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économie et finance - Page 796

  • Affaire Titan : Maurice Taylor, l'esprit et la lettre

    Un fabricant de pneus américains a scandalisé la France entière, après qu'a été rendue publique la lettre qu'il avait adressée au ministre Arnaud Montebourg. Mais bien qu'il s'exprime de façon caricaturale, il n'a rien d'un chantre du libéralisme - au contraire !
    Maurice M. Taylor Jr., surnommé "le Grizzli", était une personnalité totalement inconnue en France il y a quelques semaines encore. Ce dirigeant américain d'une entreprise de fabrication de roues et de pneumatiques "hors route", Titan, basée à Quincy (Illinois), a pourtant acquis en quelques heures .une notoriété, doublée d'une impopularité, qui n'a certainement pas manqué de le surprendre, et peut-être de le réjouir. Qu'a-t-il fait ? Sollicité par le ministre Montebourg pour reprendre l'usine Goodyear dite "d'Amiens Nord", il s'est fendu d'une lettre rendue publique dans laquelle il fustige en quelques lignes les gouvernements français et américain, les salariés et les syndicats hexagonaux, les avocats et les politiques en général. Point d'orgue de la missive : « How stupid do you think we are ? », que nous ne ferons pas l'offense à nos lecteurs de traduire...
    Provocation
    Il s'agit bien évidemment d'une provocation, de la part d'un entrepreneur connu pour son caractère entier et ses positions radicales, qui fut candidat (1 %) à la primaire républicaine de 1996. Mais, au-delà des mots (qui semblent avoir étrangement blessé notre ministre, pourtant lui aussi volontiers caustique avec les interlocuteurs ne rentrant pas dans ses vues), n'y a-t-il pas quelques vérités qui blessent dans la prose de Morry Taylor ? Par exemple, lorsqu'il dénonce la faiblesse de notre gouvernement face à la Chine en matière de lutte contre la subvention déloyale de son industrie, a t-il tort ? Certes non, point n'est besoin d'exemple pour rappeler que l'Europe, ouverte à tous vents, laisse s'effondrer des pans entiers de son outil de production. Et lorsqu'il affirme qu'en matière de sauvetage d'entreprises en difficulté, « syndicats et gouvernement ne font que discuter », on ne peut pas ne pas songer au contraste entre, d'une part, l'entrepreneur qui a bâti un groupe de près d'un milliard et demi de chiffre d'affaires à partir des ruines de concurrents moribonds et, d'autre part, les tentatives infructueuses auxquelles nous assistons depuis quelques mois en France.
    Sa dénonciation du syndicalisme est certes excessive et caricaturalement américaine. Il faut toutefois rappeler que le site d'Amiens Nord, en difficulté depuis 2008, souffre, entre autres maux propres à l'industrie pneumatique européenne (faiblesse du marché automobile, coût du caoutchouc, concurrence chinoise), du jusqu'au-boutisme de leaders syndicaux, dont certains mènent en parallèle une carrière politique locale à l'extrême gauche. Cette attitude a découragé bien des repreneurs, dont...Titan, le groupe de Morry Taylor, qui a visité l'usine en mai 2012, et a été déclaré « persona non grata » par la CGT locale ! Quelle mouche a donc piqué notre ministre pour qu'il sollicite un industriel éconduit de la sorte quelques mois auparavant ? Nous préférons croire qu'il ne s'agit que d'une imparfaite connaissance du dossier.
    Débrayages multiples
    Autre point d'achoppement, et non des moindres, avec l'opinion publique et nos classes dirigeantes politique et économique, pour une fois à l'unisson : M. Taylor affirme que « les ouvriers travaillent trois heures, mangent une heure et discutent trois heures ». Les responsables syndicaux auraient même répliqué à l'Américain que « c'est comme ça en France » ! Que n'a-t-il pas dit là ? Certes, ce propos paraît outrancier, tant nous connaissons tous, dans toutes les branches d'activité, publique ou privée, des salariés et des responsables qui ne comptent pas leurs heures et manifestent une louable conscience professionnelle. Ceux-là peuvent légitimement se sentir blessés par de tels propos. Mais c'est oublier qu'ils ne leur étaient pas destinés. En effet, M. Taylor décrit, sans doute en appuyant un peu sur la plume, ce qu'il a vu dans l'usine d'Amiens au moment de sa visite : une usine en conflit social sporadique, sujette à des "débrayages'' permanents, ce qui est hélas une réalité, notamment dans certaines entreprises du secteur automobile. Cette situation est tolérée, d'une part par les directions pour qui cet état de fait est un moindre mal en regard des moyens à mettre en oeuvre pour faire tout simplement appliquer le règlement intérieur et respecter les contrats de travail, et d'autre part par les pouvoirs publics qui ont depuis longtemps renoncé à garantir aux salariés des usines concernées la simple liberté de ne pas faire grève...
    En toute impunité
    Qu'on songe à la situation ces dernières semaines sur le site PSA d'Aulnay-sous-Bois, où certains salariés, sous la houlette d'un apparatchik trotskiste, paralysent impunément la production en recourant à la violence. Ces mêmes pouvoirs publics restent sans réaction face aux chantages écologiques (menaces de pollution, comme chez Cellatex dans les Ardennes), voire terroristes (menaces d'explosions, comme récemment à la fonderie DMI de Vaux dans l'Allier, où les grévistes n'ont fait qu'imiter leurs confrères d'Ingrandes-sur-Vienne il y a deux ans). Ils encouragent ainsi les comportements extrémistes, dont la finalité n'est pas tant de sauvegarder les emplois que d'obtenir une indemnité de licenciement plus conséquente. Les députés communistes ne s'y sont pas trompés, qui s'apprêtent, à l'heure où nous écrivons, à réclamer l'amnistie pour les voies de fait commises lors des conflits sociaux ! Le décalage entre cette situation, qui ne choque même plus un seul homme politique français, et l'état d'esprit d'un entrepreneur américain comme Maurice Taylor, est tel que l'on pourrait presque qualifier son propos de modéré si l'on ne craignait de vexer inutilement des compatriotes auxquels on répète en boucle et sans le moindre fondement qu'ils ont la meilleure productivité au monde.
    Protectionnisme
    Le dernier point que nous soulignerons (mais il y en a d'autres dans ce texte riche d'enseignements) est la référence du patron de Titan au protectionnisme. Ceux qui dépeignent l'homme comme un tenant du libéralisme à tout crin n'ont pas lu sa lettre jusqu'au bout : d'une part, il décrit son action "antidumping" contre les pneus agricoles chinois ayant inondé son marché local (rappelant au passage qu'il a dépensé des millions de dollars en avocats, pour une procédure finalement gagnée qui permet à l'État américain de percevoir un impôt sur les importations sans que lui n'ait rien touché...) ; d'autre part, il annonce que, faute d'une politique économique réaliste et efficace, Michelin (dix fois plus gros que Titan en chiffre d'affaires !) ne sera dans cinq ans plus en mesure de produire des pneus en France. On peut qualifier ce propos de forfanterie. On peut aussi s'interroger sur le fait qu'un groupe comme Michelin réalise effectivement la plupart de ses bénéfices dans ses sites hors d'Europe. On pourrait aussi questionner nos politiques sur l'inefficacité de leur action pour enrayer le déclin du marché automobile européen (par pitié, qu'on ne nous parle pas de la voiture électrique !) et l'absence totale de contrôle aux frontières (françaises ou européennes) pour des produits aussi banalisés que les pneumatiques, qui peuvent impunément être importés de pays où ils sont fabriqués dans des usines subventionnées, et de surcroît au mépris des standards sociaux et environnementaux imposés à notre industrie. Telle est aussi la leçon de Maurice Taylor. Qu'elle soit amère et donnée dans des formes peu civiles sous nos longitudes ne doit pas nous interdire de les méditer. Sans trop tarder...
    Jean-Marc Ferrand Action Française 2000 mars 2013

