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international - Page 1269

  • « A vouloir se faire, l'Europe se défait. »

    « Qu'est-il possible, alors ? »

    « Ce qui serait possible, c'est le développement des souverainetés nationales et leur entente par mise en évidence de leur intérêt commun sur un très petit nombre de thèmes. Par exemple, leur sécurité intérieure et extérieure, mais qui n'irait pas jusqu'à supposer une défense commune...

    « Vous ne sauvez même pas le projet de défense européenne? »

    « Bien sûr que non. Soyons réalistes. Le mot « défense » suppose d'abord qu'il y ait un adversaire contre lequel on se défend. Pour l'instant, personne ne sait où il est. Deuxièmement, il faudrait que cet adversaire soit reconnu communément par un ensemble de peuples qui se croient menacés par lui. Je vois mal comment un adversaire pourrait aujourd'hui menacer simultanément le Portugal, la Suède, la Grèce, l'Irlande. Ce n'est pas imaginable. Troisièmement, je ne vois pas pourquoi des peuples aussi différents que les Anglais, les Portugais ou les Italiens trouveraient des raisons communes pour envoyer leurs militaires se faire tuer là ou les intérêts français seraient menacés. Ce n'est pas tenable.
    La seule chose qui est immuable sur cette terre, c'est le temps. Tout peut être modifié sauf le passage du temps. On ne peut pas revenir en arrière. C'est un mystère peut-être, mais c'est comme ça. Or la création politique dont nous rêvons suppose la suppression du passage du temps, donc quelque chose
    d'inhumain, de suprahumain, d'étranger. »

    « C'est donc voué à l'échec? »

    « A l'échec ou pour le moins à la sortie de l'Europe hors de l'histoire. L'Europe n'aura plus d'autre solution que de se mettre dans la mouvance américaine, ou bien dans la mouvance du tiers-monde, mais elle ne le fera pas parce qu'elle appartient au camp des riches. Du fait de son association avec le clan des riches, elle aura à subir la vengeance des 4 milliards de sacrifiés actuels, alors que traditionnellement, de par son histoire, rien ne la désignait à un tel destin. »

    « Voulez-vous dire que l'Europe faussement unie sera incapable de faire face à l'immigration et à la pauvreté, qu'elle ne pourra endiguer la fracture économique entre les nantis conduits par les États-Unis et les déshérités de la planète? »

    « Effectivement. L'Europe unie est un mythe. La fracture, la fissure s'accroît entre le monde nanti et environ 4 milliards d'êtres humains installés dans la zone Asie Pacifique pour la plupart (la Chine, l'Inde, le Pakistan, l'Indonésie, la presqu'île du Sud-Est asiatique), notamment par les différences de niveau de vie, elles-mêmes conséquences de la « marchandisation » du monde dont les États-Unis sont le fer de lance.

    Avant la dislocation de l'URSS, l'humanité vivait avec deux perspectives: celle de l'économie de marché à l'américaine, avec son brio, ses succès mais ses difficultés aussi, et la perspective socialiste, marxiste-léniniste. Les peuples avaient le choix entre une perspective ou une autre, mais les plus miséreux pouvaient patienter en ayant l'espoir de pouvoir, un jour, s'associer soit à l'une soit à l'autre de ces deux options. La destruction de l'Union soviétique, la disparition de l'espérance marxiste-léniniste ne laisse plus comme seule hypothèse que celle de l'économie de marché et de l'économie libérale. Aussitôt, le monde a commencé à regarder cette économie libérale et à la scruter avec un intérêt redoublé parce qu'elle était devenue son seul avenir, en essayant de distinguer ce qu'elle a de bien et ce qu'elle a de mal. Les réalisations de l'économie de marché sont certaines, évidentes, mais la fracture socio-économique s'est considérablement agrandie depuis trente ans, depuis qu'il n'y a plus compétition entre les deux systèmes, depuis que celui qui l'a emporté peut agir avec plus de liberté, plus d'arrogance, plus de fermeté et pousser son système à bout sans avoir à redouter la compétition d'un autre système. Le résultat se résume par quelques chiffres : environ 1,2 à 1,3 milliard d'individus vivent actuellement dans le monde avec moins d'un dollar à dépenser par jour.

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    Il y a quarante ans environ, les 20% des plus riches dans le monde avaient un revenu 30 fois supérieur à celui des 20% les plus pauvres. Aujourd'hui, l'écart n'est plus de 30 mais de 85. Les plus riches sont 85 fois plus riches que les plus pauvres. Le fossé s'est multiplié par trois. Au regard de ce bilan, on est en droit de se poser la question de savoir si le système ne bénéficie qu'à une minorité en laissant les autres dans la misère. Cette minorité étant justement celle dont nous parlions précédemment, c'est-à-dire celle qui, en se référant aux lois de la nature, s'estime être la plus forte, la plus intelligente, la plus habile, la plus travailleuse au détriment de l'autre qui se trouve délibérément marginalisée. Comme les dons humains sont inégalement répartis, cette sélection s'opère d'une manière de plus en plus étroite, sur une pointe de plus en plus aiguë alors que la base, misérable, s'accroît. Autres chiffres: actuellement, à peu près un habitant sur trois de la planète n'a pratiquement pas accès à l'énergie. Les pays les plus riches consomment environ 25 fois plus d'énergie que les pays les plus pauvres, et les pays les plus riches comptent à peu près 1 à 1,2 milliard d'habitant sur les 6 milliards de la planète.

    L'énergie étant un facteur de développement, les 4,5 milliards restant commencent à se rendre compte qu'ils son condamnés à la médiocrité, sinon à la misère.

    Le phénomène qui semble nouveau, c'est qu'on commence à scruter avec avidité le développement de l'économie de marché et à élever des critiques contre ce qu'elle entraîne: on conteste le privilège d'une minorité - les gens que la nature aurait favorisés - et on souligne les appétits de tous les autres de plus en plus nombreux. Car, en plus, il faut tenir compte de l'accroissement de la population, du fait qu'on va passer de 5 à 6 milliards à 7,5 milliards dans vingt ans. Ce milliard et demi de plus, à 90%, appartiendra à la partie pauvre. Le nombre de « revendicateurs » sera de plus en plus grand et la minorité de plus en plus étroite, et, donc, les conditions d'existence seront de plus en plus difficiles.

    C'est pourquoi si l'Europe veut équilibrer cette fuite en avant, elle ne peut le faire qu'en tenant compte de son histoire, et non en s'alignant sur le modèle américain qui, à tout prendre, est trop élitiste, marginalisant trop d'êtres humains. »

    « Comment expliquez-vous que le ministre des Affaires étrangères, Hubert Védrine, affirme que la France dispose de plusieurs atouts pour affermir sa position dans le monde, le conseil de sécurité de l'Onu, la force de dissuasion, ses alliances, l'appartenance au G8, l'influence diplomatique, la force économique et la vitalité de ses entreprises ? Comment expliquez-vous cette réponse ? »

    « La réalité est tout autre. Hubert Védrine est membre du gouvernement et il a été le conseiller de François Mitterrand pendant des années. Il est au courant de tout ce qui s'est fait en France, mais les résultats sont décevants. Dans le domaine de la dissuasion nucléaire, il oublie que nous avons parié sur la « simulation » (alors que les États-Unis ne lui font pas confiance et entendent poursuivre leurs expérimentations atomiques) et commis l'irrémédiable.
    Nous avons détruit notre centre d'essai du Pacifique et dispersé ses équipes de scientifiques; nous avons fermé Pierrelatte, centre de fabrication d'uranium enrichi; nous avons fermé Marcoule; nous venons de renoncer à Super-Phénix; nous avons fermé l'un des arsenaux fabriquant des sous-marins nucléaires.
    Maintenant nous ne sommes plus capables de fabriquer qu'un sous-marin nucléaire tous les dix ans à peu près, nous avons une force de dissuasion réduite au minimum. Nous avons abandonné le plateau d'Albion qui était notre seule possibilité d'installer des missiles capables en trente minutes de dissuader, demain, les missiles chinois, par exemple. Toute l'Europe est donc devenue ouverte aux futures menaces dont les Américains se protègent le plus.
    On l'a vu récemment lorsqu'il s'est agi du bouclier spatial du président Bush, invoquant notre propre protection nous nous mettrons sous la coupe américaine.

