avaient été relâché plus tôt au cours du même mois [189]. Au cours d’une rencontre tenue à Islamad en novembre 2012, des officiels afghans et pakistanais ont adopté une nouvelle stratégie visant à ce que « d’anciens officiels talibans libérés avec la stature de Turabi servent d’émissaires, ouvrant la voie à des pourparlers de paix entre le gouvernement de Hamid Karzaï et la direction talibane actuelle » [190]. Ce processus initié par le chef des forces armées pakistanaises Ashfaq Kayani a permis un rapprochement entre les autorités afghanes et pakistanaises mais a aussi fait des émules en Europe: une rencontre semi-secrète organisée par un »think tank” français s’est tenue dans les environs de Paris en décembre 2012 [191]. Cet événement a réuni des représentants du gouvernement afghan et plus particulièrement du Haut Conseil pour la Paix ainsi que des membres de l’opposition, comme les Talibans ou des cadres du Hezb-e Islami mais là encore, aucune avancée n’a été faite [192]. La seule surprise est venue récemment de Gulbuddin Hekmatyar qui, dans une entrevue accordée au Daily Telegraph, a proposé un plan de paix en dix points et appelé tous les acteurs présents ainsi que les Afghans à s’unir et mettre fin à leurs disputes afin de trouver une solution viable au conflit [193].
L’autre élément préoccupant dans la perspective d’une guerre civile imminente est constitué par les milices entretenues par certains officiels et le réarmement de certains seigneurs de guerre : Ismaïl Khan, l’homme fort de Herat, et le Conseil des Moudjahidin local ont soutenu la formation et le réarmement de milices anti-talibanes composées d’anciens moudjahidin chargés de prendre le relais des troupes de l’ISAF après 2014 [194]. Ce fait traduit la difficulté voire l’incapacité des forces afghanes à mener de manière autonome et avec succès leur mission anti-insurrectionnelle. De telles milices villageoises (les « arbaki ») ont une grande utilité tactique voire stratégique mais elles perpétuent aussi la problématique des groupes armés, de leur contrôle et de leur financement. Ces milices d’autodéfense peuvent sécuriser certains villages et certaines zones mais l’absence d’encadrement peut les mener à certaines dérives (trafics, exactions) et leur faire jouer un rôle de facteur aggravant dans la perspective d’une guerre civile imminente. Les efforts qui ont été consacré par l’ISAF et l’État afghan à la récupération d’armes et au désarmement des milices auront été ainsi plus ou moins vains.
Les autorités de Kaboul ont souhaité réaffirmer leur autorité face à l’Émir de l’Ouest qui occupe aussi le poste de Ministre de l’Eau et de l’Energie. L’État afghan est juridiquement le seul habilité à procéder à la vente, à l’achat et à la distribution d’armes ainsi qu’au recrutement de soldats (la création de compagnies privées locales de sécurité est cependant un moyen de contourner ces dispositions légales et de se doter de milices ayant une apparence de légalité): les services de renseignement afghans ont arrêté certains suspects et les autorités de Herat se sont empressées de condamner officiellement les activités du Conseil des Moudjahidin [195]. Ismaïl Khan a ajouté que d’autres seigneurs de guerre étaient en train de procéder au réarmement de leurs milices [196] : au-delà de la lutte contre les Talibans, ces groupes armés joueront aussi un rôle dans la lutte pour le pouvoir et leur apparition traduit l’accroissement des rivalités existant au plus sommet de l’État (l’ancien seigneur de guerre ouzbek et général de l’Alliance du Nord, Abdul Rashid Dostom s’est ainsi fait récemment l’avocat d’une refonte totale du système et l’établissement d’un vrai multipartisme) [197].
L’Émir de Herat a déclaré en novembre 2012 que les moudjahidin devraient recevoir plus de poids et de responsabilités car après avoir sauvé le pays de l’URSS, ils pourraient le sauver à nouveau des « conspirations étrangères » : « Ils [les étrangers] ont récolté toutes nos armes, notre artillerie et nos tanks, et les ont mis au rebut. A la place, ils ont amené des filles néerlandaises, des filles françaises, des filles de Hollande (sic), ils ont amené des soldats occidentaux à la peau blanche, ainsi que des soldats américains à la peau noire, et ils ont pensé qu’en faisant tout cela ils nous amèneraient la sécurité mais ils ont échoué » [198]. La radicalisation ou l’hostilité d’une partie des élites afghanes n’est pas un phénomène nouveau. Avant de tenir ces propos et d’appeler les moudjahidin à expulser par la force les étrangers d’Afghanistan, Ismaïl Khan avait déjà déclaré en 2009 que « Le destin des Américains en Afghanistan sera pire que celui des Russes » [199]. L’homme fort de Herat a souvent affirmé qu’il combattrait à nouveau les Talibans si ces derniers reprenaient le pouvoir mais son propre gendre a rejoint dernièrement les insurgés [200].
