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international - Page 1139

  • Entretien avec Alexandre Douguine sur l'Ukraine (commenté par Pascal Lassalle) 2ième partie

    Mais le président Viktor Ianoukovytch a refusé l’invitation de l’Occident.
    Bien sur qu’il l’a refusée. Il a été élu par l’Ukraine orientale pro-russe et non pas par l’Ukraine occidentale. Ianoukovytch ne peut pas agir contre les intérêts et les souhaits de sa base électorale. S’il avait accepté l’invitation de l’Union Européenne, il aurait immédiatement été considéré comme un traître par ses électeurs. Les partisans de Ianoukovytch veulent l’intégration avec la Russie. Pour parler clairement : Ianoukovytch a simplement fait ce qui était logique pour lui. Il n’y a ni surprise, ni miracle, simplement une logique politique.
    Ianoukovytch a surtout reculé pour des raisons de basse cuisine électorale (volonté d’être réélu en 2015) et du fait de la réaction de Moscou, qui après une brève guerre commerciale en août 2013, lui a fait réaliser quel serait le prix à payer économiquement et socialement en cas de signature des accords avec l’UE. Il est vrai que dans la politique de chantage menée maladroitement par l’ancien gouverneur de Donetsk, l’UE sinistrée ne s‘est pas montrée désireuse de payer le prix nécessaire pour faire pencher la balance de son côté.
    Pour satisfaire sa base électorale « naturelle », mais aussi Moscou, il a fait quelques concessions symboliques dans les domaines linguistiques (russe devenu langue officielle dans les régions russophones), mémoriels et identitaires (réécriture des manuels d’Histoire dans un sens plus favorable aux schémas historiographiques russes, ceux de l’Histoire dite « commune »).
    L’alliance anti-Ianoukovytch comprend des libéraux, des anarchistes, des communistes, des militants des droits des homosexuels, ainsi que des groupes nationalistes qui sont parfois néo-nazis. Qu’est-ce qui unit ces différents mouvements ?
    Ils sont unis par une seule chose : leur haine de la Russie. Ianoukovytch pour eux est l’homme de la Russie, l’ami de Poutine, l’homme de l’Est. Ils haïssent tout ce qui a un rapport avec la Russie. Cette haine les tient unis ; ils forment un bloc de haine. Pour le dire clairement, la haine est leur seul idéologie politique. Ils n’aiment ni l’Union européenne, ni Bruxelles.
    Encore cette « haine » tombée du ciel, chez des gens déshumanisés et animalisés par vos soins, que l’on pourrait croire génétiquement programmés pour détester une vertueuse et innocente Russie. On est loin des beaux principes énoncés dans le cadre de la Quatrième théorie politique dont vous vous faites l’ardent promoteur et ses belles paroles sur le respect des identités, des traditions et des souverainetés pour tous les peuples. Certains sont visiblement plus dignes d’en bénéficier que d’autres (plus égaux aurait dit George Orwell). Un double standard dont vous créditez, à juste titre, les médias mainstream occidentaux, mais que vous n’hésitez pas à pratiquer cyniquement lorsqu’il est question de vos intérêts. Ce qui peut amener le lecteur, un tant soit peu perspicace, à se demander si la vision du monde néo-eurasiste qui est la vôtre ne constitue pas en fin de compte un nouvel habillage du traditionnel impérialisme et chauvinisme que la « Sainte Russie », quelles que soient ses incarnations historiques, a pratiqué de manière récurrente depuis le XVème siècle. Ce qui est autorisé pour certains peuples ne l’est pas pour d’autres, comme les Ukrainiens que vous persistez à vouloir inclure dans votre sphère géopolitique et civilisationnelle, en dépit des enseignements de l’histoire ou de l’ethnologie.
    Ceux-ci, diabolisés par vos propos, ne peuvent se prévaloir d’une démarche positive, celle de construire un état souverain et une nation unifiée, dans une conscience identitaire enfin retrouvée. Dans votre aveuglement et votre obstination à leur dénier ce droit légitime, vous contribuez à être le meilleur promoteur de réflexes russophobes, sans parler du fait de les repousser, par réaction, dans les bras des puissances occidentales et atlantistes.
    Par cette posture funeste, vous faites indiscutablement le jeux de nos ennemis qui ne souhaitent pas voir émerger un monde multipolaire.
    Quels sont les principaux groupes ? Qui détermine les actions de l’opposition ?
    Au sein de ce qu’on nomme les EuroMaidan, ce sont clairement les groupes néo-nazis violents qui dominent. Ils incitent à la violence et tentent de provoquer une situation de guerre civile à Kiev.
    Comme j’avais pu le voir, il y a quelques années, dans vos interventions télévisées à destination d’un public russophone, vous n’hésitez pas, comme les autorités et les médias de votre pays, ainsi que leurs fidèles relais en Occident, à avoir recours à cette reductio ad Hitlerum diabolisante cet « antifascisme » anachronique, inquisitorial et mensonger, pratiqué également par nos pouvoirs oligarchiques, pour discréditer les pensées et les actions des dissidents.
    Nous trouvons ces procédés indignes et déshonorants, qu’ils soient employés à l’Ouest ou à l’Est du continent.
    Décidément, au-delà de leurs oppositions géopolitiques, il semblerait que toutes les oligarchies se ressemblent, dans le « traitement » de leurs opposants ou de leurs hérétiques.
    Tous ceux qui ne se soumettent pas à votre vision mythifiée de l’Histoire (vulgate de la « Grande guerre patriotique ») ou à vos perpectives géopolitiques sont diabolisés, anathémisés et ostracisés, par le recours à ces pratiques totalitaires qui montrent, comme l’écrivait Lampedusa, que « plus les choses changent, plus rien de ne change ».
    Concernant les éléments nationalistes présents sur les barricades de l’EuroMaidan, ceux-ci se rattachent majoritairement à l’héritage de l’Organisation des Nationalistes Ukrainiens (OUN) dans sa branche révolutionnaire, celle de Stepan Bandera (horresco referens !) et de l’Armée Insurrectionnelle Ukrainienne (UPA) qui en est, d’une certaine manière, l’émanation, avec sa bannière noire et rouge et son cri de guerre omniprésents ces dernières semaines. Ces militants et guérilleros ont lutté d’abord contre les Polonais, puis contre les Allemands (après avoir vainement cherché leur appui) et les Soviétiques, jusque dans les années 50.
    Votre honnêteté devrait vous amener à reconnaître que vouloir chercher des soutiens allemands pour édifier un état ukrainien social et national ne fait pas nécessairement de vous quelqu’un d’acquis au racisme national-socialiste (que vous pourriez presque « bénir » d’ailleurs, car il a empêché une synergie germano-ukrainienne, voire germano-russe qui aurait pu changer le cours de la guerre à l’Est). Ce raisonnement est globalement valable également pour la majorité de ceux qui ont servi dans des divisions de la Waffen SS, qu’ils aient été Ukrainiens, Bélarussiens, Baltes ou mêmes Russes.
    Cet héritage « bandériste » connaît un certain regain chez un nombre croissant de jeunes ou de moins jeunes à Kyiv, mais aussi dans toute l’Ukraine.
    Tous ces supposés « néo-nazis », naturellement antisémites comme ne se privent pas de le répéter ad nauseam les médias mainstream russes, comme la chaîne de télévision Russia Today, ne sont pas uniquement des « bandéristes » accourus d’Ukraine occidentale (Galicie avec les régions de L’viv, Ternopil’ ou Ivano-Frankivsk), mais des patriotes venus de l’ensemble du pays, ukrainophones et russophones mêlés.
    Ne vous en déplaise, comme vous l’avez montré à de multiples reprises avec des actions hostiles à l’Etat ukrainien initiées par l’organisation de jeunesse de votre mouvement, ces dernières années(2), une nation est peut-être en train de naître difficilement, mais irrésistiblement, quels que soient les combats d’arrière garde des nostalgiques d’une intégration impériale et eurasiatique, minoritaires dans l’ensemble du pays.
    Les Altereuropéens sincères ne peuvent qu’espérer que le bon sens finisse par l’emporter, d’un côté comme de l’autre, pour faciliter la résolution durable de contentieux qui ne font que profiter aux ennemis de nos peuples.
    Dans le cas contraire, et sans avoir les capacités oraculaires de la Pythie de Delphes, je dirai vous n’avez pas fini d’entendre parler des Ukrainiens, ce que vous savez parfaitement d’ailleurs.
    Les médias mainstream occidentaux affirment que le rôle de ces groupes extrémistes est artificiellement amplifié par les médias pro-russes afin de nuire à toute l’opposition.
    S’ils affirment cela, c’est pour botter en touche. Comment pourraient-ils justifier que l’Union européenne et les gouvernements européens soutiennent des mouvements racistes, extrémistes et néo-nazis à l’extérieur des frontières de l’Union européenne alors qu’à l’intérieur de celles-ci, ils mènent des campagnes mélodramatiques contre des groupes d’extrême droite mille fois plus modérés ?
    Peu nous importe en définitive le traitement médiatique en Occident d’une réalité qui s’avère être la suivante : Une minorité active et déterminée, porteuse d’une vision du monde et d’un projet alternatif, comptant quelques centaines de militants nationalistes radicaux, a transformé une contestation initialement pro-UE, en une lutte révolutionnaire pour abattre une clique mafieuse, incarnant un mode de gouvernance étrangers aux traditions politiques nationales et soutenue obstinément par une puissance étrangère. Ces nationalistes révolutionnaires ont su saisir ce moment propice, aidé par la maladresse d’un pouvoir discrédité (violences du 30 novembre 2013 sur Maidan, passage en force le 16 janvier à la Rada d’un arsenal législatif répressif encore pire que ce qui se fait de mieux en Occident ou en Russie). Réunion de plusieurs petits groupes (Tryzub Stepan Bandera, UNA-UNSO…) sur le modèle réticulaire de la leaderless resistance , ce Praviy Sektor (« Secteur Droit ») a su forcer les événements, en « chevauchant le tigre », ravivant un mouvement qui stagnait, radicalisant vers eux des milliers de personnes initialement non politisées et imposant en grande partie leur dynamique à des partis politiques perçus comme trop mous, y compris les nationalistes du parti Svoboda d’Oleh Tyahnybok.
    Un processus révolutionnaire-conservateur semble donc à l’œuvre, processus qui devrait logiquement vous inspirer, cher Alexandre Guelievitch, une certaine sympathie, ainsi que l’aviez fait à l’égard de tous les camps en présence durant la guerre de Bosnie, avec un article publié dans le numéro de la revue belge Vouloir de janvier-mars 1933(3)

