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géopolitique - Page 581

  • SYRIE « Cette guerre ne finira pas de sitôt »

    Le conflit syrien entre dans une nouvelle phase à même de bouleverser l’équilibre géopolitique international. C’est dans ce sens, que nous avons abordé le sujet avec Robert Bibeau. Pour rappel, ce dernier est un analyste économico-politique et directeur de la revue en ligne « Les7duQuebec.com » http://www.les7duquebec.com - Reporter Chérif Abdedaïm. 

    La Nouvelle République/ La crise syrienne connaît un nouvel essor avec l’implication directe de la Russie, ce qui bouleverse la donne géopolitique dans la région. Quel impact cela pourrait-il avoir sur la politique de l’Occident dans la région ?

    Robert Bibeau : Les puissances impérialistes occidentales ont poussé jusqu'à l'extrémité afin de provoquer l'intervention de la puissance impérialiste russe dans la région, et elles y sont parvenues. Elles espèrent maintenant que la puissance russe s'enlisera là-bas comme en Afghanistan auparavant. Elle affichera ses armes sophistiquées, leurs capacités tactiques et stratégiques - et la Russie engouffrera des ressources dans cette guerre qui ne finira pas de sitôt pensent-ils.

    La conjoncture économique et politique est toutefois bien différente qu'au temps des talibans afghans. L'agression des puissances occidentales contre l'Afghanistan (2000-2011) visait à ouvrir une brèche à l'est de l'Iran pour construire un oléoduc entre l'océan Indien et le Kurdistan au Nord ; - une brèche également pour encercler l'Iran pour mieux la faire chanter et l'éloigner de l'axe Moscou-Pékin ; - une brèche pour éventuellement miner les oléoducs russes ou d'autres pays de la CÉI approvisionnant le marché chinois. À cette époque le pétrole valait son pesant d'or et l'hégémonie américaine sur les autres puissances impérialistes occidentales était peu contestée. Cette guerre afghane fut le dernier acte de l'apogée de la puissance hégémonique étatsunienne.

    Depuis, tant de choses ont changé. Il y a eu l'enlisement des Américains en Afghanistan, en Irak, en Syrie, au Yémen et en Libye où ils ont allumé des feux qu'ils ne savent plus maîtrisés. Depuis, il y a eu l'effondrement du prix du pétrole. Depuis, il y a la crise économique systémique du capitalisme qui n'en finit plus de s'approfondir. Depuis, il y a eu la fronde de plus en plus évidente de puissances régionales qui voyant s'effriter la puissance de leur mentor, prennent leur distance et développe leur propre politique interventionniste parfois opposée aux visées américaines dans la région. Depuis, il y a eu l'affaiblissement du dollar et des pétrodollars qui ne représentent plus que 60% du commerce international (contre 90% en 1980). Depuis, il y a eu la montée en puissance régionale de l'Iran qui n'est pas du tout encerclé dans cette contrée et qui est lourdement impliqué en Irak, en Syrie, au Liban et au Yémen. La puissance iranienne n'est pas en "faising out" bien au contraire. C'est d'ailleurs une des raisons pour laquelle les Émirats arabes et l'Arabie Saoudite se collent de plus en plus à la petite puissance israélienne pour affronter l'Iran leur pire ennemi après la signature de l'entente "légalisant" le développement du nucléaire iranien. Israël leur fournira éventuellement les têtes nucléaires recherchées.

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  • « En avoir ou pas »

    En Russie, on est viril, tout simplement. Et un peuple viril a des chefs qui le sont aussi.

    Sachant que Sarkozy est un grand nerveux, il a voulu lui faire le coup que Franco a fait à Hitler en octobre 1940 à Hendaye : il l’a fait attendre un bon moment. Sacré Poutine ! Il est pâlot comme une bouteille de lait, il est petit, presque laid. Parfois, quand il s’exprime à la télé, on dirait presque un adolescent timide. Il est vrai que d’autres fois, on n’a vraiment pas envie de le chatouiller. Eh bien, malgré tout cela, ils sont tous tombés sous son charme : les Schröder, les Berlusconi, les Fillon et, donc, notre Sarko national. De vrais vassaux ! Avec des yeux pleins d’humilité et un sourire d’écolier de classe primaire, enfin … un écolier appliqué d’hier pas dévergondé comme celui d’aujourd’hui. Mais pourquoi ? Parce que l’obsession fondamentale – quoique inconsciente – de tout homme normalement constitué … est d’en avoir. C’est existentiel, eschatologique même.

