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géopolitique - Page 613

  • « Aujourd’hui, nous n’avons pas le choix : il faut soutenir Assad »

    Claude Goasguen accuse le socialaud Olivier Dussop : « Vous soutenez l’État islamique en Syrie ! »

    « Le gouvernement ne défend pas les Français, je ne le soutiendrai pas« . Claude Goasguen a été très virulent sur le plateau de Politique Matin, mardi. « Vous soutenez Al Qaeda en Syrie ! » a accusé le député-maire du XVIe arrondissement qui débattait avec le député socialaud Olivier Dussopt. Interloqué, celui-ci s’est interrogé : « Mais vous êtes fou ? Vous êtes fou ? » Avant de retirer son propos à la fin du débat.

    http://www.altermedia.info/france-belgique/

  • L’épouvantail de la « théorie du complot »

    Une véritable campagne d’intimidation se déploie – à coups d’émissions TV, de dossiers de presse, d’accusations infâmantes, de « listes noires »,  d’interdictions de parler etc… – à l’encontre de « complotistes » et de « confusionnistes » où l’on fait figurer, pêle-mêle, des critiques surtout dérangeants des politiques des Etats-Unis, d’Israël, de l’Union Européenne etc… (curieusement, il s’agit toujours de ceux-là !)  et les « populistes » « antisémites » « conspirationnistes délirants » auxquels les précédents sont abusivement amalgamés.

    Les procédés de cette « chasse aux sorcières », couverte par certains intellectuels français, sont de type policier et rappellent les méthodes de l’extrême-droite « organisée », y compris des menaces physiques à l’encontre d’organisateurs de débats « conspirationnistes ».

    Cela frise la terreur intellectuelle, vu que les « accusés » sont quasiment mis en demeure de se taire ou, de facto, réduits au silence par des médias (journalistes) eux-mêmes effrayés d’être vus en sulfureuse compagnie.

    Difficile de savoir « qui tire les ficelles » de ce…complot médiatique auquel prend également part une certaine « gauche » bienpensante. Il faudrait IDENTIFIER les sources, en particulier les soi-disant « antifas » qui se chargent de cette basse besogne.

    A titre d’information, le « journal antiproductiviste » KAIROS publie cette critique cinglante de…

    Le 4 janvier dernier, le New-York Times ouvre un débat dans ses colonnes avec une courte série d’articles sur les théories du complot. Après les attentats parisiens du 7 janvier paraissent également dans les journaux français de nombreux articles sur ce thème – avec des titres explicites trahissant l’objectif poursuivi. On peut lire par exemple : « Les jeunes plus exposés à la théorie du complot », « Comment naissent les théories du complot », «   La théorie du complot, l’arme politique du faible », « Les rouages de la machine complotiste » ou encore « Pourquoi les enfants sont tentés par la théorie du complot ? ».

    Tous ces articles évoquent les théories du complot sans qu’aucun d’eux n’ose préciser ce que ce vocable, hors de toute conviction, de toute réalité et de toute opinion, peut objectivement désigner. A leur lecture, apparaît pourtant le seul dénominateur commun de tous ces points de vue : la perte de confiance d’une partie de la population face à la présentation officielle d’évènements (ou à leurs analyses), c’est-à-dire émanant du pouvoir, grands médias ou institutions politiques. Cette défiance – justifiée  ou non – vis-à-vis des thèses officielles porte de plus en plus de gens à accorder leur confiance à des sources non officielles présentant des versions des faits sensiblement différentes. Dès lors, si l’on imagine que ce phénomène peut se généraliser à une part importante de la société, on comprend mieux l’inquiétude des pouvoirs, et plus généralement de nos élites. Car que resterait-il de notre système si les populations ne croyaient plus ce que leur disent les élites  politiques et médiatiques qui les dirigent ?

    L’objectif de tous ces articles apparaît sans ambiguïté : décrédibiliser toute personne mettant en doute les thèses officielles, c’est-à-dire la vérité telle que la conçoit le pouvoir. A ce titre, toutes les vieilles méthodes sont employées, à commencer par l’emploi de néologismes suggestifs, comme « les conspirationnistes  » évoquant sans détour l’image de gens à moitié fous s’imaginant que des comploteurs masqués se réunissent en secret la nuit dans les caves pour nuire à la communauté tout entière.

    La seconde méthode, qui était fréquemment pratiquée par l’URSS et la Chine de Mao, consiste à disqualifier la parole des gens qui doutent des versions officielles en leur collant sur le dos une pathologie certifiée par des spécialistes. Ainsi, toute parole dissonante ou dissidente sera considérée comme un comportement déviant qu’il faut soigner. Comme le disait très sérieusement une journaliste de France 2 : « il faut repérer et traiter tous ceux qui ne sont pas Charlie  ». Dans la demi-douzaine d’articles du NYT, un supposé spécialiste du phénomène dénonce la nature « paranoïaque » des conspirationnistes, un autre y voit le symptôme d’une anxiété « de masse » (on notera le choix du terme soulignant la nature peu instruite ou éduquée des conspirationnistes qui appartiennent à « la masse  »), un autre encore évoque les croyances populaires aidant le peuple à admettre ce qu’il ne comprend pas.  Le portrait est dressé : celui qui émet un doute sur les thèses présentées par le pouvoir s’appelle un conspirationniste, c’est un malade mental généralement peu instruit appartenant à la masse et sujet à des croyances populaires car il ne comprend pas le monde. Dans les articles français, on trouve l’utilisation de la même méthode, puisque l’on parle de « vulnérabilité »  au conspirationnisme  comme à une maladie, vulnérabilité accrue avec la jeunesse : l’idée est de faire passer la remise en cause des thèses officielles pour de l’adolescence attardée. Les conspirationnistes sont donc des victimes – immatures dans la totalité des cas – et les journalistes se demandent comment leur venir en aide. L’un des articles va d’ailleurs plus loin que la simple référence à l’adolescence puisqu’il parle des enfants tentés par la théorie du complot. Ainsi, si un doute naît dans votre esprit sur ce qui vous est présenté officiellement, cela signifie que vous êtes retombés en enfance. Dans le même esprit, on notera également l’intervention dans les colonnes du NYT d’une professeure de psychologie qui use d’une bienveillance maternelle avec une extrême condescendance jugeant ces théories risibles et inoffensives pour la plupart.

    « Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage  », c’est la troisième méthode destinée à neutraliser toute idée contraire aux thèses officielles. Pour cela, on va associer au conspirationnisme des thèses parfois indéfendables ou saugrenues, ou encore poursuivies par la loi. Ainsi, en lisant les articles cités plus haut, on pensera que les conspirationnistes ne croient pas aux premiers pas sur la lune en 1969, qu’ils sont convaincus que les extra-terrestres ont débarqué sur terre il y a longtemps (mais que les gouvernements nous le cachent), et enfin, que ce sont des négationnistes. Sachez donc que si vous doutez de certaines informations ou analyses exposées dans les grands médias, cela signifie que vous pensez que les extra-terrestres sont parmi nous et que vous niez l’existence des chambres à gaz. Cette méthode est d’une efficacité redoutable puisque, en ces temps terrifiants de procès pour pensée, de dénonciation calomnieuse d’intention ou de non-charlisme, chacun redoute, et c’est bien légitime, d’être soupçonné de la sorte et lynché.

    Le portrait-robot du conspirationniste ayant été tracé, que ce soit sous les traits de la naïve victime de son incompréhension du monde, ou sous ceux du délire paranoïaque du malade mental, il faut aussi en citer des exemples et le situer sur un échiquier politique infréquentable. On lira alors dans Le Figaro : « le conspirationnisme était le propre de l’extrême droite. Depuis les attentats du 11 septembre, on le trouve aussi chez certains courants de la gauche radicale ». Le message est clair : extrême droite et extrême gauche se rejoignent dans la déraison  ; seuls des extrémistes peuvent douter des versions officielles. Quant aux exemples, ils sont explicites : Alain Soral, l’humoriste Dieudonné ou Jean-Marie Le Pen sont cités. Une fois toutes ces précautions prises, on peut alors qualifier certaines analyses de conspirationnistes pour les discréditer. On apprend ainsi, par de supposés experts censés « démonter les mécanismes complotistes », que le conspirationnisme est très répandu en Russie. En effet, toujours dans le même article, d’après « l’expert » interrogé, « les télévisions du Kremlin décrivent (…) les révolutions de couleur comme des complots occidentaux ». Cette fois, si vous pensez que certains renversements de régime ont été organisés ou soutenus par des agences américaines, c’est que vous êtes victime de la propagande du Kremlin passé maître dans l’art du conspirationnisme. Dans Le Monde, on peut lire le même type de discours, tout aussi accusateur quand, à propos de l’assassinat de Boris Nemtsov, le journal écrit : « La théorie du complot prend de l’ampleur à Moscou (…) et le pouvoir russe n’hésite pas à désigner son commanditaire : l’Occident ». L’objectif est ici, à l’aide de disqualification par théorie du complot, d’écarter toute explication autre que celle de l’assassinat de Nemtsov par le Kremlin.

    Plus intéressante encore, et infiniment plus inquiétante, la description des conspirationnistes faite par la fondation Jean-Jaurès, le fameux think tank du parti socialiste auquel le président Hollande a commandé un rapport en janvier. Voici ce que le laboratoire d’idées, réputé siège de l’élite des intellectuels du parti gouvernemental, écrit  dans son rapport lorsqu’il entreprend de décrire  ceux qui doutent des thèses officielles : « (…) mouvance hétéroclite, fortement imbriquée avec la mouvance négationniste, et où se côtoient admirateurs de Hugo Chavez et inconditionnels de Vladimir Poutine. Un milieu interlope que composent d’anciens militants (…) d’extrême gauche,(…), souverainistes, nationaux-révolutionnaires, ultra-nationalistes, nostalgiques du IIIème Reich, militants anti-vaccination, partisans du tirage au sort, révisionnistes du 11 septembre, antisionistes, adeptes des médecines alternatives, agents d’influence du régime iranien, bacharistes, (…)  ». De cet odieux inventaire à la Prévert destiné à rendre compte du conspirationnisme tel que l’entend le pouvoir, c’est le mépris et l’intolérance, voire la haine et l’insulte qui émergent de ces associations infâmes, mêlant sans honte les adeptes de la médecine douce avec les admirateurs de nazis et de Hugo Chavez (à propos de ce dernier, rappelons qu’il a été le président de gauche du Venezuela, régulièrement élu quatre fois consécutives, et qu’il s’est illustré au plan international par son refus de se plier à la domination américaine  ; son alliance avec Morales en Bolivie, Correa en Equateur ou Castro à Cuba en font un acteur majeur de la vague socialiste en Amérique latine, vague qui vient de faire plier Obama il y a quelques jours, contraint de lever l’embargo sur Cuba). D’après le Parti Socialiste français, approuver le socialisme de Chavez, c’est être un paria, tout comme refuser d’alimenter la guerre civile en Syrie, ou faire partie d’un milieu interlope, ou être antisioniste, ou être un nostalgique du IIIème Reich, c’est appartenir à une mouvance où se côtoient tous les infréquentables, tous les sorciers qu’il faut combattre. Notons d’ailleurs qu’à cette liste noire, la fondation Jean Jaurès ose ajouter, déshonorant ainsi le nom qu’elle porte, celui d’Etienne Chouard, simple citoyen blogueur devenu célèbre en 2005 pour avoir lancé une campagne pour le « Non » au référendum sur la Constitution européenne, et revendiquant aujourd’hui une position radicale sur la nécessité de repenser la démocratie.