    Mais comment les militants des droits des homosexuels et les groupes de la gauche libérale peuvent-ils combattre côte à côte avec des néo-nazis qui sont bien connus pour être homophobes ?
    Avant tout, tous ces groupes haïssent la Russie et le président russe, cela en fait des camarades de combat. Et les groupes de la gauche libérale ne sont pas moins extrémistes que les néo-nazis. Nous les nommons libéraux, mais c’est une erreur. On peut constater en Europe de l’Est et en Russie que, très souvent, le lobby homosexuel et les goupes néo-nazis et ultra-nationalistes sont alliés. De même, le lobby homosexuel a des idées très extrémistes sur la manière de déformer, rééduquer et influencer la société. Nous ne devons pas oublier cela. Le lobby des gays et des lesbiennes n’est pas moins dangereux pour la société que les groupuscules néo-nazis.
    Une série d’amalgames qui peuvent montrer leurs limites lorsqu’on analyse la situation en détails. Cela me fait penser à un article remarquablement documenté à propos des FEMEN, récemment mis en ligne sur internet (4).
    L’offensive chromatique se poursuit : après les « oranges-bruns », voici venu le temps des « roses-bruns » !

    À suivre

  • Entretien avec Alexandre Douguine sur l'Ukraine (commenté par Pascal Lassalle)