  • La faillite de la reconstruction irakienne

    60 milliards de dollars de subsides avec des résultats jugés “insuffisants”. Panetta critique le retrait voulu par Obama. Une leçon pour l’Afghanistan !

    Les Américains ont envahi l’Irak il y a dix ans et ont consacré 60 milliards de dollars pour la reconstruction du pays et le gros de cette somme colossale est parti en fumée. Stuart Bowen vient de le confirmer; il est le chef de l’agence gouvernementale de vigilance sur la reconstruction de l’Irak. Il vient de présenter son rapport final au Congrès américain. Ce rapport contient aussi une critique acerbe du modus operandi du Président Obama, formulée directement par l’ancien secrétaire d’Etat à la défense, Leon Panetta. Selon cet ancien chef du Pentagone, le retrait total des troupes américaines à la fin de l’année 2011 a réduit considérablement le pouvoir d’influence de Washington sur Bagdad. Panetta critique surtout l’incapacité du gouvernement Obama à trouver un accord avec Bagdad sur la présence militaire permanente des Etats-Unis, en particulier sur l’immunité des soldats américains face aux lois irakiennes.

    Les coûts de la reconstruction, a déclaré Bowen, “ont été beaucoup plus élevés que prévu” et les résultarts obtenus sont “insuffisants, vu les sommes engagées”. En effet, nonobstant le fait que Washington ait déboursé 15 millions par jour, l’Irak demeure encore et toujours un pays pauvre, en grande partie privé d’électricité et d’eau potable. A Bassorah, seconde ville d’Irak, on peut encore voir des égoûts à ciel ouvert. En tout, y compris les frais diplomatiques, militaires et autres, les Etats-Unis ont dépensé près de 767 milliards de dollars depuis l’invasion de l’Irak, selon le “Congressional Budget Office”. Selon les organisations qui contrôlent les dépenses fédérales, les projets encore en cours feront monter la note à quelque 811 milliards!

    Dans de trop nombreux cas, explique Bowen, les fonctionnaires américains ne se sont pas entretenus avec les autorités irakiennes pour essayer de comprendre comment ils pouvaient rendre service au pays ou pour tenter de savoir dans quels projets il fallait prioritairement investir de l’argent. Le résultat de tout cela, c’est que les Irakiens se sont désintéressés des initiatives américaines, tout en refusant de payer leur part, de terminer les travaux, de mettre en oeuvre les projets au préalable acceptés.

    Le rapport de Bowen s’intitule “Apprendre de l’Irak” et fait référence à la situation en Afghanistan. Là-bas aussi, en douze années de guerre, les Etats-Unis ont dépensé des dizaines de milliards de dollars (90, dit-on) pour des projets dont l’issue est plus que douteuse. Prochainement, le gouvernement de Kaboul devra décider d’octroyer ou non l’immunité aux soldats américains après le retrait total prévu pour 2014.

    Ferdinando CALDA.
    (articule paru sur le site du quotidien romain “Rinascita”, 8 mars 2013; http://www.rinascita.eu/ ).

  • Maxence Hecquard : « Les problèmes structurels de notre société ne sont pas économiques mais avant tout moraux »

