économie et finance - Page 823
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Les tentatives de sauvetage de l'euro ont plombé la compétitivité de l'ensemble des pays de la zone
Dans une analyse publiée par La Tribune, Hans-Werner Sinn estime que l'appréciation de l'euro met en lumière l'énorme dommage collatéral provoqué par le sauvetage de l'Euro. Les mesures adoptées jusqu'à présent ont ouvert des canaux de contagion depuis les économies périphériques noyées dans la crise vers les économies encore saines du centre, plaçant un considérable risque financier sur les contribuables et les retraités de ces dernières, tout en sapant la perspective d'un rétablissement à long terme des économies en difficultés. Il est vrai que le sauvetage de l'Europe a permis de stabiliser les finances publiques avec des taux d'intérêt plus bas pour les économies surendettées, reconnaît M. Sinn. Mais il a aussi entraîné une appréciation de la monnaie, et donc affaibli la compétitivité de l'ensemble des pays de la zone euro. En résumé, le sauvetage de l'Euro rend le problème le plus sérieux de la zone euro - la profonde perte de compétitivité des économies troublées - d'autant plus difficile à résoudre, conclut l'auteur. -
Y a-t-il trop d’avions dans le ciel ?
L’Union européenne prévoit que le nombre d’avions aura doublé d’ici 2020. Notre planète peut-elle supporter une telle augmentation ? Si elle n’est responsable que de 2 % du total mondial des émissions de CO2, l’aviation commerciale sait qu’il va falloir faire mieux.
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Conférence de Frédéric Lordon et Fabien Danesi
Le 22 février 2013, la galerie VivoEquidem recevait Frédéric Lordon qui s’est entretenu avec Fabien Danesi lors de la conférence “Les paysages affectifs du capitalisme contemporain”.
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CROISSANCE OU ES-TU ?
Si ce n'était tragique, ce serait vraiment un spectacle du plus grand comique. Chacun des acteurs plus ou moins officiels brandit son chiffre au sujet de la croissance. C'est l'occasion d'un nouveau couac dans le gouvernement. Laurent Fabius, dont personne ne comprend ce qu'il vient faire dans cette galère, minore les chiffres du gouvernement. Moscovici bien dans son rôle proteste vigoureusement. Décidément, le chef d'orchestre Jean-Marc Ayrault a bien du mal avec ses musiciens. La Cour des Comptes s'en mêle et affiche son pessimisme. Quant à l'Europe, elle a communiqué ses prévisions le 22 février et elle écrase tous les chiffres avec mépris : son pouvoir en extension permanente lui permet de jouer les gendarmes. Comme la France aux yeux de tout le monde ne se réforme pas, elle la menace de sanctions financières ce qui est aberrant et insupportable. Ces péripéties montrent une fois de plus que l'adhésion à la CEE conduit à une destruction lente mais régulière des nations, ce que beaucoup de peuples ne veulent pas malgré les votes plus ou moins truqués ici ou là.
De toute façon et quelles que soient les nuances tous les chiffres annoncés sont ridiculement bas. La sainte croissance disparaît sous le tapis. L'Europe, dans son ensemble, est presque en récession et cela montre aussi son rôle négatif sur le plan économique sans parler du reste. Un vrai gendarme doit être au-dessus de tout soupçon. Or la situation est si grave que les autres continents qui sont plus prospères se plaignent de la faiblesse du nôtre. Pendant ce temps plusieurs pays sont l'objet d'émeutes. Personne ne comprend l'austérité imposée par l'Europe et la rigueur qui s'ensuit. Des dirigeants corrompus échappent eux-mêmes à la rigueur et le fossé se creuse entre les classes politiques et les simples citoyens.
LA FOLIE TAXATIVE
Le pire si l'on peut dire est que le pouvoir, tout en versant légitimement des larmes sur la croissance perdue, organise tout ce qu'il faut pour l'assassiner. Dès la préparation du tsunami fiscal que ce pouvoir avant l’élection avait promis, chacun des acteurs, que ce soit une entreprise ou un particulier, a commencé à lever le pied. Ensuite quand la menace est passée dans les faits ce fut terrifiant ; malheur aux riches, chasse aux entrepreneurs, actionnaires punis, retraités rognés, classe moyenne étranglée. S'ajoute une inventivité fiscale délirante. En dernière nouvelle il est question d'attaquer les familles. Le Président, en visite au salon de l'agriculture, a prévu un nouveau tour de vis fiscal pour 2014 !
