« Il nous fait perdre la présidentielle, se fait rejeter ses comptes, et c’est à nous de payer en applaudissant son discours ! » (un député UMP).
Victime, c’est le rôle qu’il préfère. Victime des chiraquiens au début des années 2000, de la crise pendant son quinquennat et aujourd’hui des juges et du Conseil constitutionnel. Lundi 8 juillet, dans un huis clos de l’UMP, Nicolas Sarkozy a fait ce qu’il fallait pour électriser son auditoire, chauffer les contributeurs afin de trouver 11 millions d’euros pour remettre à flot le parti de droite. Si ça marche, l’ancien président de la République sera redevenu le patron incontesté de son camp. Le « presque vainqueur » de 2012 endossera alors l’habit de faiseur de miracles. Qui pourrait contester une nouvelle candidature en 2017 à celui qui a sauvé le parti de la faillite ?
Le succès éventuel de ce « sarkothon » repose sur l’identification de la base au héros à peine surgi du purgatoire de la défaite. La base appelée à venger l’idole d’une injustice. « Aidez-moi ! », répétait M. Sarkozy pendant la campagne présidentielle. On y est revenu. N’en déplaise à l’ancien président, le roi de ces retours au finish est un homme qu’il n’aime pas : Silvio Berlusconi, 76 ans, lui aussi « presque vainqueur » des élections générales de février, et redevenu « l’actionnaire majoritaire » de la coalition droite/gauche au pouvoir en Italie.
Depuis son arrivée au pouvoir en 1994, qui a coïncidé avec l’ouverture des premiers procès contre lui – au choix : pour corruption, concussion, fraude fiscale, abus de pouvoir et prostitution de mineure –, le « Cavaliere », qui risque une peine d’interdiction d’exercice de charges publiques, s’est toujours posé en « victime » de la justice qui, selon lui, agirait dans un but politique afin de « retourner » le résultat des urnes.
Se poser en victime
Pendant vingt ans, il est parvenu, grâce à cet argument, à souder son camp derrière lui, empêchant toute remise en question de son leadership. La solidarité envers le chef tient lieu de ligne politique. « Je suis attaqué injustement, il faut me soutenir ! », a-t-il répété, usant ainsi ses dauphins successifs empêchés de conduire le moindre droit d’inventaire. Pendant vingt ans, l’Italie s’est divisée, hystérisée pourrait-on dire, entre pro et anti-Berlusconi, concentrant le débat politique sur les vicissitudes judiciaires de ce dernier et sa survie politique.
La tentation, souvent grande, de comparer M. Berlusconi et M. Sarkozy n’est pas toujours opérante. Ils appartiennent à deux générations différentes, voire à deux mondes, évoluent dans deux systèmes politiques différents. Les affaires qui les concernent ne sont pas de même nature. Mais la manière de s’en servir est quasi identique : se poser en victime pour susciter la compassion et l’adhésion, fût-elle forcée.
Depuis plusieurs mois M. Sarkozy bouillait en se demandant comment sortir par le haut des dossiers judiciaires – Karachi, Bettencourt, Tapie, comptes de campagne – dans lesquels son nom ou ceux de ses proches étaient cités. Déjà, il se posait en victime, laissant ses intimes rapporter aux journalistes son « écœurement », chargeant ses avocats de mener la contre-attaque contre le juge Gentil qui instruit l’affaire Bettencourt et auquel il en veut particulièrement. « L’acharnement des juges redouble son désir de retourner à l’Elysée », estimait un de ses anciens conseillers. « S’il devait être condamné, Berlusconi fera tomber le gouvernement et retournera au pouvoir », entend-on, comme un écho, de l’autre côté des Alpes.
L’« acharnement » des juges
Objectivement, M. Sarkozy est dans son tort. Il a « fraudé » en oubliant 1,7 million d’euros de dépenses de campagne. Tout comme M. Berlusconi est dans le sien quand il conteste une justice qui serait moins clémente à son égard et plus rapide dans certains cas que pour n’importe quel autre citoyen italien. Mais ce qui importe est moins la précision des arguments sur le fond que leur valeur symbolique. La curiosité des juges est vue comme un « acharnement », leurs enquêtes s’opposeraient à la volonté populaire exprimée par leur vote. « Pourquoi devrais-je être chassé de la vie parlementaire pour évasion fiscale, se demande M. Berlusconi, alors que de nombreux Italiens fraudent le fisc ? » « Pourquoi, en 1995, les comptes de campagne de MM. Chirac et Balladur ont-ils été validés par le Conseil constitutionnel et pas les miens ? », laisse dire M. Sarkozy.