    A la lecture de cette description pitoyable – dont il faut répéter qu’elle est réalisée par l’élite du parti au pouvoir – on comprend aisément que sont estampillés conspirationnistes tous ceux qui ne pensent pas comme le veulent nos élites. Ainsi, le problème « complotiste » n’est plus de distinguer le vrai du faux, le vraisemblable de la fable ou le délire de la raison, non, le problème est de penser ou non comme le suggère le pouvoir. Il faut donc condamner tous ceux qui, finalement, « ne sont pas Charlie ».

    Ce mois de janvier 2015 s’achève par un texte étonnant :

    «  Pour combattre un ennemi, il faut d’abord le connaître et le nommer (…) c’est toujours le complot, le soupçon, la falsification (…). Les théories du complot se diffusent sans limites et ont, dans le passé, déjà conduit au pire. Alors face à ces menaces, il nous faut des réponses, des réponses fortes, des réponses adaptées. (…) Il faut prendre conscience que les thèses complotistes prennent leur diffusion par internet et les réseaux sociaux (…). Nous devons agir au niveau international pour qu’un cadre juridique puisse être défini, et que les plateformes qui gèrent les réseaux sociaux soient mises devant leurs responsabilités et que des sanctions soient prononcées en cas de manquement. »

    Ces quelques lignes ne sont pas extraites d’un manuscrit d’Orwell qui n’aurait pas encore été publé, mais du discours de François Hollande prononcé le 27 janvier dernier à propos de l’antisémitisme. Deux semaines après ce discours, est publié le décret d’application du blocage de sites internet sans juge pour suspicion d’apologie d’actes terroristes, ce qu’Amnesty International dénonce comme un concept flou dans un article où l’on apprend le 18 mars que cinq sites ont déjà été bloqués sans procédure de justice.

    Le 19 mars est présenté en Conseil des ministres le projet de Loi Renseignement, prévoyant de renforcer les données liées aux connexions internet : l’idée majeure est d’installer des boîtes noires chez les fournisseurs d’accès internet contrôlant et vérifiant tous les transits de données. L’argument est de les équiper d’algorithmes destinés à déceler des comportements proches d’éventuels terroristes, et de contrôler les personnes en contact avec les personnes déjà suspectées. De plus, la conservation des données est étendue de un à cinq ans et tous les opérateurs devront fournir les éléments permettant le déchiffrement des données. Le quotidien   Le Monde précise : « La France n’est pas seule à se pencher sur la question du chiffrement : le sujet est aussi à l’origine d’un bras de fer entre le FBI, Apple et Google. (…) Le premier ministre britannique, David Cameron, a quant à lui menacé ces derniers mois de rendre illégaux les systèmes de chiffrement dont les créateurs n’auront pas fourni les « clefs » aux autorités. »

    Enfin, le 9 avril, les principaux hébergeurs de sites internet réagissent en lançant un signal d’alerte dans un communiqué adressé au Premier Ministre. Outre dresser un tableau noir des conséquences économiques qu’aurait l’adoption d’une telle loi (perte de plusieurs milliers d’emplois et déménagement vers l’étranger de toutes leurs plateformes), ils s’opposent à la « captation en temps réel des données de connexion » par les boîtes noires aux  contours flous, et déclarent :   « [40% de clients étrangers] viennent parce qu’il n’y a pas de Patriot Act en France, que la protection des données des entreprises et des personnes est considérée comme importante. Si cela n’est plus le cas demain en raison de ces fameuses « boîtes noires », il leur faudra entre 10 minutes et quelques jours pour quitter leur hébergeur français. » (…)   «   En effet, nous ne sommes pas les États-Unis, nous n’avons pas de NSA, dont les activités de surveillance opaques ont poussé nombre d’entreprises et de particuliers du monde entier à devenir clients de la France : une démocratie plus transparente et respectueuse des droits de ses citoyens. »

    Ainsi pourraient se dessiner les contours d’un nouveau monde, bien étrange, un monde dans lequel de grosses entreprises viennent au secours de nos libertés en nous protégeant du pouvoir politique.

    - Source : Michel Segal
  • Qui dirige aux USA ?

    Quelqu’un peut-il expliquer pourquoi les USA creusent leur tombe ?

    On ne reviendra pas sur l’affaire des Mistral vendus et non livrés à la Russie. On n’évoquera pas le gel des avoirs russes, ni l’humiliant Sommet de Minsk (février 2015) pour un président Hollande et une chancelière Merkel y allant sur ordre. On devrait inventer l’expression : pire qu’à Canossa.

    « La question qui s’impose donc est pourquoi les USA attaquent-ils la Russie depuis 1945 ? »

    L’ex-ambassadeur de France en Russie, Jean de Gliniasty, parle de « catastrophe »  (1) pour résumer la situation; réflexion de bon sens partagée par l’immensité des Français canal historique, mais que visiblement nos hiérarques n’entendent pas. Même l’ex-président Valéry Giscard d’Estaing, pourtant peu réputé pour son américanophobie, dénonce l’asservissement de nos gouvernants aux intérêts US (2). Il est vrai que depuis la dernière manifestation de souveraineté, à l’occasion de la Deuxième Guerre d’Irak, ceux-ci ont battu leur coulpe. Après ce refus de suivre les USA en Irak, Mme Condoleeza Rice avait déclaré : « La France sera punie ». Depuis, chacune des décisions de nos dirigeants va contre l’intérêt des Français et de la France. Y a-il un lien ?

    La réinfosphère s’interroge sur les motivations à l’origine de ces politiques antifrançaises menées depuis l’Elysée et Matignon. On a déjà beaucoup disserté sur ce thème. Mais il est plus surprenant que la politique menée depuis Washington présente les mêmes caractéristiques, à savoir desservir les intérêts des USA. La réinfosphère s’interroge alors sur qui les dirige ?

    En effet, les attaques orchestrées contre la Russie vont contre les intérêts américains. Affaiblir la Russie revient à renforcer une Chine déjà capable de rivaliser avec l’hyperpuissance US alors que l’URSS ne le pouvait pas, malgré les bobards sur son compte. En outre, on verra en conclusion que ce calcul est très hasardeux, car si l’hypothèse est que des intérêts mercantiles motivent les décisions US, le risque est très élevé pour un ROI (3) inaccessible.

    De la relation Chine/Russie

    Aujourd’hui, la Chine réunirait près de 1,5 milliard d’habitants à l’origine d’un PIB de 8.000 milliards de dollars. Par comparaison, la Russie est en dessous de 150 millions d’habitants dont une centaine de millions d’Européens et un PIB de 2.000 milliards de dollars. La Chine est une puissance spatiale maintenant. Elle prévoit l’envoi d’hommes sur la Lune en 2025-2030, et sur Mars ensuite. Son potentiel techno-scientifique progresse constamment. La Russie de son côté a connu une succession d’échecs dans l’espace et n’a plus les moyens de participer à son exploration.

    Heureusement, la Sibérie constitue un tampon entre ces deux puissances aux forces désormais disproportionnées. Mais ce tampon est aussi l’objet de toutes les convoitises asiatiques. Commencée au XVIe siècle, la conquête de la Sibérie par les Russes est terminée au XIXe. Avant, ces territoires étaient sous domination asiatique. Ces derniers ont des arguments forts pour justifier leur entreprise : moins de 10 millions de Blancs peuplent ces territoires (4) ; face à eux, plus d’un milliard de Chinois revendicatifs et capables.

    Alors, quoi de plus simple pour ces derniers: aller en Afrique, en Australie ou ailleurs pour capter les ressources dont ils ont besoin ? ou les prendre en Sibérie, territoire proche qu’ils considèrent comme leur ? La réponse est triviale.

    La question qui s’impose donc est pourquoi les USA attaquent-ils la Russie depuis 1945 ?

    En effet, leur volonté d’aller jusqu’à Moscou à cette époque est connue maintenant. En face, ils le savaient. Très vite Staline comprit que l’ennemi n’était plus l’Allemagne, mais les Alliés anglo-saxons. Notons que l’Angleterre à cette époque n’avait pas les moyens de s’opposer aux vues des USA. Aujourd’hui moins encore. La classe dirigeante anglaise historique est sur un siège éjectable. Elle le sait. Elle ne doit sa survie qu’à son art de l’accommodation. Quant à la France…

    La Guerre froide fut la conséquence de ce volontarisme US. L’éclatement de l’URSS en fut l’issue en 1991. L’ère Eltsine aurait pu faire croire que les jeux étaient faits, mais la Russie continua la lutte. L’affaire Khodorkovski est révélatrice des forces agissant en Russie.

    L’affaire Khodorkovski

    Elle a ressurgi avec la condamnation de l’Etat russe par le tribunal de La Haye à payer 50 milliards de dollars aux actionnaires de l’ex-premier groupe pétrolier russe, Ioukos (5). Des biens russes viennent d’être saisis à ce titre en France et en Belgique.

    Dans une Russie en proie aux gangs et aux mafias, Mikhaïl Khodorkovski put créer un groupe pétrolier majeur : beau succès entrepreneurial pour nos médias ; extorsion caractérisée pour les Russes. A peine constitué, il s’empressa de vouloir le vendre à Exxon Mobil / Chevron Texaco et transféra le contrôle des droits de vote liés aux actions qu’il détenait à Lord Jacob Rothschild. En outre, le rôle attribué à Khodorkovski dans les mouvements d’indépendance des régions de Sibérie riches en ressources aggrava le contentieux avec l’Etat russe.

    Depuis, nos médias le présentent comme le héros de la liberté, alors qu’outre Niémen il est perçu comme un bandit vendu aux USA. Au début des années 2000, en Russie, un macaron « Khodorkovski go home » fleurissait sur les portes des réfrigérateurs.

