Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

France et politique française - Page 3663

  • Des institutions à l’encan

    C'est l'analyse d'Hilaire de Crémiers dans le numéro d'avril de Politique Magazine.

    "Les élections donnent lieu à des commentaires infinis et la plupart sans intérêt. Car la vraie question est de savoir si la guerre électoraliste et partisane est bonne pour la France.

    A quoi servent les élections ? Dans le cadre actuel de nos institutions, à exacerber la lutte des partis. Tel est le résultat le plus évident des élections dites départementales qui viennent de se dérouler.

    Soit, la plupart des départements sont repassés à droite, mais qui ne voit ce qui se passe au vrai, au-delà de ce basculement. Il ne s’agit plus de représenter les Français, leurs territoires, leurs intérêts ; mais alors plus du tout ! D’ailleurs, dans l’état présent du projet de loi sur la nouvelle organisation des territoires de la République, il est impossible de rien prévoir : le texte est illisible comme maintenant toutes les lois, tant elles sont mal rédigées, et, de fait, personne, sauf les quelques élus spécialisés, n’a lu ce salmigondis technocratique et démagogique dont les tours et les détours compliquent encore plus les échelons et les compétences de l’imbroglio territorial français. 

    Et Hollande ose parler de « choc de simplification » et le gouvernement a appelé les électeurs à voter alors que la loi est en cours d’élaboration et de remaniement. C’est littéralement grotesque, mais peu leur chaut.Car la seule chose qui les occupe et les préoccupe, c’est la lutte des partis. Voilà leur unique passion. La mécanique institutionnelle est telle que la Ve République est maintenant pire que la IVe et la IIIe ; et faut-il évoquer les précédentes qui s’achevèrent dans l’épuisement des factions ? Mourantes, toutes s’en sont remises à un pouvoir personnel : encore faut-il qu’il y ait une personne.

    La France livrée aux partis

    La Ve République en est là. Sous son nom règnent non pas des hommes d’état, mais de médiocres politiciens. Les partis se partagent la France, du Conseil constitutionnel jusqu’à la moindre commission culturelle, sociale, administrative. Le département est un lieu de pouvoir qui n’échappe pas à la mainmise des partis. Serait-il possible un jour de choisir des représentants en fonction d’autres critères que l’étiquette d’un parti, la compétence, le dévouement par exemple ? 

    Lire la suite "Des institutions à l’encan"

    Paula Corbulon

  • Consommer à crédit en France et aux États-Unis

    Comparant France et États-Unis, Gunnar Trumbull montre que le développement du marché du crédit à la consommation s’explique par des coalitions d’intérêts différentes qui ont influencé les politiques du crédit de manières opposées.

    Ces dernières années, les travaux sur le crédit et l’endettement des ménages ont le vent en poupe notamment depuis la crise des subprimes qui a déclenché la crise financière en 2007-2008. Bien que le cas américain soit plus largement analysé dans la littérature, l’intérêt des chercheurs porte aussi sur d’autres pays d’Europe et d’Asie confrontés au problème du surendettement.

    En effet, au cours du XXe siècle le crédit a de moins en moins fait l’objet de désapprobation morale dans les pays industrialisés occidentaux, et depuis les années 1970, des changements institutionnels majeurs ont transformé le cadre légal du surendettement pour faciliter les procédures de faillite personnelle.

    Pourtant, en France il a fallu plus d’une décennie pour que les législateurs s’accordent, en 2003, sur les procédures de faillite personnelle qui autorisent l’annulation de la dette et donnent droit à un nouveau départ, comme le stipule la loi américaine depuis 1978. Cette différence de réglementation ne s’explique pas forcément par l’écart du nombre de ménages endettés. Pour comprendre cette différence, il importe de revenir sur le rôle que joue le crédit dans le système économique et dans le modèle de société des deux pays.
    Avec ce livre, “Consumer Lending in France and America”, Gunnar Trumbull apporte une contribution notable à la littérature, en analysant la construction politique du rôle économique et social du crédit aux États-Unis et en France.

