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  • Cazeneuve ment sur les chiffres des déboutés du droit d'asile !

  • Épidémie de maisons squattées : et si on supprimait la loi DALO ?

    S'emparer du bien d'autrui, donc le voler, est devenu un droit accordé par l'État.

    Personne n’a oublié Odette, 84 ans, qui, en 2013, après quelques mois d’absence, a trouvé son domicile occupé par des intrus. Personne n’a oublié Maryvonne, 83 ans, dont la maison squattée a fini par lui être rendue dans un état effrayant.

    Début juillet, à La Réunion, c’est la famille Leperlier qui, au terme d’une procédure judiciaire – qui lui coûtera 5.000 euros contre 500 pour les « indélicats » – finira par récupérer son bien que ces derniers, métropolitains et belges, ont transformé en élevage de chiens.

    Il y a quelques jours, un couple et ses enfants, se rendant en vacance dans leur propriété familiale, dans le Calvados, ont été dans l’impossibilité d’entrer dans les lieux pris d’assaut, peu de temps auparavant, par des individus faisant valoir leur « droit opposable » au logement.

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  • Economie : le FN change de discours

    Comme le constate Dominique Albertini dans Libération :

    "Après avoir été taxé de gauchisme par les élus Les Républicains, le FN amende sa ligne pour rassurer les milieux économiques en vue de la présidentielle. [...] Lors d'un récent déplacement en Normandie, Marine Le Pen a rendu hommage aux petits entrepreneurs : «Ils sont héroïques de se battre dans ces conditions», a-elle lancé, prônant un «Etat stratège mais pas intrusif». Elle a ensuite évoqué dans un communiqué la «colère» des Français «contre un impôt déjà trop lourd».

    De leur côté, la plupart des candidats frontistes aux régionales tiennent un discours économique franchement libéral.Lors de son lancement de campagne en Paca, Marion Maréchal-Le Pen a jugé que «la politique doit être la moins contraignante possible pour être efficace». En Bretagne,Gilles Pennelleplace la «baisse des impôts» en tête de ses priorités. Dans les Pays-de-la-Loire, Pascal Gannat dénonce la «spoliation fiscale des entrepreneurs» et appelle à «libérer l'économie de ses pesanteurs». Enfin, les stratèges économiques du FN, déjà à l'œuvre sur le prochain programme présidentiel, envisagent plusieurs inflexions allant dans le même sens. [...]

    «Après les élections départementales, on a été quelques-uns à se demander si notre positionnement n'avait pas limité les reports de voix de l'UMP vers le FN au second tour, témoigne un cadre frontiste. Aujourd'hui, on a sans doute fait le plein des voix à gauche. Il ne serait peut-être pas inutile d'équilibrer un peu notre discours en matière sociétale et économique.» Le FN s'y est d'ailleurs efforcé au printemps en s'engageant dans unmouvement contre le Régime social des indépendants(RSI), en solidarité avec les petits patrons, commerçants et artisans mobilisés.

    «Il faut désamorcer les arguments de nos adversaires qui disent que nous sommes de gauche», reconnaît également Bernard Monot. Cet eurodéputé est, avec Jean-Richard Sulzer, l'un des stratèges économiques du Front national ; il dirige un «comité d'action programmatique» chargé d'élaborer ce volet pour la candidature de Marine Le Pen en 2017. Et ce programme pourrait connaître quelques évolutions par rapport à la dernière édition.«Le paysage a changé depuis 2012 : il n'est plus possible d'augmenter la fiscalité sans décourager les acteurs économiques, explique Jean-Richard Sulzer. Ce ne sera pas le grand soir.»

    Concernant les particuliers, le dernier programme présidentiel proposait de renforcer la progressivité de l'impôt sur le revenu, notamment avec la création d'une tranche supérieure à 46 % : «Les classes moyennes paieront moins, mais les foyers aisés paieront davantage», pouvait-on lire. Cinq ans plus tard, «on proposera sans doute la stabilité fiscale, tout en simplifiant le système», poursuit Sulzer. Plus précisément, «on va proposer une grande réforme fiscale qui va énormément réduire le nombre d'impôts en France, et en particulier sur les entreprises, explique Bernard Monot. Il s'agit notamment debaisser le taux de l'impôt sur les sociétés à 25 %[contre 33,33 % aujourd'hui, ndlr]». Certes, cette baisse serait accompagnée d'un élargissement de l'assiette, aboutissant à un niveau de prélèvement quasi stable. Mais le taux pourrait être encore plus bas pour les entreprises investissant en France. Le programme de 2012 prévoyait, lui, un taux maximum de 34 %, dégressif selon la taille des entreprises. [...]

    Autre évolution déjà actée :il ne sera plus question en 2017 de ramener l'âge légal de départ à la retraite à 60 ans, comme c'était le cas en 2012. «Nous n'avons jamais défendu la retraite à 60 ans», a osé Nicolas Bay en mai. Seule la référence à 40 annuités de cotisation pourrait être retenue, et non plus un âge légal. «En interne, il est même question d'une fusion de tous les régimes ainsi que d'une retraite à points», assure un membre du bureau politique.Quant au temps de travail hebdomadaire, si rien n'est encore tranché, une remontée progressive de 35 heures à 39 heures est envisagée. [...]"

    Michel Janva

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • La parole capétienne et la crise de l’agriculture française

    Le chef de la Maison royale de France, Monseigneur le comte de Paris, a très souvent exprimé son soutien aux agriculteurs et aux éleveurs Français face aux lobbys financiers et aux dictats insensés de l’union Européenne. 

    Aujourd’hui à l’heure où une nouvelle fois les éleveurs français tentent de sauver ce qui reste de l’élevage français, nous vous invitons à lire ou à relire deux textes publiés par monseigneur le comte de Paris, dans lesquels le prince exprime sa vision de ce que devrait être la politique agricole française et dans lesquels le prince condamnait déjà ce que les éleveurs et les agriculteurs dénoncent aujourd’hui par leurs actions.

    Preuve une fois de plus que la parole capétienne, indépendante des lobbys financiers et de l’obsession électorale de nos élus, serait encore aujourd’hui et même plus que jamais utile à notre démocratie .