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    Comme nous l'avons déjà fait pendant la guerre du Golfe en menant une guerre où nous avions tout à perdre et rien à gagner et comme nous l'avons fait en acceptant la destruction des Balkans à quoi nous n'avions absolument rien à gagner non plus. »

    « La politique de défense européenne est donc un leurre? »

    « Oui. Elle est un leurre parce que, pour qu'il y ait une politique de défense européenne, il faudrait d'abord qu'il y ait une politique européenne, une stratégie européenne, un gouvernement européen, un état-major européen. Tout cela n'existe pas.
    Ensuite, cette politique, si elle veut être effective ne peut avoir que des visées universelles, comme la politique américaine. Depuis un siècle l'Amérique combat sur des lignes extérieures. Elle combat au-delà des océans. Elle a combattu en Indochine, elle a combattu en Europe. Elle a un concept d'emploi des forces à distance. Nous, nous avons combattu sur ce qu'on appelle, dans notre métier, des lignes intérieures, c'est-à-dire que nous combattons sur 300 ou 400 kilomètres, eux, sur 4 000. Pendant un siècle, leur mentalité, leurs armements, leurs études ont été orientées vers la projection de la force à distance. Parce qu'ils ont craint la Russie, ils ont dépensé des milliards pour créer l'instrument d'intervention à distance qu'ils possèdent aujourd'hui, ce que  l'Europe n'a pas fait. Nous sommes à un quart de siècle d'écart, au moins, Par rapport à eux. »

    « Mais alors quels sont aujourd'hui les atouts de l'armée française? C'est une armée fantoche ? »

    « Une guerre intereuropéenne paraît monstrueuse, et envisager la force à distance comme le voulait Léotard dans sa programmation de 1994, en projetant des dizaines de milliers d'hommes jusqu'à des milliers de kilomètres de distance, est une ambition démesurée. Pour cela, il faut des cargos aériens et maritimes dont nous ne disposons pas.
    Au moment où il formulait ce projet, la France était riche de 22 avions « Transall ».

    Or, il faut des cargos maritimes - que les Américains appellent des
    RO-RO (roll in roll out) - pour l'embarquement et le débarquement, il faut aussi des bateaux rapides qui emportent des milliers de tonnes de ravitaillement, il faut des avions de protection du point où l'on débarque, donc avec un long rayon d'action, il faut des batteries d'engins balistiques mobiles de manière que l'adversaire ne commence pas à vous détruire balistiquement à l'endroit où vous débarquez. Nous avions des engins balistiques modernes, c'était l'Hadès, on l'a arrêté. »

     

    « Et le porte-avions, le Charles-de-Gaulle? »

    « Le « Charles-de-Gaulle » fait hélas partie des fiascos de la Ve République à côté du sang contaminé, de l'alimentation carnée des herbivores, de l'hépatite B, de l'hôpital Pompidou... Ils sont nombreux et tous ont pour origine l'inadéquation entre l'ambition et les moyens. Il aurait fallu ne pas lancer la construction d'un porte-avions sans s'être assuré d'avoir assez de moyens pour le construire dans un délai normal. Comme sa construction s'est étalée sur quatorze ans, bien évidemment, les ingénieurs qui ont eu la possibilité d'être embauchés ailleurs sont partis. »

    « L'autre phénomène du même genre, c'est le Rafale. »

    « Bien immérité est cet autre fiasco, assez exemplaire. En voilà l'histoire. Au départ, il s'agit d'une réalité technique incomprise. Depuis 1960, date à partir de laquelle on vole à deux fois la vitesse du son, soit à Mach 2, on se heurte au mur de la chaleur. Non plus au mur du son que l'on franchit, mais au mur de la chaleur que l'on ne franchit pas, parce que les métaux de revêtement des avions résistent mal à la chaleur. Tous les avions au monde piétinent devant le mur de la chaleur. Ils font tous Mach 2, Mach 2.2, Mach 2.3, Mach 2.4, etc. Or pourquoi auparavant un avion se démodait-il?
    C'était à cause de la vitesse. Il y a cinquante ans on gagnait 20 ou 30 kilomètres par an. Au début de la guerre de 1939-1945, les chasseurs volaient à 450 kilomètres à l'heure, ils étaient démodés par rapport à un avion qui atteignait 600 kilomètres à l'heure, et puis 700... Quand on est arrivé à 1 200 kilomètres à l'heure, la vitesse du son, on a piétiné un petit peu, puis on a franchi le mur du son. (Dans l'air aux températures habituelles, elle vaut environ 340 m.s ou 1 224 km/h. Cette vitesse varie cependant en fonction de l'altitude et de la température.)

    On est arrivé à 2000, 2400 kilomètres l'heure. Là, c'est l'arrêt. La conséquence, c'est que les avions ne se démodent plus : leur cellule n'a plus qu’à être transformée puisqu'elle se heurtera de toute façon au mur de la chaleur.

    Autrement dit, le même avion demeure opérationnel, aux équipements électroniques près qui peuvent être adaptés pendant quarante à cinquante ans.

    Par exemple, le premier Mirage III qui a volé en novembre 1956 est encore perfectionné et en service, soit plus de quarante ans après. Il faut généralement, à un bureau d'études, cinq ans pour mettre au point un nouvel avion: cinq ans pour étudier le prototype et le construire, puis pour construire l'outillage et démarrer la construction en série. Pour alimenter les bureaux d'études, il faudrait lancer un avion tous les cinq ou dix ans. Mais une telle cadence est devenue inutile. En revanche, si on lance un nouvel avion tous les quarante ans, alors le bureau d'études meurt. »

    « Comment peut-on sortir de ce dilemme ? L'industrie aéronautique est florissante ? »

    « Ce dilemme s'est manifesté dans les années soixante-dix. C'est ainsi qu'en décembre 1976 Marcel Dassault s'est rendu auprès de Valéry Giscard d'Estaing. Marcel Dassault lui apportait deux projets d'avions: un bimoteur destiné aux grandes distances et un autre avion dérivé de la famille des « Mirage III » que Dassault avait appelé le Mirage 2000 et qui était un avion en delta certes perfectionné, mais dérivé du Mirage ordinaire. Voilà ce qu'il proposait à Giscard d'Estaing: si vous financez le bimoteur, sur mes petites économies, je financerai le mono. Mais Valéry Giscard d'Estaing qui n'était pas auvergnat pour rien lui a proposé l'inverse: le financement par l'État du monoréacteur, lui laissant le financement du biréacteur. Dassault s'est incliné mais en sortant de l'Élysée il savait que le Mirage 4000 ne pourrait être mené à bien parce qu'il n'avait pas les moyens de développer cet avion: c'est-à-dire de l'étudier, de construire le prototype, de l'essayer et d'élaborer l'outillage correspondant. On avait encore un espoir, c'est que l'Irak l'achète, mais on tombait en pleine guerre lrak-Iran.

    Donc le Mirage 4000 a été abandonné et l'on s'est tourné vers le Mirage 2000. C'était donc en décembre 1976. On se met au travail, cinq années s'écoulent, l'avion prend forme. A ce moment-là, arrivent au pouvoir François Mitterrand et, au ministère de la Défense, Charles Hernu, qui a voulu attacher son nom à un avion nouveau. Il a donc décidé de lancer un nouvel avion dont il a voulu qu'il soit européen. Nous avons commencé à prendre contact avec les Allemands, les Anglais, les Espagnols, les Italiens...

    Les Allemands et les Anglais ont donné leur accord à condition que cet avion soit construit autour d'un moteur qu'ils avaient financé et qui est monté sur les avions « Tornado ».

    Mais dans ces conditions, c'était la mort de la Snecma qui, justement pour ce nouvel avion, avait passé licence d'un moteur américain. »

    « L'accord ne s'est pas conclu. Le Rafale est un avion français. »

    « Oui et nous pouvons en être fiers parce que c'est une réussite remarquable. Mais là intervient la nouvelle donne: tout remarquable soit-il, il y a très peu de commandes. Comme l'argent était rare et que l'on entretenait déjà le 2000 lancé cinq ans plus tôt, et que la coopération avec les Anglais et les Allemands avait échoué, la fabrication du Rafale s'est faite à la petite semaine. Cet avion, qui a été voulu en 1983, entrera en service en 2004 ou 2005, c'est-à-dire un quart de siècle après sa conception.
    C'est d'autant plus absurde que les Allemands et les Anglais se sont empressés d'adjoindre à leur projet les Italiens et les Espagnols, si bien qu'aujourd'hui près de 400 de leur avion leur ont été commandés, alors que nous n'avons reçu commande que d'une quarantaine du nôtre.