    Ukraine : « Unis par la haine »
    Version française corrigée d’un entretien donné par Alexandre Douguine au journaliste allemand Manuel Ochsenreiter,  (première mise en ligne,  le 29 janvier 2014).
    (http://manuelochsenreiter.com/blog/2014/1/29/united-by-hatred)
    Commentaires critiques de Pascal Lassalle rédigés le 18 février 2014 (NB: les commentaires de Pascal Lassalle apparaissent en italique). Pascal Lassalle est historien et conférencier. Il anime un Libre-Journal sur Radio Courtoisie et est animateur du Cercle Georges Sorel, affilié au MAS.
    Manuel Ochsenreiter : Professeur Douguine, les médias occidentaux mainstream et les politiciens établis décrivent l’actuelle situation en Ukraine comme un conflit entre, d’un côté, une alliance d’opposants pro-européens, démocrates et libéraux, et de l’autre, un régime autoritaire dirigé par un président-dictateur. Qu’en pensez-vous ?
    Alexandre Douguine : Je connais ces analyses et il est inutile de vous dire que je les considère comme totalement erronées. Il n’est plus possible, aujourd’hui, de diviser le monde comme à l’époque de la Guerre froide. Il n’y a pas, contrairement à ce que beaucoup de médias occidentaux affirment, un « monde démocratique » qui s’oppose à un « monde antidémocratique ».
    Tout à fait d’accord.
    Le monde qui se déploie sous nos yeux, est beaucoup plus complexe, avec des oligarchies transnationales ou non, qui se heurtent sur la vaste scène planétaire. En Ukraine, cette fois-ci, la partie la plus consciente du peuple ukrainien, son avant-garde, s’est levée face à un pouvoir oligarchique kleptocrate, prédateur et corrompu, qui a longtemps oscillé au gré de ses intérêts, entre Bruxelles et Moscou, dans une fragile logique multivectorielle, établie depuis la fin des années 90.
    La signature des accords avec Moscou mi-décembre 2013, a signifié la fin de cette politique de bascule aux yeux de nombre d’Ukrainiens.
    Si l’on en croit les médias mainstream, votre nation, la Russie, est un des principaux pays du « monde antidémocratique ». Et la Russie, avec le président Poutine, intervient dans les affaires nationales de l’Ukraine…
    C’est complètement faux. La Russie est une démocratie libérale. Lisez la constitution russe : nous avons un système électoral démocratique, un parlement qui fonctionne, la liberté du commerce. Notre constitution est basée sur des modèles occidentaux. Notre président Vladimir Poutine dirige le pays d’une manière démocratique. Nous ne sommes pas une monarchie, nous ne sommes pas une dictature, nous ne sommes pas un régime soviétique communiste.
    « Démocratie libérale ? ». Alexandre Douguine croit-il vraiment ce qu’il écrit ? Allons donc ! La « démocratie souveraine », consolidée par Vladimir Poutine au cours de ses mandats, n’est que l’ultime avatar d’une tradition bien russe, en vigueur depuis le tsar Ivan III au moins, celle d’un régime autocratique patrimonial, porté par un messianisme orthodoxe et impérial, une « korpocratura  plébiscitaire », pour reprendre la lumineuse expression de l’universitaire français Jean-Robert Raviot. Une forme de pouvoir indiscutablement (néo-)eurasiste, mais bien étrangère à la tradition politique européenne (« romano-germanique » selon la terminologie eurasiste).
    Les hommes politiques occidentaux affirment que Poutine est un dictateur.
    Ils se basent sur quoi ?
    Le terme de « dictateur » est effectivement totalement inadapté pour définir la nature du pouvoir exercé par Vladimir Vladimirovitch Poutine.
    À cause de ses lois sur l’homosexualité, de son soutien à la Syrie, des poursuites contre Mikhail Khodorkovski et les Pussy Riot…
    Ils le dénoncent comme un dictateur parce qu’ils n’aiment pas la mentalité russe. Chacun des points que vous avez mentionné est totalement légitime d’un point de vue démocratique et n’est nullement une marque d’autoritarisme.
    Il faudrait quand même admettre que la Russie, dont on peut ne pas aimer la politique, est un pays dirigé de manière libérale et démocratique. Le Président Vladimir Poutine accepte les règles démocratiques de notre système et il les respecte. Il n’a jamais violé la moindre loi. De ce fait, la Russie appartient au camp libéral démocratique et la grille de lecture de la Guerre froide n’est pas opérante pour expliquer la crise ukrainienne.
    « Manière libérale et démocratique » ?
    Nous ne discuterons pas des réalités d’un pouvoir fort, d’un état dysfonctionnel, d’une « dictature de la loi » purement formelle et à géométrie variable au gré du bon vouloir des gouvernants, du plus petit fonctionnaire au maître du Kremlin, cela nous entraînerait bien loin et dépasserait le cadre étroit de ces commentaires.
    Comment peut-on décrire ce conflit violent et sanglant ?
    Il faut en faire une analyse géopolitique et civilisationnelle. Et nous devons prendre en compte les faits historiques, même quand ils sont contraires aux idées en vogue !
    Je n’aurais pas dit mieux !
    Que voulez-vous dire ?
    Que l’Ukraine est un État qui n’a jamais existé dans l’histoire. C’est une entité qui a été créée récemment et qui se compose au moins de deux parties complètement différentes tant par leur identité que par leur culture. Il y a une Ukraine de l’Ouest qui participe de l’identité de l’Europe orientale. Les Ukrainiens occidentaux se considèrent en grande partie comme des Européens et leur identité est basée sur le rejet total du panslavisme et de la Russie. Les Russes sont considérés comme les ennemis absolus. On peut dire qu’ils haïssent les Russes, la culture russe et la politique russe. Cette haine est une composante importante de leur identité.
    Vision partielle et partiale, voire erronée, schématique et caricaturale. L’Ukraine fait partie de ces pays d’Europe, comme la Croatie ou la Slovaquie, qui ont vu leur construction étatique contrariée à cause des appétits impérialistes de puissants voisins (Pologne et Moscovie/Russie/URSS) ou de choix géopolitiques funestes. Des tentatives étatiques ukrainiennes ont donc bien existé. En décrivant d’une manière binaire, les fractures actuelles qui divisent le peuple ukrainien, Alexandre Douguine simplifie une réalité beaucoup plus complexe. Il se garde bien de préciser que cette traditionnelle division ouest/est, souvent exagérée, de l’ethnos ukrainien, ne correspond pas à une donnée civilisationnelle « naturelle », mais s’avère la conséquence d’une longue et récurrente politique de russification et de lutte contre tout ce qui pouvait incarner une identité distincte de celle porté par le pouvoir tsariste ou soviétique (à partir de Staline). Cette « haine » essentialisée et presque métaphysique que vous signalez n’est pas tombée du ciel, mais constitue la conséquences de politiques et de postures auxquelles les pouvoirs russes, quels qu’ils soient, rivés sur des schémas historiographiques et des représentations impérialistes, ont le plus grand mal à renoncer, pérennisant ainsi un contentieux qui ne peut que profiter aux forces occidentales et atlantiste.