    En s’intéressant plus particulièrement aux coalitions d’intérêt entre les acteurs et à leur influence sur la réglementation et le marché, il apporte des éléments de réponse différents des analyses culturalistes qui associent les réserves des Français à l’égard du crédit à une tradition moraliste ou l’endettement des ménages américains à un hédonisme consumériste.

    Trumbull s’inscrit à la suite d’autres chercheurs qui ont montré que l’endettement des ménages américains n’est pas lié à un dysfonctionnement du système financier, mais représente plutôt une condition du rêve américain depuis les années 1950 [1]. Son analyse est d’autant plus pertinente qu’il compare la place du crédit dans le discours public aux États-Unis avec la France, où, en revanche, le compromis social ne donne pas à l’endettement les mêmes vertus sociales et économiques.

    Ce spécialiste des politiques de consommation en Europe et aux États-Unis, s’intéresse aussi à l’influence de la société civile sur les pouvoirs publics [2]. Mais ici, il s’agit surtout des coalitions d’intérêts qui ont permis aux prêteurs américains de gagner l’approbation morale en s’associant aux intérêts d’autres groupes non-gouvernementaux. En France, il montre qu’il n’y a pas eu de coalition similaire, au contraire, l’accès au crédit suscite certaine réserve, et sur le plan économique, des doutes demeurent quant à son efficience.

    Essor de l’industrie du crédit aux États-Unis et en France

    Il faut signaler que le crédit ne représente pas au XIXe siècle une activité lucrative dans laquelle il est facile de se lancer. Les prêteurs, pour développer légalement leur activité sont confrontés à plusieurs obstacles. Premièrement, le crédit doit se défaire de la désapprobation morale dont il était la cible. Pour cela, les prêteurs cherchent à anoblir l’image du crédit, liée à la criminalité, l’usure, ou encore à un hédonisme irresponsable.

    Ensuite, à cause du risque et des coûts administratifs élevés, l’activité est peu rentable, surtout pour les petits prêteurs qui n’ont pas ou peu de capital. Enfin, les différentes réglementations (limite des taux d’intérêt, rationnement de l’offre de crédit, etc.) constituent des barrières à l’entrée supplémentaires.

    Trumbull analyse comment les acteurs du crédit ont contourné ces obstacles. Il rappelle brièvement qu’aux États-Unis, la première lutte sociale contre les prêteurs requins (loan shark) date de la fin du XIXe siècle. Les réformateurs sociaux et les prêteurs se sont battus pour obtenir une révision de la loi sur l’usure et légaliser les petits prêts (small loan).

    La légalisation des prêts personnels a ensuite facilité l’essor du marché des crédits à la consommation (consumer credit) et l’entrée de nouveaux acteurs : les chaînes de détail (retailers), les sociétés financières de crédit et les banques. À la différence du cas américain, dans la France d’après-guerre, les réformateurs sociaux et les politiques n’attribuent ni un rôle social, ni un rôle économique au crédit, notamment du fait de la période de rationnement et de contrôle du capital.

    Néanmoins, à partir du début des années 1950, comme l’explique Sabine Effosse dans son dernier ouvrage, le crédit à la consommation bénéficie d’une réhabilitation politique [3]. Dans cet environnement plus propice, de nouveaux acteurs arrivent, parmi lesquels le Cétélem, qui deviendra le leader français et européen du crédit à la consommation.

    Trumbull consacre une bonne partie de son étude aux stratégies mises en œuvre par cet établissement financier adossé à de puissants groupes financiers, pour rester compétitif dans un contexte politique, économique et social différent du marché américain.