    Or, comme pour tout objet de série, le prix d'un avion diminue avec le nombre. Les 30 premiers coûtent trois fois plus chers que le 300e. Les Allemands et les Anglais ont déjà dépassé la barre du 300e alors que nous nous trouvons avec un avion beaucoup trop cher et, donc, inexportable.
    Pour parachever le tout, le gouvernement actuel a pratiquement cédé la société Aérospatiale aux Allemands pour former la société EADS qui naturellement va promouvoir l'avion germano-anglais.
    Ainsi, une firme française va promouvoir la vente d'un avion rival.
    Voilà une série d'erreurs dont le contribuable fait les frais car on a dépensé des milliards pour ce Rafale et la France perd un de ses joyaux avec l'un des meilleurs bureaux d'études d'avions de combat. Domaine où elle a excellé. »

    « Et le service militaire ? »

    « Encore un exemple d'une politique militaire française discutable. Pendant toute la période de la guerre froide, au moment où nous avions à faire face à 230 divisions russes, ainsi qu'à des dizaines de milliers d'avions et à 54 000 chars d'assaut, que nous ayons en France une armée classique ou non ne servait pas à grand chose. Notre apport à l'alliance Atlantique, 300 ou 400 chars d'assaut, était modeste. A cette époque, nous aurions pu faire l'impasse sur le service militaire avec seulement une petite armée hautement spécialisée mettant en œuvre une force nucléaire qui, elle seule, avait un véritable pouvoir égalisateur et permettait d'écarter toute tentative d'agression soviétique. Nous ne l'avons pas fait. Au contraire, nous avons consacré, pendant quarante ans, 80% des dépenses militaires à des forces classiques.
    Aujourd'hui que la puissance soviétique a disparu- nous considérons qu'elle a disparu puisque nous avons stoppé tout effort nucléaire -, nous supprimons le service militaire, oubliant qu'il avait deux avantages.

    Le premier est son rôle égalitaire. Puisque nous sommes un pays que nous voulons multiethnique et  multiconfessionnel, un pays devant se préparer à des chocs de civilisations, le service militaire aurait pu être pendant douze ou dix-huit mois un creuset permettant de donner aux nouveaux venus l'assurance d'être traités en égaux avec les  citoyens français, en créant la possibilité d'un  travail en équipe quelle que soit leur origine. Et puis, il remédierait à l'individualisme congénital des Français en leur apprenant à travailler en commun et en complétant leur formation de citoyens. »

    « Il ne reste plus que le football? »

    « Reste effectivement le football mais pour bien peu de joueurs. L'autre avantage du service militaire était de permettre d'avoir des effectifs suffisamment importants pour quadriller le territoire et maintenir cet ordre qu'implique la multiethnicité dont je parlais tout à l'heure, par une simple politique de présence que l'on demande maintenant à la police.
    Au fond, on demande à la police de reconstituer une armée parallèle intérieure. Les propos d'Hubert Védrine correspondent à ce qu'il aurait aimé que fût la situation, mais non à ce qu'elle est. »

    « Il n'y a donc pas d'autres manières, selon vous, de faire l'histoire et de s'accomplir dans le temps en dehors de ce trépied que constituent la souveraineté, la puissance et l'indépendance? »

    « Tout est lié. L'indépendance d'un État lui permet de mener sa politique financière, sa politique économique, sa politique militaire, sa diplomatie, sa politique sociale. Dès que vous touchez à l'un de ces facteurs, vous mettez tout le système par terre.
    Avec l'euro, la France est entrée dans un carcan financier qui avantage certainement les grosses entreprises qui n'ont plus de problèmes de change, mais en contrepartie elle ne peut plus jouer sur la dévaluation de sa  monnaie pour remédier au problèmes de productivité.
    En conséquence, si par un miracle quelconque la productivité d'un pays concurrent devenait plus grande, elle serait obligée de baisser les salaires, pour compenser la difficulté de productivité. Cela peut créer des problèmes sociaux, car les répercussions seront bien évidemment sociales. Il est incohérent par exemple d'imposer les trente-cinq heures et en même temps de vouloir un régime libéral.

    Si vous êtes libéral à l'américaine, alors vous défendez la liberté du travail, « que le plus fort l'emporte, que le plus faible soit marginalisé », avec une compensation morale consistant à dire que l'enrichissement des plus riches  aidera les plus pauvres à sortir de leurs difficultés s'ils le peuvent. Nous prétendons, à la suite de Maastricht, adopter ces mêmes méthodes du libéralisme tout en mettant un frein sur le travail, ce qui n'est pas très cohérent. Notre idéal devrait être l'égalité des chances. Or le système libéral actuel est
    inégalitaire. Nous n'avons pas vécu deux siècles de luttes sociales pour, maintenant, nous rallier à l'ultralibéralisme.
    Entre le système américain, inégalitaire, et le système soviétique, irréalisable, l'Europe avait trouvé le juste chemin. Or voici qu'on est sur le point de l'abandonner. »

    http://www.lesmanantsduroi.com

  • De charybde en scylla

     

     

     