    Précisons enfin que Khodorkovski ayant un père juif, « l’antisémitisme » supposé des Russes est dénoncé par nos médias. Convainquons-nous pourtant d’une réalité : il n’y a pas de question juive en Russie. Certes, la majorité des oligarques, voire la totalité, étaient perçus comme juifs, mais d’autres juifs les combattaient dans l’appareil d’Etat. On pense à Yevgeny Primakov, à Mikhail Fradkov, etc. Cependant, il est patent que beaucoup d’entre eux furent attirés par les sirènes US actionnées par leurs cousins de là-bas. Cela ne date pas d’aujourd’hui. Beaucoup de « juifs » vivant aux USA, sinon tous, ont de la famille dans l’ex-Russie impériale ; et donc réciproquement.

    Je ne comprends pas

    Alors je ne comprends pas. On ne parlera pas ici des politiques menées en Europe. Nous sommes sous tutelle depuis 1945 (6). On ne parlera pas non plus de nos dirigeants. Ont-ils le choix de leurs politiques ?

    En revanche, pourquoi le peuple US ne discerne-t-il rien ? Il est connu que son horizon politique se limite à l’élection du shérif, exceptionnellement à celle du gouverneur, mais quand même, on devrait en trouver quelques-uns avec un peu de conscience politique.

    Ne voient-ils pas qu’en affaiblissant la Russie, leurs dirigeants ouvrent la Sibérie à la Chine et par contrecoup affaiblissent les USA ?

    Certes, leurs financiers pourraient faire plus d’argent en exploitant les ressources sibériennes ou en vendant quelques armes. Est-ce envisageable ? Leur armée n’est plus celle de 1941-1945. En outre, cette dernière bénéficiait du réalisme anglais à cette époque. Leur expertise reconnue se borne aujourd’hui à l’usage de drones dirigés depuis des écrans vidéos. Que pourraient-ils faire face à des peuples disposant d’une technologie égale à la leur, face à des Russes ou à des Chinois sachant encore mourir pour leur pays ? Aujourd’hui, ils ne peuvent affronter ni les uns ni les autres. Ils ne pourront donc jamais contrôler physiquement la Sibérie. Quant à nous Européens de l’Ouest, ils nous enverraient bien au casse-pipe comme ils l’envisagèrent lors des événements de Yougoslavie, mais, de plus en plus de nos compatriotes comprennent ce qui se passe. Les militaires aussi commencent à poser des questions. Quant aux immigrés vivant en Europe, les plus astucieux devinent maintenant la partition qu’on leur fait jouer ici.

    Alors quelle grille de lecture appliquer à la politique US aujourd’hui ?

    Un processus d’autodestruction s’est-il déclenché aux USA ? Après les Soviétiques, abstraction historique, les Américains vont-ils à leur tour disparaître, laissant aux peuples issus de millénaires d’histoire apaiser la planète ?

    Les biologistes savent maintenant que le cancer est causé par l’arrêt des processus de suicide cellulaire. Assistons-nous à un gigantesque suicide US pour éviter l’effondrement général de l’humanité que leur civilisation obère ?

    Sinon, quelqu’un peut-il expliquer ce qui se passe là-bas ?

    Frédéric Villaret, 26/06/2015

    Notes :

    • 1/ « Un ex-diplomate français suggère que Washington pourrait être à l’origine de la crise ukrainienne »
    • 2/ « Avec leurs sanctions contre la Russie, les Etats-Unis ont enfreint le droit international », par Valéry Giscard d’Estaing »
    • 3/ Return on investment (ROI).
    • 4/ « Le mythe de la prise de contrôle de la Sibérie par la chine »
    • 5/ « La Haye condamne la Russie à payer 50 milliards de dollars dans l’affaire Ioukos »
    • 6/ Bizarre que nos médias dénoncent et s’offusquent des écoutes de membres de l’oligarchie par les USA. Est-ce un contre-feu pour ébranler des Français de plus en plus conscients de l’asservissement de leurs dirigeants à Washington ?

    Voir aussi :

    « Après sa visite à Poutine, Giscard prend tout le monde à contrepied »

    http://www.polemia.com/qui-dirige-aux-usa-2/

  • ÉDITORIAL DE L’Action Française 2912 : GUERRE DE CIVILISATION

    Alors que François Hollande, apprenant l’attentat terroriste commis vendredi 26 juin à côté de Grenoble contre une usine chimique, n’a su qu’ânonner « la nécessité de porter des valeurs et de ne pas céder à la peur, jamais »,...

     

    ... Manuel Valls, face à cette première décapitation sur le sol français — les islamistes franchissant, par cet acte culturel, un cran symbolique supplémentaire dans la guerre qu’ils mènent sur notre vieille terre chrétienne contre tout ce qu’elle représente —, a préféré, et à juste titre, parler dimanche 28 [1] de « guerre de civilisation », indisposant du reste plus son propre camp qu’une droite qui a vu dans ce propos un hommage du vice socialiste à la vertu sarkozyste. Il a eu d’ailleurs entièrement raison d’ajouter aussitôt, de peur de ne pas être compris, qu’il ne s’agit pas d’« une guerre entre l’Occident et l’islam » et qu’il n’est pas devenu un disciple d’Hutington. L’Occident, en effet, du moins en ce sens-là, loin d’être une réalité géopolitique, n’est qu’une arme idéologique de destruction massive des Etats-Unis dont la barbarie apparemment plus douce est pareillement dirigée contre la civilisation incarnée par nos vieilles nations européennes... Un « Occident » dont, néanmoins, la politique actuelle du gouvernement français favorise les entreprises, qu’il s’agisse, entre autres exemples, de son opposition à la Russie ou de sa soumission, via l’Europe, dans les négociations sur le traité transatlantique.

    La France, chrétienne en son essence, n’est pas en guerre contre l’islam, encore moins contre ses propres ressortissants musulmans, mais, comme l’affirme Aymeric Chauprade, contre le « totalitarisme islamique » et ceux « qui vivent à l’extérieur ou chez nous, profitent d’ailleurs des largesses de notre État-providence tout en étant hostiles à ce que nous sommes, à nos valeurs, à notre civilisation. » [2] Nous ne sommes évidemment pas les seuls menacés et cette guerre est mondiale, comme l’a montré, le même jour, l’attentat commis en Tunisie et visant principalement des touristes. C’est que de nombreux pays européens ont pratiqué et continuent de pratiquer la même politique, qui risque même d’aller s’aggravant sous des prétextes compassionnels, après avoir déstabilisé, à la demande de l’« Occident », une Afrique du Nord et un Proche et Moyen Orient qui n’en demandaient pas tant ! Oui, la cause des attentats est bien « à rechercher dans la mise en place d’une politique étrangère déplorable [...], dans une immigration incontrôlée et incontrôlable, dans une justice complaisante ainsi que dans la destruction de tous les repères traditionnels de notre société. » [3]

    Le terme de civilisation a un mérite : celui d’obliger à nommer les choses et à ne plus se contenter de la vaine opposition entre des « valeurs républicaines » et un « terrorisme » également hors-sol. Notre civilisation, c’est tout ce que nous sommes depuis plusieurs millénaires, même lorsque certaines de nos valeurs sont devenues folles, et cette barbarie a un visage, celui d’un fanatisme qui se réclame d’une religion et par rapport auquel les fidèles de cette même religion doivent impérativement et clairement se positionner en cessant de prétendre qu’ils sont les premières victimes. Ainsi, le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) a osé relativiser l’horreur de l’attentat en affirmant dans un communiqué que « le vrai danger réside du côté de ceux qui utilisent ces événements pour déverser leur haine contre une partie de la population qui est, de fait, celle qui paye le plus lourd tribut face au terrorisme. » Le Gouvernement peut-il encore considérer comme interlocuteur crédible un « collectif » qui ose prétendre que le danger n’est pas le djihadisme mais une « islamophobie » largement fantasmée et qui, fort heureusement du reste, ne compte encore aucune victime, décapitée ou non ? La désinformation à laquelle s’emploie le CCIF a-t-il pour objectif le désarmement moral de la nation ? Inutile de dire à qui profiterait celui-ci...

    Qu’importe qu’on ne puisse savoir si les propos de Manuel Valls, qui rompent avec l’éternel refrain sur LA République, expriment la conviction, toute neuve, d’une France qu’on ne peut réduire à une idéologie ou à un régime politique, ou ne sont qu’éléments de langage concoctés par ses communicants. Il avait déjà évoqué une attaque contre « l’essence même de la France » pour commenter la tentative d’attentat contre deux églises de Villejuif. L’essentiel, en effet, n’est pas que le Premier ministre soit sincère mais qu’il se soit cru obligé de parler ainsi. Que lui, ou ses communicants, comprennent qu’il se suffit plus d’évoquer les « valeurs de la république » sous forme d’incantation magique pour mobiliser les Français contre une entreprise barbare qui menace l’existence même de la nation. Ne rêvons pas ! Nous n’en avons pas fini d’en souper, de ces valeurs, et Valls sera le premier à nous les resservir lorsqu’il s’agira de politique politicienne. Mais c’est un fait : sous ce mot de « civilisation », ambigu, peut-être, mais dont l’ambiguïté même a pour mérite de sortir de la référence plavlovienne à la République, c’est de nouveau la France en son être qui perce, ou tout du moins, l’aveu que le recours à une idéologie — la République, la laïcité — ne peut plus suffire à vaincre dans une guerre cruciale.

    Les récents propos de Marion Maréchal-Le Pen, qui ne comprend pas « cette obsession pour la République » et, condamnant la tendance qui « voudrait que la République efface la France », affirme que « la République ne prime pas sur la France », constituent une divine surprise. Sommes-nous à un tournant, provoqué par la véritable indigestion que la « République » commence de provoquer chez les Français, et que seuls ne ressentent pas quelques ringards confits en dévotion ? Une indigestion qui n’est que la révélation d’une imposture : celle d’une religion de substitution ayant cru trouver dans la mondialisation un nouveau ressort pour faire disparaître définitivement un peuple français réel, trop réel. Nos compatriotes se réveillent et, avec eux, le meilleur de l’élite politique. Tant mieux !