    Maxence Hecquard, auteur des Fondements philosophiques de la démocratie moderne (éd. F-X. de Guibert), est aussi un homme d'affaires expérimenté qui connaît bien les marchés de capitaux.
    Monde et Vie : Maxence Hecquard, la crise économique a connu cet été une nouvelle étape. Pensez-vous que nous soyons à la veille d'un effondrement du système ?
    Maxence Hecquard : Non. Cette crise est grave, mais ne signifie pas encore à mon sens la ; fin du monde capitaliste, malgré ses turpitudes comme le montant astronomique des dettes extérieures des États.
    Que se passe-t-il aujourd'hui ? Les investisseurs, c'est-à-dire le marché, prennent conscience que la dette d'un certain nombre d'Etats pourra difficilement être remboursée. En effet, ces États ne produisent pas suffisamment de richesses pour assurer à la fois le service de leur dette extérieure et le fonctionnement normal de leur économie. C'est le cas de presque tous les pays développés - y compris la France -, qui vivent depuis 30 ans au-dessus de leurs moyens, avec un endettement qui, en termes de pourcentage de leur produit intérieur brut (PIB), s'accroît structurellement.
    Il faut se souvenir que la dette est à la fois un stock - son volume - et un flux. En effet chaque année, une partie de la dette arrive à échéance et doit être renouvelée : on crée donc une nouvelle dette pour rembourser la première et financer les affaires courantes. À cette occasion, les investisseurs prêtent de nouveau et fixent un nouveau taux d'intérêt, qui suit les aléas généraux des marchés internationaux. C'est ce mécanisme qui crée des difficultés. Car si les investisseurs prennent brusquement conscience qu'un emprunteur, en l'occurrence un État, est insolvable ou risque de le devenir, ils réclament un taux d'intérêt plus élevé pour couvrir ce risque de défaut. On entre alors dans un cercle vicieux : les intérêts augmentant, le pays est obligé de s'endetter encore davantage pour les payer et finalement n'arrive plus à rembourser le capital. C'est ce qui s'est produit en Grèce. Et si la prise de conscience s'étend à d'autres pays - on parle de ceux de l'Europe du Sud, la France n'étant pas à l'abri avec une dette représentant environ 80 % de son PIB -, les taux d'intérêt de leurs dettes montent brusquement, reproduisant le même mécanisme infernal.
    La nouvelle dette sert exclusivement a payer les intérêts de la vieille dette
    Les États-Unis sont dans la même situation et viennent de perdre leur note AAA. C'était inévitable puisque, depuis plusieurs années, leur nouvelle dette sert exclusivement à payer les intérêts de la vieille dette. Ils s'enfoncent ainsi dans un mécanisme de surendettement, qui ne peut pas durer éternellement.
    Pourtant ce phénomène dure depuis des décennies : comment est-ce possible ?
    C'est fondamentalement un problème monétaire. Si les États-Unis ont pu s'endetter autant, c'est parce que, depuis l'abandon de l'étalon-or, ils peuvent créer de la monnaie pour assurer les remboursements de leur dette. Le mécanisme des changes flottants permet ainsi à certains de s'endetter massivement tant qu'ils trouvent des prêteurs. Le Japon a financé pendant des décennies les déficits américains et c'est la Chine qui le fait aujourd'hui. L'augmentation de la masse monétaire en dollars, avec la dépréciation qui en résulte, a permis les remboursements réguliers de la dette américaine. L'Europe a imité les États-Unis. C'est parce que le dollar et l'euro ne sont plus convertible en or que l'Occident a pu s'endetter massivement. Mais les marchés ont brusquement pris conscience de ces risques souverains et se sont aperçus qu'il n'était pas exclu que des États occidentaux fassent défaut. D'où la nervosité qui incite beaucoup d'investisseurs à refuser de souscrire à de nouvelles dettes et à vendre les bons du trésor. Ils leur préfèrent les valeurs-refuge : or, immobilier, œuvres d'art, etc.
    Une crise des finances publiques entraînerait une crise générale de liquidité, qui se traduirait par une récession mondiale, avec pour conséquence des faillites d'entreprises en chaîne et la chute des marchés boursiers.
    Par ailleurs, dans une économie mondialisée, les difficultés d'un acteur sont ressenties dans toute la planète. La mondialisation se traduit donc fatalement par une multiplication des crises.
    Néanmoins, le système financier international est extrêmement solide et ce n'est pas la première crise financière qu'il traverse - il s'en est produit tout au long du XXe siècle.
    Puisque vous avez posé le diagnostic, examinons les remèdes. Par quels moyens pourrait-on sortir de la crise actuelle ?
    Il existe plusieurs manières de traiter le surendettement.
    La manière simple et honnête consiste, lorsque l'on a vécu au-dessus de ses moyens, à réduire son train de vie, sa consommation et à accroître son épargne pour rembourser ses créanciers. C'est la politique de rigueur imposée à la Grèce et que l'on envisage aujourd'hui de mettre en œuvre dans l'ensemble des pays occidentaux. Malheureusement je crains que cette politique soit inefficace aujourd'hui. En effet elle reviendrait à mettre le commun des citoyens au pain sec et à l'eau pour rembourser les dettes, alors que les dépenses somptuaires engagées par les pays occidentaux depuis 30 ans n'ont pas profité à toute la population.
    Cette politique de rigueur aurait donc un coût social et politique important, difficile à gérer pour les équipes gouvernantes et dont les limites pourraient s'éprouver dans la rue. Les désordres sociaux seraient aggravés par la mauvaise assimilation de populations immigrées souvent désoeuvrées, comme nous l'avons vu récemment en Angleterre. En outre, la disproportion entre la masse des dettes à rembourser et les capacités d'épargne des parties les moins favorisées de la population et même des classes moyennes rend inopérant ce moyen de désendettement, pourtant le plus naturel.
    Une seconde solution consisterait à faire défaut, en disant aux créanciers : nous n'avons pas les moyens de vous rembourser, donc nous vous demandons un rééchelonnement des dettes. C'est ce qu'ont fait la Russie en 1998, le Brésil en 1999 et l'Argentine en 2002. Il me paraît cependant difficile d'envisager une telle issue pour des pays nord-américains ou européens, car un défaut officiel entraînerait mécaniquement des provisions sur les bilans des banques, qui sont des détentrices importantes des dettes souveraines de ces pays. Il s'ensuivrait une faillite théorique des banques occidentales très compliquée à gérer par les banques centrales.
    Mutualisation et inflation
    Un troisième type de solution dissocierait les Etats européens qui ont franchement exagéré (l'Europe du sud) et ceux qui ont été plus raisonnables (l'Europe du nord) en les traitant différemment. C'est déjà le cas, puisque les pays du sud paient des taux d'intérêt très supérieurs à ceux de l'Allemagne, de la France ou de certains pays d'Europe du nord : la différence est de 3 à 5 %. Pour permettre aux États du sud de « relancer la machine », on pourrait envisager qu'ils sortent de la monnaie unique et retrouvent une monnaie nationale fortement dévaluée par rapport à l'euro. Cette dévaluation compétitive leur permettrait de relancer l'économie, de restaurer les exportations et donc de redonner de la compétitivité. Cependant, le coût politique pour l'Europe serait tel que les dirigeants europhiles préféreront une autre solution, plus douloureuse mais préservant la monnaie unique : la quatrième solution.
    Celle-ci consisterait à mutualiser les dettes en substituant aux dettes des Etats les plus dépensiers une dette de l'ensemble de l'institution européenne, ce qui conduirait les fourmis à contribuer à payer les dettes des cigales.
    Les peuples-fourmis ne risquent-ils pas de réagir négativement à cette mutualisation ?
    L'opinion publique des pays les moins endettés et les plus performants économiquement sera mécontente, mais ce mécontentement suffira-t-il à enrayer ce processus ? Aujourd'hui, tous les pays européens sont engagés dans une fusion d'abord économique, puis politique. J'entends fort peu de voix demander le retour à une indépendance complète - y compris monétaire - des nations. Cette crise représente d'ailleurs une formidable opportunité politique pour réduire le pouvoir des nations en difficulté. Cette contrepartie politique justifiera les efforts financiers de l'Europe du nord, qui va accroître son emprise sur l'Europe du sud. Ça vaut bien quelques sacrifices des retraités allemands...
    Toutes les mesures de règlement de la crise vont dans le sens de cette mutualisation de la dette. Ainsi, quand la Banque Centrale Européenne acquiert des dettes des États qui ne trouvent pas preneur, elle fait fonctionner la planche à billets pour les financer. Or, la BCE est elle-même financée par l'ensemble des États membres de l'Europe. Il s'agit donc bien d'un mécanisme de mutualisation.
    De même, quand le Fonds de garantie européen s'endette auprès des États membres pour racheter la dette des Etats en difficulté, il s'agit encore d'un mécanisme de substitution et de mutualisation. Et la règle d'or qui a été envisagée la semaine dernière par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel est elle-même une condition pour avancer sur le chemin de la mutualisation complète des dettes européennes.
    Cela suffira-t-il à régler le problème du surendettement ?
    Non, car le surendettement est général, même s'il est plus grave dans certains pays. Mutualisée, la dette extérieure de l'Europe est aussi importante que celle des États-Unis - gigantesque. À court terme, la mutualisation rassure les créanciers et permet de gagner du temps, mais elle ne réduit pas la dette.
    Une fois de plus la réduction de la dette passera invariablement par l'inflation. On fera fonctionner la planche à billets pour rembourser les dettes. C'est ainsi que l'on a réglé toutes les crises de surendettement majeur, dans tous les pays. Il était exclu de recourir à cette solution lors de la construction de la monnaie unique européenne, parce qu'on nous la présentait précisément comme un remède à l'inflation ; mais cette monnaie unique n'ayant pas empêché le surendettement, l'inflation va revenir.
    Il y a déjà eu une importante inflation cachée, au moins sur les biens de consommation...
    Oui, mais elle est insuffisante pour régler le surendettement, qui est d'une tout autre ampleur. On peut penser que celle à venir serait beaucoup plus importante, comparable à l'inflation à 15 % que l'on a connue en France à la fin des années soixante-dix. En pâtiraient essentiellement les gens qui ont une épargne monétaire, autrement dit les classes moyennes et les retraités. Comme nous sommes des pays vieillissants, cette politique inflationniste est plus difficile à faire accepter politiquement qu'il y a 30 ans, c'est pourquoi nos gouvernants se gardent de l'annoncer.
    En pâtiraient aussi les pays comme la Chine, le Japon et les États du Moyen-Orient, qui ont investi massivement dans la dette souveraine de l'Occident vieillissant et consommateur : lequel leur répondrait cyniquement que les pertes qu'ils constateraient sur leurs dettes libellées en dollars ou en euros seraient la compensation des taux de change artificiellement bas dont ils bénéficient et qui leur ont permis de s'industrialiser au détriment des pays occidentaux.
    Mutualisation et inflation : telle est la solution. Il s'agit d'un défaut de paiement qui ne dit pas son nom.
    Vous avez posé le diagnostic de la crise et analysé les moyens d'y remédier, mais quelles sont ses causes ?
    Nous sommes surendettés parce que nous avons vécu au-dessus de nos moyens ; et nous avons vécu en cigales parce que notre monde a perdu toute règle morale : sa seule règle est de consommer et de jouir de ce monde comme d'une chose qui nous appartiendrait. Telle est la cause profonde de la crise.
    L'Occident doit faire son mea culpa. En quelques générations, il a dévoré l'ensemble des riches ses de la planète, sans enrichir les populations des pays sous-développés et sans même se reproduire correctement. La frénésie de la consommation a été le seul moteur de la croissance occidentale, alors que celle-ci aurait dû se fonder sur une saine croissance démographique. Ceci a engendré des flux migratoires et de nombreux désordres (comme le problème des retraites) que personne ne veut vraiment reconnaître. Je pense que nous allons certes passer cette crise, mais qu'à long terme la situation ne s'améliorera pas. L'effondrement du système finira par arriver si l'on ne règle pas les problèmes structurels de notre société. Ceux-ci ne sont pas économiques mais moraux. Ils touchent au bon ordre de la nature et à la nécessité de vivre conformément à nos moyens en pratiquant, comme disent les philosophes, la justice.
    Propos recueillis par Hervé Bizien monde & vie . 27 août 2011