    La consultation de Google Analytics nous signale une forte hausse des visiteurs provenant d'Afrique du Nord qui, lorsqu'on les additionne, sont en troisième position entre Canada et Belgique. Que l'on ait recherché l'avis de Royal-Artillerie serait flatteur mais il est probable qu'à l'exception de la Tunisie où la moyenne du temps passé est de 1min 36s, - ces lecteurs avaient été accrochés au train des équipages par un billet monarchiste de septembre 2006 : Le Roi de Carthage - les autres ont fait le tour des blogues royco pour savoir ce que nous pensions de la "révolution en marche". Temps passé et taux de rebond nous l'indiquent. Allons-y donc.
    La démocratie réelle résoudra-t-elle les problèmes causés par la dictature ? Bien sûr, dès que l'on expulse la dictature ! à la réserve près qu'ils n'en sont pas tous issus mais résultent aussi des fondamentaux de chaque pays et de la pertinence du régime économique choisi, parfois il y a longtemps.
    Quand on creuse, on s'aperçoit que les gens réclament d'abord la justice au sens large et le minimum vital, pas la lune ! La captation de la valeur ajoutée produite dans le pays par une caste de vampires leur est donc insupportable, bien avant qu'ils ne s'indignent de l'insuffisance de cette valeur ajoutée globale et n'en comprennent les raisons.
    Au Mahgreb, le cas de l'Algérie est à part. C'est un pays riche et prometteur colonisé par les familles issues des leaders de la guerre d'indépendance qui se sont réparti entre elles les flux de biens et matières. Le gouvernement est chargé d'agiter le tapis pour les maintenir dans leurs rentes respectives. Elles ne libèreront le pays que gavées à en crever, et ce ne semble pas être pour demain, les jeunes générations comptant bien prendre la suite.
    Le cas du Maroc est spécifique mais pas autant qu'on l'analyse. Le Makhzen marocain n'est pas une aristocratie éclairée mais une grille féodale qui régente tout le royaume, sous le regard d'un roi entravé qui a beaucoup déçu, du moins ceux qui ne le connaissaient pas avant.
    Les révoltes spontanées que nous observons dans le monde arabe ne sont plus mises à feu par le nationalisme, la lutte contre l'Occident, la défense des ethnies ou cultures minoritaires, ou même la faim. Elles sont déclenchées par le gap entre le monde libre et le monde arabe, l'insupportable défi de libertés en tous genres que leur vendent sur l'écran d'ordinateur les "pourrisseurs" anglo-saxons et leurs affidés européens. C'est CocaCola et les jeans Levi's 504 qui ont sappé le communisme. Aujourd'hui, Yahoo, Google, Facebook, Twitter ont pris la rélève de la subversion douce.
    Les fondamentalistes musulmans le savent qui poussent à élargir le gap pour retourner à la charia et à la civilisation de piété et grandeur d'un passé lointain, mais de toutes les fermentations qu'ils ont semées, aucune n'a eu l'effet déclencheur spontané. Toutes leurs manifestations bruyantes sont organisées et soigneusement encadrées, ce sont des défilés. Ils rament maintenant partout derrière les "libéraux" en Jordanie, en Egypte. Ailleurs ils sont carrément dépassés.
    Revenons à la Tunisie qui est le "pays sympa" d'Afrique du Nord. Time Magazine avait fait un article en novembre 2007 que nous complétions d'une entame enthousiaste : Ce pays démuni de tout sauf de courage a émergé jusqu'à devenir un petit dragon arabe sur le modèle asiatique. Et nous y combattions la rage démocraciste des Américains qui voulaient y forcer (déjà) leur modèle, par moult exemples de peuples prospères sans démocratie, en commençant par une question qui fâche, toujours la même : A quoi cela sert-il de promouvoir urbi (à l'ONU) et au monde les déclarations des droits de l'homme et du citoyen, si au final il s'en tape, ne s'intéresse qu'à la paix des villes et des champs, à l'éducation de ses gosses, à mettre un peu d'argent à la banque ? S'est-on posé la question de savoir si le citoyen veut l'être ? Des agitateurs "contre-révolutionnaires" mettent le ver dans la pastèque cérébrale en démontant la manipulation des puissants ou des riches sous les yeux incrédules des électeurs, en leur suggérant de laisser la stratégie entre les mains de professionnels honnêtes débranchés de la machine à fric. Hurlements des idéologues de l'égalitarisme pour qui c'est de la pornographie. Or les familles dynastiques de qualité peuvent jouer ce rôle désintéressé. Et les peuples ne s'y trompent pas qui naturellement privilégient aux affaires publiques les familles qu'ils connaissent.
    C'est une définition de l'aristocratie comme régime politique, et les peuples qui lui préfèreront l'égalistarisme français seront malheureux, éternels insatisfaits, puisque le ressort de ce système est la promesse de satisfaire des envies réputées toutes légitimes. On sait bien que ce n'est pas possible sur terre, mais quel slogan mobilisateur !
    Pour le moment, tout laisse accroire que l'Opinion recherche un homme providentiel - Ben Ali le fut en son temps quand il débrancha le géronte Bourguiba -, homme fort en pays de caïds qui va s'entourer des rois-mages pour redonner du travail à tous, après avoir fait des élections à la proportionnelle pour inaugurer le grand cirque des tribuns télévisuels. C'est tout vu.
    De bonne foi, si le peuple tunisien est en quête d'un Etat juste qui favorisera la croissance économique pour assécher les poches de misère et donnera à chacun sa chance - attention, courage ! - il aurait intérêt à étudier une restauration monarchique qui est le mode représentatif le moins cher et le plus sûr en termes d'image extérieure, d'unité nationale et d'incarnation d'une vrai souveraineté. La dignité retrouvée de la fonction déteindra sur les étages subalternes où travaillera le nouveau gouvernement démocratiquement élu par un processus adapté aux moeurs du pays.
    Evidemment que les tuteurs imposés (Etats-Unis, France, UE) déconseilleront ce choix qui en creux dénonce leur illégitimité, puisqu'ils sont les purs produits éphémères de la démocratie retravaillée à dessein et n'entendent pas laisser à autrui un avantage de temps long qui leur est inaccessible. Dès fois que ce petit pays deviendrait un Hong Kong à la charnière de la Méditerranée occidentale et orientale ! Vous n'y pensez pas !
    Que le peuple tunisien se tienne à distance aussi de cette machine à normaliser tous les comportements que sera l'Union Pour la Méditerranée. Qu'il choisisse le grand large, sa position géographique s'y prête.
    Finissons par les armes de la maison des Bey de Tunis.
    Qu'elles vous donnent envie, amis de Carthage.
    http://royalartillerie.blogspot.fr
    Sites tunisiens parlant de monarchie :
    - Royaume de Carthage
    - Réveil tunisien
    - Nawaat
    Les deux billets de Royal-Artillerie cités dans celui-ci sont :
    - Le Roi de Carthage
    - La rage démocratique
  • Oui, on peut gagner la guerre contre les Taleban… mais qui le souhaite vraiment ?

    Article paru dans la rubrique Débats du Figaro du 28/5/07

    En Afghanistan les Américains, avec près de 30 000 hommes, continuent à mener non sans raison la guerre du ressentiment. Les Européens en revanche, qui n’alignent  pas moins de 20 000 soldats,  sont surtout concernés en cette terre lointaine par la drogue contre laquelle ils devraient lutter plus fermement.

    Cliquer sur la carte pour agrandir

    S’il s’agit de gagner ce combat, l’objectif prioritaire doit être le « nerf de la guerre talebane», ces  milliards de dollars que rapporte la vente,  surtout en Europe, des 600 tonnes annuelles d’héroïne afghane. Avec cet argent les Taleban équipent,  arment et rémunèrent  les révoltés pachtouns, se procurent les services de spécialistes pointus, notamment pour les explosifs,  tout en préparant l’acquisition de missiles anti-aériens qui, comme les stinger américains de naguère, pourraient un jour emporter la décision.

    Que la culture du pavot cesse et les Taleban ne pourront plus  soutenir l’effort de guerre que par leurs stocks d’héroïne.

    La question qui se pose dès lors est de savoir si on peut  éradiquer le pavot et détruire les stocks.

    La première opération est réalisable si l’on procède énergiquement avec l’aide d’un gouvernement afghan décidé et des 100 000 hommes de la Police et de l’Armée nationale afghane (ANA) en cours de formation: l’éradication n’a-t-elle pas été effectuée en deux ans, de 1999 à 2001, par les Taleban eux-mêmes qui, au nom du Coran, s’étaient mis à lutter contre la drogue ? Dans ce but, ils ont été expéditifs: les  cultivateurs de pavot ont été menacés de la peine de mort et des exécutions publiques ont eu lieu. Résultat : dès 2001 la zone talebane n’était  plus productrice d’opium.

    La destruction des laboratoires de fabrication et des stocks est plus difficile car les uns et les autres sont disséminés dans les localités. Dans ce cas, même si l’on sait  où se trouvent ces laboratoires et ces stocks, les frappes aériennes ne peuvent être « chirurgicales ». Il y aurait beaucoup de dégâts collatéraux dans ce qui deviendrait  une guerre impitoyable. Pourtant l’appareil de production de narcotiques serait vite détruit et, en deux ans, les stocks fondraient.

    Une telle action exige que nos troupes quittent les camps fortifiés où, à l’imitation des Américains, elles se sont enfermées laissant les révoltés contrôler la moitié du territoire: 11 000 soldats à Bagram, 8 000  à Kandahar, autant à Kaboul, Djallalabad, etc, se morfondent à l’intérieur de points d’appui vulnérables comme, jadis, Danang ou Dien-Bien-Phu …

    Base de Bagram

    Kandahar

    En dehors de ces « valets d’arme », l’effectif des troupes en mesure d’être  engagées sur le terrain ne dépasse pas 10 000 h, ce qui est notoirement insuffisant. En fait, avec 25 000 véritables combattants, il faudrait recourir à un éclatement en petites garnisons de deux à trois cents hommes, épaulés par des unités de l’ANA,  dans tous les districts « chauds » de la moitié sud du pays. L’appui aérien serait intensifié et le droit de poursuite utilisé dans la zone tribale pakistanaise, refuge notoire des rebelles. Parallèlement, les paysans ayant perdu leur gagne-pain seraient indemnisés et équipés pour de nouvelles cultures de substitution.

    Tel est le prix à payer pour une guerre de pacification ayant quelques chances de réussite.

    Qui est prêt à une telle action ? Personne !

    Il faut tout d’abord constater que les interventions menées  de nos jours, où que ce soit, contre la drogue sont étonnamment pusillanimes. Du producteur afghan au consommateur européen, le trafic porte sur des dizaines de milliards de dollars. Il suscite des profiteurs directs, éminemment condamnables, mais aussi et surtout des bénéficiaires indirects qui ne se sentent pas coupables. A Istanboul, Londres, Rome ou Paris, sur la Côte d’azur ou la Costa brava, des institutions influentes, financières ou commerciales,  ont pris l’habitude de fonctionner avec un argent douteux et n’entendent pas  voir disparaître ce revenu. Le malaise économique est tel aujourd’hui que le déséquilibre qui résulterait d’une attaque frontale contre l’opium pourrait être la goutte faisant déborder la coupe des désordres. Et d’aucuns s’ingénieraient alors à profiter de la crise pour en revenir  à la situation actuelle: une  sorte de cohabitation secrète avec la drogue.