Globalement la chasse aux riches fabrique des pauvres et la paupérisation est bien le signe de la faible croissance. Le prétexte invoqué est qu'il faut équilibrer les comptes ou au moins revenir dans la règle du 3 %. Bien que ce 3 % soit un objectif très insuffisant nous l'enregistrons. Croire que l'ouragan fiscal équilibrera les comptes est une funeste illusion : trop d'impôts tue l'impôt. En outre, le Président et son entourage sont drogués à la dépense publique et ils volatilisent l'argent de tous côtés contrairement à leur objectif prétendu.
Dans cette situation délétère et tout soudain, le même pouvoir se réveille sentant le parquet qui s'effondre et il commande un rapport. L'auteur, Louis Gallois, est un haut fonctionnaire socialiste n'ayant pas l'expérience de la direction d'entreprises capitalistes, mais uniquement d’entreprises publiques comme la SNCF. Il ne peut donc connaître le fonctionnement réel des entreprises privées.
Il a, d'ailleurs, montré son incompétence en brandissant son rapport sur le perron de l'Elysée avec 22 mesures. Ces 22 mesures ne sont que du copier coller de nombreux rapports antérieurs sur le même sujet et ressemblent toutes à des usines à gaz. Elles ne peuvent remédier à la désindustrialisation, au chômage et à la paupérisation.
Le pouvoir sans rire du tout a proposé 35 mesures pour restaurer la compétitivité perdue ! Il n'est plus question de choc : les principales mesures concernent le budget 2013. Alors que des entreprises meurent tous les jours, on leur promet des lendemains qui chanteront en 2014 ! L'illisibilité est totale dans un nuage d'usines à gaz, le nuage voguant selon le vent des déclarations et des votes.
LA SOLUTION
La solution pour restaurer la croissance perdue et la compétitivité des entreprises, uniques créatrices de richesses est connue des économistes.
Il faut pour l'essentiel libérer fiscalement les entreprises par la suppression totale de deux ou trois grands impôts. Pour au minimum équilibrer les comptes, il s'impose de faire des économies. Celles-ci ne doivent pas se limiter à des mesurettes. Elles doivent être liquides, immédiates et massives. Dans un pays socialisé à 75 % le champ est immense.
Très rapidement alors le peuple français retrouvera la prospérité à laquelle il a droit au lieu d'une austérité qui lui est imposée par la force
Michel de Poncins http://libeco.net -
Goldman Sachs la banque qui dirige le monde
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L'EDF, UN CONTE FANTASTIQUE
La Cour des Comptes vient de jeter tout tranquillement un pavé dans la mare à l'occasion de son rapport annuel paru le mardi 12 février. C'est la totale. L’EDF est théoriquement privée et cotée en bourse. Dans les faits, elle est jalousement gérée par l'État, lequel est rempli de camarades des dirigeants. Or le rapport est très critique sur les pratiques de ces dirigeants. Les salariés bénéficient de salaires et d'avantages très généreux sans lien évident avec la performance de l'entreprise. De ce fait et contrairement aux salariés du secteur privé, ils n'ont pas subi de ralentissement de la progression de leur rémunération globale depuis 2008 en dépit des résultats contrastés d'EDF. Parmi les heureux bénéficiaires de ce généreux mouvement, il est évident que le groupe des hauts dirigeants est amplement gâté. Il se trouve aussi que de proche en proche tout le personnel se trouve favorisé. Parmi les avantages divers se trouvent de fastueuses retraites. Parmi les coûts, ne pas oublier les niches confortables offertes à des camarades en panne dans leur carrière.
La Cour pousse son analyse dans le détail. Elle pointe de nombreux avantages pour les salariés comme des tarifs avantageux ou des abonnements gratuits. Espérons modestement que cette possibilité pour une dépense essentielle ne conduit pas certains agents particulièrement serviables et peu scrupuleux à faire bénéficier leurs gentils voisins de cette aubaine !
LES ORIGINES HISTORIQUES
Le conte fantastique a des racines historiques profondes. Après la guerre, le premier acte fut une opération de banditisme d'État, par laquelle le pouvoir politique nationalisa les diverses compagnies d’électricité qui remplissaient parfaitement leur office et auraient pu continuer ainsi à la satisfaction générale.
