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culture et histoire - Page 1691

  • Dix thèses sur la fabrication capitaliste de la soumission politique, l’émancipation humaine, l’économie de la crise spectaculaire et la crise de l’économie spectaculaire…

    « L’argent est la puissance aliénée de l’Humanité. »

    Marx, Manuscrits de 1844

    « Une formation sociale ne disparaît jamais avant que soient développées toutes les forces productives qu’elle est assez large pour contenir, jamais des rapports de production nouveaux et supérieurs ne s’y substituent avant que les conditions d’existence matérielles de ces rapports soient écloses dans le sein même de la vieille société. C’est pourquoi l’humanité ne se pose jamais que des problèmes qu’elle peut résoudre, car, à y regarder de plus près, il se trouvera toujours, que le problème lui-même ne surgit que là où les conditions matérielles pour le résoudre existent déjà ou du moins sont en voie de devenir. »

    Marx, Préface à la Critique de l’économie politique

    I

    Le présent positionnement critique tel qu’il est ici exposé ne constitue qu’une brève synthèse de ce que la théorie radicale a su développer au fil du temps depuis que les fractions les plus maximalistes issues de la Ire Internationale, entreprirent, d’une part, de formaliser le mouvement révolutionnaire d’aspiration vers la communauté humaine de l’Être, débarrassée du salariat et de l’État et, d’autre part, de dénoncer toutes les gauches et extrêmes gauches du Capital qui, en tant que stade suprême du fétichisme de la marchandise, n’eurent jamais d’autre fonction que celle d’élaborer les laboratoires de recherche et de modernisation les plus pernicieux pour le triomphe moderniste de la liberté despotique de la tyrannie de l’argent. Ce texte n’a donc pas vocation à expliquer la totalité du processus historique qui organise la présente crise du capitalisme mondial. Il vise seulement à souligner les quelques poteaux indicateurs à partir desquels une telle explication doit être envisagée pour qu’à l’inverse de tous les rackets qui, de l’extrême droite à l’extrême gauche du Capital, entendent éterniser la vie fausse du commerce démocratique, de l’achat et de la vente, du paraître et de l’avoir, de l’angoisse, de l’illusion et des mensonges publicitaires de l’économie narcissique de la marchandise, puisse enfin émerger un questionnement ontologique véritable susceptible de désigner le chemin de l’auto-émancipation humaine véridique pour la re-naissance accomplie d’une communauté de l’authentique satisfaction de l’épanouir.

    II

    Si la crise actuelle du mode de production capitaliste est globale puisqu’elle traverse partout l’ensemble des sphères constitutives, matérielles, biologiques et symboliques de son déploiement aliénatoire, ce qui détermine à l’origine la dés-articulation historique de la production de toutes ses activités, c’est la dés-articulation de son activité historique de production elle-même. L’univers du mouvement indépendant des machineries du profit quand il atteint l’apogée de son spectacle mondial accessible est par le fait arrivé au périgée de la mondialisation de son spectacle atteignable. Du coup, la puissance cumulative du faux scientifique unanimement propagée commence à cesser de pouvoir entraîner cette dénaturation et ce maquillage de la vie humaine qui lui est tant nécessaire. Alors, on entre dans ce temps spectaculaire cosmopolite où les aménagements du territoire de la dictature démocratique de l’argent ont, eux-mêmes, inauguré l’entreprise d’achèvement de leur propre route. Conséquemment, l’économie du sur-développement de la mutilation de l’existence y perd cette indispensable capacité d’enchaîner l’humain vivant dans la propagation de l’universalité d’un fétichisme de la marchandise  qui ne  peut  plus  désormais se  développer que comme inapplicabilité historique objective de sa propre praticabilité

    III

    Les fondements de cette crise comme de toutes celles qui la préparèrent en la précédant, doivent être recherchés dans le fonctionnement essentiellement contradictoire du mode d’exploitation capitaliste qui se voit de plus en plus incapable d’assumer le développement de sa logique dans le cadre historique pourtant façonné par la logique de son développement. Le capitalisme pleinement réalisé est la société de la possession entièrement terminée lorsqu’au plus haut point de l’emprise de l’avoir, il ne subsiste plus maintenant que quelques ultimes résistances éparpillées émanant encore de quelques rares domaines de l’être préservé. Mais ces dernières n’en demeurent pas moins les seuls abris de vouloir humainement vivre à partir desquels un recommencement communautaire deviendra vraisemblable quand les hommes décideront de se débarrasser finalement de cette impitoyable césure qui au sortir du néolithique créa les divisions fonctionnelles du travail qui brisèrent la communauté organique première pour la reconvertir graduellement en civilisation de la transaction, du contrat et du change vers cette apothéose de notre temps  qu’exprime si impeccablement la forme-marchandise intégrale du quantitatif sans restriction.

    IV

    Alors que le Capital a fait du temps de travail, la mesure obligée de toute chose et le principe unique de toute richesse, il tend simultanément à réduire au minimum le temps de travail nécessaire à la production de chacune des marchandises qu’il met en mouvement afin d’en réduire le coût pour en vendre ainsi le plus possible.

    Chaque entité capitaliste doit pour se valoriser au maximum, extorquer la plus grande quantité de profit aux prolétaires (la classe universelle des hommes soumis à la dépossession humaine par les commandements de la rentabilité !) lesquels asservis au processus de la réification forment d’ailleurs la seule source effective de valeur par l’écart historiquement incontournable qui doit exister entre le salaire payé à leur force de travail achetée et ce que rapporte cette dernière. Mais pour écouler massivement sa production, toute entreprise du Capital est en permanence contrainte d’accroître sa productivité en vue d’être compétitive au regard de la concurrence nationale et internationale puisque vendre le plus possible, c’est d’abord produire dans le moins de temps possible.

    Dès lors, la part du travail vivant exprimée en main-d’œuvre humaine domestiquée dans la production du système des choses, ne peut que systématiquement diminuer en faveur de celle du travail cristallisé en dynamique machinique qui, lui, s’il permet de produire plus vite ne crée aucune valeur nouvelle car il ne fait – par son usure – que transmettre aux marchandises qu’il élabore la valeur que lui a transféré le travail humain qui l’a préalablement conçu. Il en résulte que le taux de profit ne peut que baisser à mesure que le processus despotique de la technologie arraisonne scientifiquement le corps et l’esprit des humains réifiés par l’accumulation du Capital, étant donné que le profit ne provient que de l’exploitation de la force de travail ouvrière.