    François Marcilhac - L’Action Française 2912

    - [1] au Grand Rendez-vous d’Europe 1, Le Monde et i-Télé 
    - [2] Entretien donné à Boulevard Voltaire ce 29 juin. 
    - [3] Communiqué de l’Action française du 27 juin 
    - [4] Entretien à la revue Charles

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?EDITORIAL-DE-L-Action-Francaise,9197

  • Vers un nouveau front islamique dans les Balkans occidentaux ? 3/3

    L’expansionnisme albanais : stratégie de la tension dans tous les Balkans occidentaux

    L’islamisme radical revient en force dans tous les Balkans occidentaux. Après des coups de fusils sur un commissariat au Monténégro et l’attaque par un commando d’anciens djihadistes des guerres bosniaques dans la partie serbe de la Bosnie-Herzégovine en avril, c’est un véritable acte de guerre qui s’est déroulé le 9 mai dernier en Macédoine. Dans la ville de Kumanovo, pendant plus de vingt heures, une trentaine de terroristes se sont acharnés sur un commissariat, mais aussi contre un quartier en tirant au mortier, faisant plus de 20 morts.

    Kosovo-Métochie : une purification ethnique au cœur de l’Europe

    Le Kosovo et la Serbie méridionale, en plus de la Macédoine du nord, sont des régions où l’expansionnisme extrémiste albanais se développe depuis la fin des années 1990. Or ce processus se développe non seulement au détriment des populations serbes obligées de fuir, mais également des minorités roms, turques et bochniaques également prises au piège et vivant dans un état de peur permanente.

    Les extrémistes albanais ont procédé depuis 1999 à un grignotage systématique du territoire. Les trois grandes villes du Kosovo ont été épurées de leur population serbe : Pristina est aujourd’hui vidée des 40 000 Serbes que comptaient la ville en 1999, tout comme le sont Pec et Prizren. Les Serbes sont petit à petit repoussés au nord de l’Ibar selon une logique implacable. Après les grands centres du sud (Prizren) et de l’est (vallée de la Drenica) dans les années 2000-2002, il a été procédé à partir de 2003 à l’épuration des Serbes du cœur de la plaine du Kosovo, au carrefour des grands axes de communication. Un premier déferlement de violence a eu lieu les premiers mois du rétablissement d’une autorité albanaise au Kosovo, avec des assassinats de paysans et plusieurs villages serbes attaqués de nuit par les extrémistes albanais. Le 15 août 2003, à Goraždevac, une fusillade sur un groupe d’enfants serbes qui se baignaient dans la rivière aboutit à l’assassinat des jeunes Ivan Jovanović et Pantela Djakić. Les Roms ont aussi beaucoup pâti de l’extrémisme albanais. Plusieurs dizaines de milliers ont dû fuir après 1999, souvent à l’étranger. Les Roms restés au Kosovo s’entassent souvent dans des camps de réfugiés au nord de l’Ibar.

    Cela a débouché sur les émeutes raciales des 17 et 18 mars 2004, pendant lesquelles un déferlement de violence inouï de la part cette fois d’une partie de la population albanaise a abouti à un bilan dramatique : 19 morts, 900 blessés, 700 maisons et trente églises détruites, 4000 personnes chassées de chez elles. Là encore, les attaques albanaises étaient ciblées, car elles visaient des villages serbes autour de Priština et le dernier réduit méridional dans des monastères autour de Prizren.

    Les liens entre Al-Qaïda et l’UCK au Kosovo

    Plusieurs sources sérieuses ont démontré que la guérilla de l’UCK a été soutenue dès 1998 par des moudjahiddines liés à Al Qaïda. Le Washington Times, s’appuyant sur un rapport des services américains, révélait le 4 mai 1999 – c’est-à-dire pendant les bombardements de l’OTAN – que certains combattants de l’UCK luttant contre l’armée yougoslave ont été « formés dans des camps terroristes en Afghanistan et en Bosnie-Herzégovine » et « financés par Oussama Ben Laden ». Durant le conflit du Kosovo au printemps 1999, des vétérans du Djihad islamique venant de Bosnie et de Tchétchénie ont « passé la frontière de l’Albanie voisine par groupes de cinquante hommes ou plus ». Selon le gouvernement serbe, l’unité Abou Bekir Sidik  opérait dès le mois de mai 1998 dans la vallée de la Drenica. Composée de 210 combattants « internationaux » (Bochniaques, Saoudiens, Yéménites, Irlandais), cette unité était commandée par Ekrem Avdi, ex-djihadiste en Bosnie et proche des Frères musulmans. Lors des émeutes anti-serbes des 17 et 18 mars 2004, Ekrem Avdi était présent auprès d’autres membres présumés d’Al Qaïda , comme Samedin Xhezairi (1). Le journaliste d’investigation Jürgen Elsässer a prouvé que plusieurs leaders d’Al Qaïda ont joué la courroie de transmission avec les chefs de l’UCK. Abou Hamza aurait ainsi créé et dirigé un camp d’entaînement d’Al Qaïda près de Prizren. Mohammed Al Zawahiri, chef du « Djihad islamique » égyptien et frère du bras droit de Ben Laden, aurait également dirigé une unité d’élite de l’UCK. Enfin Ridvan Neziri, ancien d’Afghanistan, faisait office pendant la guerre du Kosovo de représentant d’Al Qaïda auprès de l’État-major de l’UCK (2).

    Fréquemment, des fuites des services de renseignement de la KFOR nous indiquent la gravité de la menace terroriste islamiste au Kosovo et ses alentours. Dans un communiqué du 8 mars 2007, il est annoncé que des djihadistes se prépareraient à commettre des attentats au nord de l’Ibar au Kosovo et au Sandjak, dans le but d’élargir leur contrôle territorial aux zones de peuplement serbe. Le quartier général de l’unité de moudjahiddines albanais  Abou Bekir Sidik, commandée par Ekrem Avdija, se trouverait à Mitrovica – sud et déploierait ses activités en Métochie (Drenica) et au Monténégro oriental (Mokra Gora).

    Or ce constat arrive au moment où l’activisme de groupes islamistes radicaux s’accélère. Ainsi dans le village de Rezale (Drenica), la mosquée entièrement financée par l’Arabie Saoudite et respectant scrupuleusement la charia, est dirigée par un imam cousin du n°2 d’Al Qaïda. Dans les villages alentour, l’appel au djihad est fréquemment prononcé. Ces islamistes radicaux sont soutenus par des groupes extrémistes venus du Sandjak et même d’Albanie. Un des camps d’entraînement terroriste de la Drenica, tenu par le membre des services de contre-espionnage du gouvernement provisoire de Pristina, Ilijaz Prokchi, servirait, selon les services de l’OTAN, au maniement des armes chimiques. Le plus inquiétant est que ces extrémistes « locaux » sont de plus en plus soutenus de l’extérieur. Ainsi en décembre 2006 seraient arrivés au Kosovo, par l’entremise d’organisations caritatives islamistes, une trentaine de moudjahiddines égyptiens venus de France. Ils ont été accueillis par le groupe Abou Bekir Sidik à Srbica, qui pourrait disposer d’un armement important car leur mosquée d’attache se situe à côté de l’ancienne usine d’armements « Ilijaz Kodra ». Leur but serait d’engager la lutte armée contre la KFOR et la MINUK afin d’ouvrir un corridor islamiste joignant l’Albanie au nord du Kosovo (3).

    Or l’instrumentalisation de ces divers groupes islamistes est le fait ici du pouvoir albanais du Kosovo. Le frère du premier ministre, Gani Thaçi, déjà connu pour le racket des stations d’essence kosovares, serait ainsi chargé du transport et de l’implantation de ces djihadistes internationaux sur le territoire du Kosovo. Les moudjahiddines sont en effet nécessaires à la famille Thaçi comme fer de lance d’une attaque sur le nord du Kosovo. Le terrorisme islamiste est ici clairement utilisé dans des buts territoriaux par Pristina : évincer définitivement les Serbes du Kosovo et étendre leur contrôle sur le Sandjak et la Serbie méridionale.

    Tensions albanaises en Serbie du sud

    À l’hiver 2000, l’UCK a accouché de deux mouvements terroristes opérant depuis le Kosovo en Serbie du sud et en Macédoine. Pour la guérilla albanaise, le but affiché est de détacher trois communes du sud de la Serbie pour les englober au Kosovo : Bujanovac peuplée de 61% d’Albanais, Presevo de 93 % et Medvedja de 39%. Le 4 février 2000, l’UCPMB ( Armée de libération des villes de Presevo, Medvedja et Bujanovac ) attaquait cette vallée du sud-est de la Serbie et à Dobrasin, une fusillade entre la guérilla albanaise et la police serbe faisait fuir 175 Albanais. Le 20 janvier 2000 l’UCKM ( Armée de libération nationale des Albanais de Macédoine ) posait sa première bombe en Macédoine ; elle passera à l’offensive armée un an plus tard.

    Lors de la « révolution démocratique » à Belgrade (octobre 2000), les Albanais du triangle Presvo-Medvedja-Bujanovac réclamaient une meilleure représentation dans les institutions publiques et dénonçaient les brimades policières serbes. Mais très vite – en novembre 2000 – l’UCPMB va contrôler la route menant au Kosovo et réaliser des attentats fréquents contre la police. Le 28 janvier 2001, trois policiers serbes sont tués par des mines antichars placées par les Albanais de l’UCPMB : à ce moment, la guérilla albanaise contrôle quelques 200 km2 de cette région située en bordure du Kosovo. Début février 2001, une attaque contre un autobus transportant des Serbes fait 10 morts au Kosovo. Devant cette escalade des deux côtés de la frontière impulsée par les guérillas albanaises, Belgrade demande à l’OTAN d’assurer la sécurité ; en même temps elle impose une « redéfinition » de la zone de sécurité à la frontière entre le Kosovo et la Serbie méridionale. Le 8 juillet 2009, une attaque à la grenade se passait contre une gendarmerie à Lučane près de Bujanovac, faisant deux blessés. Cette attaque terroriste était qualifiée par Ivica Dačić, Ministre de l’Intérieur, comme « une attaque contre l’intégrité territoriale de la Serbie ». On voit donc se développer même aux confins méridionaux de la Serbie une volonté irrédentiste albanophone qui, outre la volonté d’élargir par la force les frontières du Kosovo, vise à créer un abcès de fixation sur un passage important, le corridor énergétique et de communication Belgrade-Salonique.

    La Macédoine touchée par l’irrédentisme albanais depuis 2001

    L’UCK a également combattu en Macédoine en 2001. Wolf Oschlies, conseiller du gouvernement allemand, pense que quelque 150 moudjahiddines, proches de Ben Laden, auraient participé à la formation de l’Armée Nationale Albanaise (ANA) sur les décombres de l’UCK dissoute. Ils ont été entraînés en Bosnie dans les camps de l’armée bochniaque. L’un d’entre eux, un certain Fatih Hassanein, a fait plusieurs allers-retours entre Macédoine et Kosovo en 2001. Or ce Soudanais avait auparavant dirigé l’ONG caritative islamiste TWRA, active en Bosnie et au Kosovo : il aurait été le relais entre Ben Laden et les autorités de Sarajevo durant le conflit bosniaque.