Alors qu’il risquait de rester dans l’histoire comme le fossoyeur de l’UMP, M. Sarkozy en deviendra peut-être le sauveur par le subterfuge de la victimisation. Les ressorts de la reconquête sont conformes au personnage : de l’audace, de la transgression, du show et de l’affect. L’exemple italien peut le conforter. Donné pour politiquement mort à son départ du pouvoir en novembre 2011, M. Berlusconi est revenu au centre du jeu politique en usant de la même stratégie un an plus tard. Il a échoué à un souffle du pouvoir en février en jouant à fond du ressort de l’identification d’une partie des Italiens à la victime supposée, comme dans les séries qu’il fait produire pour ses chaînes de télévision.
Comme en 2007, M. Sarkozy use également de la victimisation pour souder ses supporteurs, les électriser et forcer à la solidarité de tous. Mais plus encore qu’en 2007, il prend la justice pour cible. Il sait que le principal danger pour son éventuel retour vient des juges qu’il cherche à faire tomber de leur piédestal. C’est encore au pouvoir qu’on s’en protège le mieux.
Françoise Fressoz et Philippe Ridet
Le Monde.fr, 11/07/2013 http://www.polemia.com
http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/07/11/la-berlusconisation-de-nicolas-sarkozy_3445978_3232.html
magouille et compagnie - Page 2286
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La berlusconisation de Nicolas Sarkozy
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L’embryon humain devient un outil de l’industrie pharmaceutique
Communiqué de la Fondation Jérôme Lejeune :
"Cet après-midi, les députés ont signé l’épilogue estival de l’entreprise de modification de la loi de bioéthique engagée par les radicaux de gauche et portée avec obstination par la ministre de la recherche. Compte tenu de la réserve et du blocage des votes mis en œuvre par cette dernière jeudi 11 juillet pour abréger l’examen des amendements de l’opposition, et afin d’éviter éviter à tout prix que l’un d’eux ne soit voté, le vote solennel global d’aujourd’hui ne revêtait pas un suspens insoutenable. Or, face aux directives de vote de la majorité et à la discrétion d’une partie des ténors de l’opposition, la Fondation Jérôme Lejeune regrette que les représentants politiques, n’aient pas voté en conscience alors que les conséquences de ce bouleversement sont majeures. Les conséquences concrètes d’une éventuelle adoption de la proposition de loi qui détruit des êtres humains vivants portent atteintes à l’Etat de droit.
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L’embryon humain est présumé disponible pour être détruit dans la recherche. Le passage d’un principe d’interdiction (assorti de dérogations) à celui d’autorisation (encadrée) fait de façon inédite de l’embryon humain, d’un être humain, un matériau disponible pour des expérimentations sous pavillon de complaisance de la médecine. Nous devenons une société « embryocide » c'est-à-dire dont un des principes repose sur l’homicide de l’embryon humain.
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La charge de la preuve ne s’impose plus au chercheur qui n’a plus à justifier de sa recherche sur l’embryon. Certains chercheurs partisans de ces recherches - faut-il rappeler que tous n’appellent pas à ce changement législatif loin de là – se sont dits « stigmatisés » par le régime actuel qui les contraint à justifier. Mais n’est-ce pas la moindre des choses, dès lors qu’il s’agit d’expérimenter sur du vivant humain ? Le principe de précaution tant valorisé lorsqu’il s’agit d’écologie par exemple s’évapore ici et un tapis rouge est déroulé à la marchandisation du vivant.