    En tant que Russe, cela ne vous inquiète pas ?
    Pas du tout ! Il s’agit de leur identité. Cela ne veut pas nécessairement dire qu’ils veulent nous faire la guerre, juste qu’ils ne nous aiment pas. Nous devons respecter cela. Les Américains sont haïs par de nombreux peuples et ils l’acceptent bien. Que les Ukrainien occidentaux nous haïssent n’est pas une bonne ou une mauvaise chose. C’est juste un fait qu’il faut simplement accepter. Tout le monde n’est pas obligé de nous aimer !
    Les Ukrainiens occidentaux pourraient revoir leurs sentiments à l’égard de votre pays si vous acceptiez de vous comporter différemment, dans une perspective « d’égalité et de réconciliation », en reconnaissant leur droit à bâtir une nation  unifiée au lieu de soutenir et de propager des visions séparatistes et clivantes, position qui serait inacceptable pour vous, rapportée à certaines régions de votre grand pays, multiethnique et multiculturel…
    Mais les Ukrainiens orientaux apprécient quant à eux les Russes.
    La majeure partie de ceux qui vivent dans la partie orientale de l’Ukraine partage une identité commune avec le peuple Russe – historiquement, civilisationnellement et géopolitiquement. L’Ukraine orientale est une terre russe et eurasienne. En réalité, il existe deux Ukraine. Nous voyons cela très clairement lors des élections. La population est partagée sur toutes les questions politiques importantes. Et quand elles ont trait aux relations avec la Russie, nous constatons à quel point ce problème devient dramatique : une partie de l’Ukraine est absolument pro-Russe, l’autre est rabiquement anti-Russe. Deux sociétés différentes, deux pays différents et deux identités nationales et historiques coexistent dans une seule entité.
    Il y historiquement un seul pays, l’espace géographique où s’est déployé l’ethnos ukrainien (qui dépasse d’ailleurs les frontières politiques actuelles). Une seule identité également, certes fragmentée, mise à mal par des fractures internes pesantes, mais pas insurmontables à moyen et long terme. Je ne parlerai pas des 17% de Russes ethniques, résultant de la politique de « grand remplacement » de Staline qui a remplacé les millions de victimes du génocide par la faim de 1932-33 (le « Holodomor ») par des colons russes.
    Les Ukrainiens « ethniques », de l’Est et du Sud du pays, produits d’une colonisation mentale et linguistique intense, qui les a profondément « dénationalisés » et aliénés par l’intégration de stéréotypes infériorisants, ne peuvent cependant pas être considérés comme partageant une identité civilisationnelle commune avec le peuple russe. Parler les mêmes langues, regarder les mêmes programmes télévisés ou écouter les mêmes tubes chantés par les pin-up de service ne suffit pas à faire un même peuple (dans ce cas, pourquoi ne pas faire des Irlandais, des Anglais comme les autres ?). Les effets de la russification/soviétisation ne sont pas moins désastreux et condamnables que l’occidentalisation mentale, sociologique et même linguistique que subissent nos peuples européens.
    Votre lucidité serait de le reconnaître au lieu de n’appliquer votre ethno-différentialisme qu’aux autres peuples, pour peu qu’ils ne situent pas dans votre « étranger proche ». Cette Ukraine russophone, russifiée et soviétisée est naturellement désireuse d’entretenir de bonnes relations avec sa puissante voisine (liens humains, économiques et culturels). Cela ne signifie pas pour autant qu’ils veuillent rejoindre Moscou dans un nouvel Anschluss, comme en témoignent régulièrement les études menées dans ce sens. Rappelons également que l’on ne parlait pas un mot de russe dans cette partie de l’Ukraine jusqu’au moins le début du XVIIIème siècle et que nombre de patriotes et de nationalistes ukrainiens, jusqu’au XXème siècle, sont nés dans ces régions. La translation vers l’Ouest (La Galicie sous une domination autrichienne plutôt souple) d’une Ukraine nationalement et identitairement consciente ne s’est faite qu’à cause d’une répression politique et culturelle impitoyable sous les tsars Alexandre II et III.
    Ici donc, nous avons encore affaire à des phénomènes pas vraiment « naturels », résultant  plutôt d’une politique ethnocidaire de type coloniale et jacobine menée avec une intégration/assimilation/vampirisation des élites ukrainiennes, de la petite noblesse cosaque aux cadres de l’époque soviétique).
    La question est donc, quelle société domine l’autre ?
    C’est un point fondamental de la politique ukrainienne. Nous avons deux Ukraine et nous n’avons qu’une capitale : Kiev. Mais à Kiev, nous avons les deux identités, cette ville n’est pas plus la capitale de l’Ukraine orientale que de l’Ukraine occidentale. La capitale de l’Ukraine occidentale est L'viv, celle de l’Ukraine orientale est Kharkiv. Kiev est la capitale d’une entité artificielle. Ceci est très important pour comprendre l’actuel conflit.
    Vision simpliste et erronée. Kiev et l’Ukraine centrale sont situées dans un entre-deux identitaire, ayant subi de plein fouet les distorsions évoquées ci-dessus. Cette partie de la population, en particulier ses jeunes générations, penche depuis 1991, d’une manière croissante vers l’idéal de la construction de l’état national (c’est elle qui vote pour les formations politiques nationales-démocrates, comme celle de Yulia Tymochenko). Cela est nettement perceptible au regard des événements de l’EuroMaidan, sans être pour autant nouveau. Le reste de la population d’Ukraine centrale a commencé à abandonner ses comportements traditionnels d’apathie et d’indifférence politique pour prendre son destin en main, en tant que communauté du peuple consciente.
    Les médias occidentaux ainsi que les « nationalistes » ukrainiens ne seront pas d’accord avec votre description de l’Ukraine comme un État « artificiel ».
    Les faits sont clairs. La création de l’État d’Ukraine au sein de ses frontières actuelles, n’est pas le résultat d’une évolution historique, mais d’une décision bureaucratique et administrative de l’Union soviétique. La République socialiste soviétique ukrainienne fut une des quinze républiques constituant l’URSS de sa création en 1922 à sa chute en 1991. Cependant, durant ces soixante-douze années d’histoire, les frontières de la République d’Ukraine furent modifiées à de nombreuses reprises, principalement quand une part conséquente de l’Ukraine occidentale fut annexée par l’Armée rouge en 1939 et lorsque la Crimée lui fut rattachée en 1954.