Si l’Afghanistan arrive à échapper à une guerre civile généralisée, il n’en restera pas moins affecté par un conflit de moyenne intensité et sera toujours confronté à plusieurs problématiques critiques comme le développement socioéconomique du pays, une corruption endémique, les clivages ethniques et religieux, le besoin d’une indépendance et unité nationales fortes, le poids du passé et l’influence des pays voisins (Iran, Pakistan, Inde, ex-républiques soviétiques d’Asie Centrale, Russie, Chine mais aussi la Turquie, l’Arabie Saoudite, le Qatar et dans une moindre mesure les Émirats Arabes Unis) ou occidentaux. Quelle que soit l’issue du conflit ou du processus de négociations, il semble peu probable qu’un régime totalement semblable à celui mis place en par les Talibans durant la seconde moitié des années 90 soit instauré. Il est tout autant improbable qu’un régime démocratique et libéral de type occidental voit le jour en Afghanistan dans les prochaines décennies. L’implication du Pakistan, de l’Arabie Saoudite et du Qatar en Afghanistan, la situation sécuritaire et politique du pays ainsi que l’intégration progressive de certains groupes talibans au processus de négociations pourrait mener à moyen terme à l’apparition d’une sorte de régime non plus traditionnel ou conservateur mais clairement fondamentaliste. L’Afghanistan ne reviendrait pas nécessairement à sa situation des années 90 (guerre civile généralisée, misère galopante, sous-développement, prohibition de la musique ou du chant, des images, etc.) mais pourrait au contraire conserver un certain niveau d’activité économique et des apparences de « modernité » coexistant avec une société restée traditionnelle et des institutions devenant très conservatrices voire fondamentalistes (pour ne pas dire néo-talibanes).
Dans le meilleur des cas l’Afghanistan pourrait ressembler à l’Iran d’aujourd’hui (si on ne prend pas en compte la distinction chiite-sunnite et leurs différences religieuses) mais il est plus probable qu’il se réfère au modèle pakistanais ou à celui représenté par les monarchies pétrolières du Golfe (la prospérité et la stabilité en moins bien que le pays regorge de ressources). La diversité de l’Islam afghan et l’indépendance du pays est menacée à la fois par les radicaux Déobandis du Pakistan et les Wahhabites du Golfe Arabo-Persique (l’influence iranienne ne s’exerce quant à elle que sur les Hazaras chiites voire les Qyzylbashis dans le domaine religieux, sur les Tadjiks au niveau culturel et sur l’ouest du pays): il est très peu probable que le pays connaisse à nouveau un système et une société semblables à ce qu’il a connu de Zaher Shah à Mohammed Najibullah. Pour l’Afghanistan le sens de l’Histoire semble désormais aller dans la direction empruntée par la Tunisie, l’Égypte ou la Libye après le Printemps Arabe. Ainsi au printemps 2012 des affiches ont fleuri dans différents quartiers de Kaboul (certaines étaient visibles dans les environs de Bagh-e Bala et de l’hôtel Intercontinental) et celles-ci invitaient les Afghans à soutenir la lutte des rebelles syriens (ce qui est assez préoccupant compte tenu du fait que les quelques Afghans combattant en Syrie sont engagés du côté des groupes armés fondamentalistes). Ces affiches ne provenaient pas d’une association démocrate ou d’une ONG défendant les Droits de l’Homme dans la mesure où elles comportaient une forte connotation religieuse. Enfin, à côté du drapeau afghan et de celui des insurgés syriens on pouvait voir ceux de la Turquie, du Qatar, de l’Arabie Saoudite.
Gilles-Emmanuel Jacquet http://fr.novopress.info
À propos de l’auteur
Titulaire d’un Master en Science Politique de l’Université de Genève et d’un Master en Études Européennes de l’Institut Européen de l’Université de Genève, Gilles-Emmanuel Jacquet s’intéresse à l’Histoire et aux Relations Internationales. Ses champs d’intérêt et de spécialisation sont liés aux conflits armés et aux processus de résolution de ces derniers, aux minorités religieuses ou ethnolinguistiques, aux questions de sécurité, de terrorisme et d’extrémisme religieux ou politique. Les zones géographiques concernées par ses recherches sont l’Europe Centrale et Orientale, l’espace post-soviétique ainsi que l’Asie Centrale et le Moyen Orient.
Source : Realpolitik.tv.