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L’embryon humain dit « surnuméraire » devient officiellement un réactif de laboratoire. L’embryon humain deviendra un outil de l’industrie pharmaceutique, réelle bénéficiaire de l’adoption de cette proposition de loi. Déjà en 2011, le LEEM soutenait les positions suivantes au moment de la révision de la loi de bioéthique :
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L’assouplissement des démarches nécessaires au développement des lignées et du champ possible d’investigation en matière de cellules souches embryonnaires
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La mise en place d’autorisations d’importations de lignées de CSE sans dérogation et de l’autorisation de réaliser des transferts de noyau sous contrôle strict (en d’autres termes, du clonage)
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Faire entendre la voix de la France via les instances concernées (INPI, …) afin de faire revenir l’OEB sur sa décision d’exclure de la brevetabilité les produits issus de cellules souches embryonnaires
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La recherche non-embryonnaire – la seule à être à la fois éthique et efficace aujourd’hui - sera sacrifiée dans les plans de financement. Alors que cette dernière reçoit des crédits croissants dans les pays développés en pointe sur l’innovation thérapeutique tel que le Japon, la France va creuser son retard pour des raisons idéologiques.
La Fondation Jérôme Lejeune constate que, si ce n’est pour des raisons évidentes d’éthique, les députés n’ont pas su discerner les enjeux stratégiques qui se jouent en termes de recherche sur les cellules souches. Ils ont choisi d’enfermer la France dans l’aveuglement et le fantasme entretenus autour des prétendues (depuis plus de 20 ans…) perspectives de la recherche utilisant l’embryon humain au lieu de miser courageusement et efficacement dans ses alternatives. La Fondation Jérôme Lejeune soutient en France l’initiative citoyenne européenne Un de nous qui avance vers le million de signatures et portera à l’automne devant la Commission européenne une requête pour stopper les financements européens aux programmes de recherche sur l’embryon humain."
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Marion Maréchal-Le Pen : recherche sur l'embryon: la primauté de la science et du marché sur l’humain
Communiqué de presse de Marion Maréchal-Le Pen :
"L’Assemblée nationale s’est prononcée aujourd’hui en faveur d’une proposition de loi radicale de gauche et soutenue par le Gouvernement concernant la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires. Ce texte majeur modifie la loi de 2004 en passant d’une interdiction de principe avec dérogation à une autorisation de principe assortie de conditions plus souples.
Le débat a eu lieu en catimini, en quelques heures à peine et à l’insu des Français. Non content de ne pas respecter la loi de 2011 prévoyant un débat public sous forme d’états généraux pour les réformes éthiques, la ministre a demandé l’application de la procédure de « réserve des votes » empêchant ainsi les députés d’amender la proposition afin d’accélérer le débat.
Par ce texte, l’humanité de l’embryon est niée par principe, l’humain en devenir sera réduit à l’état de matériau d’expérimentation au nom de la compétitivité scientifique. Et ce, alors même que l’utilisation des cellules souches adultes et du cordon ombilical sont à l’origine de la majeure partie des avancées scientifiques et qu’une solution alternative a été découverte par le chercheur japonais Yamanaka grâce aux cellules souches dites IPS.
De surcroit, le texte a supprimé une disposition de la loi de 2011 prévoyant que les alternatives aux recherches sur l’embryon humain et conformes à l’éthique doivent être favorisées.
Cette proposition est d’autant plus étonnante qu’une directive européenne de 2010 fixe comme objectif le remplacement total des procédures scientifiques appliquées aux animaux « sous forme embryonnaire ou fœtale » par des méthodes alternatives. Demain l’embryon humain vaudra moins que celui de la baleine…
On peut s’étonner de la détermination du Gouvernement quand de nombreux chercheurs, comme le professeur Ménasché, affirment que l’ancien régime ne les empêchait pas de mener à bien leur recherche mais faisait obstacle aux investissements privés dans ce secteur…
Pour toutes ces raisons, Marion Maréchal-Le Pen a voté contre ce texte et cosigné avec Jacques Bompard un amendement interdisant toute recherche sur l’embryon humain".
http://www.lesalonbeige.blogs.com/
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11 séptembre "L'Etat profond" - Interview du géopoliticien Aymeric Chauprade
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Tour pour tous : l'intox du Monde démontée
Sous le titre "La désagrégation de La Manif pour tous", le quotidien parisien écrit :
"Les drapeaux roses sont apparus aux détours des routes sinueuses du Tour de France. Mais sur les étapes de la Grande Boucle, postés devant les caméras du monde entier, les anti-mariages gay n'ont mobilisé qu'une poignée de militants. Lancé en juin Le Tour de France pour tous, émanation de La Manif pour tous, devait prolonger la mobilisation sur la route des vacances. Redonner de la visibilité aux opposants "sans perturber la fête".