    Cet État fragile ne peut non plus lutter contre la mafia albanaise. Ainsi, le 12 octobre 2005, un citoyen turc, Erdogan T., était arrêté dans sa jeep immatriculée en Albanie alors qu’il essayait d’entrer en Macédoine par le passage de Kafasan sur le lac d’Ohrid. Il transportait un kilo de cocaïne, plus quatre kilos d’héroïne et un demi-kilo de haschich, le tout emballé dans 19 paquets. En janvier 2006, trois islamistes français d’origine marocaine étaient appréhendés au cours d’une opération de police menée à Priština, au Kosovo. Ils avaient fui la police française à la suite des émeutes de l’automne 2005, et se trouvaient sous la protection d’une « maison wahhabite de sécurité » au cœur même de Priština.

    Mais surtout, le non règlement de la question albanaise en Macédoine a fini par exploser à la figure des décideurs internationaux. C’est ainsi que les 10 et 11 mai 2015 de véritables scènes de guerre se déroulèrent pendant plus de vingt heures entre l’armée macédonienne et un groupe de guérilleros de l’ancienne UCK. Le bilan est très lourd : 19 morts et un quartier entier détruit aux maisons éventrées. Or, dans les jours suivants, on apprenait que parmi les terroristes assaillants se trouvaient pas moins de trois commandants qui avaient combattu dans les rangs de l’UCK durant la guerre du Kosovo en 1999. Déjà le 20 avril 2015, un groupe de 40 membres de l’UCKM (section macédonienne de l’UCK) masqués et armés avaient purement et simplement attaqué un poste de police dans le village de Gošince et après avoir brutalisé et ligoté les quatre policiers macédoniens de faction, filmé à la mode lancée par Al Qaïda leurs revendications on ne peut plus claire : former la Grande Albanie. On voit donc que se dessiner par des actions ponctuelles et marquant le territoire autour du Kosovo une volonté d’imposer, par la terreur, le programme jusqu’au boutiste de la grande Albanie. Les efforts entrepris par la communauté internationale depuis les accords d’Ohrid ayant mis fin à six mois de violences inter-ethniques ne sont pas récompensés par la paix (4).

    Une stratégie de la terreur semble s’imposer en Macédoine aussi, pour l’UCK payante car les territoires albanophones du nord et de l’est du pays vont petit à petit vers une séparation de fait du centre, formant au mieux à l’avenir une confédération à la bosniaque.

    Conclusion

    Nous assistons à l’émergence d’une véritable transversale verte du terrorisme sur une ligne suivant les territoires suivants : Bosnie-Sandjak-Kosovo-Macédoine. Le but des terroristes islamistes est clair : créer un foyer de tension durable en Europe du sud-est.

    Dans un scénario à l’algérienne, le but des différents mouvements appuyant le projet de « Grande Albanie » est de creuser un fossé entre les Albanais et toutes les autres communautés (Serbes, Macédoniens, Roms, Turcs) à l’échelle de tous les Balkans occidentaux. L’objectif est également d’internationaliser la question, en développant la stratégie de la terreur afin de pousser les puissances occidentales à intervenir.

    Dans un avenir très proche, la question est donc bien de savoir si, devant la recrudescence rapide des violences islamistes dans les Balkans, nous n’allons pas vers un nouveau conflit d’ampleur impliquant les forces occidentales. L’autre question brûlante est, devant l’atermoiement des Occidentaux face à ces phénomènes de guérilla urbaine, de savoir si cela ne sert pas les intérêts des États-Unis. Alors que l’on est prompt à intervenir sur les zones du Sahel ou du Moyen Orient, pourquoi rien n’est fait pour contrer cette nouvelle guerre qui s’annonce préjudiciable à l’Europe toute entière ?

    Alexis Troude, 6/06/2015

    Notes et références

    (1) Ministère de la Défense de Serbie-Monténégro, « Rapport sur les événements du Kosovo les 17 et 18 mars 2004 », Revue Vojska, Belgrade, 25 mars 2004.

    (2) Jürgen Elsasser, Comment le Djihad est arrivé en Europe, Xenia 2006, pp 164-165.

    (3) Andrija Mikic “Le Djihad menace le Kosovo”, Novosti, Belgrade, 8 mars 2007.

    (4) Les accords d’Ohrid du 13 août 2001 avaient imposé au gouvernement central le principe de la clé nationale au Parlement (quota de 20 députés albanophones) et au gouvernement (5 ministres et un vice-président albanophone), mais aussi l’égalité linguistique (à côté de la langue officielle macédonienne existait une langue nationale albanaise) et des droits culturels (université albanophone de Tetovo). Christophe Chiclet, « L’ambiguïté des accords d’Ohrid », Confluences Méditerranée 3/2007 (N°62) , p. 101-108

    http://www.realpolitik.tv/2015/06/vers-un-nouveau-front-islamiste-dans-les-balkans-occidentaux-troisieme-partie-par-alexis-troude/

  • Vers un nouveau front islamiste dans les Balkans occidentaux ? (2/3)

    Al Qaïda tisse ses mailles au cœur de l’Europe du sud-est

    L’islamisme radical revient en force dans tous les Balkans occidentaux. Après des coups de fusils sur un commissariat au Monténégro et l’attaque par un commando d’anciens djihadistes des guerres bosniaques dans la partie serbe de la Bosnie-Herzégovine en avril, c’est un véritable acte de guerre qui s’est déroulé le 9 mai dernier en Macédoine. Dans la ville de Kumanovo, pendant plus de vingt heures, une trentaine de terroristes se sont acharnés sur un commissariat, mais aussi contre un quartier en tirant au mortier, faisant plus de vingt morts.

    Les filières d’Al Qaïda dans les Balkans suite au 11 septembre

    Après les attentats du 11 septembre 2001, les services occidentaux se sont rendus compte que plusieurs centaines d’islamistes radicaux étrangers vivaient tranquillement comme citoyens bosniaques – l’État de Bosnie-Herzégovine leur avait donné un passeport. Leur recherche par la police de la KFOR commença car ils représentaient un danger pour leur possible lien avec Al Qaïda. On apprenait ainsi qu’un Algérien de nationalité bosniaque avait tenté en 1998 d’acheminer des explosifs pour un groupe terroriste en Allemagne. Un des principaux lieutenants de Ben Laden, le Palestinien Abu Zubeida, disposait en 2000 d’un réseau d’agents en Bosnie. Ahmed Ressam et Karim Atmani, qui furent combattants djihadistes en Bosnie au début des années 1990, organisèrent ensuite la cellule de Montréal avec pour objectif de poser une bombe aux États-Unis. Atmani, faisant partie du « groupe de Roubaix », a été ensuite condamné à cinq ans de prison en France. Oussama Ben Laden lui-même possédait un passeport bosniaque régulier, qui lui a permis de séjourner à plusieurs reprises en Bosnie-Herzégovine dans les années 1990. La journaliste allemande Renate Flotau, de l’hebdomadaire Der Spiegel, affirme avoir vu à plusieurs reprises Oussama Ben Laden dans l’antichambre du bureau du président bosniaque, Alija Izetbegović.

    Dans un entretien pour l’agence de presse yougoslave « Tanjug », le journaliste français Christian Chesnot, ancien otage en Irak, expliquait en 2004 que son ravisseur avait été formé pendant la guerre en Bosnie. Ce chef du groupe dénommé l’ Armée islamique en Irak, lié à Al Qaïda, était « un type plutôt jeune, une petite trentaine d’années (…). Il passait son temps à écouter des chants islamiques sur la Bosnie et à parler des opérations menées par des moujahiddines pendant la guerre de 1992-1995, à laquelle il a participé avant de se lancer dans d’autres pays de djihad ». Selon Chesnot, ce groupe terroriste développe un « agenda irakien » mais aussi un « agenda international et djihadiste » (1).

    Ces derniers temps, plusieurs faits divers ont démontré l’implication des « salafistes (2) » durant la guerre de 1992-1995 et après. La survivance d’« Émirats islamiques » en Bosnie-Herzégovine, bien qu’éphémères à chaque fois, a aussi frappé l’opinion. En août 2005, l’opinion bosniaque apprenait avec stupeur que cinq Pakistanais du groupe  Hezb-il-Islami, allié à Al Qaïda en Afghanistan, s’étaient installés dans la mosquée de Dobrinja : ils ne demandaient pas moins que la création d’un Émirat islamique dans ce quartier de la banlieue de Sarajevo, d’où les Serbes avaient été chassés en 1995. Cela amena le journaliste bochniaque Esad Ečimović à parler de « menace du radicalisme islamique en Bosnie ». Au mois de décembre 2008, les Américains libéraient de Guantanamo trois djihadistes algériens qui avaient combattu en Bosnie puis ensuite obtenu la nationalité bosniaque. Boudella al Hajj, Mustafa Ait Idr et Mohammed Nechle avaient immigré en Bosnie. Ils avaient été arrêtés en 2001, sur des soupçons de préparation d’un attentat contre l’ambassade américaine à Sarajevo. Depuis janvier 2002, ils étaient détenus à Guantanamo.

    En 2009, une affaire politico-judiciaire défrayait la chronique à Belgrade : Ali Hamad, ancien officier d’Al Qaïda qui a travaillé pour l’armée bosno-musulmane, a voulu témoigner sur des exactions faites contre des civils serbes dans le conflit de 1992-95. Ce djihadiste international demanda à être protégé par la Serbie, car il a eu à subir déjà trois tentatives d’assassinat en prison. Selon Ali Hamad, ces tentatives seraient commanditées par des dirigeants bochniaques gênés par un procès qui pourrait apporter la preuve du soutien d’Al Qaïda aux autorités de Sarajevo.

    En janvier 2009, on découvrait qu’un des membres du Hamas palestinien, Abou al Mari, mort récemment à Gaza dans le conflit avec l’armée israélienne, était l’un des nombreux terroristes internationaux qui avaient fait la guerre du côté des forces armées bosno-musulmanes en 1992-1995. Al Mari, comme un grand nombre de moudjahiddines, ne s’est pas seulement battu en Bosnie, mais aussi en Afghanistan, en Tchétchénie et dans d’autres pays où les islamistes ont mené « la guerre sainte ». Selon Ivica Milivončić, auteur du livre Al Qaïda s’est forgé en Bosnie-Herzégovine, « Le Hamas est l’une des 33 organisations terroristes dont les membres se sont battus en Bosnie-Herzégovine. À cause du conflit permanent avec Israël, le Hamas n’avait pas pu envoyer beaucoup de combattants en Bosnie entre 1992 et 1995. Après la fin de la guerre, la majorité d’entre eux est retournée en Palestine. Mais une partie est restée en Bosnie-Herzégovine et un petit groupe du Hamas s’est infiltré dans l’ancienne Agence pour la Recherche et la Documentation, c’est à dire les services de renseignements bosniaques ». La majorité des membres du Hamas qui dans la Fédération croato-musulmane ont obtenu la nationalité bosniaque a, selon lui, changé de nom et de prénom. Au lieu de noms arabes, ils ont pris des noms bochniaques et c’est la raison pour laquelle ils sont difficiles à retrouver.