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  • L’Afrique Réelle n°71 - Novembre 2015

    Sommaire

    Actualité :

    Algérie : Saïd Bouteflika se prépare-t-il à succéder à son frère ?

    Economie :

    Afrique : l’impasse économique

    Dossier :

    Islam et islamisme en Afrique sud saharienne

    • - L’islam africain traditionnel
    • - Le wahhabisme à la conquête de l’Afrique
    • - L’islam radical, nouvel horizon révolutionnaire africain
    • - Pourquoi les Européens sont-ils désarmés face à l’islam révolutionnaire africain ?
     

    Editorial de Bernard Lugan : Fin de règne à Alger

    En Algérie, c’est une course pour la survie qui vient d’être engagée par la famille du président Bouteflika. Afin de neutraliser par avance toute contestation du président qu’elle voudrait se choisir, l’armée et les forces de sécurité sont actuellement épurées des cadres qui ne lui ont pas fait allégeance. La longue liste des suspects (voir la page 3 de la revue), vient encore de s’allonger avec la mise à la retraite de 12 généraux et de 2 colonels du DRS (les services spéciaux), ainsi que de 14 colonels de la justice militaire.

    Deux hommes exécutent la manoeuvre décidée par Saïd Bouteflika, le frère du président moribond. Le général Gaïd Salah, chef d’état-major et vice-ministre de la Défense est chargé d’épurer l’armée. Le général Tartag a, quant à lui, reçu pour mission de « nettoyer » le DRS de tous ceux qui pourraient avoir conservé des liens avec le général Mediene, leur ancien chef évincé le 13 septembre.

    De 1999, date de l’arrivée au pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika à 2013, veille de l’actuelle crise pétrolière, l’Algérie a engrangé entre 800 et 1000 milliards de dollars de revenus tirés des hydrocarbures. Où est passée cette somme colossale ? Aucune industrie n’a été créée, aucun véritable développement agricole n’a été entrepris. La rue va donc demander des comptes.

    Or, ceux qui ont pillé le pays ont fait un pari : la nomenklatura élargie qui a profité de la manne des hydrocarbures n’a pas intérêt à pousser à la déstabilisation politique dont elle serait la première victime. Elle jouera donc la sécurité en se ralliant à celui que le clan Bouteflika aura désigné. Comme la situation régionale est hautement explosive et que l’Algérie est un maillon essentiel dans la lutte contre le terrorisme, les pays européens n’ont pas davantage intérêt à une explosion de l’Algérie, et c’est pourquoi ils entérineront ce choix. [....]

    La suite sur le blog officiel de Bernard Lugan

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  • Libye, Syrie, Ukraine : le Waterloo de la diplomatie française

    Alors que Nicolas Sarkozy vient de rendre visite à Vladimir Poutine, Jean-Michel Quatrepoint compare deux diplomaties, la française et la russe. Il déplore l’absence de vision de la France sur le dossier syrien.

     

    LE FIGARO. - Nicolas Sarkozy a rendu visite à Vladimir Poutine dans sa datcha proche de Moscou, jeudi 29 octobre, et a prôné le dialogue entre la France et la Russie. Ce virage de celui qui a fait rentrer la France dans le commandement intégré de l’OTAN en 2007 vous surprend-elle ?

    L’ancien président de la République devrait commencer par reconnaître ses deux erreurs. La première est la guerre de Libye : il est responsable de sa déstabilisation. Deuxièmement, c’est sous son quinquennat que son ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, et le Quai d’Orsay, ont tout fait pour faire partir Bachar el-Assad. Par la suite, François Hollande, Laurent Fabius et le Quai ont aggravé cet échec diplomatique. Ceci dit, Nicolas Sarkozy peut se féliciter de ses relations anciennes avec Vladimir Poutine. Lors de la crise géorgienne, il avait su maintenir le contact avec celui qui était alors Premier ministre, n’hésitant pas, déjà, à se rendre à Moscou.

    Comment qualifier l’attitude de la France en Syrie ?