    Cliquez sur les liens ci-dessous pour lire ou relire les textes du prince :

    Monseigneur le comte de Paris : " Il serait peut-être temps d’écouter la sagesse paysanne "

    Réflexions de Mgr. le Comte de Paris sur l’Agriculture

    Merci à La Couronne

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?La-parole-capetienne-et-la-crise

  • Pouvoir et politique d’après Hannah Arendt

    Hannah Arendt appartient au petit nombre de penseurs politiques les plus importants du XXe siècle. Après avoir fait des études philosophiques approfondies en Allemagne auprès de Karl Jaspers et de Martin Heidegger, elle émigre en France en 1933, puis se fixe définitivement aux États-Unis à partir de 1941 où elle enseigne la sociologie dans différentes universités.

    L’originalité d’Hannah Arendt est de mêler dans ses analyses une série de remarques nées de l’observation endurante des phénomènes sociaux, culturels, politiques à une réflexion approfondie des écrits des auteurs qui, au fil des siècles, ont pensé la politique. Ce qui lui permet de fixer précisément les limites chronologiques d’une telle réflexion : « Notre tradition de pensée politique a un commencement bien déterminé dans les doctrines de Platon et d’Aristote. Je crois qu’elle a connu une fin non moins déterminée dans les théories de Karl Marx » (La Crise de la culture, p. 28). La faculté politique autorise l’activité humaine la plus noble, la plus généreuse, la plus proche de son humanité et de son essence d’homme. Apte à la parole et à la vie en commun, l’homme se distingue de l’animal, trouvant sa destination et sa valeur dans la vie publique quand il est en rapport avec d’autres hommes à qui il s’adresse librement et sur un pied d’égalité : « La double définition aristotélicienne de l’homme comme zôon politikon (vivant apte à vivre en cité) et comme zôon logikon (être doué de langage), un être accomplissant sa vocation la plus éminente dans la faculté de la parole et dans la vie de la polis, était destinée à distinguer le Grec du barbare et l’homme libre de l’esclave » (La Crise de la culture, p. 35). La véritable liberté politique ne consiste pas à faire retraite dans la sphère de la vie privée mais à participer à l’action publique, menée avec des égaux et reposant sur des choix individuels.

    ***

    La question du pouvoir se définit à partir d’une série d’oppositions.

    Dans le chapitre « Sur la violence » de Du mensonge à la violence : Essais de politique contemporaine (p. 152-156), Hannah Arendt applique la réduction phénoménologique à l’examen du pouvoir, ce qui l’amène à un travail autant méthodologique que linguistique. Il importe de distinguer le pouvoir, qui permet à l’homme d’exercer une activité efficace dans le monde, de la puissance qui ne concerne qu’une personne unique, de la force qui intéresse une énergie individuelle ou collective, de l’autorité qui investit naturellement celui qui la possède de la capacité reconnue et acceptée d’imposer telle ou telle obligation, de la violence enfin qui ne s’applique qu’à une pratique destinée à soumettre physiquement ses opposants.

    ◊ La puissance

    La puissance est le phénomène le plus évident du pouvoir. Elle dégénère souvent dans une violence qui apparaît dans les moments paroxystiques de la vie politique. Une ère politique nouvelle suppose un mouvement de table rase qui s’accompagne nécessairement de violence car « la violence est le commencement, aucun commencement ne pourrait se passer de violence ni de violation » (Essai sur la révolution, p. 23). Ainsi se comprend la terreur révolutionnaire qui, pour fonder une nouvelle façon de penser et de vivre, une nouvelle organisation de la hiérarchie sociale, n’hésite pas à user de méthodes radicales pour exterminer les réfractaires.

    Or, les révolutions, comme les guerres, correspondent à un moment de trouble et d’indécision où la vie en commun, la vie politique disparaît en tant que telle au profit de la libération de forces bestiales, animales, où les hommes sont gouvernés plus par leurs instincts que par leur raison. La violence, en effet, apparaît quand le pouvoir s’affaiblit et « dans la mesure où la violence joue un rôle dominant dans la guerre et la révolution, l’une comme l’autre agissent,stricto sensu, en dehors du domaine politique » (Essai sur la révolution, p. 12). Celui qui use de la violence dans le but d’imposer son autorité refuse sa condition d’homme comme être de langage : « La violence […] est incapable de parole» (Essai sur la révolution, p. 21).

    Ainsi apparaît la différence essentielle entre pouvoir et violence. Alors que le premier use de persuasion et de sages précautions, « le pouvoir, mais non la violence, est l’élément essentiel de toute forme de gouvernement. La violence est, par nature, instrumentale ; comme tous les instruments, elle doit toujours être dirigée et justifiée par les fins qu’elle entend servir » (Du mensonge à la violence, p. 161).

    ◊ Le pouvoir

    De fait, la marque la plus certaine d’un pouvoir authentique et sûr de lui est la non-violence : « la polis, l’État-cité, se définit de manière explicite comme le mode de vie fondé sur la persuasion exclusivement et non sur la violence » (Essai sur la révolution, p. 11). Le pouvoir est le fonds qui donne leurs assises aux pensées et aux actions humaines. Alors que la violence exhibe son caractère instrumental, le pouvoir transcende les affaires de tous les jours en leur donnant un sens et une mesure : « loin d’être un moyen en vue d’une fin, le pouvoir est en fait la condition même qui peut permettre à un groupe de personnes de penser et d’agir en termes de fins et de moyens » (Du mensonge à la violence, p. 161).

    La polis grecque est le lieu où les égaux confrontent librement leurs opinions et usent d’arguments solidement étayés et présentés à l’aide d’un art rhétorique soigneusement travaillé afin de mieux persuader l’autre. Le pouvoir suppose donc un monde commun où chacun peut recevoir par la parole de l’autre le dévoilement d’une vérité jusqu’alors cachée et peut à son tour agir pour le bien de tous : « La grammaire de l’action — l’action est la seule faculté humaine qui demande une pluralité d’homme — et la syntaxe du pouvoir — le pouvoir est le seul attribut humain qui ne s’applique qu’à l’espace matériel intermédiaire par lequel les hommes sont en rapport les uns avec les autres — se combinent dans l’acte de fondation grâce à la faculté de faire des promesses et de les tenir qui, dans le domaine de la politique, pourrait bien être la plus haute faculté humaine » (Essai sur la révolution, p. 258).