    Sandjak : nouvelle terre de djihad dans les années 2000

    Au Sandjak, couloir stratégique de 8873 km2 reliant le Kosovo à la Bosnie, le terrorisme islamiste a fait son apparition en 2007. Après la guerre de Bosnie (1992-1995), certains groupes de moudjahiddines afghans et arabes avaient trouvé refuge au Sandjak. Après plusieurs années d’attente, ces groupes wahhabites sont passés à l’action et la police serbe a démantelé au printemps 2007 un camp d’entraînement à Novi Pazar, arrêtant 5 Jordaniens. La police serbe mit alors à découvert un arsenal important d’armes, non seulement aux alentours du camp wahhabite, mais aussi dans une localité proche : fusils automatiques, sept kilogrammes d’explosifs et une dizaine d’obusiers. Le ministre de l’Intérieur de Serbie affirmait à cette occasion qu’il soupçonnait l’existence d’autres camps de ce type dans la région. Selon les services de renseignement serbes, des terroristes venus d’Irak et d’Afghanistan circulaient facilement entre Novi Pazar, Sjenica et Tutin ; les habitants de ces localités avaient depuis un certain moment signalé à la police des mouvements d’étrangers portant des signes distinctifs islamistes. Selon Suad Bulić, commissaire à Novi Pazar, « ce groupe est connu depuis longtemps : ils ont organisé des bagarres et tiré des coups de fusil dans certaines mosquées ».

    Cela démontre un processus de radicalisation d’un islamisme importé (wahhabisme d’Arabie saoudite), éloigné des préoccupations des citoyens bochniaques du Sandjak. La nouveauté du cas du Sandjak est la tentative d’introduction d’une lutte entre confréries musulmanes au cœur même des lieux de culte. Ce dernier point explique la forte réaction du mufti Muhamer Zukorlić à ces événements : « Les wahhabites, après avoir voulu nous diviser en imposant leurs conceptions de la prière, veulent déstabiliser maintenant toute la région ». Or c’est dans cette perspective qu’il faut considérer cette nouvelle menace au Sandjak. Selon Radenko Joković, criminologue à Novi Pazar, les armes utilisées par les Jordaniens arrêtés viennent du Kosovo voisin, ce qui tendrait à prouver qu’ils travaillent avec les extrémistes albanais dans le même but : internationaliser la question du Sandjak. Située au sud de la Serbie à l’intersection des corridors VIII et X, une guérilla albanaise maintient la pression contre la police serbe. On assiste donc à la menace de création d’un Grand Kosovo autour du nouvel État indépendant (3).

    En outre les cinq Jordaniens ne seraient, selon les services de la KFOR, qu’un petit noyau d’un réseau lié à Al Qaïda. Le même rapport des services de renseignements de la KFOR indiquait en mars 2007 que « les groupes terroristes du Kosovo ont commencé un transfert intensif d’armes du Kosovo vers le Sandjak ». Début 2007 s’est aussi installé au Sandjak le Front Islamique du Salut , dirigé par un Turc et deux Bochniaques. Ce groupe est formé d’une vingtaine de moudjahiddines turcs, mais aussi de Soudanais, d’Algériens, d’Egyptiens et de Palestiniens. Le Sandjak est ainsi devenu une base de repli pour les djihadistes venus du Kosovo. Les montagnes entre Kosovo et Sandjak sont devenues le lieu d’action du groupe djihadiste « Bajgora Storm », avec pour commandant l’ex-terroriste de l’UCK Ram Rama, reconverti dans le djihadisme au Sandjak. Des armes lourdes convoyées par huit camions en février 2007 auraient été réceptionnées par une cellule d’Al Qaïda qui les a ensuite distribuées à des wahhabites sur le territoire du Sandjak. Selon les rapporteurs de la KFOR, la cellule d’Al Qaïda prévoyait ensuite d’amener dans le sens inverse des armes chimiques destinées à l’attaque de la base américaine de Bondsteel. Les moudjahiddines disposeraient sur le sol du Sandjak de camps d’entraînement temporaires et très mobiles ; ils peuvent aussi mobiliser plusieurs centaines de fidèles « prêts à soutenir la lutte des musulmans dans les Balkans (4)». Le lien entre UCK et djihad est donc une fois de plus établi et les wahhabites considèrent le Sandjak comme un lieu de projection du djihad dans toute la région.

    2015 : la guerre du salafisme contre les chrétiens est déclarée

    La conséquence directe et terrible de cet activisme salafiste très dynamique en Bosnie depuis plus de vingt ans est l’apparition d’affidés de l’islamisme radical moyen-oriental. Ainsi à Gornja Maoča, petite enclave salafiste au nord-est de la Bosnie-Herzégovine (partie musulmane), plusieurs habitants ont hissé le drapeau noir de l’État Islamique en début d’année. Cela a tout de suite entraîné une action de police de la sûreté de l’État bosniaque (SIPA) en février 2015, mais cela est peine perdue car le mal est déjà enraciné ; déjà à deux reprises en 2010 la police lourdement armée avait arrêté des djihadistes. En effet, Gornja Maoča, un village proche de Srebrenik, dans le nord du pays, est connue pour être une enclave du mouvement salafiste en Bosnie-Herzégovine. On estime à plusieurs dizaines les combattants qui s’entraînent dans ce camp implanté pat l’État islamique dans ces montagnes de Bosnie ; toutes les femmes portent la burqua et les programmes scolaires suivent celui de la Jordanie. Entre 200 et 300 citoyens bosniens combattraient dans les rangs des djihadistes déjà en Syrie, sous le commandement de Nusret Imamović, le chef de la communauté wahhabite de Gornja Maoča, qui figure depuis le 24 septembre sur la liste des 10 terroristes islamistes les plus recherchés par le département d’État américain. La menace d’actions en Europe à partir de ce type de camps est très probable ; mais cela veut déjà dire que l’idéologie de l’État Islamique se propage sur le sol européen et a un ancrage territorial dans les Balkans (5).

    Or fin avril 2015 dans la ville de Zvornik, un jeune djihadiste a attaqué violement une poste de police, faisant un mort et deux blessés parmi les policiers serbes. Il n’est pas anodin de voir que Zvornik, placé côté République Serbe, en face de la fédération croato-musulmane, est située dans la même région que Gornja Maoča; à la confluence de Bosnie, Serbie et Croatie. Le but de l’État Islamqieu en Bosnie nord- orientale n’est pas seulement de réactiver les anciens réseaux djihadistes d’Al Quaîda jamais définitivement éteints ici depuis les guerres de 1992-1995, d’envoyer des soldats aguerris sur le terrain syrien mais aussi d’ enraciner durablement en Europe un foyer islamiste dur, formé de combattants qui ont parfois plus de vingt ans de habitudes djihadistes derrière eux. Cela s’est passé aussi dans un contexte de radicalisation, -attaques terroristes sur la gendarmerie de Novi Grad en Republika Srpska, drapeaux de l’Arabie Saoudite accrochés de façon ostentatoire sur les feux de croisement à Gradiška. Milorad Dodik, Président de la République Serbe de Bosnie, ne s’y est pas trompé et il dénonce devant ce regain de violences les atermoiements des forces de l’ordre des autorités centrales (Sarajevo). La question sous-jacente est de savoir comment peuvent se multiplier ces actes terroristes en présence de plus de mille soldats de la mission EUFOR-Althéa ? (6)

    Soutenue financièrement par l’Iran, l’Arabie saoudite et les Emirats Arabes Unis, l’Organisation de la Jeunesse Islamique Active (AIO), a été fondée en 1995 par Nedim Haradžić, officier du groupe de djihadistes  El Moudjahid , qui fournira des éléments aguerris à l’AIO. Son programme est on ne peut plus clair: « Notre but est la formation d’un État islamique en Bosnie-Herzégovine, basé exclusivement sur la charia, et dont le modèle est l’Arabie saoudite. Pour atteindre ce but, il faut changer le système scolaire en Bosnie ».

    L’AIO est clairement néo-fondamentaliste, défendant une interprétation littérale des textes de la charia et l’intolérance envers les autres communautés religieuses, y compris les musulmans qui ne suivent pas les préceptes de leur mouvement, considérés comme des takfir (non croyants). Ils appellent à retourner aux pratiques originelles de l’Islam : habillement spécifique, prières quotidiennes, port du hidjab pour les femmes. On les rencontre dans des madrasas (écoles corniques) bosniaques, où ils recrutent des nouveaux fidèles.

    Or l’AIO possède plusieurs camps d’entraînement en Bosnie, où des anciens du conflit bosniaque entraînent au terrorisme. Le plus connu d’entre eux est  Vehabija, groupe d’ultra-radicaux comptant jusqu’à 300 membres en 2003. Or il est intéressant de voir qu’après être passés par la République turque de Chypre-nord, ils sont ensuite envoyés au Sandjak et dans la vallée de Preševo, en Serbie du sud. Le groupe paramilitaire des  Cygnes noirs , qui avait perpétré des opérations de nettoyage contre les Serbes derrière les lignes ennemies en 1991-1995, est issu de la division Handjar. Izetbegovic lui-même ne cachait pas qu’elle était l’héritière de la tristement célèbre division pro-nazie «Waffen SS Handjar » (1941-45). Or 600 combattants y sont toujours actifs, ayant été recyclés comme gardes du corps du SDA (7).

    Les services secrets bosniaques ont été étroitement liés à ces opérations. C’est ainsi que le Service musulman de renseignement (MOS) coordonnait dans les années 2000 les actions des 200 à 300 moudjahiddines restés en Bosnie et l’AIO lui sert ainsi d’exécuteur des basses œuvres. Le plus inquiétant est qu’ Haris Silajdzic, le Président du collège présidentiel de Bosnie entre 2006 et 2010, était considéré par les services occidentaux en 2003 comme « le principal coordonnateur de tous les services secrets arabes qui travaillent en Bosnie ». Le journaliste allemand Jürgen Elsässer considère comme étonnant, dans ce contexte, que l’action de la SFOR se soit concentrée depuis quinze ans sur la traque de criminels de guerre serbes alors que les camps d’entraînement de l’AIO restent intouchés .