    C’est le Waterloo de la diplomatie française. Nous avons été exclus des dernières négociations. Les autres puissances se moquent de la voix de la France. Nous disposons, au même titre que l’Union européenne, l’Allemagne et l’Italie, d’un strapontin à la conférence de Vienne sur la Syrie ce vendredi. Les vrais décideurs sont en réalité la Russie et les Etats-Unis. Avec la réinsertion de cet Iran que la diplomatie française a tant ostracisé. Car le problème est bien plus complexe que la désignation des bons et des méchants. Si Assad est un dirigeant peu fréquentable, il est loin d’être le seul… [....]

    La suite sur Le Figaro.vox

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  • Pourquoi l'aide humanitaire est nuisible à certains pays d'Afrique (archive)

    L’aide au développement des pays les plus pauvres est sans doute l’une des plus belles idées de notre temps. Elle a fortement augmenté au cours des trente dernières années et a même battu son record en 2008 en atteignant 120 milliards de dollars. Pourtant, dans le même temps, l’Afrique s’est considérablement appauvrie et la croissance y est demeurée extrêmement faible.
    La perfusion continue de l’aide internationale produit en fait un certain nombre d’effets pervers dans les pays qui en dépendent. Elle alimente la corruption et empêche le développement d’un tissu économique prospère. Cette aide, qui ne sert le plus souvent qu’à soulager nos consciences, est aujourd’hui mise en cause.
    Le livre qui fait l’effet d’une bombe
    Le premier livre de Dambisa Moyo, ancienne consultante de la Banque Mondiale et économiste chez Goldman Sachs, fait l’effet d’une bombe. Intitulé Dead Aid : Why Aid Is Not Working and How There Is a Better Way for Africa, il préconise de couper toute aide à l’Afrique d’ici cinq ans. Selon l’auteur, il s’agit du seul moyen pour le continent de sortir enfin de la pauvreté. Contrairement à ce que nous avons l’habitude d’entendre de la part de nos économistes, hommes politiques et célébrités, elle affirme que l’aide internationale a perpétué en Afrique le cycle de la pauvreté et affaibli la croissance. Si Dambisa est la première économiste Africaine à parler des problèmes que pose l’aide, il est difficile de lui opposer qu’elle ne connaît pas son sujet : née à Lusakan en Zambie, elle est docteur en économie et diplômée des prestigieuses universités d’Oxford et Harvard. Elle n’est pas non plus indifférente à la pauvreté, puisqu’elle est engagée dans de nombreuses actions caritatives, notamment de micro-crédit dans les pays en développement et d’aide aux enfants en difficulté aux Etats Unis.
    Inefficacité de l’aide internationale
    En cas de crise majeure, comme lors du tsunami en Asie (2004), l’aide humanitaire est absolument nécessaire. Elle est même un impératif moral. Mais ces aides ponctuelles constituent une goutte d’eau dans l’océan d’argent qui inonde l’Afrique chaque année. Au cours des soixante dernières années, plus de 1000 milliards de dollars d’aide au développement ont été transférés des pays riches vers l’Afrique. Pourtant, nous sommes obligés de constater que cette politique de transferts massifs n’est qu’un facteur d’érosion des structures économiques et politiques déjà fragiles de ce continent. La richesse par habitant y est aujourd’hui plus faible qu’en 1970. Plus de la moitié de la population, soit 350 millions de personnes vit avec moins de 1 dollar par jour. Ce chiffre a triplé en 30 ans. Le FMI, dans un rapport publié en 2005, priait les différents acteurs du développement de cesser de croire qu’une aide accrue règlerait les problèmes de l’Afrique. Malgré les différentes voix qui s’élèvent, le monde ne semble pas prêt à débarrasser l’Afrique de cette drogue paralysante. Aider est devenu un impératif absolu dont le poids éclipse toute rationalité. Aider pour sauver notre âme, à défaut des Africains.
    Effets pervers