    Dans les années 1960, malgré la légitimité acquise par les établissements prêteurs américains, leur activité n’est toujours pas rentable. Cette faible rentabilité s’explique en grande partie par des limites réglementaires. Quant au cas français, il s’agit plutôt de savoir quelle réglementation appliquée sur le marché du crédit à la consommation pour en faciliter l’essor.

    lire la suite 

  • Taubira se demande en quoi elle est laxiste : 6 exemples qui le prouvent

    Christiane Taubira s'est exprimée sur la réforme pénale dans un entretien au Parisien, publié ce lundi 2 juin. "En quoi suis-je laxiste ? Depuis deux ans, c'est magique, j'entends ça tous les jours mais personne ne me donne un seul exemple", a rétorqué la garde des sceaux. En voici quelques uns.
    1 - Dès son arrivée, Christiane Taubira a fait le choix de vider les prisons plutôt que d’en construire 
    Xavier Bébin : La première décision prise par Christiane Taubira Garde des Sceaux a été de supprimer le programme de construction de 24 000 places de prison voté par la majorité précédente. Conséquence : en 2017, à la fin du programme de construction déjà engagé, la France comptera 62 000 places de prison, pour 68 000 détenus. Le message était sans ambiguïté : contre surpopulation carcérale, il s’agissait de baisser le nombre de détenus (donc en incarcérant moins et en libérant plus vite) plutôt que d’augmenter le nombre de places. 
    2 - Christiane Taubira a aggravé l’inexécution des peines de prison, facteur d’impunité 
    Non contente de ne prendre aucune mesure susceptible de résorber le stock de 100 000 peines de prison inexécutées (essentiellement faute de places de prison en nombre suffisant), Christiane Taubira a aggravé la situation par sa circulaire de politique de pénale de septembre 2012, demandant explicitement aux procureurs de retarder, voire d’éviter la mise à exécution des peines de prison ferme. On se souvient du scandale qu’avait suscité, à l’été 2013, la libération de trois voyous que la police venait juste d’interpeller à Dreux en vue de mettre leur peine de prison à exécution. Il s’agissait d’une application directe de sa directive. 
    3 - Christiane Taubira a annoncé la suppression des lois permettant de neutraliser les criminels les plus dangereux 
    Au fil de ses interventions publiques, la ministre n’a cessé de remettre en cause le concept de "dangerosité" dont elle pense que "personne n’est en mesure de la définir ni de la mesurer". Exit, donc, la dangerosité des Guy George, Patrice Evrard, Emile Louis et consorts. Cohérente avec elle-même, Christiane Taubira a demandé la suppression de la "rétention de sûreté", une mesure permettant précisément de protéger la société contre un très petit nombre (une centaine) de prédateurs extrêmement dangereux. Mais pour elle, "la rétention de sûreté, c’est juste pas concevable". Vous avez dit laxiste ? 
    4 - Christiane Taubira veut désarmer la Justice pénale des mineurs 
    Tant pis si les 14-18 ans (5 % de la population française) représentent 25 % des mis en cause pour viols, 34 % pour cambriolages et 46 % pour vols avec violence. Sa priorité – et l’une de ses premières déclarations publiques – a été d’annoncer la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs récidivistes, créés précisément pour que la Justice soit plus ferme à leur égard. Elle trouve donc déjà excessive la situation actuelle où, sur 50 000 condamnations prononcées chaque année, 15 000 sont des "admonestations", 13 000 des "sursis" et 5 000 des "remises aux parents". Des sanctions redoutables, assurément. 
    5 - Christiane Taubira va libérer un maximum de détenus à mi-peine 
    Sa réforme pénale, discutée ce jour en conseil des ministres prévoit, par le système de "libération sous contrainte", d’obliger les juge d’applications des peines à examiner le dossier de tous les détenus à la moitié de leur peine, en vue de les remettre en liberté (je dis bien à la moitié de leur peine, et non aux deux-tiers comme le prétend le gouvernement, car c’est ce qui se produira en pratique compte tenu des remises de peine automatiques dont bénéficient par ailleurs les détenus). Le projet de loi Taubira prépare donc la libération massive et rapide d’individus si peu motivés de se "réinsérer" qu’ils n’ont même pas pris la peine de préparer un dossier de libération conditionnelle. 
    6 - Christiane Taubira supprime les peines plancher visant les récidivistes 
    A la décharge de la ministre, il s’agissait d’un engagement du candidat François Hollande. Mais son projet de loi va encore plus loin : il prévoit explicitement de favoriser les aménagements de peine des récidivistes – oui, des récidivistes – et d’augmenter la durée de leurs remises de peine. Ceci, alors qu’une majorité des crimes et délits sont commis par une toute petite minorité (5%) d’individus suractifs et dangereux. Et que la société est d’autant mieux protégée que ce noyau dur est derrière les barreaux, plutôt qu’en liberté, même sous "contrainte" (laquelle sera de toute façon bien aléatoire).