  • 2 mai 1716 : la fortune anonyme et vagabonde

    Autorisée par lettres patentes, une banque est fondée à Paris le 2 mai 1716. Société par actions, au capital de 6 millions de livres, cette banque privée, d'escompte et d'émission, habilitée à émettre des billets au porteur, est étroitement liée au pouvoir puisque 75 % de son capital sont en billets d'Etat. Le paiement des impôts en billets de banque sera d'ailleurs autorisé le 10 avril 1717. Ces privilèges sont dus à l'appui que fournit le Régent Philippe d'Orléans au fondateur de la banque John Law.
    Ce personnage est pourtant quelque peu louche. Fils d'un orfèvre installé à Edimbourg et qui a acheté à grands frais des domaines qui lui permettent de se faire appeler « baron de Lauriston », John Law, après avoir dissipé sa fortune à Londres, a nomadisé à travers toute l'Europe avant de jeter son dévolu sur Paris en 1708. Il fréquente les tripots et joue gros jeu. S'étant introduit dans l'entourage du duc d'Orléans, il capte son attention en lui proposant des solutions hardies pour remédier aux difficultés financières de l'Etat. Les dépenses de l'Etat, qui ont doublé entre 1689 et 1967, ont doublé à nouveau entre 1701 et 1714... Cet accroissement des dépenses ne peut être couvert que par un ensemble d'expédients et par le recours à l'emprunt. C'est dans cette conjoncture difficile que Law prétend apporter un remède miracle. Après un départ précipité de Paris, sur ordre du lieutenant de police qui l'accuse de malversations (« il en savait trop aux jeux qu'il avait introduits dans cette capitale »), l'aventurier y revient après la mort de Louis XIV et retrouve aussitôt l'oreille de Philippe d'Orléans, désormais Régent - et très sensible aux questions d'argent, comme devaient l'être nombre de ses descendants.
    L'ascension de Law est spectaculaire. Les billets émis par sa banque, se substituent à la lettre de change traditionnelle, jusque sur la place d'Amsterdam. Le 4 décembre 1718, un édit transforme la banque privée en Banque Royale. Par ailleurs, Law a fondé en août 1717 la Compagnie du commerce d'Occident, dont sa banque a souscrit le capital. Obtenant le privilège exclusif du commerce avec la Louisiane et le Canada (pour les peaux de castor), la Compagnie reçoit ensuite le monopole du commerce avec les Indes, la Chine et l'Afrique.
    L'argent des particuliers afflue rue Quincampoix, au siège de la banque Law obtient le bail des fermes et gère le remboursement de Ia dette publique par une émission continuelle de monnaie fiduciaire. Tout semble lui sourire. Consécration : il accède au contrôle général des Finances en janvier 1720. Les billets remboursables au porteur et à vue, obtenus contre de bons écus, représentent bientôt la somme fabuleuse de 2 696 400 000 francs. La fureur spéculative est au comble et l'on se bouscule frénétiquement rue Quincampoix.
    Mais quelques grands personnages (dont le duc de Bourbon et le prince de Conti), qui ont beaucoup investi, prennent peur et se dégagent. Le château de cartes s'écroule, la panique se répand. Des milliers d'imprudents sont ruinés du jour au lendemain, certains se suicident.
    Quelques malins ont fait des fortunes spectaculaires. Law, lui, s'enfuit sous un déguisement jusqu'à Bruxelles.
    P. V national Hebdo du 30 avril au 6 mai 1998