    L’aide au développement alimente la corruption. L’Union Africaine estimait en 2002 qu’elle coûtait annuellement au continent la somme astronomique de 150 milliards de dollars. Jeffrey Winters, professeur à la Northwestern University estime qu’en 2004, 100 milliards de prêts accordés par la Banque Mondiale on été détournés pour alimenter des circuits de corruption. Selon l’agence d’observation de la corruption Transparency Inernational, l’ex-Président de la République Démocratique du Congo (ancien Zaïre) M. Mobutu aurait volé au moins 5 milliards de dollars au pays.
    Une économie naissante a besoin d’institutions fortes, de services publics efficaces et d’un gouvernement responsable. Les jeunes ont besoin de travailler et de croire en l’avenir de leur pays. L’aide a montré qu’elle était incapable de satisfaire ces objectifs. Au contraire, elle encourage seulement les gouvernements des pays pauvres à décrocher le téléphone et demander plus d’aide, éloignant ainsi chaque jour davantage les peuples Africains de la sphère de la production.
    Même ce qui semble être intervention minime en surface peut avoir des conséquences dramatiques. Dambisa Moyo prend l’exemple d’un producteur de moustiquaires dans une petite ville d’Afrique. Il emploie 10 personnes qui produisent ensemble 500 moustiquaires par semaine. Leur salaire leur permet de faire vivre une quinzaine de personnes chacun. Une organisation internationale fournit généreusement 100.000 moustiquaires aux habitants de la région. Cela met sur la paille notre producteur, ses 10 employés et les 150 personnes qui en dépendent. Dans quelques années, les moustiquaires seront usées. Alors, il n’y aura plus de producteur vers qui se tourner, et il faudra à nouveau demander de l’aide. Le même raisonnement s’applique à l’agriculture. Inonder le marché africain de nourriture Américaine et Européenne gratuite ruine les petits exploitants africains. Un minimum de bon sens conduirait par exemple à acheter la nourriture à des agriculteurs locaux, pour ensuite la redistribuer aux nécessiteux.
    Les conditions du développement économique
    Entreprendre en Afrique est un véritable cauchemar. Outre l’insécurité physique et juridique qui y règne, une bureaucratie démesurée vient entraver le bon fonctionnement des affaires. Au Cameroun, un investisseur doit compter 426 jours pour obtenir une licence. Il faut 119 jours pour créer une entreprise en Angola. Ces chiffres sont à comparer avec ceux des Etats Unis (40 jours) ou de la Corée du sud (17 jours). De plus, l’Afrique se caractérise par son instabilité. Depuis 1960, les guerres et massacres on tué plus de neuf millions d’hommes et de femmes. Dans la même période, l’Afrique a connu près de 80 coups d’Etat. Onze pays ont connu la guerre civile en seulement 15 ans pour un coût estimé à 200 milliards de dollars.
    La bonne nouvelle est que nous savons ce qui marche et conduit à une réduction durable de la pauvreté grâce à une croissance soutenue. Les pays qui dépendent de l’aide internationale sont en grande difficulté, et ceux qui n’en dépendent pas réussissent. Il suffit de regarder les exemples de l’Afrique du Sud et du Botswana pour le comprendre. Ces deux pays, modèles de réussite du continent africain, ont su construire leur avenir sur une économie de services, une administration démocratique, stable et peu corrompue. Les gouvernements doivent s’attacher à attirer un maximum d’investissements en réduisant la bureaucratie et en mettant en place une fiscalité attractive. Ils doivent enfin encourager le commerce, et se construire progressivement des institutions solides pour faire revenir la confiance.
    Guillaume Varnier IFRAP 31/03/09
    Depuis 1985, l'iFRAP est un Think Tank indépendant analysant la performance de l’Etat, des administrations et des politiques publiques, afin de proposer des réformes concrètes.
    http://www.ifrap.org/Pourquoi-l-aide-humanitaire-est-nuisible-a-certains-pays-d-Afrique,1162.html(à consulter pour lire les graphiques qui ne sont pas reproduits ici)