    Alexis Troude, 4/06/2015

    Fin de la deuxième partie.

    Notes et références

    (1)Par djihadistes on désignera ici les partisans étrangers du djihad ; au cours des années 1990, les militants radicaux issus de celui–ci devaient se nommer eux-mêmes « salafistes djihadistes ». Cf. Gilles Kepel, op. cit., p. 619 (note 11). djihad : effort personnel intérieur accompli sur le chemin de Dieu (grand djihad), guerre sainte contre les infidèles (petit djihad ). Gilles Kepel note que la jurisprudence islamique distingue le djihad défensif et le djihad offensif. Le premier est proclamé lorsque le territoire de l’Oumma est attaqué par les Infidèles et que la continuité même de l’existence de l’Islam est menacée. Dès qu’une fatwa ou avis juridique référé aux Textes sacrés est émis en ce sens, tous les musulmans doivent s’engager dans le djihad, que ce soit en portant les armes ou en contribuant à la cause de toute autre manière appropriée, par le don financier, la charité, ou la prière. Cf. Gilles Kepel, op. cit., p. 583.

    (2) Salafisme/salafistes: le réformisme salafiste est un courant de pensée apparu à la fin du XIXème siècle et représenté par des penseurs tels que l’Iranien Djamamuddin al Afghani ou l’Egyptien Mohammed Abduh. Il peut favoriser la “modernisation de l’Islam”. Toutefois, depuis les années 1970, le terme “salafiste” désigne avant tout les mouvements islamistes tels que les Frères musulmans ou la Jama’at-i Islami.

    (3) Le 24 février 2003, à 10 km de Bujanovac, le policier Milan Vujović était tué en patrouille sur une mine ;fin octobre 2005, une explosion éclatait dans le centre de Preevo, revendiquée par un groupe armé albanais. En cas de heurts entre les deux forces militaires, les liens avec la Macédoine et la Grèce seraient coupés pour la Serbie, à l’endroit où le corridor européen X est vital pour la survie de l’économie serbe. Voir Alexis Troude, « Serbie, l’adieu au Kosovo ? », Politique internationale n°116, été 2007, pp 223-248.

    (4)Aleksandar Popovic, « Al Qaïda menace le Kosovo », Novosti, Belgrade, 27 mars 2007.

    (5) Drago Hedl, « Reportage dans le fief des Wahhabites », Jutarnji List, (Zagreb )10 octobre 2014, publié in Courrier International du 14 octobre 2014.

    (6) Mladen Kremenovic, « L’attaque à Zvornik marque-t-elle l’essor de l’islamisme radical en Bosnie ? », Novosti, Banja Luka, 10 mai 2015.

    (7) Jürgen Elsasser, « Comment le Djihad est arrivé en Europe », Xenia 2006, pp. 190-192.

    http://www.realpolitik.tv/2015/06/vers-un-nouveau-front-islamiste-dans-les-balkans-occidentaux-deuxieme-partie-par-alexis-troude/

  • Vers un nouveau front islamiste dans les Balkans occidentaux ? (1/3)

     

    Le radicalisme islamiste européen est né en Bosnie

    L’islamisme radical revient en force dans tous les Balkans occidentaux. Après des coups de fusils sur un commissariat au Monténégro et l’attaque par un commando d’anciens djihadistes des guerres bosniaques dans la partie serbe de la Bosnie-Herzégovine en avril, c’est un véritable acte de guerre qui s’est déroulé le 9 mai dernier en Macédoine. Dans la ville de Kumanovo, pendant plus de vingt heures, une trentaine de terroristes se sont acharnés sur un commissariat, mais aussi contre un quartier en tirant au mortier, faisant plus de vingt morts.

    Cela intervient au moment où la population est secouée par des revendications sociales, mais aussi où les albanophones, touchés par la crise économique et se plaignant du manque de représentativité, en veulent au gouvernement central. C’est dans ce vide politique que les djihadistes se sont engouffrés ; or plus de la moitié d’entre eux sont des Albanais venus des pays frontaliers de la Macédoine et trois s’étaient déjà fait connaître au début des années 2000 dans un mouvement terroriste, l’ANA, se battant pour la Grande Albanie.

    Pour saisir les enjeux profonds de ce soudain regain de violence, il nous faut tracer les lignes de perspective de l’islamisme radical dans les Balkans. Pour ce faire, nous allons plonger dans les ressorts de l’instrumentalisation des mouvements djihadistes par certaines puissances dans cette région depuis plus de vingt ans.

    Aux origines du fondamentalisme islamiste européen

    Pour saisir la problématique de l’islamisation progressive de la Bosnie-Herzégovine, nous devons remonter à l’époque de la Yougoslavie communiste, où, à l’instar de Staline en URSS, le dirigeant Tito accorde un statut particulier à la religion musulmane. Dès les années 1960, les partisans d’une nationalisation de la religion musulmane sont soutenus par le régime communiste. Tito crée en 1968 une nation « musulmane » en Bosnie-Herzégovine, cas unique en Europe d’une nation basée sur une confession religieuse. Très vite, des intellectuels musulmans de Bosnie imposent le concept de peuple bochniaque, qui regrouperait les musulmans de Bosnie, de Serbie et du Monténégro. En 1976, le dirigeant slovène Stane Dolanc estimait que le mouvement pour une conscience nationale des musulmans de Bosnie était bien avancé et que la Ligue des Communistes avait désormais le devoir « d’aider objectivement ce processus de différenciation » car « l’Église (musulmane) a, elle aussi, la perspective d’en tirer un avantage » (1). Adil Zulfikarpašić défendait l’identité « bochniaque », sorte de creuset des Musulmans de Bosnie-Herzégovine : cette terminologie sera reprise à partir des années 1990 et désigne aujourd’hui les musulmans de Bosnie-Herzégovine.

    Les plus grandes personnalités politiques bochniaques actuelles avaient il y trente ans des idées très arrêtées sur le rôle exclusiviste de l’Islam en Bosnie-Herzégovine. Mustafa Cerić, actuel « Reis-el-Ulema » – Commandeur des croyants – de Bosnie-Herzégovine et principal dignitaire musulman des Balkans occidentaux, pointait dès les années 1980 dans le bulletin de « l’Association Islamique de Yougoslavie » le danger que représentent la modernité et l’universalisme, donc la différence de cultures, pour l’Islam conçu comme un système de valeurs homogène. Haris Silajdžić, président de la présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine de 2006 à 2010, défendait l’argument suivant dans les années 1980 : les musulmans de Yougoslavie auraient perdu les valeurs culturelles et religieuses qui fondaient leur identité pendant le communisme, ce qui aurait créé un vide spirituel.

    Durant la période titiste, le bulletin officiel de l’Association Islamique de Yougoslavie recensait chaque mois les mosquées, madrasas et autres institutions construites sur le sol yougoslave. L’effort consenti par l’Association Islamique avec le concours de l’État fédéral, pour accroître les biens matériels musulmans, a été considérable de 1968 à 1991. De 1945 à 1974, près de 500 nouvelles mosquées ont été construites en Yougoslavie, soit davantage que sous l’Empire ottoman ! On comptait, pour la seule Bosnie-Herzégovine, 1 036 mosquées en 1974 et en considérant uniquement le premier trimestre 1968, 18 mosquées et 4 madrasas furent ouvertes. La progression foudroyante de la construction d’institutions islamiques, dans le domaine éducatif comme dans celui de l’information, apparaît aussi importante que celle des mosquées. En 1968, « l’Association Islamique » avait imprimé 60.000 exemplaires du Coran en serbo-croate et 20.000 dictionnaires arabe/serbo-croate.

    Autre facteur important d’islamisation, les dignitaires religieux de l’Association Islamique menaient dans les années 1970 une véritable diplomatie religieuse avec le monde musulman. Le Reis-el-Ulema de Yougoslavie a ainsi eu l’honneur d’être visité en 1973 par le colonel Kaddafi, accompagné des ambassadeurs de Turquie, Iran, Pakistan, Libye, Koweït et Jordanie. Des délégations conduites par le Reis-el-Ulema ont pu se rendre la même année en Libye et au Koweit. En 1974, la « Ligue islamique mondiale », représentée par le Roi d’Arabie Saoudite accompagné de docteurs de la foi marocains, envoyait une délégation en Bosnie-Herzégovine. La somme de 250.000$ était allouée à la construction de la Faculté islamique de Sarajevo et la Ligue islamique mondiale adressait « ses remerciements au Maréchal Tito pour les droits et libertés donnés aux musulmans en Yougoslavie ». Les délégations étrangères visitant la Yougoslavie étaient en général frappées par la situation satisfaisante, parfois privilégiée, des musulmans yougoslaves. Une délégation du Koweït parlait ainsi de la Yougoslavie comme d’ « une forteresse de l’Islam en Europe ».

    Ce soutien des grandes puissances musulmanes aux Bochniaques s’accroît dans les années 1990. L’Iran soutient financièrement le régime d’Izetbegović et envoie des Gardes de la Révolution pour entraîner, lors du conflit bosniaque, la 7ème Brigade musulmane  intégrée à l’armée de Bosnie-Herzégovine. L’Arabie Saoudite, outre une aide militaire conséquente (35 millions $ d’armes entre 1992 et 1994), s’est engagée le plus en faveur des Bochniaques. Les interventions répétées au sein de l’ « Organisation de la conférence islamique » pour lever l’embargo sur les armes à destination des Bochniaques ont fini par être entendues au parlement américain, et « l’Association islamique mondiale de secours », que l’Arabie finançait, a réalisé un travail missionnaire d’envergure (envoi de prédicateurs, formation d’imams, cours d’arabe) (2)

    Moudjahiddines et djihadistes en Bosnie-Herzégovine

    Des unités de combattants islamistes arrivent en Bosnie aussitôt après l’entrée des moujahiddines – Combattants de la foi – à Kaboul en avril 1992 ; ils viennent principalement d’Afghanistan et d’Arabie (3).

    Des ONG islamistes coordonnent l’entraînement et la logistique pour le transport de ces unités en Bosnie centrale, près de Zenica et Travnik, où l’unité El Mudjahid naquit en 1992. Au début de la guerre, les mercenaires étrangers combattaient au sein de la 7ème Brigade musulmane de l’armée de Bosnie. Suite à des désaccords avec certains officiers de l’armée bosniaque, ils se sont séparés et ont formé l’unité Zubeir sous le commandement de Sadr al Sudeiri, originaire d’Arabie Saoudite. Le mois d’août 1993 a été la période décisive pour l’organisation des moujahiddines en Bosnie, lorsque le général d’armée bosniaque Rasim Delić ordonna l’intégration des combattants des pays islamiques au sein du 3ème corps d’armée, dans l’unité 56/89 nommée El Mudjahid. Cette unité d’environ 300 combattants a été élargie pendant la guerre avec des moujahiddines locaux. Plusieurs de ses membres seront également utilisés comme instructeurs dans l’armée régulière (4).