    À partir de là, pour compenser la baisse tendancielle de son taux de profit, chaque établissement capitaliste est conduit à devoir augmenter la masse de son profit et il ne peut le faire qu’en essayant d’élargir toujours plus le champ de ses débouchés afin de vendre toujours davantage.

    Le système capitaliste est le devenir de son existence contradictoire. Cela ne l’empêche pas de survivre mais il doit en payer périodiquement le prix dans des crises de sur-production toujours plus gigantesques les unes que les autres. Et il ne disparaîtra que du jour où l’existence de son devenir contradictoire sera devenue impossible.

    V

    Lorsque l’illimité besoin d’expansion fanatique du Capital, sur le fondement de la loi de la baisse tendancielle du taux de profit, rencontre la limite incontournable du marché mondial, bref quand les forces productives des débits de la vente indéfiniment poursuivie sont dans la réelle impossibilité de se trouver une demande solvable en adéquation avec leur sur-développement, la seule solution restante pour relancer la valorisation du capital, c’est la trans-formation graduelle de la guerre économique en guerre tout court dans la perspective d’un mouvement de re-partage militaire des marchés.

    Avec la domination réelle advenue du Capital, le fétichisme de la marchandise cesse de se construire à partir de son antériorité progressivement absorbée et liquidée pour se définir comme autocratie tyrannique et achevée de l’argent en tant que pure universalité moderne enfin débarrassée des obstacles qui faisaient la trame des sociétés de jadis. La production capitaliste est ainsi parvenue à unifier tous les territoires de la vie aliénée laquelle n’est plus bornée par aucune réalité qui ne serait pas duplication du temps-marchandise lui-même.

    La conséquence fondamentale que tous les espaces pré-capitalistes (au sein desquels il était possible au XIXe siècle, tant par l’extension interne que l’impérialisme externe, d’écouler la sur-production industrielle !) ont tous été progressivement intégrés dans le cadre de l’émergence d’un marché planétaire, c’est que depuis 1914, nous sommes entrés dans un nouveau cycle historique qui se caractérise par la triade suivante : CRISE, GUERRE MONDIALE, RECONSTRUCTION…CRISE… alors qu’antérieurement le dérouler fondateur de la production marchande était assis sur la trilogie évolutive : EXPANSION, SURPRODUCTION, COLONISATION… EXPANSION…

    Au concept de crise se rattache donc dialectiquement celui de décadence puisque la première boucherie mondiale marque le moment historique où la contradiction essentielle n’est plus le heurt entre le présent du Capital et les formations sociales historiquement héritées du passé mais l’affrontement entre le présent potentiellement infini des forces productives et le présent irrémédiablement fini du marché mondial que celles-ci ont constitué en liquidant le dit passé à mesure que la baisse du taux de profit ne cessait d’aiguiser explosivement l’opposition valorisation/dé-valorisation.

    Dire qu’il y a décadence du capitalisme depuis 1914 signifie que d’hétéro-destructif, ce dernier est devenu foncièrement auto-destructif à mesure que la modernisation technicienne du travail de la vie fausse a du s’effectuer à proportion des mouvements d’amplification aliénatoire vers l’absolutisme de l’argent  qui voyait la domination encore formelle du Capital sur la société céder la place à la domination réelle de l’échange sur l’ensemble du vivant désormais totalement domestiqué. Désormais, l’antagonisme entre le besoin de débouchés toujours plus vastes et le rétrécissement continu de leur assise ne peut se conclure que par des anéantissements toujours plus massifs de ce que le Capital a précédemment produit.

    Le mode de production capitaliste est une impossibilité en mouvement qui en se réalisant totalement réalise par conséquent la totalité du mouvement de son impossibilité.

    Le carnage impérialiste de la baisse du taux de profit est devenu la vérité organique de la société de l’argent. Une fois que le globe terrestre se trouve entièrement approprié par le Capital, la prise de possession de nouveaux espaces est infaisable autrement que sur le terrain chimérique des crédits toujours plus fallacieux du capital fictif. Dès lors, il ne peut plus être question que de nouvelles redistributions guerrières du même espace par le chemin notamment des manipulations monétaires et terroristes qui tentent ainsi de répondre à ces instants aigus où la capacité de vente du monde mercantile se heurte violemment à son impuissance d’achat.

    VI

    Les dernières années du siècle passé, en terminant la phase de reconstruction qui suivit la seconde guerre mondiale, marquèrent le commencement prononcé d’une saturation tendancielle du marché mondial résultant d’une affirmation soutenue à la très sensible baisse du taux de profit. Les premiers temps du siècle présent sont le prolongement concrétisant du siècle dernier et ils témoigneront comme l’indique significativement la décennie en cours, d’une baisse de plus en plus appuyée du taux de profit en même temps que d’un engorgement systémique du marché international en voie de tangible réalisation.

    La propagation à outrance du crédit depuis la fin du deuxième conflit mondial et son développement forcené depuis des décennies de crise permanente n’ont bien entendu pas permis de pallier les difficultés de vendre une production sans cesse plus démesurée et n’ont donc cessé d’accompagner un mouvement permanent de cette dernière vers le subterfuge sans restriction, la feinte et la fiction irrésistibles.

    C’est dorénavant le règne de la guerre commerciale totale autour des derniers débouchés solvables subsistants qui entraîne de gigantesques restructurations et de massives délocalisations industrielles sous toutes les latitudes en vue de produire au coût le plus bas afin d’exporter et de vendre à tout prix

    Aujourd’hui, dans le monde du falsifié triomphant et de l’inversion généralisée, le krach inévitable du système des fictions faramineuses de l’économie spéculative s’annonce comme de plus en plus proche. Aussi, le gouvernement pentagoniste du spectacle mondial n’a-t-il rien d’autre à offrir à la planète pour échapper à la faillite et tenter de sauver un dollar sur-hypothéqué que le chaos de la guerre sans fin par la mise en scène permanente de coup montés terroristes de vaste ampleur, menés de l’intérieur même des services spéciaux de la provocation étatique.