    http://archives.polemia.com/article.php?id=2123

  • L’armée russe affirme sa supériorité en guerre conventionnelle

    L’intervention militaire russe en Syrie, qui devait être un pari risqué de Moscou face aux jihadistes, s’est transformée en une manifestation de puissance qui bouleverse l’équilibre stratégique mondial [1] Conçue au départ pour isoler les groupes armés des États qui les soutiennent en violation des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, puis les détruire, l’opération a conduit à aveugler l’ensemble des acteurs occidentaux et leurs alliés.

    Stupéfait, le Pentagone est divisé entre ceux qui tentent de minimiser les faits et de trouver une faille dans le dispositif russe et ceux qui, au contraire, considèrent que les États-Unis ont perdu leur supériorité en matière de guerre conventionnelle et qu’il leur faudra de longues années pour la récupérer [2].

    On se souvient qu’en 2008, lors de la guerre d’Ossétie du Sud, les Forces russes étaient certes parvenues à repousser l’attaque géorgienne, mais avaient surtout montré au monde l’état déplorable de leur matériel. Il y a dix jours encore, l’ancien secrétaire à la Défense Robert Gates et l’ancienne conseillère nationale de sécurité Condoleezza Rice parlaient de l’armée russe comme d’une force de « second rang » [3].

    Comment donc, la Fédération russe est-elle parvenue à reconstruire son industrie de Défense, à concevoir et à produire des armes de très haute technologie sans que le Pentagone ne mesure l’ampleur du phénomène et qu’il se laisse distancer ? Les Russes ont-ils utilisé toutes leurs nouvelles armes en Syrie ou disposent-ils d’autres merveilles en réserve ? [4]

    Le désarroi est si grand à Washington que la Maison-Blanche vient d’annuler la visite officielle du Premier ministre Dmitry Medvedev et d’une délégation de l’état-major russe. La décision a été prise après une visite identique d’une délégation militaire russe en Turquie. Inutile de discuter des opérations en Syrie, car le Pentagone ne sait plus ce qui s’y passe. Furieux, les « faucons libéraux » et les néo-conservateurs exigent la relance du budget militaire et ont obtenu l’arrêt du retrait des troupes d’Afghanistan.

    De manière on ne peut plus étrange, les commentateurs atlantistes qui assistent au dépassement de la puissance militaire US dénoncent le danger de l’impérialisme russe [5]. Pourtant la Russie ne fait ici que sauver le Peuple syrien et propose aux autres États de travailler en coopération avec elle, tandis que les États-Unis lorsqu’ils détenaient la prééminence militaire ont imposé leur système économique et détruit de nombreux États.

    Force est de constater que les déclarations incertaines de Washington durant le déploiement russe, avant l’offensive, ne devaient pas être interprétées comme une lente adaptation politique de la rhétorique officielle, mais pour ce qu’elles exprimaient : le Pentagone ignorait le terrain. Il était devenu sourd et aveugle.

    Un système de brouillage généralisé

    On sait, depuis l’incident de l’USS Donald Cook en mer Noire, le 12 avril 2014, que l’armée de l’Air russe dispose d’une arme lui permettant de brouiller tous les radars, circuits de contrôle, systèmes de transmission d’information, etc. [6]. Dès le début de son déploiement militaire, la Russie a installé un centre de brouillage à Hmeymim, au nord de Lattaquié. Subitement, l’incident de l’USS Donald Cook s’est reproduit, mais cette fois dans un rayon de 300 kilomètres ; incluant la base Otan d’Incirlik (Turquie). Et il persiste toujours. L’événement s’étant produit durant une tempête de sable d’une densité historique, le Pentagone a d’abord cru que ses appareils de mesure avaient été déréglés avant de constater qu’ils sont brouillés. Tous brouillés.

    Or, la guerre conventionnelle moderne repose sur le « C4i » ; un acronyme correspondant aux termes anglais de « command » (maîtrise), « control » (contrôle), « communications », « computer » (informatique) et « intelligence » (renseignement). Les satellites, les avions et les drones, les navires et les sous-marins, les blindés et désormais même les combattants, sont reliés les uns aux autres par des communications permanentes qui permettent aux états-major de commander les batailles. C’est tout cet ensemble, le système nerveux de l’Otan, qui est actuellement brouillé en Syrie et dans une partie de la Turquie.

    Selon l’expert roumain Valentin Vasilescu, la Russie aurait installé plusieurs Krasukha-4, aurait équipé ses avions de conteneurs de brouillage SAP-518/ SPS-171 (comme l’avion qui survola l’USS Donald Cook) et ses hélicoptères de Richag-AV. En outre, elle utiliserait le navire espion Priazovye (de classe Project 864, Vishnya dans la nomenclature Otan), en Méditerranée [7].

    Il semble que la Russie ait pris l’engagement de ne pas perturber les communications d’Israël —chasse gardée US—, de sorte qu’elle s’interdit de déployer son système de brouillage au Sud de la Syrie.

    Les aéronefs russes se sont fait un plaisir de violer un grand nombre de fois l’espace aérien turc. Non pas pour mesurer le temps de réaction de son armée de l’Air, mais pour vérifier l’efficacité du brouillage dans la zone concernée et pour surveiller les installations mises à dispositions des jihadistes en Turquie.