    Non, les faits ne sont aussi « clairs » que vous l’affirmez.
    L’ethnos ukrainien a préexisté à la construction difficile ou trop brève de son état national et souverain. Les frontières actuelles sont le résultat des calculs cyniques de Staline qui a utilisé les réalités ethniques (réunion des populations ukrainiennes au sein de la « grande patrie du socialisme ») pour accroître son territoire et légitimer le déplacement des frontières vers l’Ouest (Galicie, Volhynie, Ruthénie subcarpathique, Bukovine du nord). Il a opéré de facto, ce rassemblement des terres ukrainiennes, qui avait été tenté le 22 janvier 1919 avec l’union de la République Populaire Ukrainienne (UNR) et de la République populaire d’Ukraine Occidentale (ZUNR) en un seul état.
    Les Soviétiques, qui ont fait don de la Crimée sous Krouchtchev comme vous le rappelez justement, n’ont pour autant pas opéré de rectifications de frontières avec les terres ethniquement ukrainiennes des régions russes frontalières (Koursk, Rostov sur le Don, ou Krasnodar et le Kouban).
    Quant au terme d’« état artificiel », nous pourrions discuter très longuement de l’« artificialité » de très nombreux pays et pas des moindres, dont celle d’une Fédération de Russie, qui n’a pas fini de se débattre dans des problématiques identitaires loin d’être résolues, en dépit d’une doxa officielle rassurante.
    Certains hommes politiques et analystes estiment que la solution la plus simple serait la partition de l’Ukraine en deux États.
    Ce n’est pas aussi facile que cela semble à cause du problème des minorités nationales. Nombre de ceux qui vivent en Ukraine occidentale se considèrent comme des Russes. Nombre de ceux qui vivent en Ukraine orientale se considèrent comme des Ukrainiens uniquement. Une simple partition du pays ne résoudrait pas le problème mais en créerait de nouveaux. Seule la séparation de la Crimée est envisageable car elle est entièrement peuplée de Russes.
    Concernant les perspectives de partition de l’Ukraine, vous semblez vous être éloigné (réalisme ?) de positions précédentes beaucoup plus tranchées (1). Quant à ceux qui se considèrent comme Russes en Ukraine occidentale, mis à part les petits groupes de Russes ethniques résultant du brassage de l’époque soviétique (familles de fonctionnaires et de militaires notamment), je devine que vous faites allusion à la tendance extrêmement minoritaire (représentée par l’écclésiastique Dmytro Sidor) et potentiellement séparatiste de la population roussyne/ruthène de la région naguère hongroise de Transcarpatie. Celle-ci est considérée en Ukraine comme une variante régionale de l’ethnos titulaire ou comme une ethnie propre dans certains pays voisins qui en hébergent des représentants (Slovaquie et Vojvodine serbe notamment).
    L’immense majorité de la population ukrainienne (Crimée mise à part) ne souhaite pas de partition. Cette perspective menaçante est utilisée à des fins d’intimidation par des partisans du pouvoir actuel (des gouverneurs, comme celui de Kharkiv qui violent allègrement la constitution du pays) et des personnalités russes comme Serguei Glaziev. On parle d’ailleurs le terme de « fédéralisme » ou « fédéralisation », mais les mots n’étant pas les choses, on est loin dans ce cas de thématiques chères à certains de vos amis comme Alain de Benoist ou même à l’auteur de ces lignes. La praxis de cette région du monde depuis la chute de l’URSS nous renvoie plutôt à des logiques séparatistes, comme nous le rappellent les exemples caucasiens. La question de la Crimée et de Sébastopol est délicate et je conviens, sûrement avec vous, que supprimer son statut de République autonome, comme le souhaitent la plupart des nationalistes ukrainiens, pourrait déclencher un processus séparatiste aux conséquences incalculables pour la région.
    Vous oubliez, de plus, les Tatars dans la population de Crimée, traités comme des citoyens de seconde zone et qui ne semblent pas bénéficier de votre mansuétude proclamée, à l’égard du respect imprescriptible du droit des peuples (mais bon, malheur à ceux qui ont choisit à vos yeux, le mauvais camp géopolitique…).
    Terminons également par le cas de certains partis nationalistes dans les pays frontaliers de l’Ukraine qui sont tentés de profiter des troubles pour faire valoir de vieux contentieux ou des revendications territoriales inasouvies. Le Jobbik, dont vous avez rencontré le leader Gabor Vona en mai 2013 à Moscou, n’exclue pas l’intégration de son pays à l’Union eurasienne chère à Poutine. Toujours nostalgiques d’une Grande Hongrie d’avant le traité de Trianon de 1920 (perte de 28% de son territoire), ils ont fait une déclaration publiée le 4 février dernier selon laquelle ils appelaient le gouvernement hongrois à profiter de la situation incertaine en Ukraine et d’une « opportunité historique » pour « résoudre la situation des Hongrois en Transcarpathie ».
    Pourquoi l’Union européenne souhaite-t-elle tant intégrer tous ces problèmes dans sa sphère d’influence ?
    L’Union européenne n’y a aucun intérêt. Ce sont les États-Unis qui y ont intérêt. On assiste actuellement à une campagne politique contre la Russie. L’invitation faite par Bruxelles à l’Ukraine de rejoindre l’UE a immédiatement entraîné un conflit entre l’UE et Moscou et un conflit interne en Ukraine. Cela n’a rien de surprenant pour qui connaît la société ukrainienne et son histoire.
    Le conflit interne concernant l’UE a pourtant été initialement limité, dans la mesure où cette perspective initialement voulue par Ianoukovytch et les oligarques qui le soutiennent, a suscité dans l’Ukraine de l’Est et du Sud, au mieux une relative adhésion, bien que moins marquée que dans le reste du pays, au pire une certaine apathie ou indifférence comme c’est usuellement le cas sur de tels positionnements.
    C’est ensuite que le pouvoir et ses relais, soutenu par Moscou, ont lancé l’offensive, fin janvier, avec l’activation, à l’initiative de l’aile dure du Parti des régions et des communistes, d’un grotesque « Front ukrainien » pour lutter contre « l’envahisseur fasciste » (sic), reprenant l’imagerie de la Grande Guerre patriotique, y compris le fameux ruban de Saint-Georges, au cours d’un congrès réunissant 6000 délégués dans un gymnase de Kharkiv.
    Une démarche qui a peu d’assise populaire dans des régions qui constituent pourtant le bastion électoral traditionnel de l’actuel président.