  • Nice : le tribunal administratif condamne la mairie pour le bail de la mosquée !

    Le Tribunal administratif a condamné hier la mairie de Nice pour le bail de la mosquée rue de Suisse. Le bail en question était établi entre la ville de Nice, dont le maire est  Christian Estrosi, et l’association islamique de la mosquée, située rue de Suisse. Suivant les recommandations du rapporteur public, le juge a finalement condamné la municipalité. La décision établissant le bail a donc été annulée, le Tribunal estimant même qu’elle était « entachée d’une illégalité d’une particulière gravité » : la mairie avait en effet sous-évalué le coût du loyer des locaux, accordant en plus une remise de 50% sur ce loyer déjà diminué.

    Christian Estrosi avait ainsi apporté son soutien à la nouvelle grande mosquée de Nice-est, ainsi qu’à des extensions pour les mosquées de l’Ariane et des Moulins, alors que la ville comptait pourtant déjà 18 lieux de culte islamiques !

    Preuve, s’il en fallait, que les politiques, fussent-ils estampillés à droite, développent délibérément l’islamisation sur le territoire français ! Car comment expliquer autrement un tel zèle auprès des associations islamiques ?

    Il reste que le problème se situe encore en amont : tant que l’immigration de masse continuera de déferler en France, l’équilibre culturel du pays sera évidemment affecté. Et ce n’est pas l’immigration suédoise qui pose un problème culturel en France !

    http://www.contre-info.com/

  • Olivier Delamarche : « Un jour on sera tous Chypriotes »

    Olivier Delamarche, du groupe Platinium Gestion, le 26 mars 2013 sur BFM Radio, met les points sur les i, dans l’émission “Intégrale Placements“, face à Guillaume Sommerer et Cédric Decoeur.

     « Vous êtes Portugais, vous êtes Espagnol, vous êtes Italien, est-ce que vous laissez vos sous dans une banque ?
    Avec une dette massive comme aujourd’hui dans tous les pays, il y aura un défaut de paiement.
    En France les dépôts sont de 2000 milliards, le fonds d’indemnisation des banques en faillite est de 2 milliards, vous faites comment pour garantir ?
    On a eu un défaut de l’Irlande qui est passé totalement inaperçu, ils ont ré-étalé la dette à 35 ans, c’est-à-dire à vie.
    Les épargnes ne sont absolument pas en sécurité dans les pays endettés. »

    http://fortune.fdesouche.com/

  • Écoracialisme (6) - Une géopolitique des écosystèmes

     

    Voici, aujourd’hui, publié en avant-première, le sixième extrait du prochain livre de Frédéric Malaval, Ecoracialisme.

     

    Après avoir présenté dans son introduction sa thèse selon laquelle des évolutions irrépressibles obligeront les différentes races humaines à vivre dans leur écosystème d’origine, Frédéric Malaval a développé plusieurs argumentaires qui se construisent à partir d’observations sur la société humaine, sur un certain confort de vie après les grandes calamités du XIXe et de la première moitié du XXe siècle, sur « l’insondable origine des peuples » et, enfin, dans son cinquième extrait, sur une certaine modernité venue tout droit des Etats-Unis au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Dans ce sixième extrait, publié ci-après, son approche se fixe sur une géopolitique directement issue des écosystèmes, avec évidemment une évolution qui se fait et se défait au gré des ressources naturelles de la planète. polemia

    (…) Cette approche écosystémique permet aussi d’éclairer la géopolitique associée aux deux révolutions industrielles des XIXe et XXe siècles.

    La première révolution industrielle est la conséquence de l’utilisation du charbon dans les machines à feu, objet de la thermodynamique. (…) La seconde révolution industrielle a comme origine la substitution du pétrole au charbon comme combustible alimentant les machines à feu.

    (…) Mais alors que l’utilisation du charbon repose sur la maîtrise politique des territoires où se déroule la première révolution industrielle, le recours au pétrole va changer la donne géopolitique. Il y a alors rupture avec une géopolitique traditionnelle associant territoire et ressources. Le jeu géopolitique est modifié par le recours au pétrole. En effet, de nombreux Etats n’ont pas ou plus la maîtrise politique des territoires où se situe cette ressource à l’origine des caractéristiques écosystémiques de leur société. Ce découplage alimente toute la géopolitique depuis les années 1930, période où le pétrole s’impose comme l’énergie du futur. Une nouvelle vision de la Seconde Guerre mondiale en est issue. Celle-ci opposa des empires (USA, Russie soviétique, Royaume-Uni, France, Chine) ayant la maîtrise politique des territoires où se situait cette nouvelle ressource, à des nations qui n’en disposaient pas (Allemagne, Japon, Italie). L’effort de guerre de l’Allemagne ne pouvait s’appuyer que sur les ressources pétrolières de Roumanie, l’obligeant à une stratégie reposant sur la Blitzkrieg, incapable qu’elle était de soutenir une guerre longue. Les trop faibles ressources naturelles du Japon et de  l’Italie les plaçaient dans la même situation à l’origine du Pacte Antikomintern (1936) et le rêve de se retrouver ensemble, installés sur les gigantesques ressources de l’Eurasie centrale.