    ◊ Le pouvoir totalitaire

    Selon Hannah Arendt, le système totalitaire combine les caractères suivants :

    • Une idéologie officielle qui coiffe tous les aspects de la vie individuelle et collective, et qui explique l’humanité d’après une trajectoire qui d’un présent rejeté radicalement se dirige vers un état parfait.
    • Un parti unique de masse, dirigé par le seul dictateur.
    • Une terreur, organisée par la police politique, dirigée non seulement contre les opposants, mais contre des portions entières de la population et de la société, et aboutissant à ce que David Rousset a appelé l’univers concentrationnaire.
    • L’atomisation systématique de la société, l’isolement de l’individu. D’une part, on détruit les anciennes structures (famille, églises, corps intermédiaires). D’autre part, on mobilise la population dès l’enfance (jeunesses hitlériennes, komsomols staliniens) au sein du parti et de ses organisations satellites qui quadrillent l’ensemble de la vie sociale et professionnelle.
    • La mainmise sur tous les moyens d’information et de propagande.


    Comme le montre Hannah Arendt dans Eichmamm à Jérusalem (1966), l’homme du totalitarisme n’est pas un monstre. Il est même désespérément banal dans le mesure où il n’est qu’un fonctionnaire méticuleux et consciencieux, un subalterne discipliné. « La terreur, écrit l’auteur par ailleurs, produisit un phénomène étonnant, elle fit que le peuple allemand participa aux crimes des chefs. Ceux qui étaient asservis devinrent des complices… des hommes dont on ne l’eût jamais cru possible, des pères de famille, des citoyens qui exerçaient consciencieusement leur métier, quel qu’il fût, se mirent avec la même conscience à assassiner et à commettre, si l’ordre leur en était donné, d’autres forfaits dans les camps de concentration » (article sur La Culpabilité allemande, 1945). L’homme du totalitarisme, à l’instar d’Eichmann, considère qu’il fait son devoir, et rien de plus. Hannah Arendt maintient qu’Eichmann n’a fait qu’obéir aux ordres donnés par le pouvoir nazi, ce qui marque de suspicion le bien-fondé du procès intenté contre lui par les autorités israéliennes plus de quinze ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale.

    ◊ L’autorité

    Chronologiquement, la violence précède le pouvoir. Le commencement de tout pouvoir politique s’opère, pratiquement toujours, dans le sang. C’est même par la révolution que le commencement a lieu et « les révolutions sont les seuls événements politiques qui nous placent directement, inéluctablement, devant le problème du commencement » (Essai sur la révolution, p. 25).

    Mais, de même qu’à l’origine du pouvoir on trouve la violence, avant l’instauration de l’autorité il y a la liberté : « La liberté en tant que phénomène politique date de l’essor des États-cités grecs. Depuis Hérodote, elle a été conçue en tant qu’organisation politique dans laquelle les citoyens vivaient ensemble en dehors de l’autorité, sans division entre gouvernés et gouvernant » (Essai sur la révolution, p. 39). Or, cette liberté n’a rien à voir avec l’égalité qui n’a pas, avant la Révolution française, accédé à la dignité de valeur suprême : « l’idée même l’égalité telle que nous la comprenons, au sens que toute personne est née égale à toutes les autres du fait même de sa naissance et que l’égalité est un droit de naissance, était totalement inconnue antérieurement à l’époque moderne » (Essai sur la révolution, p. 54).

    L’important, cependant, est que l’autorité transcende tout pouvoir : « la crise de l’autorité dans un gouvernement autoritaire est toujours une force extérieure et supérieure au pouvoir qui est le sien » (La Crise de la culture).Étymologiquement, auctoritas vient de augere, “augmenter”, « et ce que l’autorité ou ceux qui commandent augmentent constamment, c’est la fondation » (La crise de la culture, p. 129). L’autorité n’a donc besoin ni de violence ni de persuasion pour s’imposer: elle tire d’elle-même, c’est-à-dire du passé, sa propre justification. Quand on cesse de respecter l’autorité, c’est qu’on a perdu le lien religieux avec le passé. Un père de famille ou un professeur qui accepte de parler d’égal à égal avec son fils ou son élève renie son autorité de fait en refusant de maintenir intact le lien de supériorité entre le passé et le présent (1).

    ◊ Le primat du politique et de la vie en commun

    Le Mit-sein

    C’est dans les paragraphes 25 à 27 de Être et Temps que Heidegger développe l’analyse du Mit-sein, de l’être-ensemble. Il remarque (§ 25) qu’autrui est un a priori de la condition humaine, une donnée première au même titre que l’espace et le temps par exemple : « le Dasein n’est jamais donné sans les autres » et « les autres sont toujours « là-avec ». Ce qui lui permet d’avancer au § 26 que « l’être-avec est un existential », c’est-à-dire une structure première de l’homme compris comme Dasein, au même titre que le langage ou le souci. Ainsi, « le monde du Dasein est monde-commun (Mitwelt).L’être-au est être-avec (Mitsein) en commun avec d’autres. L’être-en-soi à l’intérieur du monde est coexistence (Mitdasein). Se trouvant d’emblée, dès qu’il est jeté dans le monde, en compagnie d’autres hommes, « le Dasein est essentiellement en lui-même être-avec ».

    Dans l’être-avec, il est offert à l’homme d’avoir un rapport authentique et libre à lui-même. Il éprouve sa propre liberté quand, avec d’autres, il travaille à une tâche qui libère chacun du poids de l’égoïsme et de l’inauthenticité : « l’être-en-compagnie de ceux qui sont employés à la même tâche ne se nourrit souvent que de méfiance. Au contraire l’engagement dans la même tâche se détermine à partir du Dasein qui se prend chaque fois proprement en main. Cette façon d’être authentiquement liés ensemble permet seule un rapport direct à la tâche entreprise, elle met l’autre face à sa liberté pour lui-même » (§ 26). C’est dire que dans l’être-avec authentique, le Dasein est libre. Il fonde son être sur la reconnaissance de la présence d’autres Dasein ; c’est-à-dire des êtres intimement concernés par le problème de l’être. Évoluant dans un monde commun, les hommes s’offrent chacun l’un à l’autre leur liberté.

    C’est sur cette liberté que se fonde l’établissement du pouvoir. Mais depuis les temps chrétiens, tels que le Moyen Âge les a vécus, la vie humaine est devenue la valeur suprême et la vie privée l’emporte sur la vie publique. Or, faire œuvre politique, c’est s’engager dans un espace et dans un temps qui transcendent l’espace et le temps humains : « pour les Grecs et pour les Romains aussi bien, malgré toutes leurs différences, la fondation d’un corps politique était engendrée par le besoin qu’avait l’homme de dépasser la mortalité de la vie humaine et la fugacité des actes humains » (La Crise de la culture, p. 94).