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    Si l’Otan a toujours la possibilité de photographier depuis des satellites la construction des bases militaires russes en Syrie, elle ne peut plus ni écouter les communications radio, ni visualiser les déplacements des hommes et des matériels. En outre, l’Otan ne peut plus contrôler à distance ses propres appareils, ni communiquer avec ses hommes lorsqu’ils entrent dans la bulle de protection russe.

    Des missiles de croisière ultra-performants

    Enfin, la Russie a utilisé plusieurs armes nouvelles, comme 26 missiles furtifs de croisière 3M-14T Kaliber-NK, équivalents des RGM/UGM-109E Tomahawk [8]. Tirés par la Flotte de la mer Caspienne —ce qui n’avait aucune nécessité militaire—, ils ont atteint et détruit 11 cibles situées à 1 500 kilomètres de distance, dans la zone non-brouillée —afin que l’Otan puisse apprécier la performance—. Ces missiles ont survolé l’Iran et l’Irak, à une altitude variable de 50 à 100 mètres selon le terrain, passant à quatre kilomètres d’un drone états-unien. Aucun ne s’est perdu, à la différence des états-uniens dont les erreurs se situent entre 5 et 10 % selon les modèles [9]. Au passage, ces tirs montrent l’inutilité des dépenses pharaoniques du « bouclier » anti-missiles construit par le Pentagone autour de la Russie —même s’il était officiellement dirigé contre des lanceurs iraniens—.

    Sachant que ces missiles peuvent être tirés depuis des sous-marins situés n’importe où dans les océans et qu’ils peuvent transporter des têtes nucléaires, les Russes ont rattrapé leur retard en matière de lanceurs.

    En définitive, la Fédération de Russie serait détruite par les États-Unis —et vice-versa— en cas de confrontation nucléaire, mais elle serait gagnante en cas de guerre conventionnelle.

    Seuls les Russes et les Syriens sont en capacité d’évaluer la situation sur le terrain. Tous les commentaires militaires provenant d’autres sources, y compris des jihadistes, sont sans fondement car seuls la Russie et la Syrie ont une vision du terrain. Or, Moscou et Damas entendent profiter au maximum de leur avantage et maintiennent donc le secret sur leurs opérations.

    Des quelques communiqués officiels et des confidences des officiers, on peut conclure qu’au moins 5 000 jihadistes ont été tués, dont de nombreux chefs d’Ahrar el-Sham, d’al-Qaïda et de l’Émirat islamique. Au moins 10 000 mercenaires ont fui vers la Turquie, l’Irak et la Jordanie. L’Armée arabe syrienne et le Hezbollah reconquièrent le terrain sans attendre les renforts iraniens annoncés.

    La campagne de bombardements devrait se terminer à la Noël orthodoxe. La question qui se posera alors sera de savoir si la Russie est autorisée ou non à terminer son travail en poursuivant les jihadistes qui se réfugient en Turquie, en Irak et en Jordanie. Faute de quoi, la Syrie serait sauvée, mais le problème ne serait pas résolu pour autant. Les Frères musulmans ne manqueraient pas de chercher une revanche et les États-Unis de les utiliser à nouveau contre d’autres cibles.

    À retenir : 
    - L’opération russe en Syrie a été conçue pour priver les groupes jihadistes du soutien étatique dont ils disposent sous couvert d’aide à des « opposants démocratiques ». 
    - Elle a exigé l’usage d’armes nouvelles et s’est transformée en une démonstration de force russe. 
    - La Russie dispose désormais d’une capacité de brouillage de toutes les communications de l’Otan. Elle est devenue la première puissance en matière de guerre conventionnelle. 
    - Cette performance a attisé la discorde à Washington. Il est trop tôt pour dire si elle sera favorable au président Obama ou si elle sera utilisée par les « faucons libéraux » pour justifier un accroissement du budget militaire.

     
    Video : missiles russes traversant territoire iranien vers leurs objectifs en Syrie. Vitesse et basse altitude entre les montagnes, très étonnant !

    Thierry Meyssan

    [1] “Russian Military Uses Syria as Proving Ground, and West Takes Notice”, Steven Lee Myers & Eric Schmitt, The New York Times, October 14, 2015.