    Cette approche éclaire les grands mouvements de cette période à l’origine du monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. L’Italie engagea le mouvement en cherchant à conquérir les pétroles de la Libye ; l’Allemagne au printemps 1942 s’associa à l’Italie dans sa lutte contre le Royaume-Uni pour maîtriser l’Afrique du Nord tout en s’engageant au même moment vers les champs de pétrole du  Caucase de la Russie soviétique. Le Japon, de son côté, optait pour la conquête des pétroles de l’Asie du Sud-Est (Philippines, Malaisie) après avoir été refoulé en Sibérie à la bataille de Khalkhin-Gol en 1939, là aussi contre la Russie soviétique. Par manque de ressources durables, ces trois protagonistes échouèrent dans leurs tentatives d’accéder au pétrole, laissant aux empires en place la maîtrise du monde. Le différentiel démographique entre les deux blocs n’est pas le seul responsable de ces défaites. Malgré les hautes qualités de leurs armées, l’impossibilité d’accéder au pétrole participa à leur échec.

    (…) L’actualité rend compte quotidiennement des mouvements dont la finalité poursuit le jeu engagé dans les années 1930 et dont la justification est le découplage entre ressources énergétiques et souveraineté politique. Avant d’envisager la fin du pétrole comme énergie de référence, sa maîtrise politique est vitale pour les sociétés modernes ultra-complexes (ou ultra-artificialisées, c’est pareil) ne possédant pas cette énergie sur leur sol ou voulant empêcher les autres d’y accéder. C’est le grand jeu géopolitique depuis 1950. Une sorte d’écopolitique… Or, les données de cette écopolitique changent fondamentalement avec les évolutions que l’extension de la technosphère a permises sur l’ensemble de la planète. Le plus important est la forte croissance démographique que cela a engendrée en tous points du globe. La conséquence la plus directe est la fin de la suprématie européenne, tant démographique que technologique.

    La question démographique a déjà été traitée. La question technologique mérite une attention particulière car elle est déterminante pour qu’un peuple existe en soi.

    (…) Aujourd’hui, des savants berbères, arabes, turcs ou perses, mais qui travaillent souvent en Europe ou en Amérique, sont réputés dans de nombreux domaines. Ainsi, l’invention de la logique floue en mathématiques est attribuée à un Iranien. Mais il travaille en Amérique. Un constat s’impose : de l’Atlantique à l’Océan indien, le monde musulman a les personnalités pour maîtriser les techniques qui firent la force des Européens chrétiens.

    Quant aux Africains, régulièrement stigmatisés pour leur refus d’embrasser la Modernité, leurs contributions les plus fameuses sont le téléphone cellulaire, le réfrigérateur, l’ascenseur, etc. Dans les années 1890, l’illustre Thomas Edison perdit même un procès contre un inventeur africain à qui il contestait l’invention du système de télégraphie à induction. Granville T. Woods gagna finalement les droits du brevet. Depuis, Woods est au monde africain ce qu’Edison est au monde européen.

    (…) La conclusion à tirer de cette évocation est que la techno-science n’est plus l’apanage des Européens. Tous les peuples possèdent la capacité de créer une technosphère. Mais pour des raisons que les spécialistes étudient, ils avaient initialement refusé de surartificialiser leurs écosystèmes. Cela était-il nécessaire d’ailleurs ? La Modernité européenne, en revanche, a fait ce choix. Pourquoi les autres ne l’ont-ils pas fait ? Par sagesse écologique sans doute. En des temps où chaque peuple vivait sur le territoire dont il était issu, cela n’empêchant pas les mouvements intraclimatiques, une certaine forme de cohérence collective préservait les fondamentaux de chaque civilisation, forcément adaptée aux contraintes naturelles irrépressibles qu’elle vivait. Les cités grecques, par exemple, ne cessaient de se faire la guerre avant que Rome ne leur apportât la Pax romana IIe siècle av. JC), mais elles prenaient soin d’éviter de le faire pendant la période des récoltes les obligeant à des luttes brèves et violentes. Ceci est à l’origine du modèle grec de la guerre. En outre, les peuples étaient isolés les uns des autres : mers, montagnes et déserts limitant les migrations interclimatiques. En Europe, cet équilibre fut transgressé. Cela a permis à cette civilisation d’envahir l’écosphère, de détruire les autres civilisations, mais pas les peuples. Or, ceux-ci réagissent maintenant à la fois par la démographie et par la technologie.

    (…) Le rêve d’une société mondiale unifiée par un ordre marchand sous la tutelle des Etats-Unis s’effrite chaque jour. Des manifestations quotidiennes de ces fractures saturent la Toile. Ainsi, en avril 2011, Superman décidant de renoncer à sa nationalité américaine pour embrasser « la citoyenneté du monde » provoqua une réaction d’indignation d’Américains refusant la symbolique associée à cette mutation. Même dans la matrice de la Mondialisation, le peuple s’interroge sur l’abandon des identités d’essence nationale.

    Aujourd’hui, l’alternative apparaît limpide, reléguant dans les oubliettes de l’Histoire tous les autres antagonismes. A la mondialisation capitaliste est opposée une approche plus particulariste, mais qui se cherche encore. Alors que le monde est pensé par l’oligarchie mondiale européenne comme unifié par la mondialisation, il est en train de se fractionner. Les contraintes de tous ordres, mais surtout celles relevant de l’écologie, vont imposer à chaque peuple, dans un monde de 10 milliards d’habitants maîtrisant tous la technologie, de réintégrer son espace d’évolution naturel. Cela permettra, d’une part, de limiter autant que faire se peut l’artificialisation des écosystèmes et, d’autre part, de bénéficier des atouts « militaires » que donne le fait de vivre sur son sol pour s’opposer à d’éventuelles tentatives de conquête de peuples exogènes. Tout cela est positif car au sentiment de supériorité européen va succéder un monde diversifié où chaque peuple inséré dans son écosystème d’origine limitera ainsi son artificialisation au niveau suffisant lui permettant de vivre. La paix durable voulue par la Modernité se réalisera par la PostModernité. La fameuse guerre des civilisations que nous promettent les uns et les autres est donc un leurre car elle n’est écologiquement pas possible.

    Frédéric Malaval Polémia 26/03/2013

  • Chômage : Nouveau pic historique attendu pour février

    Le nombre d’inscrits à Pôle emploi en février pourrait dépasser le record de taux de chômage en métropole (10,8%), enregistré en 1994 et 1997 (3,185 millions). [NDLR: Il s'agirait alors d'un nouveau "record" pour la seule catégorie A, soit la 22e augmentation consécutive pour cette seule classification de chômeurs].