Notes
[120] Pour une excellente analyse et mise en perspective de toutes ces problématiques, voir Pierre Micheletti, Afghanistan, Gagner les cœurs et les esprits, Presses Universitaires de Grenoble / RFI, 2011
[121] Pour un témoignage très intéressant sur l’action humanitaire en Afghanistan et les réalités humaines voir Catherine Dufour, Amitiés Afghanes, Fayard, 2011 ; sur les réalités humaines voir Asne Seierstad, Le libraire de Kaboul, JC Lattès, 2002 et Anne Nivat, Les brouillards de la guerre, Dernière mission en Afghanistan, Fayard, 2011
[122] Conflict Barometer 2012, Heidelberg Institute for International Research Conflict (HIIK), 2012, p.103
[123] Ibid.
[124] Ibid.
[125] Ibid.
[126] Ibid.
[127] Alissa J. Rubin, « In Old Taliban Strongholds, Qualms About What Lies Ahead », The New York Times, 08/01/2013
[128] Ibid.
[129] Ibid.
[130] Ibid.
[131] Ibid.
[132] Ibid.
[133] Ibid.
[134] Ibid.
[135] Ibid.
[136] Ibid.
[137] Ibid.
[138] Ibid.
[139] Ibid.
[140] Ibid.
[141] Ibid.
[142] « 94 more Afghan schoolgirls reportedly poisoned in Sar-i-Pul », The Long War Journal, 24/06/2012
[143] Ibid.
[144] Ibid.
[145] Ibid.
[146] Ibid.
[147] Ibid.
[148] Ibid.
[149] Ibid.
[150] Ibid.
[151] Voir Rory Stewart, En Afghanistan, Albin Michel, 2009.
[152] Voir Jean Christophe Notin, La guerre de l’ombre des Français en Afghanistan (1979-2011), Paris : Fayard, 2011, pp 436-448
[153] Conflict Barometer 2012, Heidelberg Institute for International Research Conflict (HIIK), 2012, p.103
[154] Ibid.
[155] Ibid.
[156] Ibid.
[157] Voir l’excellent ouvrage de Michael Barry, Le Royaume de l’Insolence, L’Afghanistan (1504-2001), Flammarion, 2002
[158] Stuart Ramsay, « Afghanistan: Green On Blue Attacks Rising », 08/01/2013
[159] Ibid.
[160] Bill Roggio, « Afghan minister says warlords are rearming militias as NATO forces leave », The Long War Journal, 01/11/2012
[161] Conflict Barometer 2012, Heidelberg Institute for International Research Conflict (HIIK), 2012, p.103
[162] Ibid.
[163] Ibid.
[164] Ibid.
[165] Ibid.
[166] Ibid.
[167] Ibid.
[168] Ibid.
[169] Ibid.
[170] Ibid.
[171] Ibid.
[172] Ben Farmer, « Afghan soldiers ‘co-operating with the Taliban and signing ceasefire deals », The Telegraph, 01/02/2012
[173] Ibid.
[174] Ibid.
[175] Ibid.
[176] Ibid.
[177] Ibid.
[178] Ibid.
[179] Ibid.
[180] Nick Paton Walsh, « Afghan officials, Taliban may hold talks in Saudi Arabia », CNN, 30/01/2012
[181] Angus McDowall, « Saudi Arabia cautious on possible Afghan talks », Reuters, 31/01/2012
[182] « No truce, says Afghan Taliban » UPI, 30/01/2012
[183] Ben Farmer, « Afghan soldiers ‘co-operating with the Taliban and signing ceasefire deals », The Telegraph, 01/02/2012
[184] Conflict Barometer 2012, Heidelberg Institute for International Research Conflict (HIIK), 2012, p.103
[185] Ibid.
[186] Rob Taylor et Mirwais Harouni, « Afghan Hazara leader skeptical of Taliban peace », Reuters, 30/01/2012
[187] Ibid.
[188] Ibid.
[189] Jim Maceda, « Is peace really in the air in Afghanistan? », NBC News, 02/01/2013
[190] Ibid.
[191] Ibid.
[192] Ibid. et Conflict Barometer 2012, Heidelberg Institute for International Research Conflict (HIIK), 2012, p.103
[193] Jim Maceda, « Is peace really in the air in Afghanistan? », NBC News, 02/01/2013
[194] Sajad, « Ismail Khan distribute illegal weapon in Herat province », Khaama, 08/11/2012
[195] Ibid.
[196] Bill Roggio, « Afghan minister says warlords are rearming militias as NATO forces leave », The Long War Journal, 01/11/2012
[197] Rob Taylor et Mirwaïs Harouni, « Afghan Hazara leader skeptical of Taliban peace », Reuters, 30/01/2012
[198] Bill Roggio, « Afghan minister says warlords are rearming militias as NATO forces leave », The Long War Journal, 01/11/2012
[199] Paul Sperry, « Afghan Allies, Now even top officials in the Kabul government vow to kill Americans », The New York Post, 29/12/2012
[200] Ibid.