    Le spectacle de la guerre commerciale et financière s’intensifie et s’il met bien à nu les rivalités réelles entre les économies des États-Unis, du Japon et d’Europe, il se traduit surtout par une gigantesque gestion politique de l’infiltration et de la manipulation qui permet aux réseaux étatiques du terrorisme démocratique de distribuer à chaque coin de rue les propagandes requises pour la préservation de l’intoxication par la loi de la valeur. De cette façon, Washington peut ainsi s’asservir totalement les gouvernements d’Europe et du Japon en les empêchant d’investir les zones arriérées de la Russie et la Chine de manière autonome depuis que la fin de la seconde guerre mondiale a autorisé le complet assujettissement culturel et moral de tous les territoires marchands à l’état-major central des vainqueurs et que l’anachronique capitalisme d’État soviétique a été définitivement absorbé par le modernisme autocratique de la libération de toutes les transactions.

    VII

    Sur la base historique de la tradition primordiale de la conscience radicale des communaux ancestraux réactivée par la rencontre de la décadence romaine et des invasions germaniques, la classe prolétarienne européenne, héritière multi-séculaire de jacqueries paysannes continuelles contre le Diktat de l’acquérir, et dans la continuité de ses grèves sauvages dures contre tous les rackets politiques et syndicaux du camp de concentration salarial de l’anti-vie universalisée, constitue la puissance historique centrale susceptible de balayer l’empire de l’oppression marchande. Assurément, c’est avant tout que le mouvement réel des luttes de classe à partir desquelles l’humain cherche à se sortir de l’arraisonnement du système des objets peut permettre de retrouver le sens du chemin vers le communisme pour balayer tous les mensonges du totalitarisme du règne de la quantité qui, de l’extrême droite à l’extrême gauche du Capital, entend immortaliser l’homme sans autre qualité que celle d’être un patrimoine d’infinie soumission gérable.

    Au siècle dernier, l’anti-fascisme qui sut si bien massacrer les prolétaires barricadiers de la Catalogne insoumise fut la religion totalitaire de l’innovation mercantile qui pour imposer le triomphe de la communauté matérielle et mondialiste de l’argent sans limite dut écraser et diaboliser le fascisme, dernière forme communautaire illusoire qui avait tenté de conjuguer la technologie novatrice du capital et le folklore des cultures de docilité antérieures. Le fascisme (frère ennemi simplement inversé du bolchévisme  sur le même terrain des fables du capitalisme étatique futuriste !) représentait le point ultime de cet aveuglement naïf qui se figure – à partir des méandres sociaux-démocrates de la commercialisation perfectionnée – que le politique peut contrôler l’économie alors que la dictature achevée du profit sur le monde a définitivement prouvé que l’État ne serait dorénavant jamais plus rien d’autre que la concentration politique de la monstruosité marchande la plus achevée.

    Au siècle présent, et après la grande frayeur qu’avait suscité la souche séditieuse des résonnantes gauloiseries réfractaires issues de mai 68, l’antiracisme a dogmatiquement relayé l’anti-fascisme et le sans-papiérisme est devenu la clef magique de toutes les intendances modernistes qui justifient l’idéologie de la disparition programmée des insoumissions véhiculées par ce qui subsiste encore d’esprit communard européen en propageant le culte obligé de l’armée de réserve immigrée et de la discrimination positive afin de légitimer le grand remplacement qui permet de substituer à la vieille insubordination ouvrière d’autrefois les mille formes possibles de l’actuelle religion banlieusarde du fric et du trafic.

    L’immigration en tant que cœur stratégique de l’espace-temps de la chosification devenue effective vient dire qu’en cet instant où de plus en plus d’extra-Européens viennent s’entasser dans des ghettos à la mode américaine du fast-food, de la drogue, du tribalisme et de l’enfermement religieux, la libre circulation généralisée des fournitures humaines telle qu’elle est mise en mouvement par la contradiction valorisation/dé-valorisation est la clef de voûte des combinaisons par lesquelles le Capital entreprend de faire migrer le prolétariat hors des tumultes de sa propre histoire indocile pour le diluer dans la dépossession étendue du melting pot de la marchandise totale.

    La tempête sociale universelle qui vient rappellera que comme le discernaient Hegel et Marx et a contrario des continents immobiles de l’histoire captive où se retrouvent harmoniquement l’histoire arrêtée du totémisme américain et l’atavisme stationnaire du fatalisme afro-oriental, seule l’Europe des insurrections ouvrières radicales a su entrevoir théoriquement et pratiquement la possibilité d’une conscience ouverte pour un temps radicalement et totalement trans-formable jusqu’à cette extrémité impérieusement nécessaire : l’abolition de l’échange, du salariat et de l’État.

    Malgré toutes les irrémédiables pesanteurs rémanentes du torpillage syndical invariablement relayées par ses auxiliaires gauchistes, les grèves commencent à se multiplier et pourraient trouver un vaste écho favorable à mesure que tous les financements de la crise vont déboucher sur une crise de la totalité de la finance elle-même qui aboutira finalement à la paralysie industrielle des reproductions sociales. C’est dans ce contexte que l’on pourra voir surgir des soulèvements prolétariens de plus ou moins grande ampleur suivant le niveau atteint par la crise là où ils auront lieu. Il est effectivement clair que les pays les plus durement touchés par les affrontements de classe, seront ceux-là même qui auront vu se réaliser un très net saut qualitatif dans la décomposition financière de leur commerce et donc consécutivement dans leur essai d’accentuer encore l’exploitation.

    Tant que le Capital est à même de re-produire l’auto-mouvement de sa production qui caractérise naturellement l’auto-production de son mouvement, il est du même coup susceptible de perpétuer les dynamiques qui cadrent l’idéologie du contrôle mental et affectif qu’il exerce sur ceux qu’il extorque et qui ne l’acceptent que pour autant que le procès de la marchandisation puisse trouver la force de poser et d’imposer sa normalisation sociale à l’espace-temps de la domination.

    Le siècle passé a produit des mouvements sociaux de vaste ampleur qui n’ont pu que retomber vu la période qui ne pouvait offrir de perspective de subversion réelle puisque le pouvoir de la vie renversée était alors en train de justement réaliser sa complète réalisation. L’organisation historique de l’imposture omnipotente du spectacle démocratique se communique à un premier niveau par la présence contemporaine d’un nombre croissant d’immigrés qui viennent dire ici que la domination de la marchandise veut faire par déplacement, désintégration et trans-mutation de populations, disparaître l’insubordination anti-marchande du vieux cosmos pagano-christique des liesses communardes d’Europe – lieu prédominant pour une renaissance mondiale du combat maximaliste contre l’accumulation spectaculaire de la passivité moderne -. Mais l’histoire qui organise l’omnipotence de cette imposture à son stade supérieur, ne fait là qu’exécuter la sentence de l’égalisation planétaire rendue partout nécessaire par l’omniprésence d’un déracinement qui place l’homme hors de l’homme en témoignant ainsi que tout ce qui n’est pas le Capital et date d’avant son hégémonie doit finalement disparaître.