    Le monde est chaque fois renouvelé quand un homme agit librement dans un monde commun: « le courage libère les hommes de leur souci concernant la vie, au bénéfice de la liberté du monde. Le courage est indispensable parce qu’en politique, ce n’est pas la vie mais le monde qui est en jeu » (La Crise de la culture, p. 203). C’est pourquoi vivre en domaine politique revient à dire la vérité : parce que Lessing était un homme intégralement politique, il a soutenu que la vérité ne peut exister que là où elle est humanisée par le parler, là où chacun dit, non pas ce qui lui vient à l’esprit, mais ce qui lui « semble vérité » (Vies politiques, p. 41).

    Ainsi se définit la vérité : « Conceptuellement, nous pouvons appeler la vérité ce que l’on ne peut pas changer ; métaphoriquement, elle est le sol sur lequel nous nous tenons et le ciel qui s’étend au-dessus de nous » (La Crise de la culture, p. 336). Accepter que le pouvoir existe, agir librement pour ou contre lui, c’est donc mettre à jour la vérité.

    ► Gilles Vannier, in : Analyses & Réflexions sur le pouvoir, ouvrage coll., ellipses, 1994.

    Note en sus :

    1) « Affranchi de l’autorité des adultes, l'enfant n'a donc pas été libéré, mais soumis à une autorité bien plus effrayante et vraiment tyrannique : la tyrannie de la majorité. En tout cas, il en résulte que les enfants ont été pour ainsi dire bannis du monde des adultes. Ils sont soit livrés à eux-mêmes, soit livrés à la tyrannie de leur groupe, contre lequel, du fait de sa supériorité numérique, ils ne peuvent se révolter, avec lequel, étant enfants, ils ne peuvent discuter, et duquel ils ne peuvent s'échapper pour aucun autre monde, car le monde des adultes leur est fermé. Les enfants ont tendance à réagir à cette contrainte soit par le conformisme, soit par la délinquance juvénile, et souvent par un mélange des deux », H. Arendt, La Crise de la culture, Gal., 1972.

    http://www.archiveseroe.eu/recent/4

  • Entretien avec Fabrice Robert, fondateur de NOVOpress

    Entretien accordé par Fabrice Robert, fondateur de NOVOpress, au quotidienPrésent.

    1/Depuis quand existe votre site et dans quelles circonstances a-t-il été fondé ?

    Novopress.info a été créé en 2005. Nous allons donc pouvoir fêter cette année les 10 ans du site.
    Les médias « classiques » ont longtemps détenu le monopole de l’information. Grâce au réseau des réseaux, il me paraissait important – à l’époque – de tenter l’expérience d’un nouveau média susceptible de proposer une information alternative en ligne. Et le constat est désormais sans appel. Internet a permis de révolutionner l’accès à l’information tout en permettant une diversification de ses acteurs.
    Pourquoi avoir choisi un tel nom ? « Novo » signifie, en latin, « renouveler » ou encore « refaire ». NOVOpress se donnait alors comme objectif de refaire l’information face à la propagande du système et face à l’« idéologie unique ». On ne parlait pas encore, à l’époque, de réinformation, mais l’approche était – avec du recul – assez similaire. Dans un certain sens, on peut dire que NOVOpress a joué un rôle de précurseur par rapport à qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui, la réinfosphère.

    2/Qu’est-ce qui vous différencie des autres sites de la réacosphère ? D’un site comme F. de Souche par exemple ?

    Je pense, tout d’abord, qu’une certaine complémentarité entre les différentes plateformes ne peut que servir notre combat commun contre l’idéologie unique. Plus l’écosystème réinformationnel se développera sur le Net, plus nos idées se diffuseront.

    NOVOpress se propose d’analyser, avant tout, l’information sous un angle identitaire. Mais nous nous faisons aussi le relais d’initiatives intéressantes qui se développent au sein des milieux patriotes.

    Autre particularité importante de NOVOpress. Servir de caisse de résonance à des actions et projets destinés à sensibiliser l’opinion publique et mettre face à leurs responsabilités un certain nombre d’acteurs en les obligeant à se positionner. C’est ainsi que depuis 10 ans, NOVOpress a souvent servi de base au déclenchement d’actions qui s’appuient sur deux logiques convergentes : l’audience du site sur le web et la présence d’un appareil militant actif. Nous l’avons souvent dit. La rue et les réseaux informatiques sont nos permanences politiques !

    3/Vous vous présentez comme une « agence de presse française indépendante », comment recueillez-vous vos infos ?

    Outre des entretiens et nos propres contenus rédactionnels, NOVOpress met aujourd’hui beaucoup l’accent – à travers son contenu – sur les réseaux sociaux (Twitter, mais aussi Facebook) et certaines plateformes emblématiques du web 2.0 (comme YouTube, Flickr).

    Nous considérons que, chaque jour, des milliers de contenus pertinents sont noyés dans un océan d’information numérique. Des documents plus anciens peuvent aussi être exhumés et constituer des pépites pour nos lecteurs.
    Notre stratégie suit une double logique : nous souhaitons informer, mais aussi enrichir l’internaute. Par ailleurs, nous savons que le flux d’information en continu crée de l’infobésité. En sélectionnant les contenus intéressants et qualifiés – dont certains n’ont jamais été traités par d’autres —, nous voulons recréer de la rareté au sein de l’abondance.

    NOVOpress apparaît comme un « médiagrégateur social », une sorte d’entonnoir informationnel qui se propose de filtrer l’actualité qui compte.

    4/Qui collabore à NOVOpress et quel est votre public ?

    NOVOpress est animé par une petite équipe de rédaction. Mais nous travaillons dans une logique de réseau avec une approche participative. Chacun peut participer au projet en nous transmettant des informations (un tweet, un statut Facebook, une vidéo, une photo, un article de presse, un document d’analyse ou de réflexion, etc.). Nous sommes toujours en quête de nouvelles « têtes chercheuses », de veilleurs et de personnes qui maîtrisent bien les réseaux.
    Quant à notre public, je pense qu’il est tout simplement composé de personnes qui refusent l’idéologie de la pensée unique et du Pasdamalgam.