    [2] “Top NATO general : Russians starting to build air defense bubble over Syria”, Thomas Gibbons-Neff, The Washington Post, September 29, 2015.

    [3] “How America can counter Putin’s moves in Syria”, by Condoleezza Rice, Robert M. Gates, Washington Post (United States), Voltaire Network, 8 October 2015.

    [4] La seule étude disponible est bien en dessous de la réalité :Russia’s quiet military revolution and what it means for Europe, Gustav Gressel, European Council on Foreign Relations, October 2015.

    [5] « Russisches Syrien-Abenteuer : Das Ende der alten Weltordnung », Matthias Schepp, Der Spiegel, 10. Oktober 2015.

    [6] « Qu’est-ce qui a tant effrayé l’USS Donald Cook en Mer Noire ? », Réseau Voltaire, 14 septembre 2014.

    [7] « Cu ce arme ultrasecrete a cîstigat Putin suprematia în razboiul radioelectronic din Siria ? », Valentin Vasilescu, Ziarul de gardã, 12 octobre 2015. Version française : « L’arme ultrasecrète qui permet à Poutine d’assoir sa suprématie dans la guerre radio électronique en Syrie ? », Traduction Avic, Réseau international.

    [8] “KALIBRating the foe : strategic implications of the Russian cruise missiles’ launch”, by Vladimir Kozin, Oriental Review(Russia), Voltaire Network, 14 October 2015.

    [9] Après avoir annoncé le contraire, les États-unis ont dû admettre les faits : “First on CNN : U.S. officials say Russian missiles heading for Syria landed in Iran”, Barbara Starr & Jeremy Diamond, CNN, October 8, 2015. “Moscow rejects CNN’s report on Russian missile landing in Iran”, IRNA, October 8, 2015. “Daily Press Briefing”, John Kirby, US State Department, October 8, 2015. “Пентагон не комментирует сообщения о якобы упавших в Иране ракетах РФ”, RIA-Novosti, October 8, 2015.

    http://www.voltairenet.org/article189038.html

  • L’Allemagne tente de se sortir du conflit syrien

     L’Allemagne tente de sortir du rôle qui lui a été assigné durant le conflit syrien. Le ministre des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, cherche à organiser une réunion au sommet entre grandes puissances pour négocier la paix. Mais ce projet sera très difficile à réaliser, à la fois parce que l’Allemagne a une lourde responsabilité dans la guerre et parce que la France persiste à vouloir détruire la République arabe syrienne.

    Lorsque les États-Unis passèrent à l’attaque de la Syrie, en 2003, ils sollicitèrent l’Allemagne et Israël avant de confier l’opération au Royaume-Uni et à la France. À l’époque, les services secrets allemands participèrent aux côtés du Mossad à l’assassinat de Rafic Hariri en fournissant une arme qu’ils étaient les seuls à détenir [1]. L’idée était de provoquer une réaction populaire anti-syrienne, puis de faire débarquer les Marines pour repousser l’« occupant », conformément au plan de l’US Committee for a Free Lebanon et du Middle East Forum de Daniel Pipes exposé dans Mettre fin à l’occupation syrienne du Liban : le rôle des États-Unis (Ending Syria’s Occupation of Lebanon : The U.S. Role) [2]. Cependant l’opération échoua puisque la Syrie, soulignant qu’elle était militairement présente au Liban à la requête de la communauté internationale (Accords de Taef [3]), évacua le pays lorsque la rue en fit la demande.

    L’Allemagne joua encore un rôle décisif avec Israël lorsque l’ambassadeur US, Jeffrey Feltman, organisa la Commission d’enquête internationale chargée par Ban Ki-moon de faire la vérité. Berlin fournit l’ancien procureur Detlev Mehlis, qui avait déjà rendu d’invraisemblables services à la CIA en attribuant un attentat du Mossad à Berlin à Mouamar el-Khadafi, et l’ancien commissaire de police Gerhard Lehmann et agent du BND, qui se trouva par la suite impliqué dans les crimes commis par la CIA dans des prisons secrètes [4]. Mais, là encore l’opération échoua puisque, après avoir accusé les présidents Émile Lahoud et Bachar el-Assad d’avoir commandité l’assassinat de Rafic Hariri, la Commission Mehlis s’effondra dans le scandale des faux témoins [5].