    Si ce début de nouveau siècle a vu la radicalité prolétaire paralysée par une économie de l’illusion qui possède toujours les moyens d’éloigner les hommes d’eux-mêmes, se limiter à de très rares espaces touchés par des restructurations encore circonscrites puisque malgré toute leur étendue ces dernières ne se sont développées uniquement qu’en décalage et discontinuité, les années qui viennent vont tendre, en généralisant intensivement les reconfigurations, à rendre de plus en plus possible une massive entrée en lutte de la classe ouvrière mondiale.

    Le syndrome d’un envisageable retour fracassant du mouvement historique vers la Commune comme être générique de l’homme vivant au travers de conseils ouvriers révolutionnaires impulsant l’abolition de la condition prolétarienne, s’étend sur la planète. Ce qui l’avait rendu inéluctable à Barcelone en 1936-37, à Budapest en 1956 ou à Paris en 1968 jusque dans son étroitesse et ses paradoxes, loin de ralentir sa marche la précipite partout au fur et à mesure que toute gestion envisagée de la crise aboutit à la crise de toutes les gestions envisageables.

    VIII

    Lentement mais inexorablement, le vernis du conditionnement civilisationnel se fendille. Universellement quoiqu’à des degrés divers, l’affaissement approfondi de la démocratie dictatoriale du bonheur marchand s’apprête à faire surgir et croître des grèves de masse dont l’issue sera décisive. Soit, nous assisterons alors à l’intensification d’un processus d’auto-dépassement et de trans-croissance de la lutte réformiste en lutte extrémiste qui affirmera définitivement le cours vers la révolution sociale contre l’État et l’argent, soit à l’inverse se mettra en place une dynamique policière de militarisation terroriste qui conduira donc à l’inéluctabilité d’un cours d’embrigadement vers une troisième hécatombe mondiale.

    IX

    Les défaites des insurrections prolétariennes d’autrefois n’ont qu’une seule explication logique possible; l’isolement des divers mouvements sociaux qui ne purent se joindre les uns les autres sur la base d’un véritable prospérer jusqu’au-boutiste. Mais cet abandonnement est en dernière analyse le produit inévitable d’un développement encore incomplet de la contradiction travail immédiat/travail machinique qui en ces temps-là de domination capitaliste non pleinement réalisée, n’a pu que fort insuffisamment se déployer dans le temps et dans l’espace de l’univers spéculatif de l’argent : équivalent général abstrait de toutes les marchandises de la planète-Capital.

    Si l’alternative révolution pour la communauté humaine ou troisième guerre mondiale n’est pour l’instant résolue ni dans un sens ni dans un autre, il convient cependant de bien voir que c’est la première fois dans l’histoire de son histoire que le marché mondial de la mystification spectaculaire tend à faire éclater le mouvement de son mouvement puisque le poids prépotent du travail mort (c’est-à-dire du capital ne s’animant que par l’intermédiaire de la force de travail asservie) en vient dorénavant à rendre caduc le principe même de la loi de la valeur.

    Le prolétariat est la classe du travail parvenu à son ultime achèvement; l’homme-marchandise. Mais il est bien plus que cela, il est aussi et d’abord le point d’extrême réalisation de  la contradiction  historique entre l’humain  et  l’anti-humain. Et c’est seulement  au  seuil  final  de  sa  décadence  que  le  Capital  en  tant qu’il réalise là l’impossible domination de son accomplissement total et se particularise en tant que mode d’organisation paroxystique du mondialisme de la schizophrénie mégapolitaine, peut être dépassé par l’extériorisation révolutionnaire de son anti-thèse : la communauté humaine universelle en  auto-formation consciente d’elle-même.

    X

    La révolution communiste comme négation de toutes les divisions qui produisirent, perpétuèrent et exaspérèrent la perte d’unité du vrai vivre exprime le devenir historique par lequel la conscience humaine devient enfin conscience d’elle-même. Cette révolution n’aura donc pas lieu parce que le reste du prolétariat atteindra un jour le niveau de faculté des minorités subversives présentement existantes, elle sera ce qu’elle doit être parce qu’elle résultera du dépassement positif, par l’ensemble de la classe, de ces positions fragmentaires et qui loin d’être l’axe prééminent du processus de communisation ne représentent qu’une contribution relative au mouvement d’ensemble de l’auto-abolition du prolétariat.

    L’appropriation révolutionnaire de l’être de sa vie générique par l’homme ne peut s’affirmer que du jour où ne peut plus s’affermir l’appropriation de l’humanité par les hiérarchismes et le conditionnement du Capital. En ce sens, si la révolution sociale est auto-conscientisation radicale de l’humain, elle ne l’est qu’en tant que résultat de la sentence que la valeur d’échange édicte contre elle-même quand elle ne peut plus dicter que la fin de son Diktat. Ce ne sont pas les révolutionnaires qui unifieront la classe, c’est la dynamique d’auto-suppression de cette dernière qui unifiera le mouvement épars des révolutionnaires.

    N’ayant ni divinité extérieure, ni maîtrise supérieure, ni parti, ni syndicat, ni aucune nationalité de raison marchande, l’auto-organisation révolutionnaire du prolétariat ne pourra être que son auto-abolition, universelle destruction de l’échange, du salariat et de l’État pour le ré-enracinement cosmique de l’espèce contre toutes les théologies de la monnaie, du travail et du cheffisme. L’humanité ne ré-existera que lorsque son combat pour la vie authentique en aura, une fois pour toutes, terminé avec tous les commandements du dressage politique et de l’enchaînement économique qui sont la négation de l’épanouir en l’essence de toutes les demeures de l’Être.