    [...] En tenant compte des inscrits exerçant une activité réduite, Pôle emploi recensait fin janvier 4,6 millions de demandeurs d’emploi en métropole (4,9 avec l’Outre-mer). Les demandeurs d’emplois de longue durée (plus d’un an) n’ont jamais été aussi nombreux: près de deux millions, et chaque mois 90.000 chômeurs épuisent leur droit à une indemnisation.

    La série de menaces de suicides après la mort par le feu d’un chômeur à Nantes le 13 février a dramatiquement souligné les difficultés de Pôle emploi à faire face, et le désarroi des chômeurs, dont le nombre a augmenté de plus de 10% sur la seule dernière année.

    L’Insee prévoit un taux de chômage de 10,6% en métropole mi-2013 (11% avec les départements d’outre-mer). L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dont les prévisions sont à plus long terme, entrevoit une «stabilisation fin 2013», autour de 11,25% de la population active.

    Lors d’un déplacement en banlieue parisienne, Jean-Marc Ayrault a d’abord vanté les différents outils mis en place par le gouvernement. A fin mars, 15.000 jeunes, peu ou pas qualifiés, bénéficieront d’un emploi d’avenir, emploi aidé de longue durée, le «mouvement est en marche», a-t-il estimé alors que l’objectif est de 100.000 d’ici à fin 2013.

    Quant aux contrats de génération, entrés en application la semaine dernière pour favoriser l’embauche en CDI des jeunes et le maintien dans l’emploi des seniors, M. Ayrault a signé lundi, en Seine-et-Marne cette fois, l’un des tout premiers contrats. Le gouvernement en espère 500.000 d’ici à la fin du quinquennat.

    Le Premier ministre a aussi annoncé le recrutement de 2.000 CDI supplémentaires d’ici septembre chez Pôle emploi, après un renfort équivalent en 2012.

    Le service public de l’emploi, qui avait vu ses effectifs amputés de 1.800 postes en 2011 en pleine croissance du chômage, est régulièrement critiqué pour l’inefficacité de son organisation interne ou sa déshumanisation.

    Mais depuis sa création fin 2008 (fusion ANPE-Assedic), Pôle Emploi doit gérer 1,5 million de chômeurs supplémentaires, dont 950.000 sans aucune activité (+43%) et pour le ministre du Travail, Michel Sapin, le niveau des moyens du service public était une «vraie question». [...]

    Les syndicats ont salué les recrutements à venir, «bienvenus» car «face aux situations d’inquiétude, voire de désarroi des salariés privés d’emploi, la pression sur les personnels est aujourd’hui très forte», a réagi dans un communiqué la CFDT (premier syndicat).

    Pour améliorer l’accompagnement des chômeurs, Pôle emploi tente depuis début 2013 de s’y prendre autrement, en concentrant ses moyens vers «ceux qui en ont le plus besoin» et propose aux autres un suivi plus allégé.

    «Il était nécessaire d’accroître les moyens humains» pour que cette réforme «produise pleinement ses effets qualitatifs d’amélioration du suivi et de l’accompagnement des demandeurs d’emploi», a expliqué dans un communiqué le ministère du Travail.

    Sur France 2 jeudi, le président de la République va tenter de convaincre que les différents outils mis en place par son gouvernement et la future loi sur la réforme du marché du travail pourront permettre d’inverser la courbe du chômage avant fin 2013.

    Libération  http://fortune.fdesouche.com

  • Patricia Adam (PS) : "Bercy veut tuer le ministère de la défense"

    Patricia Adam, présidente socialiste de la commission de la défense de l’Assemblée nationale, estime qu’"on ne peut plus descendre" davantage le budget de la défense.

    LE MONDE : Vous demandez au président de préserver le budget de la défense, comment le convaincre ?

    Patricia Adam : Nous n’avons jamais été dans une période aussi importante, au regard des options stratégiques du pays à l’horizon des vingt prochaines années. Le retour à l’équilibre des comptes publics est aujourd’hui l’enjeu principal pour le président de la République. Respecter un déficit de 3 % du PIB comme le veut l’Europe est un enjeu stratégique. Mais il faut trouver un bon équilibre : mesurer, s’il doit y avoir des efforts sur la défense, les conséquences que cela peut avoir sur nos capacités à intervenir comme nous le souhaitons (seuls sur une durée courte et "en premier" comme on l’a fait au Mali, ou uniquement avec d’autres alliés), sur l’entraînement de nos forces, et sur notre industrie.

    Le scénario de Bercy vise à tuer le ministère de la défense. Dès 2015, si on le suit, il ne lui restera que la sécurité nationale (la gendarmerie), les forces spéciales et la dissuasion. Toutes les forces conventionnelles auront disparu.

    Ce n’est pas en tuant le budget de la défense que l’on équilibrera les comptes. Sur ce point, une communion d’idées avec l’opposition règne à la commission de la défense, car l’enjeu est la sauvegarde des intérêts nationaux.

    Les députés socialistes ont adressé à François Hollande une lettre pour lui rappeler que le budget de la défense baisse depuis cinquante ans et que si un ministère a fait des efforts de rationalisation, c’est bien celui-là. Le budget représentait 4,3 % du PIB en 1966, 2,97 % en 1981, 1,6 % en 2002, 1,56 % en 2012. On ne peut plus descendre.

    La défense a devant elle une "bosse budgétaire" – des commandes qui ne sont pas financées – de 45 milliards d’euros, et il manque 4 milliards sur la loi de programmation 2009-2014. Comment faire ?

    Le delta par rapport à la trajectoire financière est impossible à combler, même avec une croissance économique retrouvée importante, à laquelle nous ne pensons pas. Autour de nous, les menaces ne sont pas en diminution, le monde se militarise, et les Etats-Unis n’ont plus la même posture vis-à-vis de l’Europe. Nous demandons au moins le maintien en l’état du budget à 31 milliards d’euros pendant deux à trois ans en volume, en escomptant un rebond de croissance en 2016. La défense peut encaisser deux-trois ans d’apnée, mais pas plus.

    Quelles solutions concrètes proposer ?

    Nous pouvons encore repousser quelques programmes d’équipement. Les états-majors ont des solutions d’attente et ont fait des propositions d’économies intéressantes. Mais il nous faut des recettes exceptionnelles : elles peuvent venir de la vente des participations de l’Etat dans les groupes industriels de défense, c’est une proposition que nous faisons.

    Faut-il sortir la défense de la règle des 3 % ?