    5/Les journaux, les médias libres, les blogs politiquement incorrects vont se retrouver dans la ligne de mire avec le projet de loi Taubira et la possibilité de bloquer les sites. Vous qui n’avez pas pour habitude de museler vos paroles, vous sentez-vous menacé ?

    L’Internet reste le dernier espace de liberté face à l’hyper-classe politico-médiatique. Et je pense que nous assistons aujourd’hui à une tentative de reprise en main du Système pour tenter de contrôler les hommes et les idées.
    Finalement, le plus inquiétant demeure l’absence de véritable mobilisation des citoyens français face à la mise en place de lois liberticides. En effet, pour défendre leurs libertés individuelles, pour marquer clairement leur refus d’être espionnés par l’État — grâce à la loi Renseignement —, les Français n’ont pas réellement bougé.

    Alors, oui, la menace existe. Mais j’ose espérer que nous trouverons toujours des solutions technologiques pour contourner la censure.

    6/Vous nous faites l’amitié de publier sur votre site la Une de Présent chaque jour. Croyez-vous encore en la presse papier ?

    Aujourd’hui, il est certain qu’Internet a bouleversé la donne. Mais, dans le même temps, les nouveaux modes d’accès à l’information, qu’il s’agisse d’équipements (smartphone, tablette) ou des réseaux sociaux (Facebook, Twitter) ont augmenté l’appétit du public pour l’actualité. S’ils savent adopter une bonne stratégie, les médias traditionnels ont donc encore un rôle à jouer.

    Propos recueillis par Caroline Parmentier

    http://fr.novopress.info/190888/entretien-fabrice-robert-fondateur-novopress/

  • En Suède, des demandeurs d'asile syriens musulmans font fuir des chrétiens

    Un centre suédois accueillant des demandeurs d'asile majoritairement musulmans est devenu rapidement invivable pour des demandeurs d'asile syriens chrétiens qui venaient d'arriver, au motif que ceux-ci portaient des croix. Ils se sont vus intimer l'ordre de ne pas porter les symboles de leur foi, et interdire les espaces communs lorsque des musulmans les utilisaient. Craignant pour leur sécurité, les chrétiens ont fini par partir. Chassés de leur pays par Daesh, ils sont chassés une deuxième fois, et c'est encore l'islam qui les oblige à fuir.

    Marie Bethanie

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • Septembre 63 av. J.-C. : naissance d’un Titan

    Auguste, le second fondateur de Rome

    Il peut paraître cavalier, de prime abord, d’affubler le premier des empereurs romains du titre de « deuxième fondateur de Rome ». Pourtant, son règne marque un tournant fondamental dans l’histoire de l’Urbs et, plus largement, dans celle de l’Europe. Caius Octavius, qui prendra bientôt le nom de Caius Julius César Octavianus Augustus, vint au monde en Septembre 63 avant notre ère, à Rome dans une famille de noblesse récente, alors que la République romaine se délitait dans des guerres civiles meurtrières. C’est à l’issu de la dernière de ces guerres civiles, qu’il parvint à s’imposer à la tête de l’Etat romain. Sa tâche fut de le réformer dans l’optique de l’adapter à sa vocation impériale. Il inaugure ainsi un régime d’une rare longévité (presque cinq siècles), marquant profondément l’Europe de l’empreinte de l’aigle impérial : le principat. Son règne ouvre enfin une période de prospérité, au cours de laquelle l’empire territorial est pacifié sous l’égide de la pax romana, et la culture romaine atteint un niveau de brillance paroxystique, en unifiant autour d’elle une koiné (1) méditerranéenne unificatrice.

    Genèse d’un destin extraordinaire

    Octave est issu d’une famille d’ homini novi. Son père Caius Octavius a exercé plusieurs magistratures (édilité, préture, proconsulat). Il était un homo novus, un « homme nouveau », originaire de Vellitrae, une ancienne cité du Latium, et issue d’une famille de rang équestre (groupe social enrichi par les activités commerciales et financières, et l’exercice de magistratures municipales). Sa famille n’est donc pas d’un rang social particulièrement élevé. Octave lui-même n’entrera dans la haute nobilitas que par son mariage avec Livie. Son père avait épousé la fille d’un sénateur, Atia, dont la mère, Julia était la sœur de Jules César. Par conséquent, Octave était le petit-neveu de ce dernier. Cette filiation fera sa fortune financière et politique. D’autant plus qu’une fois veuve, sa mère, Atia, se remaria dans la noblesse, en 56 à un consul (Marcius Philippus). Il reçut une éducation aristocratique, commune à tous les rejetons de l’élite de l’Empire (éloquence, philosophie) et était doué de talents oratoires, indispensables à Rome pour espérer s’imposer politiquement. Lettré, à l’image de son ami Mécène, et de son oncle (sa politique de ralliement des écrivains, des poètes, comme Virgile et Horace l’atteste), il rédigea lui-même des poèmes, des pièces de théâtre (sans surestimer lui- même son talent qu’il reconnut bien modeste) et un testament politique, les res gestae.

    Dans la guerre civile opposant César à Pompée (49-46 av. J.-C.), Octave s’illustre en Espagne face au fils de Pompée, et César projette même de lui faire prendre part à la campagne qu’il projette de mener en Orient face aux Parthes. Un an avant son assassinat (qui eut lieu aux ides de Mars 44 av. J.-C.), en septembre 45, César, alors dictateur (2), fit de Caius Octavius son héritier, et l’adopta par testament. A la mort de son oncle, Octave décide, contre l’avis de sa famille, de revendiquer son héritage, et de faire valider l’adoption qui faisait de lui le fils de César (ce qui lui ferait un jour bénéficier des clientèles politiques de ce dernier). Il se heurta à Marc-Antoine, qui s’était imposé à Rome après l’assassinat de César comme son héritier, en obtenant le consulat et en éloignant les assassins de celui-ci avec l’appui de ses vétérans. Marc- Antoine fit trainer la reconnaissance de l’adoption d’Octave, ce qui n’empêcha pas cette reconnaissance de s’officialiser. En effet, en fin politique, Octave tenta d’influer sur l’esprit de l’opinion. Ainsi préside-t-il les jeux funéraires en l’honneur de son oncle.