    Gustave Lefrançais pour L’Internationale, septembre 2013

    http://www.europemaxima.com/

  • Le 12 décembre, Grenelle de la famille à Lyon

    Tract grenelle12def HD

  • Délires christianophobes

    Le Code Da Vinci, de Dan Brown, a fait apparaître en plein jour un phénomène jusque-là limité : l’’existence d’’une littérature ésotérique, prétendument basée sur des faits et des documents historiques, dont le but est de porter atteinte à la foi et aux institutions catholiques. La chose n’est pas neuve mais, ce qui l’’est sans conteste, c’'est l’’extraordinaire prolifération de ce type d’’ouvrages, la publicité favorable qui leur est accordée, et l’’invraisemblable succès, la crédibilité qu’’ils rencontrent auprès d’un public ignorant et déboussolé, prêt à tout admettre, de préférence le pire, s’'agissant d’’une religion et d’’une Église accusées d’’empêcher depuis deux millénaires l’'épanouissement humain.
    Nouvel évangile
    Il fut mené l’’an dernier grand tapage médiatique autour de la publication d’’un texte présenté comme une découverte révolutionnaire susceptible de détruire les fondements du christianisme : l’’évangile de Judas. On omettait seulement de signaler que l’’ouvrage, écrit et commercialisé à Alexandrie au IIe siècle par les milieux gnostiques, n’’avait strictement rien à voir avec les évangiles canoniques, qu’’il ne remettait donc pas en cause ; on ne signalait pas non plus que cet écrit « occulté par l’’Église comme dangereux » faisait l’’objet d’’une réfutation circonstanciée de Saint Irénée dans son Contre les Hérésies, ce qui n’’était pas le meilleur moyen de le dissimuler… Le public, qui ne sut rien de ces mises au point, le battage publicitaire étant toujours à sens unique, en resta à l’’impression première : celle d’’une découverte décisive confortant la thèse du complot clérical cher à Dan Brown.
    Il faut resituer dans ce contexte Un Homme trahi, sous-titré Le Roman de Judas, de Jean-Yves Leloup. De prime abord, il s’’agit d’’une méditation romancée autour de la personnalité et du destin du traître ; d’’autres s’’y sont déjà essayés tant le cas de l’’apôtre perdu a toujours suscité angoisse et pitié. Rien à redire à cela, d’’autant que le Judas qui émerge de ces pages, affligé d’’un physique impossible, haï de sa propre famille, tourmenté, douloureux, en quête de revanche ou de rédemption, ne manque pas d’’intérêt, en dépit de l’’attention démesurée portée à ses supposés penchants zoophiles.
    Reste que ce Judas n’’est pas celui des évangiles mais celui du texte gnostique, et selon lui le seul parmi les apôtres à avoir saisi le sens véritable de la mission du Christ. Dans la même logique, Jésus vit en concubinage avec Marie-Madeleine, sans dédaigner les charmes des autres femmes du groupe et n’’aurait jamais revendiqué le moindre statut divin ni même une mission messianique.
    L’’on trouve de belles pages chez Leloup, voire motif à méditer, mais l’on est très loin du Christ, vrai Dieu et vrai Homme de la Révélation. Combien, cependant, parmi ses lecteurs, préféreront, s’’appuyant sur des apocryphes présentés comme plus crédibles que le Nouveau Testament, adhérer à cette vision moins exigeante de sa vie et de son message ?
    Le treizième homme
    Le leitmotiv, répété ad nauseam, d’’une dénaturation par l’’Église, dès ses commencements, de l’’enseignement de Jésus, puis de la mise sur pied d’un complot perpétué de siècle en siècle afin de protéger ce qui s’’avérait une combine rentable, est en train, pour absurde qu’il soit, de s’’imposer à l’’instar d’une réalité incontestable. Peu importe les faits, et que les escrocs supposés, loin de tirer bénéfice de leur scénario, soient morts dans les pires tourments pour proclamer la véracité de leur message… Dans cette logique du mensonge primordial, Michel Benoît franchit un palier supplémentaire avec Le Secret du treizième apôtre.
    Imaginons, donc, un treizième apôtre, qui ne serait pas Mathias, remplaçant de Judas, mais “le Judéen” jamais nommé dans les textes canoniques, plus aimé du Christ qu'’aucun autre. Un Judéen témoin des derniers instants du Maître, possédant la preuve irréfutable que celui-ci n’’est pas ressuscité. Un Judéen que les autres, à commencer par Pierre, violent agitateur politique, sont prêts à réduire au silence par tous les moyens. Un Judéen qui serait parvenu à laisser la preuve de l’’imposture chrétienne et à la transmettre. Imaginons une Église tremblant d’’être démasquée, défendue par la terrible association “Saint Pie V”, proche de l’’extrême droite, capable de tous les crimes, dirigée par le cardinal Catzinger, crypto-nazi, et soutenue par des terroristes islamistes. Puis un moine, dernier détenteur de cette vérité, les tueurs lâchés à ses trousses……Vous avez envie de rire ? Vous avez tort, car il y a des gens pour croire dur comme fer aux thèses de Michel Benoît, « spécialiste des origines du christianisme qui nous entraîne dans une relecture passionnante des fondements de notre civilisation ». Pauvres de nous……