    La France est le seul pays en Europe avec le Royaume-Uni à continuer à faire un effort de défense. Même si l’on met de côté la dissuasion, cet effort est aussi l’assurance-vie des autres Européens. Nos engagements internationaux, les opérations que nous menons doivent être considérés dans la sécurité collective. La question de l’agrégat retenu pour le calcul du déficit devient essentielle. La question peut être débattue. Nous n’avons pas le choix. C’est un débat entre les pays qui ont la volonté de faire et les autres.

    Quel rôle va jouer l’expérience du Mali dans les arbitrages ?

    Le président a pris au Mali une décision rapide, en connaissance et en responsabilité. Il a parfaitement conscience de la qualité de son armée, de la formation de ses hommes et de ses capacités, mais aussi de ses manques. Il a aussi conscience de l’importance de la voix de la France au plan international, au conseil de sécurité de l’ONU, vis-à-vis des Américains qui nous apportent leur aide, et face aux Européens.

    On ne peut pas vouloir des avancées de l’Europe en matière de défense en baissant la garde. Si nous le faisons, nous envoyons un signal complètement négatif. Compte tenu du point auquel nous sommes arrivés, la seule question à se poser est : que veut-on faire de notre outil de défense ?

    LE MONDE  http://www.actionfrancaise.net

  • La Veuve Noire et "1984"

    Cray Black Widow
    C'est le site Numerama qui a détecté des choses pas nettes à la réunion de l'Union internationale des Télécommmunications (UIT) à Dubaï cette semaine, après qu'un traître de l'UIT ait passé un document de travail confidentiel à Cory Doctorow chez BoingBoing. La réunion, sous l'égide des Nations Unies, s'apprêterait à policer l'Internet sur le modèle de la NSA américaine (National Security Agency/Central Security Service) par l'adoption généralisée du système d'analyse profonde de paquets transmis (DPI) par la mise en vigueur d'une norme onusienne lancée sous la cote ITU-T Y.2770 relativement bénigne mais qui renvoie à des détails de mise en application où se cache un sacré démon. C'est ce document qui a fuité : ses 96 pages sont accessibles en cliquant ici. Ce billet est un peu plus technique mais les chaînes virtuelles le sont toujours plus que les chaînes physiques.

    On comprend bien que la traque aux terroristes et aux pédophiles motive une surveillance plus étroite des transmissions sur Internet, mais à tout le moins cette lutte légitime est le wagon de tête d'un train bien plus long qui officialise une surveillance inavouable au bénéfice  des ayant-droits sur contenu (ils sauveront la Hadopi) mais surtout bien évidemment à celui des polices les plus basses. Médiapart peut s'inquiéter.
    Si la propriété intellectuelle dans un monde aussi maillé que le Village Global reste un vaste débat, le flicage à grand débit d'Internet n'en est plus un, à voir ce qui se passe dans des pays équipés comme la Chine et la Russie. Voici quelques exemples triés par Korben tiré du draft de l'UIT :
    • Détecter et bloquer des protocoles comme Bittorrent ;
    • Détecter et bloquer la transmission de fichiers contenant des digital rights management (DRM) (gestion des droits numériques) ;
    • Détecter et bloquer la transmission de fichiers en provenance d'une personne ou d'un serveur ciblé ;
    • Détecter et bloquer la transmission de messages Session Initiation Protocol (SIP) contenant certains mots clés (protocole standard de gestion de sessions en télécommunications multimédia) ;
    • Identifier certains serveurs en analysant les paquets qui circulent sur le réseau (pour probablement pouvoir le bloquer ensuite ou envoyer la police le débrancher) ;
    • Mesurer le trafic engendré par certaines applications ou protocoles, pour le filtrer, le bloquer ou mettre de la qualité de service (QoS) ;
    • Détecter et bloquer certains paquets de logiciels ou de jeux précis ;
    • Identifier les gros uploaders de fichiers sur Bittorrent ;
    • Identifier et bloquer la voix sur protocole Internet (VoIP) en peer to peer (P2P) selon certains critères ;
    • Détecter un utilisateur précis de VoIP en P2P

    Pour mieux comprendre il faut aller voir la NSA. Disons déjà que ce n'est pas un service secret puisque ses activités ont fait l'objet d'un reportage fouillé sur Arte le 24 novembre (clic). Au pire ce serait un service discret. La batterie de supercalculateurs Cray Black Widow abrités par l'agence permet de filtrer toutes les conversations provenant des Etats-Unis ou venant des Etats-Unis. On cible un interlocuteur, un réseau, un lieu, on enregistre tout, on écoute à l'envi, on note, on détruit, puis on patrouille les communications sur la base de mots-clés, comme le réseau Echelon en Europe, Essaim en France. Les supercalculateurs vous trient des millions de conversations par seconde en moins de temps qu'il n'en faut pour appuyer sur un bouton. C'est ce traitement super-efficace, le DPI, que viennent vendre à l'UIT des professionnels de l'espionnage que sont Alcatel-Lucent par exemple. L'intérêt des pouvoirs publics est tel qu'il semble plus facile de lutter contre le réchauffement de la planète que contre le flicage généralisé de nos conversations. On assiste à une mondialisation du Patriot Act de George W. Bush.

    Pour faire bon poids, signalons aux naïfs qu'un portable éteint dans leur poche peut être activé à distance par l'opérateur et servir de micro ou de GPS à l'envers. L'imagination humaine est sans limites et la puissance cérébrale de l'espèce vaincra l'Ordre à la fin, mais avouons que ce sera sacrément dur. Pendant ce temps, passent dans les lucarnes de petits journalistes, affairés à de petites histoires dérisoires qui sentent le pipi, et tellement contents d'être là. Ils trahissent d'une certaine façon.

    On attend avec intérêt la contribution et la décision de Mme Fleur Pellerin, ministre en charge de l'économie numérique auprès d'Arnaud Montebourg, qui jusqu'à récemment plaidait pour une confidentialité accrue des données personnelles transitant sur Internet et pour garantir la fameuse neutralité du Net. Elle prépare un texte d'application en France, mais avec la meilleure volonté du monde il sera sans valeur à l'autre bout du fil : « Je pense que nous pouvons nous engager à proposer au Parlement dans le courant de l'année 2013, vraisemblablement au premier semestre, un projet de loi sur ces questions, sur un corpus de règles qui permettrait de garantir la protection des données personnelles et la vie privée sur Internet ». Par chance, elle est capable et motivée. Fin de la session à Dubaï le 14 décembre.