    À suivre

  • L'Ukraine à la Une du Monde

    140219Le quotidien "Le Monde", sans doute pour rappeler son existence à ses anciens abonnés, leur adresse chaque matin, un courriel résumant les principales nouvelles du jour.

    Ce mercredi 19 février 2014 à 8 h 46, on mettait en évidence 6 nouveaux articles, lesquels soulignaient le caractère dramatique des événements qui se déroulent en ce moment au cœur de l'Europe médiane.

    "À Kiev, titre-t-il en effet, du sang, des cendres et la crainte d'un assaut final." Un tel dernier adjectif semble quelque peu trompeur tant il se révèle difficile d'arrêter la marche tragique de l'Histoire des hommes en quête de liberté.

    Celle-ci dépasse certes le cadre de notre cher et Vieux Continent. Une autre information du même journal nous rappelle ce qui se passe au Venezuela. Le raid des forces de la répression néo-communiste, l'infâme SEBIN "bolivarien" contre le siège du parti d'opposition, qui vient d'être déclenché à Caracas, mérite au moins autant de préoccupation citoyenne dans notre pays que les pacifiques compétitions de Sotchi, cette bonne vieille résidence stalinienne. (1)⇓

    Désolé, en effet, mais là où Moscou ose accuser "les Occidentaux", là où certains intervenants commentateurs du site internet du "Monde" prétendent encore voir, ou s'époumonent à dénoncer la main des "fascistes", des "nazis" et autres affreux "nationalistes", – car dans la logomachie post-soviétique de tels vocables fonctionnent comme autant de synonymestoute personne sensée constate exactement le contraire.

    De richissimes, grossiers et stériles kleptocrates, Maduro comme Janoukovitch, héritiers des services spéciaux soviétiques, s'emploient toujours à opprimer les aspirations des peuples. Et ils utilisent, aujourd'hui encore, à Kiev comme à Caracas les mêmes recettes sanglantes et les mêmes réseaux de désinformation.

    Ce matin donc, les forces de répression prenaient position autour du centre de la capitale ukrainienne. Elles s'employaient à encercler les opposants encore sur place. Le nombre des morts augmente d'heure en heure.

    Un aspect plus grave encore était prouvé à nouveau par des vidéos amateurs. On ne peut pas parler de "civils tirant sur des civils" mais de tirs venant des "titouchkis", c'est-à-dire des voyous payés par le pouvoir. Là aussi le parallèle se révèle éclatant avec ce qui se passe à Caracas, où le régime "chaviste" se sert de l'appui des Cubains.

    Un reportage du "Monde" nous mène également "de l'autre côté des barricades au sein des terribles Berkout". Cette force spéciale aux ordres du ministère de l'intérieur est responsable des pires exactions commises à l'encontre des manifestants. (2)⇓

    On doit également se féliciter aussi de ce que "Le Monde" déjoue un autre aspect de la manipulation. Dressant le portrait de "Daniel, jeune père et prêt à prendre les armes" il qualifie ce militant ukrainien de "libéral de gauche". On ne doit pas douter pas d'ailleurs qu'aux côtés de cet homme on trouverait et on trouvera aussi d'excellents "patriotes de droite."

    Et, à juste titre, le journal souligne qu'à sa manière "il incarne la contestation ukrainienne, débutée pacifiquement et devenue depuis une lutte en partie violente contre un pouvoir déterminé à ne rien céder."

    JG Malliarakis http://www.insolent.fr/2014/02/lukraine-a-la-une-du-monde.html
    Apostilles
    1 - cf. le 11 février, chronique des événements courants "Vacances staliniennes à Sotchi".
    2 - cf. quelques images parlantes sur le site de "Die Welt".
  • GMT : comment les USA vont continuer de dépecer l’Europe…