Malgré l’ambiance révolutionnaire de l’époque, une indemnisation des actionnaires fut prévue sous forme d'un titre donnant droit à 1% du chiffre d'affaires pendant de longues années. Le banditisme initial conduisait inévitablement à des problèmes, car on n’imagine pas facilement une entreprise rembourser ses actionnaires par un pourcentage sur le chiffre d'affaires tout en continuant son développement. Les titres spéciaux ont été considérés longtemps comme des placements de pères de famille atteignant des valeurs inattendues : pour certains, la rapine initiale fut une véritable chance !
Parallèlement, un autre 1% du chiffre d’affaires était dévié vers les syndicats sous couleur d'action sociale. Ces sommes énormes ont été captées, illico presto, par la CGT et ont servi clairement à l'enrichissement des syndicats et donc des chefs syndicalistes et de leur entourage. Le comité d'entreprise, plaque tournante de cet argent avait été accroché durement pat la Cour des comptes en 1990 et 2007. La richesse du syndicat lui a permis d'acheter et d'entretenir plusieurs luxueux châteaux dans la France profonde. Les camarades qui dirigent ces demeures doivent bénéficier de jobs fort sympathiques !
Au premier acte de banditisme, il s'en est ajouté un deuxième par un prélèvement abusif de 2% du chiffre d'affaires. L'énormité des sommes a pesé pendant des années sur les utilisateurs du courant, donc sur toute la France : un calcul honnête devrait tenir compte des intérêts composés et des variations monétaires ; il est impossible à faire mais il montrerait sur des décennies l'immense déperdition de richesse qui en est résulté. Un principe financier veut que les dégâts initiaux ne se réparent jamais. C'est comme si des paquets de billets avaient été déchirés.
LE MONOPOLE
De toute façon, la brutalité du monopole assurait les arrières. Bien sûr et, mensongèrement, la propagande dira que la France fut ainsi équipée et que sa technique était « enviée dans le monde entier ». L'information dans le cadre du monopole étant télécommandée par EDF, personne ne saura jamais la vérité.
Pendant des lustres, les pouvoirs successifs logèrent dans ce fromage très républicain leurs amis et connaissances. C'était la belle époque où, à l’échelon d’en-dessous, les fils d'EDF devenaient facilement EDF. Nous ignorons si ce système perdure.
Il faut rappeler le temps pas si lointain où les énarchos-socialos au pouvoir avaient imaginé investir en Amérique latine. L'idée géniale consistait à se rattraper sur les populations de ces pays en leur faisant supporter la mauvaise gestion de l'EDF en France. Trois pays d'Amérique latine furent visés : Brésil, Mexique, Argentine ; Il a fallu plier bagage après des milliards d'euros de pertes.
L'action EDF fut introduite à la cotation en novembre 2005 au cours de 25, 54 et se retrouve aujourd'hui à 14,65. Si l'on tient compte de la dépréciation monétaire la chute est sévère.
Pour les économistes, une nationalisation ouvre dès le début la porte à diverses causes de ruine. Quand, plus tard, un autre pouvoir veut légitimement dénationaliser, la ruine s'inscrit dans les faits. Des exemples de ce type ont foisonné dans les pays de l'Est !
Michel de Poncins http://libeco.net -
Revue de presse économique de Pierre Jovanovic (27/02/2013)
Émission diffusée sur Radio Ici et Maintenant le 27 février 2013
Nouveau : écouter l’émission au format mp3
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Bruxelles : la ville où plusieurs milliers de lobbies dirigent l’Union européenne !
Aux abords des institutions européennes, il existe 2500 structures de groupes de pression et plus de 15 000 lobbyistes : ce qui fait de Bruxelles le deuxième pôle de lobbying après Washington. Pour mieux comprendre ces réseaux d’influences, les réalisateurs de la vidéo ci-dessous ont rencontré certains de leurs membres. Pascal Keineis représente à lui seul quarante multinationales dans le secteur des services, des banques et des assurances et du tourisme, soit 50% du PNB de l’UE. A l’opposé, Olivier Hoedeman a créé il y a vingt ans un observatoire pour cerner l’influence de l’industrie sur les décisions de Bruxelles. Au début de ses recherches, il avait notamment découvert l’existence de l’ERT, groupe de pression réunissant les plus gros industriels européens.
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Cameron : un « référendum » en forme de promesse électorale
Parce que David Cameron a promis à la fraction la plus conservatrice de ses concitoyens d'envisager la possibilité d'un référendum d'ici la fin de l'année 2017 sur le maintien du Royaume-Uni dans l'Union européenne, ses partenaires européens poussent des cris d'orfraie. Pourtant, où est la surprise ?