    Chasse au trésor
    Restons-en aux documents explosifs prétendument cachés par l’’Église dans les “archives secrètes” du Vatican. Sœœur Ottavia, brillante paléographe, y travaille, ce qui lui a fait perdre la foi. On lui demande d’étudier des scarifications cruciformes découvertes sur un cadavre. En fait, le pape veut récupérer les reliques de la vraie croix, toutes volées au cours des derniers mois. La mission de la religieuse, flanquée d’’un garde suisse à la réputation inquiétante et d’’un universitaire copte doté de trop beaux yeux, est de découvrir qui se cache derrière ces disparitions. Voilà le trio, muni de la Divine Comédie de Dante, texte crypté à l’intention de rares initiés, jeté, autour du bassin méditerranéen, sur les traces des gardiens de la croix, obligé de passer par d’’épouvantables épreuves dans l’’espoir d’’atteindre enfin le Paradis perdu.
    Matilde Asensi a réussi, avec Le Dernier Caton, un remarquable roman d’’aventures. Cette chasse aux trésors érudite riche en rebondissements amuse, retient, donne envie d’’en connaître la fin. L’’ennui étant que le livre véhicule, plus habilement que les précédents, les mêmes poncifs : l’’Église dénaturée a démérité, sa morale est périmée, ses dogmes aussi. Il est révélateur que le paradis, souterrain et privé de lumière naturelle, auquel les héros finissent par accéder soit on ne peut plus matériel, axé sur les satisfactions sensuelles et intellectuelles de ceux qui ont survécu aux rites d’’entrée. La croix dont ils sont les gardiens a perdu toute valeur religieuse pour devenir le symbole de leur identité. C’’est en manquant à ses vœœuf et épousant l’’homme dont elle s’’est éprise qu’’Ottavia trouvera le bonheur, jusque-là interdit par une hiérarchie corrompue, cynique et capable de mille turpitudes.
    Là encore, l’’on serait tenté de hausser les épaule et de s’’en tenir à l’’agrément du livre. Là encore, l’’on aurait tort.
    Contre-attaque
    Le plus attristant, pour un croyant, dans cette efflorescence haineuse et stupide de mensonges destinés à nuire, est certainement le sentiment d’’impuissance éprouvé. Que faire face à cette déferlante quand aucun moyen de répondre ne vous est offert, du moins pas dans des proportions permettant de réparer le mal commis ? Ni l’’apologiste ni l’’historien n’’atteignent les chiffres de vente d’’un romancier grand public, surtout si leur propos n’’est pas de ceux que l’’époque a envie de relayer. Faut-il tenter de se battre sur le même terrain, celui de la fiction ? Frédéric Bovis, Jean-François Lopez et Léopold Jorge s’’y sont courageusement essayés dans La Trace, ou le dernier secret de Jean-Paul II.
    Puisque les chasses au trésor intriguent, ils en offrent une, catholique. Emmanuel de Saint-André, archéologue agnostique est contacté par un avocat qui lui remet la clef d’’un coffre suisse. À l’’intérieur, une liasse de documents appartenant à son arrière-grand-père qui conduisent à la cachette du Saint Graal, preuve de la divinité du Christ et de sa résurrection. Une preuve que, depuis deux mille ans, une confrérie démoniaque cherche à détruire afin de conserver son emprise sur le monde, n’’hésitant pas à tuer les détenteurs du secret. Menace réelle, ainsi qu’’Emmanuel ne tarde pas à le découvrir… Traqué par la secte, ne pouvant se fier à personne, le jeune homme décide de récupérer la coupe et de l’’apporter au pape. Mission qui lui coûtera la vie, certes, mais pour mieux la lui rendre.
    Construit sur le schéma qui plaît tant aujourd’’hui, se servant des Templiers et de Rennes-le-château à contre-emploi, La Trace mène une quête chrétienne, fervente, et mérite, serait-ce par le bouche à oreille, l’’audience qui ne lui sera pas accordée autrement.
    Roman catholique
    ŒŒuvre catholique, aussi, même si les apparences lui sont défavorables, La Sixième Lamentation, de l’’Anglais William Broderick, qu’’il faut compter parmi les meilleurs et les plus beaux romans de ces dernières années. 1995 : un homme frappe à la porte d’’un monastère britannique et réclame asile. L’’abbé le lui accorde, à la demande de Rome, non sans hésitation, car il s’’agit d’’un ancien SS, accusé d’’avoir démantelé un réseau de résistance français spécialisé dans l’’aide aux enfants juifs. Un crime que le personnage nie, ce que pourrait corroborer son compagnon de fuite, policier collaborateur, évanoui dans la nature et soupçonné d’’avoir vendu le réseau pour se venger d’’une trahison amoureuse.
    Ancien avocat, le père Anselme est jeune, pénétré des apriori de notre époque. Il soupçonne le Vatican de dissimuler les compromissions de l’’Église avec l’’Allemagne nazie. D’’ailleurs, est-ce que les faux papiers qui permirent aux criminels de s’’enfuir ne leur avaient pas été donnés par un prieur sympathisant d’’AF ?
    Ancré dans ses convictions, soutenu dans ses recherches par la petite-fille d’’une survivante, ignorée, du réseau, Anselme est décidé à faire la vérité. Mais la vérité n’'est pas ce qu'’il croyait ni ce que croit le monde… Les saints et les héros ne sont pas toujours ceux à qui vont les honneurs publics et la reconnaissance de l’’histoire. Dieu seul sonde les cœœufs et les âmes.
    Un écrivain français n’’aurait pu publier ce roman qui remet en cause, avec une lucidité et un courage rares, une certaine vision d’’un passé infiniment plus complexe qu’’on le décrit. Méditation sur la possibilité du pardon chrétien, sur l’’économie du Salut, sur le rôle du mal dans le monde, doublée d’’une intrigue dense multipliant les surprises, La Sixième Lamentation est un livre que vous devez lire, jusqu’’à la dernière ligne. Il ne nous est pas contraire, tant s’’en faut……

    Anne Bernet L’’Action Française 2000 n° 2721 – du 15 mars au 4 avril 2007
    * Jean-Yves Leloup : Un Homme trahi. Albin Michel, 250 p., 17 euros.
    * Michel Benoît : Le Secret du treizième apôtre. Albin Michel, 370 p.,19,50 euros.
    * Matilde Asensi : Le Dernier Caton. Plon, 420 p., 21 euros.
    * Frédéric Bovis, Jean-François Lopez, Léopold Jorge : La Trace. Tolege éditions, 375 p., 22 euros.
    * William Broderick : La Sixième Lamentation. Albin Michel, 400 p., 20,90 euros.

  • Où va le monde ? Et pourquoi le pire n’est pas encore sûr ! par Pierre LE VIGAN

    • Mentionnons la sortie du n° 45 de Réfléchir & Agir, en kiosque ou à s’abonner au C.R.E.A., B.P. 80432, 310004 Toulouse C.E.D.E.X. 6.

     

    • Les Bouquins de Synthèse nationale viennent d’éditer un ouvrage collectif dans une nouvelle collection « Droit de regard. Regards de Droite », L’effondrement du Système avec les contributions de Maurice Bernard, de Pieter Kerstens, d’Éric Miné, de Patrick Parment, d’Arnaud Raffard de Brienne et de Georges Feltin-Tracol, 174 p., 18 € + 3 € de port; à commander à Synthèse nationale, 116, rue de Charenton, 75012 Paris, chèque à l’ordre de Synthèse nationale.

     

    La rédaction d’Europe Maxima

     

    L’une des responsabilités du politique, sinon la première, c’est de ne pas compromettre l’avenir. Cela implique de prendre en compte les risques de catastrophe sociale, écologique et autre. Quatre auteurs répondent ici à ces questions avec des préoccupations proches mais des sensibilités intellectuelles différentes.

    Pour Yves Cochet, dont les idées sont parfois très discutables mais ont le mérite d’exister, par ailleurs le seul politique des quatre auteurs, le culte du retour de la croissance va se fracasser contre le mur du réel. La croissance élevée ne reviendra plus : l’énergie abondante et pas chère c’est fini. De là l’idée que les objecteurs de croissance doivent continuer d’autant plus à développer un autre imaginaire que la croissance, cette religion du toujours plus. Quel imaginaire ? Celui d’une société de sobriété, de partage, de nouvelles autonomies collectives.