    A Rome, le parti sénatorial est repris par Cicéron, alors que le consulat de Marc Antoine entre conflit avec l’un des meurtriers de César, Decimus Brutus. Octave lève à titre privé une armée de vétérans, et s’allie à Brutus. S’en suit une guerre civile dite « guerre de Modène » s’achevant en Avril 43 par une victoire sur Marc Antoine. Depuis le 7 janvier de la même année, le sénat avait validé l’initiative d’Octave, lui accordant l’imperium et le droit de prendre la parole au Sénat. Octave marche sur Rome avec ses troupes et se fait élire consul par les comices (19 août 43). Marc-Antoine et Lépide (proconsul de Cisalpine et Narbonnaise) parviennent à s’entendre avec Octave et se partagent l’Empire, afin de poursuivre la lutte contre les assassins de César et d’établir une nouvelle constitution (27 nov. 43), formant ainsi le triumvirat.

    Les triumvirs écrasèrent Brutus et Cassius au cours des deux batailles de Philippes, en Macédoine (oct. 42). Après un nouveau partage, Marc-Antoine était chargé de pacifier l’Orient, et Octave l’Occident, en luttant contre Sextus Pompée. « La paix de Brindes » (oct. 40), renouvelle ce partage et l’alliance des deux hommes est scellée par un mariage dynastique entre Antoine et Octavie, sœur d’Octave. En 37, les pouvoirs des triumvirs sont reconduits pour cinq ans et Sextus Pompée est vaincu à Nauloque (août 37) grâce au talent d’amiral d’Agrippa, ami d’Octave. Lépide, rapidement évincé, Octave devient le seul maître de l’Occident. Il se pose en restaurateur de la paix et de l’ordre, trouvant ainsi un écho chez les populations de l’Italie, extenuées par les guerres civiles, le problème des vétérans et la crise économique.

    En Orient, Marc-Antoine lutte difficilement contre les Parthes, et s’installe en Égypte, où il épouse Cléopâtre à qui il promet la donation d’un empire oriental, attitude qui choque l’opinion romaine. Durant toute l’année 33, Marc-Antoine et Octave polémiquent violemment. En 32, avec l’appui d’une partie du Sénat et des soldats, Octave chasse les consuls, tous deux favorables à Marc-Antoine qui répudie Octavie. La découverte du testament de Marc-Antoine acheva de plonger l’Empire dans la dernière guerre civile.

    Octave, se fit attribuer le titre de dux pour la guerre contre l’Égypte, revêtit le consulat, et fit prêter serment aux alliés, et à tous les citoyens romains d’Italie afin de fonder sa légitimité sur un consensus général. Il triomphe lors de la bataille navale d’Actium le 2 septembre 31, puis entame la lente conquête de l’Orient (jusqu’en août 30) qui s’acheva par le suicide d’Antoine et de Cléopâtre à Alexandrie. A l’été 29, Octave revint à Rome et célébra, les 13, 14 et 15 août, trois triomphes. Dès ce moment, Octave se trouve être le seul maître de Rome et de son empire, et doté d’une puissance de droit et de fait que jamais personne n’avait connue avant lui.

    Refonder la Res Publica : la fondation du régime impérial

    En un peu plus de 40 ans de règne personnel, Octave parvient à réformer de fond en comble toute la structure de l’Etat en respectant les traditions romaines. Une nouvelle Rome est fondée, mais elle reste parée ou, pour ainsi dire, « équipée » des fondamentaux de sa civilisation. L’œuvre politique d’Auguste doit se comprendre à la lumière de ce qu’est l’esprit romain : la combinaison d’un respect scrupuleux du mos maiorum (littéralement, les mœurs des ancêtres) et d’un pragmatisme dans l’action, dont il résulte une fabuleuse capacité d’adaptation. Cette œuvre d’Auguste, c’est avant tout la fondation du régime impérial, le Principat : le règne du Princeps, primus inter pares, ancien titre du doyen du Sénat. La Res Publica est cependant maintenue : dans ce détail réside tout le génie politique augustéen.

    Premièrement, intéressons-nous à la fondation du régime impérial. De 31 à 27, Octave conserve les pouvoirs extraordinaires qui lui avaient été confiés par le Sénat romain au cours de la dernière guerre civile. Il était convaincu, comme beaucoup d’autres personnages politiques romains avant lui, que le monde romain avait besoin d’un monarque et en désirait un. Toutefois, de l’assassinat de Jules César, il vit que les Romains conservaient leur haine tenace de la monarchie. Il décida par conséquent de forger progressivement un nouveau régime conservant l’aspect de la forme républicaine de gouvernement, tout en l’adaptant à sa tâche impériale. Il bénéficie dans sa mission du soutien de l’armée, mais aussi de citoyens de différents milieux, sénateurs ou chevaliers. Sa stratégie est la suivante : conserver un pouvoir quasi-absolu, tout en fondant celui-ci sur le cumul de plusieurs magistratures civiles héritées de la République.

    Depuis 31 av. J-C, il était titulaire du consulat, depuis 43 av. J-C, il détenait l’imperium, et, depuis 30 av. J-C, la puissance tribunicienne (3). Ainsi, au cours d’une séance au Sénat (en janvier 27 av. J-C), restaure-t-il la res publica, qu’il rend symboliquement au Sénat et au peuple. Dans les faits, il se produit un partage : le Sénat conservait l’administration de quelques provinces sans légions et confiait à Octave, qui recevra peu après le titre d’Auguste, les provinces frontalières, et donc le commandement de l’armée. Le titre d’Augustus soulignait l’aspect sacré et divin de sa personne, et conférait de l’auctoritas à ses décisions. En 23 av. J- C, il abandonne le consulat, mais reçoit la puissance tribunicienne à vie. Cette puissance tribunitienne constitue la base de son pouvoir (sa personne étant sacrosainte, intouchable). De même il se voit confirmé son imperium. Enfin, il est régulièrement élu grand pontife (pontifex maximus), gardien de la religion traditionnelle, et reçoit, en 2 avant J.-C., le titre de Père de la patrie (pater patriae), l’ensemble du peuple romain devenant par là même son protégé, son client. Son pouvoir repose donc ainsi sur l’armée, son imperium, et sur le cumul de plusieurs pouvoirs civils. D’autre part, la puissance des tribuns lui conférait le pouvoir de s’opposer à l’action de tout autre magistrat. Enfin, son pouvoir était renforcé par le fait qu’il détenait entre ses mains la direction de la religion de l’État par le grand pontificat. Il se voyait également confié des « missions » par le Sénat et le peuple (cura morum, cura annonae). L’ensemble de ses pouvoirs, missions, et magistratures le mettait dans une position hors de pair. Il disposait dans le même temps de nombreux pouvoirs d’exceptions. Il reçut par exemple, du peuple ou du Sénat plusieurs autorisations exceptionnelles : il put ainsi intervenir dans l’élection des magistrats (droit de recommandatio), faire entrer au Sénat qui il voulait (adlectio), diriger la diplomatie et la politique extérieure. Il disposait, enfin, d’importants moyens financiers, grâce à sa fortune personnelle, héritée en partie de César, aux revenus de l’Égypte (devenue son domaine privé, du fait de son importance dans le ravitaillement en blé de Rome, afin de ne pas la laisser tomber entre les mains d’un rival), et à certains impôts alimentant les caisses impériales.