    Source

    http://www.oragesdacier.info/

  • Eric Letty : « La réflexion politique se porte mieux à droite qu’à gauche »

    Journaliste, mauricien et catholique militant, Eric Letty a été longtemps Rédacteur en chef de Monde et Vie. Il avait alors lancé cette enquête sur la droite, à laquelle il se soumet aujourd’hui.

    Monde et Vie : Pensez-vous que le clivage droite-gauche demeure pertinent aujourd’hui où l’on a de plus en plus de mal à voir les effets concrets d’une véritable alternance politique, lorsque l’on a signé pour être dans le Machin européen.

    Eric Letty : ce clivage entre la droite et la gauche ne passe plus par les partis politiques, en particulier ceux qui adhèrent à la conception d’une Europe fédérale au sein de laquelle les peuples seront appelés à disparaître. les différences entre ces mouvances sont artificielles et d’autant moins significatives que les politiciens français, en bradant la souveraineté nationale, ont abdiqué l’essentiel de leurs pouvoirs.

    Il existe pourtant une différence presque ontologique entre l’homme de gauche et l’homme de droite, qu’a soulignée Henri de Lesquen dans sa réponse à notre enquête : le premier est un utopiste, le second un réaliste. Il en résulte deux conceptions du monde radicalement différentes. L’homme de gauche est un optimiste, qui veut le bonheur ici-bas et tente d’y parvenir en construisant un système utopique. Si les réalités ne « collent » pas à son système, il fera en sorte de les y contraindre ; et si l’homme réel ne s’y insère pas non plus, il recréera l’homme à son idée : c’est ainsi que se construisent les totalitarismes. Le relativisme procède du même primat de l’Idée sur la réalité. L’homme de droite, lui, raisonne à partir des faits, en essayant d’en dégager des lois. Cette démarche, plus humble, le conduit, le conduit à admettre qu’il existe une vérité objective, qui lui faut chercher. Il ne développe pas une conception révolutionnaire, mais au contraire traditionnelle de la société, parce que les traditions sont construites sur des réalités évolutives. C’est aussi ce qui explique, à mon sens, qu’il n’existe pas d’ « intellectuels » de droite comparables aux intellectuels de gauche. Ce n’est pas une posture : l’intellectuel est un constructeur de système, ce qui n’est pas conciliable avec le mode de pensée de l’homme de droite. Mourras, par exemple, qui appuie sa réflexion politique sur « l’empirisme organisateur », n’a pas construit de système : beaucoup de ses autres ouvrages sont difficiles d’accès parce qu’ils font référence à des faits qui relevaient à son époque d’une actualité plus ou moins récente, mais appartient aujourd’hui à l’histoire. J’ajoute que, parce qu’il est subjectiviste, l’homme de gauche est individualiste ; je pense que le personnalisme, qui favorise l’épanouissement de l’individu par les liens humains qu’il tisse au sein des communautés auxquelles il appartient, correspond mieux à l’homme de droite. L’oeuvre des non-conformistes des années trente me paraît, à cet égard, très intéressante.