    Par ailleurs, bien peu d’armées sont prêtes à en découdre  avec les Taleban. Chaque nation impose des restrictions d’emploi spécifiques pour le contingent qu’elle octroie à tel point que l’OTAN, qui dirige la coalition, a bien du mérite à mener malgré tout des opérations. De toute façon, comment un soldat casqué, engoncé dans un gilet pare-balle, surchargé d’un invraisemblable bric-à-brac et  qui emporte boisson et nourriture, peut-il rivaliser en montagne avec un guerrier équipé d’une seule kalachnikov, de quelques chargeurs, qui connaît le terrain et vit sur le pays? Le contrôle du ciel dont disposent encore les Occidentaux n’est pas suffisant pour compenser ce désavantage terrestre.

    Dans ce contexte, il ne resterait plus qu’à envisager le maintien du «conflit de moyenne intensité » : il devrait permettre d’attendre la relève prévue  en 2010 par l’Armée nationale afghane. Tout le monde  y trouverait son compte, même les drogués ! L’inconvénient est que certains  fanatiques ne l’entendent pas de cette oreille et augmentent la violence des combats. En même temps, la corruption et le pourrissement qui résultent des trafics continuent à gangrener tout le pourtour de l’Afghanistan quand ils ne gagnent pas jusqu’à nos banlieues. La contagion est telle qu’un jour viendra où nous serons obligés de mener pour de bon la guerre contre la drogue,  mais, à force  de  reporter les échéances, cette lutte n’aura plus lieu en terre afghane mais chez nous !

    René CAGNAT, Colonel (e.r.), ancien attaché militaire en Asie centrale http://www.lesmanantsduroi.com

  • États-Unis : Le gaz de schiste s’infiltre jusque dans les facs

    Autorisation de forage dans les facs, collusion entre les chercheurs et les foreurs… En Pennsylvanie, le gaz de schiste trouble la vie des universités.

    Loi sur « le développement des ressources minérales indigènes ». Contrairement à ce que son nom suggère, la loi votée par le gouverneur de Pennsylvanie Tom Corbett en octobre 2012 ne concerne pas les droits des communautés indiennes riveraines, mais certains propriétaires des sous-sols de l’Etat : précisément les 14 universités publiques de Pennsylvanie. Plusieurs d’entre elles sont en effet situées au-dessus du fameux « Marcellus shale », un des principaux gisements de gaz de schiste américains.

    Avec cette loi, les présidents d’université ont désormais la possibilité d’autoriser le forage sur leurs campus, pour en extraire du gaz ou du pétrole. L’intérêt ? Leur permettre d’augmenter leurs ressources financières, sur fond de coupes dans les budgets de l’éducation publique.

     

    Baisse des subventions aux facs

    Pour justifier cette autorisation, qui a provoqué une levée de boucliers chez des organisations environnementales et étudiantes, le gouverneur Corbett met dans la balance les réductions de ses subventions aux universités, du fait de la crise. Sur le budget 2011/2012, ces baisses ont été de 18% pour la plupart des universités. Or, la nouvelle loi réserve 50% des royalties sur le gaz des sous-sols universitaires à l’université hôte, le reste se répartissant entre l’Etat (35%) et les autres universités publiques (15%).

    Mais d’après Robert Myers, directeur des études environnementales à l’université de Loch Haven , située au dessus du Marcellus Shale, la loi a peu de chances de se concrétiser à court terme. « La baisse du prix du gaz (une des conséquences du boom du gaz de schiste, ndlr) depuis un an a conduit à un recentrement de l’activité gazière et l’industrie a actuellement peu d’intérêt à acquérir des nouvelles concessions », estime-t-il. Et l’enseignant d’ajouter : « Cette loi a tout d’une tentative boiteuse des régulateurs pour se faire de l’argent sur le boom du gaz et éviter de soutenir le système éducatif à travers des taxes. »

    A court terme, l’exploitation du gaz sous les campus de Pennsylvanie serait donc peu probable. C’est ce que semble confirmer une autre université concernée, celle de Mansfield, dont le président par intérim déclarait récemment qu’il n’y avait aucune négociation de prévue sur la fracturation. Mais qu’adviendra-t-il si le prix du gaz augmente ? Dans d’autres Etats, plusieurs universités ont déjà signé des contrats avec des compagnies d’extraction. En Virginie-Occidentale, la petite université (privée) de Bethanie a autorisé dès 2011 l’entreprise Chesapeake Energy à installer un forage sur ses terres – situées à l’extérieur du campus. Dans l’Indiana, c’est l’université publique qui a signé un accord pour étudier un forage de pétrole sur son campus. Dans ces deux exemples, une poignée d’étudiants se sont mobilisés contre ces projets, invoquant les risques sanitaires et l’impact environnemental. Mais le véritable enjeu, tant que le prix du gaz ne remonte pas, est plutôt celui des liens financiers entre les chercheurs universitaires et l’industrie du gaz, selon Robert Myers de l’université de Loch Haven.

    Frackademia : collusion entre l’industrie et les chercheurs

    La chose n’est pas nouvelle, l’argent du pétrole et du gaz afflue déjà sur certains campus, non pas en royalties, mais en subventions. Face aux risques de collusions, la plupart des universités ont voté des principes de transparence irréprochables sur le papier, mais pas toujours appliqués.

    C’est ce que vient de démontrer le centre d’études Public Accountability Initiative (PAI), aux dépens de l’université d’Austin au Texas : alors que l’université avait reçu, selon le PAI, 1,5 million de dollars (1,16 million d’euros) de l’entreprise pétrolière ConocoPhillips, son Institut de l’énergie a publié une étude très relayée par l’université, selon laquelle il n’y aurait « aucune preuve que la fracturation hydraulique pollue les nappes phréatiques ». L’université n’a eu d’autre choix que de « démissionner » le directeur de l’institut, et l’auteur de l’étude Charles Groat, car ce dernier avait notamment omis de préciser qu’il était au board(conseil) – et grassement retribué – d’une importante entreprise de forage de gaz (1). L’étude a été retirée de la circulation. Un grave manquement aux règles de transparence.

    Ce type de connivence est loin d’être isolé, souligne Robert Myers, qui rappelle qu’en Pennsylvanie et dans l’Etat de New York, des affaires similaires ont été dévoilées en 2012. Dans ce contexte, nul doute que l’étude de l’agence environnementale EPA, sur l’impact entre fracturation hydraulique et pollution des eaux de surface, sera particulièrement scrutée. Attendues pour la fin de l’année 2014, ses conclusions recevront « le plus haut niveau de revue par des pairs », précise l’agence.

    Note :

    (1) Paradoxalement, ce silence n’était pas, pour des raisons subtiles, une violation du code de conduite de l’université au moment de l’étude. Le code a depuis été modifié.

    terraeco.net  http://fortune.fdesouche.com

  • Pakistan: qu’y a-t-il derrière les affrontements religieux?

    immobiliers et politiciens locaux ont fomenté les violences contre les chrétiens pour s’approprier leurs habitations

    Les émotions viennent à peine de se calmer au Pakistan, où, le samedi 9 mars 2013, une foule de musulmans enragés avait mis le feu à plus d’une centaine de maisons chrétiennes à Lahore dans l’est du pays. Cette violence s’est déchaînée suite à une accusation de blasphème. Des manifestations de chrétiens, très dures également, s’en sont suivies en guise de riposte puis les polémiques se sont déchaînées notamment sur le rôle de la police et des autorités locales. Tous ces événements se déroulent sur fond d’un pays en crise économique et politique qui se serait bien passé de cette explosion de violences inter-religieuses, derrière lesquelles se dissimulent des intérêts économiques et politiques qui n’ont finalement pas grand chose à voir avec les religions. Dans la semaine du 4 au 9 mars 2013, par exemple, on a enregistré plusieurs attaques sanglantes contre la communauté chiite pakistanaise. D’après certains observateurs, cette “escalade” doit être interprétée en tenant compte de l’accord récent entre le Pakistan (à majorité sunnite) et l’Iran chiite, un  accord visant la construction d’un gazoduc unissant les deux pays. Ce projet déplait évidemment aux Etats-Unis et aux autres ennemis de la République Islamique d’Iran dans la région (surtout à l’Arabie saoudite).

    D’après les reconstitutions qui ont été faites suite aux débordements récents de Lahore, il y a, à la base de l’assaut perpétré contre le quartier chrétien de “Joseph Colony”, une banale rixe entre deux poivrots notoires. Le soir du 5 mars dernier, le chrétien Sawan Masih, âgé de 28 ans, qui travaille dans le secteur hospitalier, et son ami coiffeur, le musulman Shahid Imran, auraient eu une altercation dans le salon de ce dernier. Gros mots et insultes s’ensuivirent qui ont finalement débouché dans le domaine religieux. A la suite de quoi, le coiffeur a dénoncé son ami à la police, l’accusant de “blasphème”; les policiers ont en conséquence arrêté Sawan Masih (ou plutôt l’ont pris “en garde à vue”).