Les déclarations du Premier ministre britannique du 23 janvier, concernant l'éventuelle organisation d'un référendum sur les liens qui doivent unir ou séparer le Royaume-Uni de l'Union européenne, aurait d'autant moins dû surprendre ses « partenaires européens » que ce discours était prévu - et reporté régulièrement - depuis plus de six mois. Sa teneur, confirmée notamment par ces reports successifs, était un secret de Polichinelle.
Dernier report en date, le 18 janvier. Alors que David Cameron devait s'exprimer, à Amsterdam, devant un parterre d'hommes d'affaires et de diplomates européens, son déplacement est annulé au dernier moment en raison de la prise d'otages qui se déroule en Algérie. Manifestement, c'est là une opportunité pour le Premier ministre britannique. Son entourage annonce en effet un report sine die, précisant que les date et lieu de la prochaine occasion seront annoncés « au moment opportun. »
Or, cinq jours plus tard, David Cameron prend de court ses partenaires européens en prononçant finalement son discours depuis le centre de la City. D'un exposé sur la scène européenne, le Premier ministre a fait un programme national ; ce qui constitue, pour lesdits partenaires, un véritable pied de nez !
A mieux y regarder, pourtant, David Cameron, au-delà du projet de référendum, s'est en réalité pleinement déclaré en faveur de l'Europe, dont il souhaite qu'elle soit un « succès », et a dénoncé la velléité d'« isolationnisme » que d'aucuns croient pouvoir lui prêter. À rebours des inquiétudes qui se font jour ici et là, la Commission européenne a d'ailleurs bien compris le message, et applaudit « la déclaration sans équivoque du Premier ministre indiquant qu'il veut maintenir la Grande Bretagne dans l'Union européenne ».
Pour quelles raisons David Cameron envi-sage-t-il, dès lors, de proposer un référendum?
Tout d'abord, sous la pression eurosceptique qui, depuis des mois, gagne l'opinion publique chez nos voisins britanniques.
Sous la pression des eurosceptiques
Ensuite, et surtout, parce que Cameron dénonce, avec des accents qui ne sont pourtant que de pâles échos de ceux de Margaret Thatcher, le fossé qui se creuse toujours davantage entre l'Europe et ses « citoyens ». C'est là, bien sûr, que réside le principal écueil du système européen, qui ne conçoit la démocratie que comme un totalitarisme. Mais on ne va quand même pas l'admettre devant le peuple !
Sitôt posée la délicate question de ce référendum, le Premier ministre britannique s'ingénie d'ailleurs à en supprimer tous les risques éventuels. Tout d'abord, en le reportant, sinon aux calendes grecques, du moins à la fin de l'année 2017.
Cette date a une raison électorale. D'ici là, aura eu lieu le référendum sur l'indépendance de l'Ecosse, dont le résultat pourrait bien affaiblir la politique du Royaume-Uni. Mais aussi, en 2015 prochaines élections, aux termes desquelles David Cameron espère bien conserver Downing Srteet. En promettant la lune à sa droite eurosceptique, il espère élargir ainsi sa base électorale. Non qu’elle soit si naïve... Mais il est le seul, aujourd’hui, à envisager un référendum...
Entre-temps, le Premier ministre réussira bien quelque tour de passe-passe qui, en rendant l’Europe plus acceptable, supprimera tout risque référendaire. Passe-passe, parce qu'il est impossible d'obtenir les « rapatriements de compétences » qu'il promet. Tout au plus peut-il envisager d’obtenir de nouvelles exceptions britanniques, lesquelles, depuis l'origine, Londres a construit sa politique européenne - qui se réduit au marché unique. Comme cela a été fait début janvier, par exemple, lorsque son Parlement a rejeté, au nom du principe de subsidiarité, le projet de directive européenne sur les quotas de femmes dans les conseils d'administration.