    Il devint donc le princeps, le premier de ses pairs, le prince. Son régime garda devant l’histoire le nom de principat. Comme nous l’avions suggéré plus haut, son pouvoir vient enfin des circonstances politiques. Vainqueur de la guerre civile, il ne se contente pas de rester le chef des seuls populares et abolit les différentes factions. Il cherche à rassembler toutes les composantes de la société autour de sa personne. Pour y parvenir, il s’appuie sur l’iconographie et la littérature (les écrits de Virgile, d’Horace) : les lettres et les arts sont mis au service de son projet, de sa représentation politique, alors que le culte impérial commence à se diffuser. Auguste est le fils de divus caesar (le divin César), et fait honorer son Génie (sorte d’ange gardien) ainsi que son Numen (volonté agissante), voire sa propre personne, associée ou non à la déesse Rome.

    Ce régime souffrait néanmoins d’une faiblesse : le princeps, étant en théorie un magistrat investi par le peuple et le Sénat, impossible pour lui de transmettre son pouvoir à un héritier naturel. Par conséquent, Auguste dut déployer nombre d’astuces et de précautions pour désigner officiellement son successeur, choisi dans sa propre famille, en recourant à l’investiture sénatoriale. La perte de tous ses héritiers directs le poussa à associer à son pouvoir Tibère, son beau-fils, qui lui succéda sans difficulté.

    Une politique de refondation et de grandeur

    Intéressons nous à présent à la politique de grandeur concomitante à la fondation du régime impérial. Nous l’avons vu, celle-ci répondait à la plus stricte nécessité. A Rome, l’empire territorial avait précédé l’Empire politique. La forme républicaine de gouvernement ne parvenait pas à remplir sa mission impériale Les conquêtes républicaines et les guerres civiles du Ier siècle av. J.-C., avaient provoqué dans le monde romain un important besoin de réorganisation. Auguste eut à subir les répercussions des guerres civiles : opposition sénatoriale, émeutes populaires, conjurations « républicaines ». Il sut malgré tout agir avec prudence, alternant sévérité et clémence. En outre, il eut la chance de vivre longtemps, malgré une santé fragile. Il put de même s’appuyer sur son entourage : Agrippa pour les questions militaires et matérielles (routes, recensements, cadastre), Mécène pour les affaires intérieures (ralliement des intellectuels). Il sut enfin rassembler autour de lui un personnel fidèle et dévoué d’hommes nouveaux, chevaliers, militaires, notables des villes italiennes, et sénateurs. Il assura au peuple de Rome un ravitaillement ponctuel à travers le système de l’annone, consistant en des distributions gratuites de blé. Il mena en général une politique conservatrice, favorable à l’ordre moral et à la famille (lois contre le célibat et les mauvaises mœurs) et fonda des colonies (en Narbonnaise, en Espagne, en Asie Mineure).

    Il réorganisa les classes supérieures de la société afin de les soumettre au service de l’État. Il chercha à contrôler le dynamique ordre équestre qui devint le vivier de l’administration. L’administration provinciale est elle aussi réorganisée. À Rome, l’administration centrale fut, dans ses hauts postes, recrutée parmi les sénateurs et les chevaliers, et, dans les postes inférieurs, des affranchis du prince, voire de ses esclaves, la familia du princeps se confondant avec l’administration de l’État. Dans l’ensemble, en dépit d’abus difficilement évitables, les provinces du monde romain furent impérialement administrées et non plus exploitées (4). Les provinciaux développèrent en conséquence une reconnaissance sincère pour le régime impérial. Ces réformes, à quoi il faut ajouter l’entretien de l’armée et des 200 000 plébéiens de la capitale coûtaient cher : Si, au début de son règne, l’empereur n’eut pas de difficultés financières majeures, il dut faire face au cours des dernières années à une sévère déflation, car il avait énormément dépensé, construit et distribué.

    La politique extérieure fut elle aussi motivée par la recherche et le maintien de la grandeur de Rome. Sous Auguste, l’Espagne du Nord-Ouest est pacifiée. Il obtint des Parthes la restitution des aigles perdus par Crassus. L’Asie Mineure, la Galatie et la Judée, furent annexées et les autres États tampons protégeant la frontière de l’Euphrate furent maintenus. L’armée atteignit le cours du Danube et l’on créa les provinces de Mésie, de Pannonie, et, dans Les Alpes furent conquises par Tibère et Drusus, ainsi que le Norique, la Rétie et les Alpes maritime. Auguste lutta aussi contre les Germains. Dans ces guerres s’illustrèrent encore Drusus et Tibère, puis Germanicus, cependant, après de multiples campagnes qui conduisirent l’armée jusqu’à l’Elbe, le soulèvement d’Arminius aboutit, à l’une des seules tâches du règne, en 9 après J.-C., au désastre de Teutobourg au cours duquel Varus, perdit trois légions.