    Dès maintenant un grand accident écologique est possible : ce que l’on pourrait nommer un supplément du destin ou une accélération du destin. Loin de tout délectation morbide, il faut penser la catastrophe possible pour pouvoir peut-être l’éviter : c’est le « catastrophisme éclairé » pour lequel plaide Jean-Pierre Dupuy. Se saisir du temps du projet pour agir avant qu’il ne soit trop tard.

    Mais il faut agir sur plusieurs fronts car l’écologie et l’économie font système. Explications. La folie de la finance a mis en péril l’économie réelle, celle qui, avec les P.M.E., crée la richesse réelle et l’emploi. En d’autres termes, la production est attaquée et souvent liquidée par l’économie casino. Ensuit, c’est la société elle-même, avec les États menacés de faillite, qui souffre de la crise de l’économie réelle. En bout de chaîne, c’est la planète dont les ressources et les équilibres sont  détruits par la logique du turbocapitalisme. Une « sortie » de crise possible se profile. Elle n’est pas rose. C’est le replâtrage autoritaire du système, au profit d’une minorité de très riches. Mais ce n’est pas une fatalité. À l’encontre de ce risque de dérive oligarchique et autoritaire, l’objectif rassembleur pourrait être, selon Susan George, de reconstruire une société humaine à partir de l’idée que la terre n’est pas un bien inépuisable. « On ne peut jamais gagner une guerre contre la nature » note Susan George. Nous sommes dans une planète de plus en plus remplie, et avec des terres cultivables qui ne sont pas multipliables à l’infini. D’où la nécessité de faire de l’usage économe et respectueux de la planète notre loi suprême.

    Une planète rétrécie, mais quelles conséquences sur les humains ? Serge Latouche émet l’hypothèse d’une double tendance : d’un côté un mouvement vers l’uniformisation mondiale des usages technologiques – une humanité homogène –, de l’autre une tendance à la constitution, sur la base de la séparation politique, voire de l’apartheid, d’entités collectives de plus en plus réduites, de plus en plus identifiées par des références prémodernes (l’ethnie, la religion, etc). Des micro-États ou de grandes « tribus ». Exemples : les petits pays issus de l’éclatement de l’ex-Yougoslavie, l’Ossétie du Sud, le Sud-Soudan, le Somaliland… Homogénéité du monde ou éclatement ? C’est cette dernière tendance qui est dominante selon Serge Latouche. Mais la fragmentation des États-nations n’est-elle pas le moyen pour les grandes puissances de conforter leurs positions ? D’être plus fort face à des petits encore plus petits et plus isolés ? C’est plus que probable, ce qui n’enlève rien à la réalité d’aspirations à des liens plus locaux, par réaction sans doute aux effets de la mondialisation.

    La deuxième remarque qu fait Serge Latouche concerne l’existence de deux phases dans la crise. Une première phase, de 2007 à 2008, avec la crise des subprimes puis la faillite de Lehman Brothers, a été marquée par l’affichage de velléités de régulation du système financier par les États. « Le marché qui a toujours raison, c’est fini », s’exclamait Sarkozy en septembre 2008. Mais concrètement la seconde phase de la crise n’a pas vu la mise en place d’une régulation nouvelle mais a été marquée par la prise en charge des dettes privées, celles des banques, par les États et donc par les citoyens, avec comme conséquence une transmission des risques de faillite aux États. Premières victimes : les systèmes de protection sociale et les services publics. Et conséquence logique : une politique d’austérité visant à faire payer le coût de la dette aux classes populaires et aux classes moyennes. Le sauvetage des banques a ainsi coûté environ le tiers du P.I.B. mondial, indique Latouche. L’estimation est peut-être surévaluée mais les sommes sont en tout cas de 20 % de la richesse nationale pour le Royaume-Uni, et de 7 % pour la France. Elles sont donc considérables.

    Surtout, la finance continue de représenter des montants de dix à quinze fois supérieurs à l’économie réelle. La déconnexion entre les deux sphères ne pourra être maintenue longtemps. Seul le crédit en flux continu et le mythe d’une croissance perpétuelle l’a rendu possible pendant un temps, et à quel prix ! Mais le modèle de la guerre de tous contre tous a sapé les fondements mêmes de la société.

    La mondialisation n‘a pas été autre chose, explique Latouche, que « l’omnimarchandisation du monde ». Quand ce cycle est accompli, il amène les hommes à réinventer les vertus de l’autonomie locale, de la débrouille, des petits marchés locaux. Une alternative au grand marché mondial ? « À moins de remettre en cause la société de croissance, on n’échappera pas au chaos. C’est effectivement : décroissance ou barbarie », conclut Serge Latouche.

    Pierre Le Vigan http://www.europemaxima.com/

     

    • Yves Cochet, Jean-Pierre Dupuy, Susan George, Serge Latouche, Où va le monde ? 2012 – 2022 : une décennie au devant des catastrophes, Mille et une nuits, 78 p., 3,50 €.

  • Le Mondialisme contre la souveraineté nationale

    Le mondialisme est illusoire au regard des réalités politiques. « Une nation est une âme, un principe spirituel »  - « Qu’est-ce qu’une nation ? » Ernest Renan (1823-1892)
    Polémia publie ici le texte, en format pdf, de la conférence donnée par Michel Leblay à la XXIXe Université annuelle du Club de l’Horloge, les 23-24 novembre 2013, consacrée au « Cosmopolitisme, idéologie dominante mondiale ». En voici, tout d’abord en quelques mots, la présentation : le mondialisme a pour objectif idéologique l’universalité de l’humanité, avec pour moyen la disparition des frontières ;  il tend à détruire la souveraineté des peuples ; dernière mystique du XXe siècle, le mondialisme n’est qu’illusion.
    Polémia
    Le mondialisme, idéologie dont les accents prirent toute leur dimension à la fin du XXe siècle après que chuta de son seul fait le communisme soviétique, vise l’unité de l’humanité par l’abolition des frontières, qu’elles soient physiques ou qu’elles marquent la singularité des cultures et des identités. Il emporte le libre mouvement des biens, des services, des capitaux comme celui des hommes. Ces derniers sont priés de se dépouiller de toutes les attaches qui les enracinent.
    Ce mondialisme est à l’encontre de l’exercice par les peuples de leur souveraineté, des peuples dont les civilisations et les cultures sont irréductibles les unes aux autres sans qu’ils soient pour cela fermés aux échanges et mus par la seule agressivité guerrière.
    En fait, la dispute entre le mondialisme et la souveraineté nationale ne relève pas de l’opposition entre deux conceptions mais de celle entre la chimère et le fait.
    Dans un premier temps, le propos s’attache à présenter à travers quelques références ce que fut, au long de l’histoire du monde occidental, la vision de nature mondialiste, cosmopolite et celle du principe de souveraineté, laissant apparaître leur contradiction.
    Puis, il est montré comment le mondialisme est devenu la dernière mystique d’un XXe siècle aux ruptures multiples.
    Enfin est mis en évidence le caractère illusoire du mondialisme au regard des réalités politiques.
    Michel Leblay, 23/11/2013
    L’intégralité de la communication de Michel Leblay, en PDF : cliquer ICI
    http://www.polemia.com/le-mondialisme-contre-la-souverainete-nationale-2/