Après cela, David Cameron n'a plus qu’aller se faire applaudir à Davos, en déclarant : « Il ne s'agit pas de tourner le dos à l’Europe bien au contraire. »
Olivier Figueras monde & vie 5 février 2013 -
Retraites : la fin de l’âge d’or… les retraités ont mangé leur pain blanc
Patronat et syndicats avaliseront-ils la désindexation des retraites complémentaires par rapport aux prix lors de leur prochaine et théoriquement dernière – séance de négociation le 7 mars prochain ? Cette quasi-première ouvrirait une nouvelle période de baisse de pouvoir d’achat pour les retraites. Une rupture par rapport à la tendance du passé où l’on a vu le niveau de vie des retraités se hisser – en moyenne – à celui des actifs. Une performance que le système par répartition ne peut assurer qu’en période de croissance économique. Les années de vaches maigres ne laissent pas d’autre choix que d’opérer des révisions déchirantes
Plus rien ne sera comme avant pour les retraités qui ont vécu leurs plus belles années – Ah, la fameuse “lune de miel” des retraités ! Et les futurs inactifs qui persistent à croire que le statu quo actuel est tenable vont déchanter. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Placé devant le mur du financement – selon les dernières projections du Conseil d’orientation des retraites ( COR) -, le système de retraite fera face à un besoin de financement de 1 % du PIB (soit 20 milliards d’euros) à l’horizon 2020 et jusqu’à près de 2,5 % dans la pire des hypothèses à l’horizon 2040. Des perspectives qui signent inéluctablement la fin prochaine de l’âge d’or des retraites en France.
Le système français de retraites par répartition , l’un des plus généreux au monde, est parvenu à hisser le revenu des retraités quasiment à la parité de celui des actifs. Année après année, le niveau des pensions progresse de l’ordre de 3 à 4 % car les nouveaux retraités ont des carrières plus complètes et mieux payées. Question : une telle performance réalisable en période d’expansion est-elle, ne serait-ce que viable, en période de stagnation ?
Sous la pression financière
De gré ou de force, c’est sous la pression financière qu’il faudra fournir la réponse. Et cette dernière sera tranchée dans le vif. Le dossier des retraites, un temps oublié, fait un retour bien plus rapide que prévu.
Sous la double menace comptable et bruxelloise, le gouvernement accélère la cadence. La réforme de 2010 était pourtant censée laisser le dossier tranquille au moins jusqu’en 2018. Las, la récession est passée par là et le creusement du besoin de financement ne laisse pas d’autre choix aux autorités que d’intervenir pour enrayer la dérive. Cette année ou l’année prochaine ? L’exécutif hésite encore sur le bon timing pour traiter ce délicat dossier.
Fidèle à sa méthode de concertation, il installe cette semaine un comité des sages, présidé par Mme Yannick Moreau, chargé d’indiquer les différentes mesures possibles – et souhaitables – pour assurer la “pérennité” du système avant de convoquer une nouvelle conférence sociale au début de l’été. Son espoir ? Que d’ici là, une décantation se réalise du côté des solutions car il n’existe pas trente-six moyens mais seulement trois paramètres sur lesquels, en l’état actuel du système, les gestionnaires peuvent agir pour rétablir l’équilibre : le niveau des cotisations, l’âge de la retraite ou le niveau des pensions.
La désindexation à l’ordre du jour
Voilà un hasard du calendrier qui arrange bien les affaires du gouvernement qui ne veut pas assumer le premier le mauvais rôle : ce sont les gestionnaires des retraites complémentaires (Arrco pour les employés et ouvriers, Agirc pour les cadres) – le “deuxième étage” des retraites selon l’expression consacrée (le régime de l’assurance vieillesse de base constituant le premier étage) – qui doivent résoudre la difficile équation financement/prestations.
Les régimes qui étaient encore excédentaires font face à un déficit d’environ 4,5 milliards d’euros et avec une telle hémorragie, les réserves financières seront épuisées dès 2017 pour l’Agirc et 2020 pour l’Arrco. Or il n’y a pas d’échappatoire. La règle veut que les régimes couvrent leurs besoins par leurs ressources propres sans recourir à l’endettement. Ce qui les oblige à trouver des solutions d’urgence si possible d’ici le 1er avril prochain, date à laquelle les paramètres du régime sont traditionnellement chaque année révisés. Avec à la clé une possible désindexation des retraites.
“Nous sommes d’accord pour prendre des mesures conservatoires à la condition que ces dernières soient équilibrées. La désindexation ne pourrait être que provisoire et ne peut pas en tout état cause concerner le régime général qui constitue le socle des retraites”, déclare Jean-Marie Toulisse, secrétaire confédéral à la CFDT en charge des retraites.