Localement, la presse qui est sur le terrain décrit la réalité autrement :
"On pense souvent que leur mouvement va finir par s’essouffler et qu’ils auront du mal à maintenir intacte leur mobilisation. Mais ils sont toujours en selle…"
Et aligne un grand nombre de photos dont :
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Espagne : le gouvernement augmente le budget anti-émeute de 1900% en un an
Tous les gouvernements de l’Union européenne se préparent discrètement à « recadrer démocratiquement » le peuple en cas de débordements trop importants. La France s’équipe (vous trouverez la liste ici) de nouvelles armes autrement plus violentes que de simples bombes lacrymogènes.
« L’Espagne augmente son budget lié à l’achat de « matériel et équipement spécifiques anti-émeute de protection et de défense» de près de 1.900% entre 2012 et 2013.
Le budget anti-émeute de départ passe de 173 670€ en 2012 € à 3,26 millions en 2013. Pour 2016, le projet d’investissement va dépasser dix millions d’euros, il vise à moderniser les matériels des unités anti-émeute utilisés.
Parmi les autres éléments qui seront fournis à la police espagnole sont prévus des gilets pare-balles, des gaz lacrymogènes, de matraques, des boucliers et balles en caoutchouc. Mais il prévoit également d’intégrer des armes de guerre. Plus précisément, on parle de fusils laser (qui causent la cécité temporaire ou permanente), des canons sonores (testé à des manifestations aux Etats-Unis et en générant des étourdissements et des nausées à la personne) et des armes à micro-ondes qui provoquent des brûlures et des douleurs. On compte également des armes qui semblent sortir de la science-fiction comme des armes électromagnétiques et lanceurs de mousse afin d’immobiliser les gens.
Avec cette mesure, les autorités espagnoles prétendent lutter contre la vague croissante de protestations qui a secoué la péninsule au cours des dernières années [...] -
Recherche sur l'embryon : le triple NON de Yannick Moreau
Communiqué de presse du député :
"Yannick MOREAU, député de la Vendée Littorale, s’élève contre la proposition de loi modifiant le statut de l’embryon et autorisant la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Yannick MOREAU votera contre pour trois raisons :
- Au nom de l’éthique et de la dignité humaine. Nous ne pouvons accepter que le plus fragile membre en devenir de la communauté nationale soit réduit à un matériau de recherche industrielle. Il faut cesser cette marchandisation rampante, fondamentalement contraire à la dignité de l’homme.
- Au nom du progrès de la science. En Démocratie il n’existe pas de vrai progrès technique s’il ne se conjugue avec le respect fondamental des droits de tous les hommes. D’autres méthodes de recherches, alternatives, existent. Parmi celles-ci l’utilisation des cellules souches reprogrammées (IPS) découvertes par le Professeur YAMANAKA, prix Nobel de médecine 2012. En effet, concernant la modélisation des pathologies et du criblage de molécules, les cellules souches non-embryonnaires égalent les cellules souches embryonnaires. Elles sont même plus prometteuses en matière de thérapie cellulaire. Cette méthode techniquement valable est moralement acceptable.
- Au nom du Droit et du respect du Parlement. Ce passage en force est indigne. La Loi de Bioéthique votée en 2011 n’est pas respectée par le gouvernement et la majorité. Le Code de la santé publique prévoit qu’un projet de réforme portant sur un problème éthique doit être précédé d’un débat public organisé sous forme d’Etats Généraux. Ceux-ci n’ont pas eu lieu. Quel manque de considération pour un sujet à l’enjeu si fondamental que de l’introduire en juillet durant la session extraordinaire, en bousculant l’ordre du jour, refusant le vote par amendements, et en commençant l’examen à 23h.
La procédure est à l’image du fond, déplorable. Les urgences sont ailleurs. Il ne suffira pas de voter contre ce texte mardi, il faudra avoir le courage de revenir dessus car la politique c’est aussi la volonté au service de la dignité.