    Aussitôt, le bruit se répand qu’un chrétien “a insulté le prophète Mohamet” et la communauté musulmane de la ville très peuplée de Lahore entre en ébullition. Samedi 9, une foule de quelque trois mille personnes se rue sur le quartier de “Joseph Colony”, auparavant évacué par la police qui, officiellement, craignait des désordres, et met le feu à une centaine d’habitations (d’autres sources parlent d’au moins 150 maisons détruites). Le lendemain, les chrétiens descendent à leur tour dans la rue, bloquent un carrefous important et affrontent la police à coup de pierres, de matraques et de grenades lacrymogènes. D’autres manifestations de protestation éclatent à Multan, toujours dans la province du Penjab, ainsi que dans la ville portuaire de Karachi, la plus grande ville du Pakistan.

    Lundi 11 mars, les violences s’estompent mais font place aux polémiques. Les écoles chrétiennes du Penjab sont fermées, de même que celles de la province du Sindh, dans le Sud-Est, où se trouve Karachi. Entretemps, le comportement de la police de Lahore est dans le collimateur de la Cour Suprême pakistanaise. Après avoir décidé de s’occuper des causes de la violence survenue dans le quartier de “Joseph Colony” et après avoir pris acte d’un rapport des autorités provinciales du Penjab sur les incidents survenus, les juges ont accusé la police “d’y avoir assisté silencieusement” et de n’avoir rien fait pour prévenir les actes de vandalisme car “ils ont ordonné l’évacuation des familles le jour précédent”.

    Selon l’ONG “Asian Human Rights Commission” (AHRC), c’est le projet d’un lobby immobilier qui se profile derrière les attaques du samedi 9 mars. Ce projet vise à mettre la main sur les propriétés des chrétiens avec la complicité des autorités locales. “Il y avait déjà quelques années que la mafia de l’immobilier convoitait le quartier de ‘Joseph Colony’ avec l’intention de le transformer en un grand espace commercial”, accuse un communiqué de l’AHRC, dont le siège se trouve à Hong Kong et qui s’occupe des droits des minorités religieuses en Asie. L’AHRC dénonce en outre un autre fait : dans la foule qui incendiait les maisons “se trouvaient quelques membres de l’assemblée législative locale et même un député national”. Tous appartiennent au parti de la “Ligue Musulmane du Pakistan-Nawaz” (Pml-N), qui se trouve dans l’opposition au Parlement national mais détient le pouvoir au Penjab.

    Ferdinando CALDA. http://euro-synergies.hautetfort.com/

    (article paru sur le site du quotidien romain “Rinascita”, 13 mars 2013, http://www.rinascita.eu/ ).

  • La bombe de la dette vient de grossir

    Traduction par notre lecteur Boreas d’un article de Max Keiser, paru le 18 mars 2013 sur le site Russia Today.

    Le montant mondial de la dette dépasse l’ensemble des dépôts bancaires dans le monde, et la situation financière actuelle à Chypre est l’inévitable prochaine phase : la confiscation.

    Toute prétention à une « titrisation » de la croissance par les banquiers centraux ou la finance mondiale en conditionnant et reconditionnant la dette, en hypothéquant et ré-hypothéquant la dette, en régulant et en re-régulant la dette, est désormais révolue.

    Depuis le début de la reprise du marché obligataire dans les années 1980 (oui, c’est si vieux que ça), les banques centrales et la finance mondiale – le FMI, l’UE et la BCE, pour n’en nommer que quelques-uns – et leurs frères de Wall Street et de la City de Londres ont fait face à chaque crise par une augmentation de la dette et une extension de la maturité de la dette.

    Le résultat a été – en 2007 – la plus haute montagne de dette au bilan et hors bilan dans l’histoire : une dette astronomique de 220.000 milliards (si l’on inclut toutes les dettes publiques, privées et contingentes des programmes de prestations non financés) dans l’économie américaine seule, avec ses 14.000 milliards de dollars de PIB. Le volume des dérivés mondiaux de la dette se situe maintenant à plus de 1.000.000 de milliards de dollars, surfant sur un PIB mondial d’environ 60.000 milliards de dollars.

    Mais à partir de 2007, puis devenant spectaculairement apparente en 2008 avec la faillite de Lehman Brothers, la capacité des contribuables du monde entier à payer les intérêts ou le principal de la dette a heurté un mur de briques.

     

    Et depuis plusieurs années, les gouvernements du monde entier ont essayé les mêmes vieux trucs : « faire comme si ». Reconditionner et allonger la maturité, et prier pour que les recettes fiscales permettent de récolter assez pour rembourser une partie de la dette. Cela n’a pas fonctionné. La bombe de la dette vient de grossir. Maintenant, à Chypre, nous voyons l’inévitable prochaine phase : la confiscation.

    Pour payer les dettes qui ont été contractées pour financer la plus forte ponction de richesses de l’Histoire, nous voyons à Chypre, ainsi que chez les institutions bancaires centrales et la finance mondiale, une tendance à juste capter et saisir l’argent des gens sur leur compte bancaire « assuré ». Nous aurions dû avoir compris ce qui se préparait quand JP Morgan (lisez : Jamie Dimon) a capté et saisi illégalement plus de 1 milliard de dollars en devançant les clients de MF Global [juste avant la faillite de celle-ci], avec l’aide de son copain-copain Jon Corzine.

    Avons-nous appris notre leçon ? Ils ont plus de dettes à payer qu’il n’y a d’argent sur tous les comptes bancaires dans le monde. Cela signifie qu’il y a des chances pour que vous – qui que vous soyez, et quel que soit votre pays de résidence – ayez un pourcentage non négligeable de votre épargne volé par les banksters.

    Depuis que la crise a frappé (et depuis plusieurs années qui ont précédé), nous avons recommandé sur le « Keiser Report » de convertir autant d’argent que vous le pouvez en or et en argent. Notre conseil hier et aujourd’hui est : le seul argent que vous devriez garder dans une banque, c’est de l’argent que vous êtes prêt à perdre.

    Vers la Révolution  http://fortune.fdesouche.com

  • L’OCDE invite la France à supprimer les départements et fusionner les communes

    Dans un rapport, l’Organisation de coopération et de développement économiques s’étonne que l’Etat ne se mobilise pas plus pour faire le ménage dans les collectivités. Le sujet reste tabou face aux élus locaux, arc-boutés.

    (…) Ailleurs en Europe, les pays ont multiplié les réformes, parfois au prix d’une rationalisation drastique (division par 3 du nombre de communes en Grèce, par 2,5 au Danemark…).

    A l’heure où le gouvernement s’interroge sur les économies à réaliser en 2014, l’OCDE propose de s’attaquer à cette spécificité territoriale française par une formule polie : il faut « simplifier la structure des administrations infranationales », réclame l’organisation dans un rapport publié le 19 mars.

    1.800 habitants par commune en France, 5.500 dans l’UE « En moyenne, une commune française compte environ 1.800 habitants contre 5.500 pour l’Union européenne et 55.000 au Danemark. L’intercommunalité, qui aurait dû permettre de rationaliser les dépenses entre communes, est venue dans les faits surtout ajouter un niveau supplémentaire à une organisation territoriale déjà complexe », explique le rapport.

    D’ici 2015, l’Etat a prévu de diminuer de 4,5 milliards d’euros les dotations aux collectivités locales. Dénoncé par les maires de France comme « un coup de massue sans précédent », l’OCDE salue au contraire l’action engagée : « La pression actuelle est de nature à encourager la mutualisation des services et de dégager ainsi des économies ». L’organisation va plus loin, en suggérant la fusion des plus petites communes et la suppression pure et simple du département. (…)

    Lire la suite sur EurActiv

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  • Les filières terroristes de Paris et les dirigeants politiques français

    Les filières terroristes de Paris et les dirigeants politiques français Dans son livre "Crimes sans Châtiment", Jean-Loup Izambert met à jour tout un système de complicités entre les dirigeants politiques français et des groupes islamistes criminels. De 1990 à 2012, de l’Algérie à la Syrie, la confrérie des Frères musulmans reçoit le soutien de Paris dans ses coups d’État contre les pays du Bassin méditerranéen.
    17 mars 2013.