    L’Allemagne encore s’impliqua dans la guerre actuelle, cette fois aux côtés du Royaume-Uni et de la France, en confiant la présidence de la réunion du « Groupe de travail sur le relèvement économique et le développement » des « Amis de la Syrie », à un haut diplomate, Clemens von Goetze. En juin 2012, il partagea lors d’une réunion à Abu Dhabi les richesses de la Syrie entre les États qui accepteraient de saboter la Conférence de Genève. Avant même d’avoir renversé la République arabe syrienne, les alliés se répartissaient les concessions d’exploitation de son gaz. Le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, créa un secrétariat permanent, doté d’un budget de 600 000 euros, pour gérer le pillage des hydrocarbures qu’il confia à Gunnar Wälzholz qui avait déjà servi identiquement contre l’Afghanistan [6].

    Lorsque la France sabota la Conférence de Genève, l’Allemagne toujours aida à réaliser le plan —conçu dès 2007 par John Negroponte, alors directeur du Renseignement national US— de guerre de type nicaraguayen. Il s’agissait de multiplier les groupes terroristes pour « saigner » le pays. Elle mit à disposition la coordination internationale des Frères musulmans, toujours présente sur son territoire, à Aix-la-Chapelle, depuis la Guerre froide. C’est actuellement depuis là que la retraite d’Ahrar el-Sham, d’al-Qaïda, de Daesh et des autres est organisée.

    Pourtant, aujourd’hui, le gouvernement Merkel constate l’efficacité des bombardements russes, les atermoiements états-uniens, et le bouleversement de l’équilibre stratégique international. Il cherche donc à se retirer de ce combat perdu et à faire la paix avec la Syrie. Ce revirement correspondrait évidemment à un rapprochement tant attendu —et tant redouté par Washington— entre Berlin et Moscou.

    Cette évolution peut être expliquée au public à l’occasion de la crise des migrants. Préparée un an à l’avance à la demande du patron de l’industrie lourde Ulrich Grillo et exécutée par le président Recep Tayyip Erdoğan, le Haut-commissaire aux Réfugiés António Guterres, et le spéculateur George Soros, des centaines de milliers de personnes ont traversé les Balkans pour aller travailler à moindre prix en Allemagne [7]. Toutefois, l’opération s’est interrompue avec le début de l’intervention militaire russe, les Allemands ayant peur que des jihadistes fuyant les bombardements ne se mêlent aux migrants et aux réfugiés. D’ores et déjà, la population allemande se dresse contre les étrangers car le patronat a profité de l’occasion pour abolir le salaire minimum dans plusieurs États fédérés. Du coup, la « crise des réfugiés » fournit un possible alibi à un changement de politique face à la Syrie.

    Quoi qu’il en soit, le rapprochement entre l’Allemagne et la Syrie sera difficile à négocier. Le ministre des Affaires étrangères et ancien patron du Renseignement, Frank-Walter Steinmeier, espère pouvoir organiser une réunion de type 5+1 (format de Vienne pour l’Iran) pour résoudre le conflit syrien. Mais la Russie le pousse à être plus ambitieux et à réunir autour de la table le président Poutine, la chancelière Merkel, le président Hollande et le président el-Assad (format Normandie comme pour l’Ukraine).

     Thierry Meyssan

    [1] « Révélations sur l’assassinat de Rafiq Hariri », par Thierry Meyssan, Оdnako (Russie), Réseau Voltaire, 29 novembre 2010.

    [2] « Les plans de l’US Committee for a Free Lebanon », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 8 mars 2005.

    [3] « Accord de Taëf (23 octobre 1989) », Réseau Voltaire, 23 octobre 1989.

    [4] « Attentat contre Rafic Hariri : Une enquête biaisée ? », entretien de Jürgen Cain Külbel avec Silvia Cattori, Traduction Eva Hirschmugl , JPH, Réseau Voltaire, 15 septembre 2006.

    [5] « La commission Mehlis discréditée », par Talaat Ramih, Réseau Voltaire, 9 décembre 2005.

    [6] « Les « Amis de la Syrie » se partagent l’économie syrienne avant de l’avoir conquise », par German Foreign Policy, Horizons et débats (Suisse), Réseau Voltaire, 14 juin 2012.

    [7] « La fausse « crise des réfugiés » », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 7 septembre 2015.

    http://www.voltairenet.org/article189104.html