Cette mesure sans précédent, si elle est avalisée par les syndicats et le patronat, pourrait inspirer le gouvernement, ce dernier pouvant alors se risquer à son tour à l’appliquer aux retraites de base. “Les partenaires sociaux ne sont pas dupes de la manoeuvre. Cette partie de go devrait trouver son épilogue le 7 mars prochain, date de l’utlime réunion de négociation pour les régimes complémentaires”, analyse Philippe Crevel, directeur du Cercle des épargnants. La désindexation est l’une des mesures les plus radicales. Une sous-indexation d’un point par rapport à l’inflation fait réaliser une économie de 4 milliards d’euros. Les Allemands l’ont fait depuis 2004, ce qui a conduit à une perte de pouvoir d’achat de plus de 10 % en huit ans.
Mais “ce serait écorner un acquis majeur des systèmes de sécurité sociale” écrit Bertrand Fragonard, magistrat à la Cour des comptes et auteur de Vive la protection sociale ! (éditions Odile Jacob).
Appliquée de façon durable, la sous-indexation conduirait à une baisse marquée du niveau de vie des retraités les plus âgés (un point sur vingt ans de durée de service d’une pension diminue son pouvoir d’achat en dernière année de 18 %).
L’âge de la retraite en question
On n’est certes pas obligé d’imaginer une séquence aussi longue. Et à court terme, la tentation de la désindexation a ses adeptes au sein même de l’exécutif ; cela éviterait au gouvernement d’avoir à “jouer” sur l’âge du départ à la retraite, une option qui fait figure de tabou à gauche. “Le report de l’âge légal fait l’objet d’un blocage à gauche, celle-ci ne voulant pas se déjuger après sa vive opposition à la réforme de 2010. Personne ne croit François Hollande capable d’annoncer un passage de l’âge de la retraite à 63 ou 64 ans après 62 ans. Et il aura du mal à assumer un allongement de la durée d’assurance”, analyse Philippe Crevel.
Bémol supplémentaire : le piétinement récent de l’espérance de vie au cours de la dernière période pourrait ralentir l’allongement mécanique de la durée d’assurance (selon la règle 2/3- 1/3 calée sur un partage constant de la vie humaine entre activité – en moyenne 40 ans – et retraite – vingt ans). La voie est étroite.
Si l’on veut écarter l’option de désindexation, il n’y a pas d’autre choix que d’accélérer l’augmentation de la durée d’assurance ou de différer l’âge de la retraite pour atteindre 64-65 ans aux alentours de 2030. C’est ce qu’ont fait les Allemands qui ont programmé la hausse de l’âge de la retraite à 67 ans jusqu’à l’horizon 2030.
“Dans une société où l’on vit plus longtemps, ce n’est pas une régression sociale que de travailler plus longtemps si – et c’est un chantier immense – on améliore les conditions d’emploi des seniors. C’est vraisemblablement la condition à remplir pour ne pas avoir à subir de régression du niveau de vie des retraités”, reprend Bertrand Fragonard. Confrontés à ces choix, les Français l’entendront-ils de cette oreille ? La réforme de 2010 accouchée dans la douleur – 4 mois de manifestations, trois journées de grèves – montre que cela n’a rien d’évident.
La fin de l’âge d’or
Quelle que soit la voie choisie, la situation des futurs retraités est appelée à connaître un net décrochage par rapport aux actifs. Selon les travaux du COR, le montant de la pension moyenne rapporté au revenu moyen d’activité est appelé à diminuer entre 5 et 10 % d’ici 2030 et de 10 à 25 % d’ici 2060 selon les hypothèses.
Et, encore, ce chiffrage ne prend en compte que le cas des carrières pleines or on sait qu’avec le développement de l’instabilité professionnelle, ces cas feront figure à l’avenir d’exception. “Jusqu’ici les réformes ont été quasi neutres pour les salariés ayant eu des carrières linéaires. En revanche, ceux qui ont des carrières heurtées ont subi une baisse de leur retraite. C’est un facteur d’inégalité”, déplore Jean-Louis Toulisse.
Les travaux du COR donnent toute la mesure des ajustements nécessaires pour atteindre l’équilibre du système de retraite. A l’horizon 2040, par exemple, cet équilibre supposerait une hausse de 2 points des prélèvements à la charge des actifs, un recul de l’âge effectif moyen de départ à la retraite d’environ 2 ans et une diminution relative des pensions par rapport au revenu d’activité d’environ 12 %. Mais quelle que soit la combinaison retenue, une certitude : il faudra agir sur tous les paramètres en même temps. Les retraités ont mangé leur pain blanc.