    Le « siècle d’Auguste » (R. Etienne)

    Si elle fut servie par une propagande bien maîtrisée, la postérité de l’œuvre politique de paix et de restauration d’Auguste fut importante. A tel point que son long règne fut assimilé par ses contemporains à un « siècle ». Il rendit vie aux rites traditionnels, parfois négligés voir bafoués à la fin de la République, et plaça l’État sous la protection d’Apollon, de Mars et de la Triade capitoline. Il favorisa de même la vie intellectuelle afin d’assurer des échos positifs à ses actes mais aussi pour s’attirer le soutien de l’élite cultivée, ainsi que, on l’oublierait un peu trop vite, par goût, étant lui-même lettré. Il put profiter dans ce domaine des efforts du siècle précédent, du goût des aristocrates pour les plaisirs de l’esprit et de la richesse en talent de la génération d’écrivains latins officiant sous son règne, ces derniers figurant parmi les plus grands auteurs romains. Virgile et Horace (ainsi que Tibulle et Properce) avaient commencé à écrire avant son triomphe, et se mirent au service du prestige de l’empereur dans leurs écrits (Énéide, liant Auguste à la descendance d’Enée, et, partant des fondateurs de Rome, ainsi que des dieux Mars et Vénus, Art poétique). Tite-Live fut quant à lui l’historien de la grandeur romaine et justifia dans sa longue histoire (Ab Urbe condita) la conquête du monde par les romains. Ovide, poète expert en science religieuse, paya quant à lui de son exil ses rapports avec des milieux d’opposants et aussi le fait de n’être pas dans la ligne voulue par Auguste vieillissant que choquaient ses poèmes érotiques (Ars amatoria, ou « l’art d’aimer »). L’art augustéen réalise pour la première fois la synthèse de la gravité romaine et des techniques grecques, alors qu’une inspiration officielle assure l’unité de la production, le tout donnant une architecture, riche, soignée et composite.

    Puisqu’il faut bien conclure

    Auguste put grâce à sa longévité mettre en place patiemment de nouvelles structures politiques, rendues nécessaires par la place impériale que s’était arrogée Rome. Son œuvre politique s’accompagne d’une impulsion culturelle sans précédent, suite à laquelle le passé et le présent firent l’objet d’une relecture globale, justifiant le pouvoir du prince, et l’existence de l’Empire, fédérant l’ensemble du bassin méditerranéen. Il fut pourtant un homme souffreteux avec de nombreux soucis de santé. L’idéalisation des portraits physiques, inspirée par l’art grec, ne doit pas en cela nous tromper. Si la statuaire fige Auguste dans une éternelle santé conquérante (la statue de Prima Porta en est l’exemple parfait), il fut plutôt une personne réservée, remarquable par sa maîtrise de soi, de ses émotions, austère, vu par ses contemporains comme un héros stoïcien, affrontant ses faiblesses, luttant contre elles au quotidien et les transcendant par son œuvre politique titanesque. D’un simple chef de faction, il parvint à devenir un Dieu vivant, un souverain à l’autorité incontestée, « forte, mais paternelle et philanthropique » (Claude Nicolet). Le principat est aujourd’hui désigné par le terme d’« Empire ». Ce nouveau régime est malgré tout difficile à définir, puisque personne sous Auguste n’a mis de nom sur lui (La Res Publica demeure donc, au moins sur le papier). Auguste inaugure un mode de gouvernement pragmatique, constitué dans la pratique quotidienne. Comme nous l’évoquions dans l’introduction, l’opération est très « romaine » : rien n’est détruit, l’ancien est conservé, du nouveau est ajouté, les solutions, si elles s’avèrent fonctionner, sont adoptées et conservées. Le principat se maintiendra jusqu’en 284 (5), l’Empire jusqu’en 476, preuve de la solidité des fondations d’Auguste. Le titre d’Augustus, qu’il fut le premier à se faire octroyer, fut porté par tous ses successeurs, ainsi que le nom de César, qui était le sien, et qu’on retrouve encore dans le kaiser allemand ou le czar russe. L’œuvre historique de cet empereur dépasse largement le cadre purement romain. Par l’unité qu’il sut renforcer dans l’Empire, il peut être considéré comme l’un des pères d’une certaine Europe, dont le souvenir a traversé les siècles, au point que les « barbares » ayant mis à bas l’Empire d’Occident au Ve siècle après J-C, n’ont cherché qu’à en imiter le modèle, à tenter de le refonder. Telle fut l’ambition de Charlemagne, roi des Francs, couronné empereur en l’an 800. C’était presque huit siècles après que ce soit éteint, à Nola, le 14 Août 14 ap. J.-C., le premier des empereurs de Rome, désormais vénéré à l’égal des dieux (6).

    Notes

    1. Une Koiné (terme grec) désigne une communauté de culture.

    2. Dans le système politique de la République romaine, la dictature était une magistrature d’exception, confiée en cas de grave crise politique, ou de péril extérieur immédiat, à un individu considéré comme ayant les qualités nécessaires à la gestion de la crise. Elle lui donnait les pleins pouvoirs pour dix ans.

    3. La République romaine était gouvernée par des magistrats d’inégales importances, n’ayant pas tous les mêmes pouvoirs. On distinguait les magistratures inférieures (détentrices de la potestas, c’est-à-dire d’une simple « compétence » ou « puissance » sur un domaine précis, comme l’édilité ou la questure) des magistratures supérieures (détentrices de l’imperium, pouvoir de souveraineté dont l’origine est divine, telle le consulat). La puissance tribunicienne, ou tribunitia potestas, attribuée aux tribuns de la plèbe rendait la personne de ces derniers sacrosaintes, autrement dit, intouchable. A noter que les magistratures étaient collégiales, et limitées dans le temps. Les sénateurs quant à eux, anciens magistrats, siégeaient à vie.

    4. La période républicaine connut à maintes reprises le pillage des provinces de l’empire par les gouverneurs, profitant de leurs missions (provinciae) pour s’enrichir afin de payer leurs campagnes électorales pour les postes qu’ils briguaient à Rome, ou pour gonfler leurs fortunes personnelles (Cf. Le procès Verrès, dont l’accusateur était Cicéron).

    5. Suite à une crise politique majeure, la « Crise du IIIe siècle », marquée par des usurpations, des guerres civiles et une forte instabilité politique, le Principat fut remplacé par le Dominat avec l’avènement de Dioclétien (284- 305), dans lequel l’Empereur n’est plus le princeps, mais le dominus (le maître).

    6. Pour prendre la véritable mesure de l’œuvre accomplie par Octave Auguste, nous renvoyons le lecteur aux références suivantes :
    – ETIENNE Robert, Le siècle d’Auguste.
    – JERPHAGNON Lucien, Histoire de la Rome Antique. Les Armes et les mots.
    – BORDET Marcel, Précis d’histoire romaine.
    – NICOLET Claude, « AUGUSTE CAÏUS JULIUS CAESAR OCTAVIANUS AUGUSTUS ou OCTAVE (~63-14) » dans Encyclopedia Universalis.
    – LE BOHEC Yann, PETIT Paul, « Rome et Empire romain – Le Haut Empire », idem.

    Charles Mallet,

    pour la Dissidence Française