    L’unité s’est rendue « célèbre » par la cruauté des massacres perpétrés dans les villages serbes en Bosnie centrale, et par les décapitations de soldats serbes et croates, filmées et utilisées comme matériel de propagande dans la mouvance islamiste (5). Les cassettes vidéo des massacres enregistrées par les membres d’El-Mudjahid entre 1992 et 1995 ont circulé ouvertement en Bosnie-Herzégovine jusqu’en 2001 : elles contiennent des scènes de torture de prisonniers serbes, soldats comme civils, et des visites des camps par l’armée de Bosnie.

    Durant la phase finale de la guerre, en septembre 1995, l’unité « El Mudjahid » participa à l’attaque de Vozuca, plus connue sous le nom d’Opération Ouragan. Deux ans plus tard, en novembre 1997, près de cette ville étaient trouvés des corps mutilés des prisonniers de l’armée serbo-bosniaque. Pour n’avoir pas empêché le massacre de 60 soldats et civils serbes à Vozuca, le TPIY a condamné le commandant en chef de l’armée bosno-musulmane Rasim Delić à trois ans de prison en septembre 1998. Bernard-Henry Lévy, qui a soutenu dans ses écrits et par un engagement sur le terrain, l’armée bosniaque aux ordres d’Alija Izetbegović, connaissait-il les agissements de ces unités paramilitaires?

    Des émirats islamiques en Bosnie

    Après la guerre en Bosnie-Herzégovine, un important nombre de moudjahiddines ayant participé au conflit rejoignirent des réseaux prêts à les orienter vers d’autres djihad (6). Ceux qui avaient des contacts avec des ONG islamiques parvinrent à trouver une petite fonction dans ces organisations, notamment dans leurs bureaux de Zenica ou de Travnik ; d’autres ont constitué des « microsociétés islamiques » et basculé dans la criminalité. Certains des combattants étrangers furent relogés par le gouvernement dans des anciens villages serbes de Bosnie centrale, notamment à Guča Gora, près de Travnik et à Bočinja Donja, près de Maglaj. Les plus radicaux tentèrent d’y créer d’éphémères « Émirats islamiques » en Bosnie.

    Mais le plus étonnant est la couverture donnée à ces anciens djihadistes par les autorités de Bosnie-Herzégovine grâce à la livraison de passeports bosniaques. Munir Alibabić, directeur jusqu’en 2002 de la « Direction fédérale du renseignement et de sécurité de B.-H. » (FOSS) affirmait dans une interview donnée en 2004 au correspondant à Paris de l’Agence de presse yougoslave que, « sur 741 cas de moudjahiddines présents en Bosnie-Herzégovine, 90 ont obtenu la nationalité bosniaque de façon illégale, et plusieurs centaines se sont vu offrir un nouveau passeport avec de fausses adresses ». Sur la totalité des personnes dont la citoyenneté a été contrôlée, plus de 500 étaient inscrites dans les registres d’état-civil du canton de Sarajevo, sur la base de faux titres de séjour ; les autres ont reçu par la suite la citoyenneté bosniaque à Zenica, Tuzla, Doboj, Tesanj et Travnik.

    Sous pression américaine, le gouvernement bosniaque a entamé des poursuites après 2002, mais il restait encore en 2009, selon l’OTAN, près de 600 anciens moudjahiddines en activité dans les réseaux dormants. Selon un fonctionnaire d’État américain, « plusieurs centaines » d’extrémistes islamistes rentrent et sortent chaque année encore de Bosnie-Herzégovine, et ce territoire continue d’être « une destination de repos » pour les membres d’Al Qaïda. La situation est tellement préoccupante que l’OTAN a demandé dernièrement à la police de Republika Srpska de lui prêter main forte dans sa traque des terroristes. Encore en 2005, sur 1052 nouveaux citoyens de Bosnie-Herzégovine originaires d’Afrique et d’Asie, moins de 20 % disposaient d’une adresse permanente (7).

    Dans la région de Zenica, en Bosnie septentrionale, un « Emirat islamique » a existé dans un village montagnard habité à 90 % par les Serbes avant-guerre. Après le conflit bosniaque, quelque 150 ex-combattants d’El Mudjahid dont environ 60 Arabes s’étaient installés dans les maisons abandonnées par les Serbes. Ils imposèrent des coutumes wahhabites et la charia à tous les habitants. Mais en 1999 et 2000, les moudjahiddines provoquèrent des incidents avec les forces de l’OTAN. En réaction, la SFOR expulsait 131 familles fin août 2000. En août 2001, la SFOR estimait que « les moudjahiddines possèdent encore sept maisons dans Bočinja. Mais davantage de familles sont restées » (8).

    Seize années après la fin de la guerre, la situation reste tendue. Adnan Buturović, journaliste de l’hebdomadaire Slobodna Bosna, et l’un des meilleurs spécialistes des réseaux internationaux islamistes en Bosnie, confiait en avril 2004 au correspondant de l’agence Tanjug : « Il y a deux explications : soit ils (les moudjahiddines) sont devenus des « cellules dormantes », soit leur rôle a été de former la génération suivante de moudjahiddines déjà nés (en Bosnie-Herzégovine), et qui sont Bochniaques. Je pense, malheureusement, qu’ils ont déjà établi leur objectif ».

    Alexis Troude, 4/06/2015

    Fin de la première partie.

    Notes et références

    (1)Stane Dolanc, « Autogestion et non-alignement », Revue de politique internationale n°618, Belgrade 1976, p. 5.

    (2) Tashit Mitri, « La Bosnie-Herzégovine et la solidarité du monde arabe », Monde arabe n°139, mars 1993, pp. 125-126.

    (3) Gilles Kepel, Jihad, Gallimard, Paris, 2000 et 2003 (2e édition), pp. 370-375.

    (4) Journal de la SFOR, n° 119, 08/08/2001.

    (5) « El Khatami je tjerao zarobljene fratre da ljube otkinutu glavu » (« El Khatami a forcé les frères emprisonnés à embrasser les têtes coupées »), Slobodna Bosna, Sarajevo, 06/03/2003, p. 7.

    (6) Gilles Kepel note que plus de 300 d’entre eux quittèrent Sarajevo pour Istanbul en 1996, où 100 auraient été dirigés par les services spéciaux turcs (MIT) vers un camp d’entraînement de Chypre du Nord. Deux cents seraient retournés à Jalalabad (Pakistan) ; d’autres seraient partis pour l’Albanie. Cf. Gilles Kepel, op. cit., p. 652 (note 37).

    (7) Mehmet Begovic, “Les étrangers en Bosnie-Herzégovine”, Dani, Sarajevo, 5 août 2005.

    (8) Jean-Philippe Lavigne, « Retour à Bocinja Donja », Journal de la SFOR, 8 août 2001.

    http://www.realpolitik.tv/2015/06/vers-un-nouveau-front-islamiste-dans-les-balkans-occidentaux-premiere-partie-par-alexis-troude/

  • Départ en Syrie : Des jeunes contestent en justice leur interdiction de sortie du territoire français

    C’est sa maman qui a fini par donner l’alerte. Devant les gendarmes, elle a raconté que Mélanie* s’était mise à porter le voile. Qu’elle avait aussi, au fil du temps, coupé tout contact avec ses proches. Agée de 22 ans, cette Mulhousienne demandera, ce mercredi, au tribunal administratif de Paris de lever l’interdiction administrative de sortie du territoire prise à son encontre, en mars, à la suite du signalement de sa mère, inquiète de la voir rejoindre les rangs de Daesh.

     

    « Son seul projet est de partir suivre des études de théologie dans une faculté réservée aux femmes à Riyad (Arabie Saoudite), assure, pour sa défense, l’avocat François Zind. Il n’y a aucun élément concret qui permet de penser qu’elle va partir faire le djihad en Syrie. »

    « Minority Report » à l’heure syrienne

    L’administration française a, elle, jugé « sérieuses » les raisons de croire que Mélanie « projette des déplacements à l’étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes ». C’est en ces termes que la loi antiterroriste, votée en novembre 2014, prévoit désormais d’interdire de sortie de l’Hexagone les jeunes qui pourraient être candidats au djihad.

    Enfant, niqab et mariage forcé : Le destin d’une djihadiste

    Comme dans le film Minority Report où Tom Cruise est pourchassé pour un meurtre qu’il n’a pas encore commis, ces jeunes sont frappés par des mesures restrictives pour la simple raison qu’ils présentent des signes de radicalisation liée à l’islamisme laissant penser qu’ils vont commettre un délit. En l’occurrence pour Mélanie, convertie depuis ces 16 ans, c’était la fréquentation d’un groupe issu de la « mouvance piétiste salafiste », selon François Zind.

    « On peut se retrouver avec des individus qui font n’importe quoi »

    « Devant la recrudescence du nombre de départs, le législateur a tenté de trouver une solution, analyse l’avocat. C’est sûr que le combat n’est pas facile. Mais ces interdictions de sortie du territoire ne sont pas une bonne réponse. »

    D’autant que, selon plusieurs experts, elles peuvent avoir des conséquences désastreuses. « En empêchant les jeunes de partir là-bas, on peut se retrouver avec des individus qui font n’importe quoi sur le sol français au nom de l’Etat islamique sans jamais avoir été en contact avec cette organisation », décrypte ainsi l’islamologue Mathieu Guidère. [....]

    La suite sur 20 minutes.fr

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Depart-en-Syrie-Des-jeunes

  • L’Arabie, le Qatar et la Turquie ont conclu une entente contre la Syrie

    Lu ici :

    "Le site lanceur d’alerte WikiLeaks annonce que des documents ayant fuité des ministères saoudiens révèlent que l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie ont conclu une entente secrète il y a trois ans pour renverser le gouvernement syrien.

    Le fondateur de WikiLeaks Julian Assange a déclaré ce dimanche à la chaîne de télévision russe Rossiya-1 que les États-Unis, la France, et la Grande-Bretagne ont également été impliqués dans l’accord secret en 2012.

    Il a ajouté que des alliés de Washington au Moyen-Orient, tels que Riyad, ont agi de manière plus agressive, allant même à l’encontre des directives des États-Unis.

    WikiLeaks a commencé début Juin à publier des centaines de milliers de documents diplomatiques et gouvernementaux, parmi lesquels des rapports internes des organisations et des communications du gouvernement saoudien entre les ambassades du pays à travers le monde. [...]"

    Michel Janva

    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html