  • Comment l’Union Européenne prépare la destruction de notre mémoire au nom du droit à l’oubli

    Communiqué de l’AAF (Association des archivistes français)

    Au nom du droit à l’oubli, quel patri­moine pour l’Europe de demain ?

    Pour éviter que de grands opé­ra­teurs pri­vés du web (Google, Facebook etc.) puis­sent conser­ver et uti­li­ser des don­nées per­son­nel­les, la Commission euro­péenne et le Parlement euro­péen se pré­pa­rent à adop­ter, pour le prin­temps 2013, une solu­tion radi­cale : un règle­ment qui obli­gera tous les orga­nis­mes publics et pri­vés à détruire ou à ano­ny­mi­ser ces don­nées une fois que le trai­te­ment pour lequel elles auront été col­lec­tées sera achevé, ou passé un court délai. La com­mis­sion veut ainsi assu­rer aux Européens un droit à l’oubli qui garan­ti­rait le res­pect de leur vie pri­vée.

    Ce règle­ment por­tera sur les don­nées per­son­nel­les sur tou­tes leurs for­mes, infor­ma­ti­ques ou papier. Il s’appli­quera immé­dia­te­ment et s’impo­sera aux légis­la­tions natio­na­les déjà en place.

    Vous avez fini vos études ? L’école ou l’uni­ver­sité éliminera votre dos­sier. Vous avez vendu un bien immo­bi­lier ? Les ser­vi­ces du cadas­tre détrui­ront les tra­ces de votre pro­priété. Vous n’êtes plus employé par votre entre­prise ? Celle-ci sup­pri­mera les infor­ma­tions vous concer­nant. A cha­cun de veiller sur ses pro­pres don­nées, ne comp­tez plus sur les ser­vi­ces publics ou sur votre employeur ! [...]

    Collecter et conser­ver des don­nées indi­vi­duel­les à des fins patri­mo­nia­les ou juri­di­ques au delà des stricts besoins qui ont pré­sidé à leur créa­tion, assu­rer aux citoyens l’accès à l’infor­ma­tion tout en pro­té­geant les éléments essen­tiels de leur vie pri­vée est l’apa­nage des démo­cra­ties, qui dis­po­sent depuis long­temps de légis­la­tions stric­tes dans ce domaine.
    Il est aber­rant d’impo­ser les mêmes obli­ga­tions dras­ti­ques aux orga­nis­mes à visées com­mer­cia­les qui conser­vent des don­nées per­son­nel­les à seule fin de les mon­nayer, aux orga­ni­sa­tions pri­vées dont la cons­ti­tu­tion d’un patri­moine his­to­ri­que est déjà par­tie inté­grante de leur culture, et aux struc­tu­res en charge de mis­sions de ser­vice public. [...]

    L’opi­nion s’est émue récem­ment du sort des manus­crits de Tombouctou ? De la même façon, elle doit réa­gir à la dis­pa­ri­tion pro­gram­mée de sa pro­pre mémoire, réponse trop rapide des légis­la­teurs euro­péens pour contrer les visées, scan­da­leu­ses, de quel­ques socié­tés.

    Association des archivistes français

    http://histoire.fdesouche.com/1407-avec-le-droit-a-loubli-quelle-memoire-restera-t-il-demain

  • Gauche libérale, la grande amnésie

    Jusqu’au milieu de XIXe siècle, la gauche était presque exclusivement le parti de l’individu, avant que celle-ci ne soit occultée de l’histoire de la gauche par les socialistes.

    Le fait de situer les libéraux à droite du spectre politique est un curieux accident de l’histoire, pour ne pas dire une anomalie

    [...] Pendant cent cinquante ans, les libéraux ont occupé les bancs de la gauche en France. De 1789 à 1930, les libéraux et mouvements affiliés ont majoritairement siégé à gauche. En 1840, les députés libéraux les plus purs occupaient l’extrême gauche de la chambre. Non content de combattre la droite nationaliste, cléricale, corporatiste et protectionniste, ils se démarquaient même d’autres libéraux, plus prêts à des compromissions avec le pouvoir. L’autre gauche, la gauche jacobine, était à cette époque complètement déconsidérée. Le souvenir de ses violences et de ses échecs économiques et financiers était encore vivace. [...]

    Jusqu’au milieu de XIXe siècle, la gauche était presque exclusivement le parti de l’individu, contre la droite, qui était le parti du collectif, de la famille, de la patrie et de la religion. Le revirement de la gauche vers le collectif, à peine perceptible en 1830, s’intensifie en 1848 et ira crescendo jusqu’à la fin du siècle. La présence à gauche de libéraux républicains ou radicaux se maintient toutefois jusqu’au début du XXe. Il est à noter qu’à cette époque, la montée du socialisme fait disparaître les libéraux de la gauche sans pour autant les rejeter à droite. Avec l’avènement du socialisme, ce sont les principes de 89 qui sont oubliés et qui disparaissent, sans être repris par la droite, toujours nationaliste, cléricale et protectionniste.

    La mouvance politique libérale « de droite » n’apparaîtra que bien plus tard, au lendemain de 1945 en réaction à la domination de l’intellectualisme marxiste. Elle restera en France extrêmement minoritaire politiquement, au contraire du libéralisme « de gauche » qui a largement participé au pouvoir pendant tout le XIXe siècle. [...]

    Lire l’intégralité de l’article sur Contrepoints

    NDLR : Avoir à l’esprit en lisant l’article que Contrepoints est un site ultra-libéral.