    Q : En juin 2012 vous annonciez la parution prochaine de votre ouvrage sous le titre provisoire de “La ligne jaune”. Le titre a changé depuis. Pourquoi ?

    Jean-Loup Izambert : D’abord, il m’a fallu près d’une année avant de trouver un éditeur libre et indépendant digne de ce nom sur la vingtaine qui ont reçu mon manuscrit. [1] Pendant ce temps, l’évolution de la situation internationale a montré que les dirigeants occidentaux ne se contentaient pas de franchir la ligne jaune entre la guerre et la paix.

    Le fait est acquis qu’ils déclenchent des conflits en bafouant la souveraineté des peuples, en piétinant la Charte des Nations Unies, ses résolutions comme les conventions internationales. Les guerres ouvertes contre la Libye puis contre la République arabe syrienne font suite à celles déjà enclenchées dans des conditions similaires contre l’Afghanistan, l’Irak, la République fédérative de Yougoslavie et plusieurs pays d’Afrique dont la Côte d’Ivoire ou le Mali. Elles témoignent de la volonté des dirigeants des mêmes pays occidentaux –USA, Angleterre et France en principal – de passer outre le droit international pour piller les richesses des peuples, contrôler les grands axes de communication qu’ils jalonnent et y installer des régimes militaro-financiers. Ils bénéficient dans ces nouvelles guerres coloniales du soutien peu flatteur des dictatures pétro-religieuses du golfe Persique et de l’intervention du Fonds monétaire international. L’embargo contre la République islamique d’Iran afin d’empêcher son développement et d’y provoquer des troubles en est un autre exemple. Ces crimes sont prémédités, planifiés, discutés entre princes et sont le fait des mêmes Etats, tous membres de l’OTAN. Autre élément important : ils sont restés sans châtiment, sans réplique, tant sur le terrain politique, diplomatique, économique que militaire, du moins pour le moment.

    Q : Quels éléments pourraient changer le cours des choses ?

    Jean-Loup Izambert : Trois facteurs sont à prendre en compte. D’abord, l’Eurasie émerge et s’organise politiquement, économiquement, financièrement et militairement avec ses partenaires sous l’impulsion de Moscou et de Pékin. La première puissance mondiale est en cours de constitution sur la base des idéaux de paix, de progrès économique et social et d’anti-impérialisme. Cet aspect est évoqué dans le livre au travers de l’intervention du politologue Alain de Benoist.

    Cela signifie que dans le temps, de gré ou de force, toutes les bases militaires étasuniennes installées dans des pays de l’Eurasie devront disparaître pour céder la place aux forces de la paix. Ce mouvement est à prolonger sur la petite Europe de Maastricht et le bassin Méditerranéen.

    Pour sa part, le politologue camerounais Jean-Paul Pougala situe bien les enjeux sur les vraies raisons de la guerre contre la Libye. Ensuite, les principaux acteurs de l’Eurasie commencent à parler d’une seule voix dans les instances internationales. Ainsi, sans le veto commun de la Fédération de Russie et de la République Populaire de Chine au Conseil de sécurité de l’ONU, rejoints aujourd’hui par de nombreux autres pays au sein des Nations Unies, nous connaîtrions actuellement un conflit militaire majeur. Il ne faut pas oublier qu’après “l’expérience” diplomatique malheureuse avec la Libye, la Fédé-ration de Russie a clairement mis en garde les gouvernements bellicistes contre tout nouvel acte de guerre contre la République arabe syrienne, Ceux qui, comme les Etats-Unis, la France, la Turquie de l’islamiste Erdogan et son partenaire Israël ont jugé bon de soutenir les gangs criminels islamistes de la nébuleuse des Frères musulmans ont pris une lourde responsabilité. Enfin, troisième facteur et non des moindres, ces Etats ont semé le ferment de la haine à leur encontre.

    Q. : C’est-à-dire ?

    Jean-Loup Izambert : Croyez-vous que les enfants palestiniens qui ont vu leurs familles assassinées par l’armée de l’Etat raciste et terroriste d’Israël qui viole depuis des décennies les résolutions de l’ONU vont se contenter longtemps de la“guerre des pierres “ contre l’agresseur ? Croyez-vous que les Libyens qui ont vu les leurs mourir sous les bombes à uranium de l’OTAN ou assassinés par des bandes islamistes armées par la France vont rester les bras croisés devant le massacre et l’occupation de leur pays ? Croyez-vous que les Syriens vont mourir en silence dans les lâches attentats suicides de gangs islamistes armés par l’Occident et la Turquie sans réagir ? Si vous regardez la carte des conflits dans les pays arabes depuis les années 90, vous constaterez que la France a toujours protégé et armé des mouvements permettant de provoquer leur déstabilisation. J’en fais la démonstration en prenant pour exemple les relations entre dirigeants français et ceux de plusieurs organisations proches des Frères musulmans. Quand les peuples vont avoir conscience de ces faits, ce qui commence à se produire en Tunisie ou en Egypte, et qu’ils se seront débarrassés des pouvoirs installés par la Sainte-Alliance Washington-Londres-Paris, les Français pourront toujours essayer d’exporter du camembert au Qatar.

    Q : Vous mettez en cause les dirigeants français, Nicolas Sarkozy et François Hollande, et des dirigeants du renseignement français en contact avec des organisations proches de groupes terroristes…

    Jean-Loup Izambert : Je ne les mets pas en cause. Je les accuse de couvrir soit des criminels associés à des groupes extrémistes islamistes, soit de soutenir des organisations qui sont liées à ces groupes et de pactiser avec des dictatures comme celles du Qatar, de l’Arabie saoudite ou du Bahreïn.

    Q : Dans votre livre vous montrez comment se fabriquent des“oppositions” et vous citez les cas de plusieurs dirigeants d’organisations islamistes bénéficiant du soutien des dirigeants français dans les guerres contre la Libye et la Syrie. Pouvez-vous nous rappeler quelques exemples ?

    Jean-Loup Izambert : Sans entrer dans les détails, concernant Nicolas Sarkozy, celui-ci a été quatre fois ministre dans quatre gouvernements UMP dont deux fois ministre de l’Intérieur avant d’être élu Président de la République en 2007. Comme je le démontre, alors qu’il occupait ces fonctions, des ministères à la présidence, il ne pouvait ignorer que des membres de l’organisation islamiste tunisienne Ennahda recherchés par Interpol pour des actes criminels étaient en France depuis le début des années quatre-vingt-dix.

    Certains des membres d’Ennahda auraient du reste été retournés et sont aujourd’hui dans les rangs du pouvoir tunisien pour orienter sa politique étrangère, économique, financière et militaire en faveur des puissances coloniales. Par ailleurs Sarkozy a été le promoteur de l’intervention militaire contre le peuple libyen et l’initiateur de relations privilégiées avec les putschistes islamistes. A ce titre, comme Président de la République française et chef des armées, il est responsable de la violation des résolutions de l’ONU dans ce conflit et responsable de crime contre l’humanité du fait de l’utilisation d’armes à uranium par les armées de l’OTAN.

    Q : Et aujourd’hui, concernant François Hollande ?

    Jean-Loup Izambert : Les Français qui ont voté pour lui découvrent qu’en réalité il poursuit la même politique que son prédécesseur de l’UMP. Je ne reviendrai pas ici sur les données concernant l’aggravation de la crise que je développe dans mon livre. Depuis 1981, à chaque fois que les socialistes ont été au pouvoir, ils ont administré les affaires de l’Etat comme des compteurs de petits pois, sans jamais rien remettre en cause de l’organisation et de la gestion de l’Etat au profit des transnationales de la finance et de l’armement. C’est le propre de tous les partis réformistes sur tous les continents : gérer le capitalisme quand celui-ci est en difficulté. Or, le terrorisme n’est rien d’autre que l’expression du capitalisme en crise qui ne peut plus supporter la moindre parcelle de démocratie, le moindre obstacle à sa survie.

    Aussi, je pense que le ministre de l’Intérieur du gouvernement Ayrault, Manuel Valls, devrait se montrer plus humble lorsqu’il accuse la droite d’être“responsable du retour du terrorisme” comme il l’a fait lors d’une séance à l’Assemblée nationale à la mi-novembre 2012. Qu’il commence par nettoyer son écurie ! Comme je le rapporte dans mon enquête en posant des questions, des ministres de l’Intérieur socialistes ont, avec des dirigeants du renseignement français, couvert des individus, membres d’une organisation islamiste, recherchés par Interpol pour des actes criminels et association à une organisation extrémiste terroriste.