Yannick MOREAU
Député de la Vendée Littorale
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Opération Valérie Trierweiler à Paris
COMMUNIQUÉ du Printemps Français : François et sa volaille
un beau lâcher de poulets à Paris pour honorer la première poule de France, Valérie T. Samedi matin, le Printemps Français a lâché une basse-cour au pied de son immeuble parisien, gardé par deux poulets. Courant derrière nos coqs, les poulets de Manuel Valls tentaient de protéger la première poule de la République, et les plumes volaientÇa nous a bien fait rire, et c’est tout ce que ça nous rapportera. Car sinon, la dame à François, elle nous coûte de l’argent : soit c’est sa maitresse, et pourquoi l’entretenir sur un pied officiel, soit c’est sa concubine, et François a menti sur son patrimoine et ses revenus.Ce n’est qu’un mensonge de plus, de la part d’Hollandouille, qui veut bien du mariage pour tous mais n’en veut pas pour lui, qui veut bien changer la vie des Français mais refuse de toucher à son confort de célibataire à bonne fortune.Pourtant le temps des comptes est venu, ceux que la Cour lui jette dessus chaque matin, et le décompte de ses soutiens dans les sondages : la France n’a plus d’argent, François est à sec.PAS DE PETITES ÉCONOMIES, VALÉRIE N’A RIEN À FAIRE PARMI LES OFFICIELS DU 14 JUILLET !
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Une poule pour tous
François et sa volaille
Un beau lâcher de poulets à Paris pour honorer la première poule de France, Valérie T. Samedi matin, le Printemps Français a lâché une basse-cour au pied de son immeuble parisien, gardé par deux poulets. Courant derrière nos coqs, les poulets de Manuel Valls tentaient de protéger la première poule de la République, et les plumes volaient. Ça nous a bien fait rire, et c’est tout ce que ça nous rapportera. Car sinon, la dame à François, elle nous coûte de l’argent : soit c’est sa maitresse, et pourquoi l’entretenir sur un pied officiel, soit c’est sa concubine, et François a menti sur son patrimoine et ses revenus.
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Turquie : Erdogan s'impose, l'Europe se tait (archive 2010)
Le 22 février, la Turquie a procédé à l'arrestation de 64 officiers dont des généraux soupçonnés d'avoir comploté en 2003 contre le nouveau gouvernement islamo-conservateur de Recep Tayyip Erdogan, Ils risquent jusqu'à 15 ans de prison.
Voici encore cinq ans, le général Çetin Dogan était le chef des forces armées turques. Envisageant une retraite paisible, il avait acheté une villa de trois étages au bord de la mer Egée, quand une équipe antit-erroriste a perquisitionné sa belle demeure et l'a arrêté à Istanbul.
À Ankara, des policiers se sont présentés à la villa du général Ibrahim Firtina, ancien commandant de l'armée de l'air et portant le titre de Pacha : « Vous êtes en état d'arrestation. Vous avez une demi-heure pour vous préparer. Prenez s'il vous plait le strict nécessaire ».
Özden Örnek, l'ancien commandant en chef de la Marine, était vénéré comme un demi-dieu. Ce vétéran qui mettait encore son uniforme blanc, a été menotté par les forces de l'ordre. En mars 2007, le quotidien Nokta avait déjà publié les plans des conspirateurs, à présent dévoilés. Le chef des services secrets turcs (MIT) en poste en 2003 avait précisé que les préparatifs d'un coup d'État avait été élaborés au sein de la 1ère armée à laquelle appartenait Çetin Dogan. Cette tentative de putsch portait le nom de «Balyoz» (massue). Le général Örnek, accusé d'être la tête pensante du complot, contesta l'authenticité des documents.
En mars 2009, une junte de la marine fomenta une autre tentative de coup d'État désignée sous le nom de «Kafes» (cage). Elle prévoyait l'enlèvement d'hommes d'affaires, ainsi que des attentats sur les minorités non-musulmanes dans des quartiers d'Istanbul où habitent des chrétiens et des juifs. Les groupes musulmans auraient ainsi été soupçonnés et, sous la pression internationale, le gouvernement aurait démissionné. Le général Ilker Baflbug, chef d'état-major, qui ne croyait pas à la réalité de ces putschs, bénéficie d'une étroite marge de manœuvre. Dans le cadre d'un entretien avec le Premier ministre Erdogan et le président Abdullah Gül qui s'est déroulé le 25 février, il s'est engagé à faire la lumière sur cette conjuration.