    Entretien avec Alain de Benoist
    Alors que François Hollande vient tout juste d’annoncer, depuis les États-Unis, une accélération des négociations concernant le Grand marché transatlantique (GMT), Alain de Benoist revient pour Boulevard Voltaire sur les conséquences dramatiques d’un tel Traité…
    Le GMT, gigantesque zone de libre-échange entre l’Europe et les États-Unis, est le grand projet du moment. Mais les médias n’en parlent que fort peu. Pourquoi ?
    Parce que l’opinion est tenue à l’écart, et que les négociations se déroulent à huis-clos. C’est pourtant une affaire énorme. Il s’agit en effet de mettre en place, en procédant à une déréglementation généralisée, une immense zone de libre-échange, correspondant à un marché de plus de 800 millions de consommateurs, à la moitié du PIB mondial et à 40 % des échanges mondiaux. Le projet porte le nom de « Partenariat transatlantique de commerce et d’investissements ». S’ajoutant au « Partenariat transpacifique » également lancé en 2011 par les États-Unis, il vise à créer la plus grande zone de libre-échange du monde grâce à une vaste union économique et commerciale préludant à une « nouvelle gouvernance » commune aux deux continents.
    En créant une sorte d’OTAN économique, l’objectif des Américains est d’enlever aux autres nations la maîtrise de leurs échanges commerciaux au bénéfice de multinationales largement contrôlées par leurs élites financières. Parallèlement, ils veulent contenir la montée en puissance de la Chine, aujourd’hui devenue la première puissance exportatrice mondiale. La création d’un grand marché transatlantique leur offrirait un partenaire stratégique susceptible de faire tomber les dernières places fortes industrielles européennes. Elle permettrait de démanteler l’Union européenne au profit d’une union économique intercontinentale, c’est-à-dire d’arrimer définitivement l’Europe à un grand ensemble « océanique » la coupant de sa partie orientale et de tout lien avec la Russie.
    Ces négociations se font à haut niveau, sans que les gouvernements concernés aient leur mot à dire. Nouvelle défaite du personnel politique ?
    La « libéralisation » totale des échanges commerciaux est un vieil objectif des milieux financiers et libéraux. Le projet de grand marché transatlantique a discrètement mûri pendant plus de vingt ans dans les coulisses du pouvoir, tant à Washington qu’à Bruxelles. Les premières négociations officielles se sont ouvertes le 8 juillet 2013. Les deuxième et troisième rounds de discussion ont eu lieu en novembre et décembre derniers. Une nouvelle réunion est prévue à Bruxelles en mars prochain. Les partenaires espèrent parvenir à un accord d’ici 2015. Les gouvernements européens ne sont pas partie prenante aux discussions, qui sont exclusivement menées par les institutions européennes. Les multinationales y sont en revanche étroitement associées.
    Sachant qu’à l’heure actuelle, quelque 2,7 milliards de biens et de services s’échangent déjà tous les jours entre l’Europe et les États-Unis, la suppression des derniers droits de douane va-t-elle vraiment changer quelque chose ?
    La suppression des droits de douane n’aura pas d’effets macro-économiques sérieux, sauf dans le domaine du textile et le secteur agricole. Beaucoup plus importante est l’élimination programmée de ce qu’on appelle les « barrières non tarifaires » (BNT), c’est-à-dire l’ensemble des règles que les négociateurs veulent faire disparaître parce qu’elles constituent autant« d’entraves à la liberté du commerce » : normes de production sociales, salariales, environnementales, sanitaires, financières, économiques, politiques, etc. L’objectif étant de s’aligner sur le « plus haut niveau de libéralisation existant », « l’harmonisation » se fera par l’alignement des normes européennes sur les normes américaines.
    Dans le domaine agricole, par exemple, la suppression des BNT devrait entraîner l’arrivée massive sur le marché européen des produits à bas coûts de l’agrobusiness américain : bœuf aux hormones, carcasses de viande aspergées à l’acide lactique, volailles lavées à la chlorine, OGM (organismes génétiquement modifiés), animaux nourris avec des farines animales, produits comportant des pesticides dont l’utilisation est aujourd’hui interdite, additifs toxiques, etc. En matière environnementale, la réglementation encadrant l’industrie agro-alimentaire serait démantelée. En matière sociale, ce sont toutes les protections liées au droit du travail qui pourraient être remises en cause. Les marchés publics seront ouverts « à tous les niveaux », etc.
    Il y a plus grave encore. L’un des dossiers les plus explosifs de la négociation concerne la mise en place d’un mécanisme d’« arbitrage des différends » entre États et investisseurs privés. Ce mécanisme dit de« protection des investissements » doit permettre aux entreprises multinationales et aux sociétés privées de traîner devant un tribunal ad hoc les États ou les collectivités territoriales qui feraient évoluer leur législation dans un sens jugé nuisible à leurs intérêts ou de nature à restreindre leurs bénéfices, c’est-à-dire chaque fois que leurs politiques d’investissement seraient mises en causes par les politiques publiques, afin d’obtenir des dommages et intérêts. Le différend serait arbitré de façon discrétionnaire par des juges ou des experts privés, en dehors des juridictions publiques nationales ou régionales. Le montant des dommages et intérêts serait potentiellement illimité, et le jugement rendu ne serait susceptible d’aucun appel. Un mécanisme de ce type a déjà été intégré à l’accord commercial que l’Europe a récemment négocié avec le Canada.
    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier., Le 13 février 2014
    Source : Boulevard Voltaire
    http://www.polemia.com/gmt-comment-les-usa-vont-continuer-de-depecer-leurope/

  • Les abattages rituels juifs et musulmans sont interdits au Danemark

    Au Danemark, il est désormais obligatoire d'étourdir les animaux avant de les abattre, depuis le 17 février. Cette loi interdit de facto les abattages rituels juifs et musulmans, qui requièrent la pleine conscience des animaux. Le texte a été défendu par le ministre danois de l'Agriculture Dan Jorgensen, qui a expliqué sur une chaîne de télévision locale que "les droits des animaux doivent primer sur la religion".

    Le vice-ministre israélien aux Cultes a vivement condamné l'interdiction, selon des propos rapportés par La Croix : "L'antisémitisme européen dévoile son vrai visage et se retrouve même dans les sphères gouvernementales." L'ambassadeur danois à Jérusalem lui a répondu, jugeant ces propos "insultants".

    Michel Janva

  • Un jeune trisomique fait la une du basket américain

    0Manager de l’équipe de basket de son lycée, Kevin Grow est un jeune lycéen trisomique qui a fait la une des journaux américains, la semaine dernière, après avoir inscrit quatre paniers à trois points. L'entraineur John Mullin, les larmes aux yeux après la fin de la partie, a déclaré :

    « C’est vraiment incroyable. Je n’ai pas de mot… A chaque entraînement, il tentait des tirs à 3-points et nos joueurs ne quittaient jamais le gymnase avant qu’il mette un lancer-franc. Il est un cadeau de Dieu » avait déclaré le coach John Mullin, les larmes aux yeux après la fin de la partie.

    En Pennsylvanie, les Philadelphia Sixers, équipe de la prestigieuse NBA, ont donc profité de leur saison sans enjeu pour faire un beau geste. Ils ont ainsi offert un contrat d’honneur de deux jours au lycéen, lui offrant la possibilité de s’entraîner avec l’équipe, de manger avec les joueurs et même de se préparer avec eux pour faire face aux Cleveland Cavaliers.

    Michel Janva

  • Football : la FIFA déshonorée - Il faut mettre le Qatar au ban des nations

    Plus de 450 immigrés indiens travaillant au Qatar sont morts depuis deux ans, selon des chiffres officiels révélés par l’ambassade d’Inde.