    L’Elysée est devenu une sorte de “carrefour” du grand banditisme où le “Tout-Paris” de la Françafrique croise les pires dictateurs de la planète – du Qatar, de l’Arabie saoudite, du Bahreïn, – et les représentants de groupes criminels comme le Conseil national de transition libyen ou le Conseil national syrien. Ces gens là sont les financiers et les organisateurs de groupes qui se livrent au crime organisé à grande échelle, trafic de drogues compris. Il est particulièrement grave de voir les dirigeants français et de l’OTAN leur donner caution, les financer et les armer.

    Q : Mais aujourd’hui les choses n’ont-elles pas un peu changé avec le nouveau gouvernement ?

    Jean-Loup Izambert : Non, bien au contraire, les guerres contre la Syrie et le Mali en témoignent, elles se poursuivent comme sous la présidence de “Sarkozy l’Américain”. Il ne faut pas s’en étonner puisque lors de la passation de pouvoir, le 17 mai 2012, entre le ministre des Affaires étrangères du gouvernement Fillon, Alain Juppé, et celui du gouvernement Ayrault, Laurent Fabius, ce dernier a déclaré à son prédécesseur : “Sur les questions majeures, je sais que nous nous retrouverons”.

    Le président François Hollande et son ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, apportent leur soutien direct à une association comme les“Amis de la Syrie”. Celle-ci regroupe en réalité des représentants de mouvements islamistes sunnites (Arabie saoudite, Qatar, Turquie, Tunisie, Maroc), des dirigeants des États-Unis, de l’Union européenne et des représentants d’officines liées aux services occidentaux, tels ceux du Conseil national syrien (CNS). Cette dernière organisation n’est rien d’autre que l’administrateur de la mort que sèment les milices islamistes en Syrie contre les symboles du panarabisme comme contre toute personne ne partageant pas leur religion.

    Encore une fois, l’organisation des Frères musulmans est au coeur de cette guerre. Je rappelle du reste dans mon livre que cette organisation n’a pas hésité à commettre des crimes odieux à plusieurs reprises contre des civils syriens, cela bien avant de recevoir le soutien direct de Paris dans sa nouvelle tentative de putsch. Toute l’histoire des Frères musulmans en Syrie n’est que crimes, sabotages et assassinats. Ce sont ces gens là que Paris soutient aujourd’hui. Du reste, plusieurs des dirigeants de “l’opposition” criminelle syrienne vivent en Ile-de-France et sont, pour certains d’entre eux, en contact de longue date avec des agents de la CIA, du MI6 et de la DGSE. Cela étant dit, la détérioration des relations entre l’armée française et le pouvoir politique, aggravée sous Sarkozy ne fait que s’accentuer. Les militaires français n’ont pas vocation à servir de milice privée à “Monsieur Total” ou à “Monsieur Areva”, et encore moins à “Monsieur Esso”. C’est pourtant ce qu’ils font au Mali ou, pire, en Afghanis-tan. Comme vous pourrez le lire dans “Crimes sans châtiment”, sous l’administration de l’OTAN, les soldats français de la force d’occupation servent en réalité de bouclier au commerce international de la drogue et des armes de la CIA avec des chefs de guerre islamistes.

    Q. : Vous affirmez que le gouvernement français arme les gangs criminels en Syrie. Mais sur quelle situation peut déboucher cette nouvelle violation de l’ONU et du droit international ?

    Jean-Loup Izambert : Le président français, son Premier ministre et le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, ont fait le choix d’envoyer des agents de la DGSE, notamment au Liban puis en Turquie, aux côtés d’agents du MI6 anglais et de la CIA étasunienne pour armer ces groupes assassins. Je rapporte sur ce point des éléments en provenance de différentes sources. Le scénario est à peu près similaire à celui contre la Libye. Face à de tels faits, répétés, il est indéniable que le gouvernement français cherche la guerre, une guerre dont il semble croire, bien naïvement, pouvoir rester à l’abri. Le président français, les ministres des Affaires étrangères et de la Défense du gouvernement Ayrault devront assumer les conséquences de leurs guerres. Car à partir du moment où vous prenez la responsabilité de protéger des éléments criminels et où vous armez des groupes terroristes en violation du droit international pour semer la mort dans d’autres pays, cela signifie que vous ne pouvez plus être considéré comme un partenaire loyal mais comme un ennemi avec lequel la neutralité n’est plus politiquement praticable. Vous devez alors assumer toutes les conséquences de la guerre, à savoir être vous-même la cible d’actes de guerre. Ce serait même justice que la violence tourne contre la violence politique, économique, diplomatique et militaire des gouvernements qui agissent de concert avec Paris, de Washington à Doha en passant par Londres, Ankara et Tel Aviv.

    Q. : Comment avez-vous travaillé pour mener cette enquête ?

    Jean-Loup Izambert : C’est une enquête sur le long terme – une vingtaine d’années –commencée dans les années 90 jusqu’à nos jours. Il était nécessaire de remonter dans le temps pour analyser l’évolution des relations entre Paris et des groupes criminels islamistes, mettre en évidence que les gouvernements de la France en crise ont besoin du terrorisme et de la violence. J’ai donc mené plusieurs enquêtes sur le terrain entre les années quatre-vingt dix et 2000. Puis je suis revenu sur les principaux protagonistes par périodes en ciblant mes recherches sur le Maghreb, principalement le Maroc et la Tunisie. Ce choix tient au fait que les islamistes y avaient tenté plusieurs coups d’Etat dans les années 90 afin d’y implanter le premier Etat islamiste du Maghreb. La stratégie de la terreur adoptée depuis par les Frères musulmans dans tous les autres pays repose sur le même plan présenté et expliqué dans mon livre. Des dirigeants d’associations, des confrères journalistes d’investigation, des spécialistes comme Abdallah Amami, des universitaires comme Moncef Ouannes, Jean-Paul Pougala ou le philosophe Alain de Benoist, des professionnels du renseignement, tel Yves Bonnet, ancien dirigeant de la DST, d’Interpol ou d’autres services, y compris militaires, interviennent au fil des pages ou apportent leur expérience, leurs avis et des informations précieuses sur les événements en cours. Leur travail important, leurs réflexions, leurs études prolongent mon enquête de terrain. Maintenant, nous allons placer le livre au coeur du débat politique car la crise économique est le terreau de la criminalisation de la vie politique. Mes confrères Richard Labévière avec “Les dollars de la terreur” [2] et Michel Collon avec “Libye, OTAN et médiamensonges” [3] ont déjà produit deux contributions importantes et documentées sur les relations entre pouvoir politique occidental et groupes terroristes islamistes et la mise en scène qui les accompagne. J’y ajoute aujourd’hui, de manière ciblée, le volet français.

    Interview de Jean-Loup Izambert par Louis Dalmas http://www.voxnr.com

    Source : B.I. Infos, no. 185, mars 2013.

    Jean-Loup Izambert : Premier journaliste à dénoncer l’implication de quarante banques européennes dans le plus grand krach boursier de la place de Genève, il publie “Le krach des 40 banques” (1998). Son livre “Le Crédit Agricole horslaloi ?”(2001),momentanément interdit de publicité et de vente en France, est traduit et édité en Fédé- ration de Russie, puis devient le sujet d’un film réalisé par RTR Planeta, première chaîne de télévision de l’Etat russe. Au lendemain de la failli- te du groupe Crédit Lyonnais, il cible les liaisons entre dirigeants de banques, pouvoir politique et magistrature dans“Crédit Lyonnais, la mascarade” (2003). Il est l’auteur de la première enquête journalis- tique sur le fonctionnement de l’ONU, “ONU, violations humaines”(2003). La guerre contre la Yougoslavie puis contre l’Irak le condui- sent à enquêter sur les dessous de la politique internationale et à écrire “Faut-il brûler l’ONU ?” (2004). Après “Les Démons du Crédit Agricole” (2005), il poursuit ses recherches dans le monde financier avec “Pourquoi la crise ?”(2009). “Crimes sans châtiment”, publié par les Editions 20 Coeurs, est l’aboutissement de vingt années d’en- quêtes sur les relations entre dirigeants français et membres de réseaux criminels islamistes