La multiplication des arrestations massives fait craindre une radicalisation du pouvoir. Voici trois ans, 200 opposants à l'AKP, le Parti de la justice et du développement qui soutient le président et le premier ministre, avaient été écroués.
En janvier dernier, 120 personnes accusées d'être liées à AI-Qaïda ont connu le même sort. Mais avec le coup de filet de février, le gouvernement s'attaque pour la première fois aux «gardiens» de l'héritage de Mustafa Kemal Atatürk, le fondateur de la Turquie moderne. Et le peuple turc qui depuis 1960 a connu quatre putschs militaires, se demande comment l'armée réagira. Voilà deux ans seulement, un hôpital militaire avait refusé d'accueillir l'épouse du premier ministre, parce qu'elle portait le voile. Aujourd'hui, les généraux, qui s'étaient toujours opposés à l'accession au pouvoir de l' AKP et s'étaient alliés au réseau criminel et mafieux Ergenekon, ont baissé de ton. Ilker Baflbug, qui a annulé un voyage en Égypte à la nouvelle de ces arrestations, a même présenté ses excuses à Erdogan. Pour sa part, le premier ministre, alors en villégiature en Espagne, a simplement commenté : « La justice fait son travail ».
Le premier ministre gouverne comme un sultan
Depuis la victoire historique de l'AKP aux élections législatives de 2002, les kémalistes, imbus de leurs privilèges, s'opposent à tout changement politique et dénigrent le premier ministre quand celui-ci cherche à persuader l'Occident de ses intentions démocratiques en abolissant les tribunaux de sécurité de l'État, en autorisant les Kurdes à parler leur langue, en promettant de régler le conflit avec la Grèce sur la question de Chypre et en faisant élaborer un projet constitutionnel obligeant les militaires à se soumettre à des contrôles civils. Mais les kémalistes, qui voulaient faire interdire l'AKP, ont perdu le pouvoir sans espoir de le reconquérir.
Les efforts des juristes pour déstabiliser le gouvernement n'ont pas porté plus de fruit. En 2008, le procureur général Abdurrahman Yalçinkaya, descendant d'une famille kurde, petit-fils d'un cheik de l'ordre très pieux des Naqshbandi (confrérie soufi) et considéré comme le juriste le plus rigoureux du pays, avait procédé à la première demande de destitution de l'AKP, qu'il qualifie de « centre d'activités anti-séculaires ». Cette procédure, portée devant le Conseil constitutionnel, a échoué. Mustafa Fientop, professeur de droit, explique pour sa part qu'Erdogan est intouchable, car « les magistrats craignent d'être emmenés les menottes aux poignets ». De son côté, la presse favorable au pouvoir actuel jubile après les arrestations des officiers généraux : le journal Zaman titre : « Les invincibles sont arrêtés », et Sabah : « Une opération sans précédent dans l'histoire de la république ». Cet enthousiasme de la presse nationale n'a toutefois trouvé d'écho favorable, ni dans les sphères de l'opinion publique, ni au sein de l'Union européenne, qui, manifestement, lie le dossier de l'adhésion de la Turquie à la question des droits de l'homme, dont la situation est loin d'être idéale dans le pays.
Le secrétaire d'un syndicat confiait ainsi : « Nous sommes sous pression. Les gens adhèrent à des syndicats d'orientation religieuse et proches du gouvernement ». De même, un professeur expose : « Les représentants de l'AKP siègent dans tous les centres de coordination. Les gouverneurs, les conseillers régionaux, les directeurs d'école, les policiers deviennent tous des affiliés du parti ». Et Burak Bekdil, journaliste au Turkish Daily News et opposant à Erdogan, est fondé à poser la question : « C'est une démocratie où seule l'armée se démocratise, tandis que dans tous les autres domaines de la société sont installés des membres de l'AKP. S'agit-il d'une démocratie islamiste ? »
Ayant ainsi déjoué toutes les tentatives des militaires et des juristes qui voulaient l'écarter du pouvoir, Erdogan, le tribun populaire, règne comme un sultan. Voici quelques années, lors d'un discours de campagne électorale, il avait déclaré : « le pouvoir est entre les mains du peuple ». Les Turcs se demandent aujourd'hui, à juste titre, de quel peuple parlait alors leur premier ministre.
Boutros Sentaraille monde & vie 3 avril 2010