    Le récent rappel à l’ordre adressé par la Fifa au Qatar concernant les conditions de travail des ouvriers sur les chantiers de la Coupe du monde 2022 trouve un écho macabre ce lundi avec la révélation du nombre de victimes indiennes.

    L’AFP, dans le cadre de la loi indienne sur le droit à l’information, a ainsi obtenu de la diplomatie indienne le chiffre de 450 victimes ! Ce nombre se comptabilise sur la période allant du 1er janvier 2012 jusqu’à début décembre 2013. En moyenne, 20 migrants sont morts chaque mois, avec un maximum de 27 en août 2013. Il y a eu 237 décès en 2012 et 218 jusqu’au 5 décembre 2013. Ce chiffre est à rapporter au nombre d’Indiens actuellement au Qatar, qui n’est pas connu précisément, mais qui était estimé à environ 500.000 fin 2012. [...]

    La suite sur Le Figaro

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Football-la-FIFA-deshonoree-Il

  • Traité transatlantique : une affaire aussi de géopolitique

    C’est en Septembre dernier que la fondation Respublica organisait un colloque sur le projet de marché transatlantique, colloque auquel participaient autour de Jean-Pierre Chevènement, maître de cérémonie, Hubert Védrine, Xavier Bertrand, le journaliste Jean-Michel Quatrepoint et l’économiste Jean-Luc Gréau.

    Le traité transatlantique ? Une vraie question de géopolitqiue dont il faudrait sans doute parler.

    ***

    S’il aboutit, le traité de libre-échange en cours de négociation depuis Juin dernier entre les Etats-Unis et l’Union Européenne aura des conséquences géopolitiques considérables. Raison de plus de ne pas en parler, apparemment !

    « La classe politique ne s’exprime pas sur ce sujet ! La classe médiatique non plus ! », s’exclamait Xavier Bertrand (UMP), invité le 16 Septembre dernier par le Président de la Fondation Res Publica, Jean-Pierre Chevènement, à s’exprimer sur ce projet de traité aux côtés d’Hubert Védrine, ancien Ministre des Affaires Etrangères. [...]

    Pascale Fournier - La suite sur Mediapart

    http://www.actionfrancaise.net/craf/?Traite-transatlantique-une-affaire

  • Les Grands Entretiens de Novopress – Nikola Mirkovic “Mourir debout plutôt que vivre à genoux”1/3

    Français d’origine serbe, Nikola Mirkovic est l’un des fondateurs de l’ONG Solidarité Kosovo qui vient en aide depuis 2004 aux populations serbes des enclaves du Kosovo. Dans Le Martyre du Kosovo (Editions Jean Picollec), il rappelle l’histoire de cette antique province, cœur culturel et spirituel de la Serbie. Il fait également la démonstration implacable de la substitution de population dont ont été victimes les Serbes du fait des Ottomans, des communistes de Tito puis de l’empire du Bien américain. Il répond aux questions de Novopress.

    Propos recueillis par Pierre Saint-Servant

    Le premier intérêt de votre livre est de briser un lieu-commun solidement établi qui voudrait que le Kosovo ne soit nullement une terre serbe mais le pays de « kosovars »…

    Toute une partie de la rhétorique guerrière de l’OTAN, relayée par les grands médias, consiste en effet à essayer de nous faire croire que le Kosovo est habité de gentils Kosovars martyrisés pas de méchants Serbes venus coloniser le pays. On ne peut être plus éloigné de la réalité. Le Kosovo, à l’origine, n’est même pas une province mais une plaine à qui les Serbes ont donné le nom de Kosovo Polje (ce qui signifie, en serbe, le champ des merles). La grande majorité des noms des villages, des villes, des montagnes, des rivières, etc .ont tous des noms d’origine serbe. La plupart des anciens monuments, qui sont le trésor du Kosovo et de la Métochie, sont serbes. Il n’y a pas de peuple kosovar, cela n’existe pas ; ceux qu’on appelle communément kosovars aujourd’hui sont en fait des Albanais. Quant aux frontières du Kosovo actuel, elles ont été dessinées par Tito à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. C’est vous dire si les racines «kosovardes » sont lointaines…

    Il n’y a pas de peuple kosovar, cela n’existe pas ; ceux qu’on appelle communément kosovars aujourd’hui sont en fait des Albanais.

    La bataille du Champ des Merles est un évènement fondateur de l’identité serbe, pouvez-vous y revenir ?

    Cet événement est historique par la grandeur de l’armée serbe qui a osé affronter, seule, l’immense empire ottoman avec une armée deux fois plus importante sur le champ de bataille. Cet événement est également historique par sa profondeur spirituelle, le roi serbe et ses chevaliers sont tous partis à la guerre pour se battre pour leur foi chrétienne. Ils ont préféré mourir debout plutôt que vivre à genoux. Pendant les siècles d’occupation ottomane, le courage, la bravoure et la foi de ces guerriers ont nourri l’espérance serbe et donné les modèles à suivre pour devenir des hommes libres.

    Le prince Lazare est comparé à certains à saint Louis. Quels éléments permettent de rapprocher les deux souverains ?

    Saint Lazare comme saint Louis ont été des rois hors du commun, des chefs que très peu de pays ont eu l’honneur d’avoir. Tout d’abord les deux sont très pieux et très chrétiens. C’est leur foi dans le Christ qui les guide dans leurs choix quotidiens que ça soit pour guider le royaume, rendre la justice, partager avec les plus pauvres ou gérer les affaires quotidiennes. Les deux rois prient et savent que leur passage sur terre est éphémère et que c’est le Royaume éternel qui est l’objectif suprême. Aussi, ces deux rois n’ont pas peur de mettre leurs épées et leurs vies derrière leur foi. Ce sont des guerriers qui sont tous les deux descendus dans l’arène pour affronter l’islam conquérant qui convoitait les terres chrétiennes. C’est aussi à la guerre que les deux vont trouver la mort et devenir des héros, des saints qu’on respecte et qu’on vénère encore de nos jours.

    Fin de la première partie, deuxième partie jeudi 20 février.

    http://fr.novopress.info/156768/les-grands-entretiens-de-novopress-nikola-mirkovic-mourir-debout-plutot-que-vivre-a-genoux/#more-156768