    S’il est chrétien, le regard que l’homme de droite porte sur la nature humaine peut sembler pessimiste, parce qu’il sait que cette nature est marquée par la chute ; mais il est dans le fond profondément optimiste, puisque l’unique sens de l’histoire aboutit à un royaume qui n’est pas de ce monde et dans lequel l’humanité sera restaurée. Le péché défigure l’homme, mais il n’abolit pas la Parole divine, rapportée dans la Genèse : « Dieu vit tout ce qu’il avait fait : cela était très bon. »

    Est-ce que François hollande ne serait pas, lui, un véritable homme de gauche ?

    Hollande reste un premier secrétaire du PS entré à l’Elysée à la faveur d’un concours de circonstances. Pour autant qu’il ait une politique, elle est mondialiste, pro-américaine, socialiste dans ses déclarations et de plus en plus libérale dans ses choix économiques, par manque de volonté et d’imagination. Il tente de se concilier sa gauche par des réformes « sociétales » comme le « mariage » entre personnes de même sexe, ou la légalisation de l’euthanasie, mais Alain Juppé accomplirait les mêmes réformes et Nicolas sarkozy également- au prix d’une nouvelle trahison de son électorat. Tous ces gens-là appartiennent à une gauche opportuniste, qui a fait sienne l’utopie mondialiste.

    On parle de droitisation de la vie politique. Quels seraient les événements qui ont marqué ce mouvement « dextrogyre » , N’assiste-t-on pas plutôt à une disparition de la politique au sens traditionnel d’art du gouvernement des hommes au profit d’un système auto-administré d’une part et de lobbying d’autre part ? 

    Concernant ce mouvement dextrogyre, je citerai évidemment le succès de la Manif pour tous, qui échappe pour l’instant, me semble-t-il, aux partis politiques comme l’a montré le faible score réalisé par Hervé Mariton lors des primaires de l’UMP ; et la montée spectaculaire du Front national, qui correspond à un besoin de retrouver leur identité collective, menacée de dilution dans l’Europe bruxelloise et par l’immigration de masse.

    Quant au système auto-administré, il est propre à un système politique qui érige le fonctionnaire en garant de la durée, tandis que les politiques jouent les courants d’air de ministère en ministère. Les lobbying sectoriels se développent alors d’autant plus qu’ils qu’ils donnent au politicien l’impression d’exister. Les groupes de pression les plus efficaces sont plus anciens, comme la franc-maçonnerie.

    Qu’est-ce que votre enquête auprès de « vrais » gens de droite vous a appris sur la droite ou sur la vie politique en général ?

    Elle m’a montré que non seulement la réflexion politique n’est pas morte à droite, mais qu’elle s’y porte plutôt beaucoup mieux qu’à gauche, ce qui est une promesse d’avenir. En effet, la pensée de droite échappe au politiquement correct, ce qui lui confère une liberté et une diversité beaucoup plus grandes qu’à gauche - ainsi qu’une vraie tolérance. 

     

    Propos recueillis par l’abbé G.de Tanoüarn monde&vie de janvier 2015

  • Elisabeth Lévy : «Le FN à 25% témoigne de la faillite de l'antifascisme mondain»

    A l'occasion de la sortie du nouveau Causeur, Elisabeth Lévy a accordé un long entretien à FigaroVox dans lequel elle revient sur la percée du FN aux départementales ainsi que sur la polémique autour des propos de Jean-Marie Le Pen.
    En couverture du nouveau Causeur, le visage de Marine Le Pen avec le titre «Un Français sur quatre». Avez-vous pris votre carte au FN ?
    Elisabeth Lévy: Vous êtes de la police de la pensée? Vous travaillez pour Mediapart? Si j'avais interviewé François Hollande, vous ne m'auriez jamais demandé si j'avais ma carte au PS. Mais rassurez-vous: Causeur ne soutient nullement Marine Le Pen - et pas non plus Dieudonné à qui nous avons consacré une «une» assortie d'une longue interview. Cependant, nous avons bien un parti pris qui consiste à parler «normalement» du Front national, sans agiter de gousses d'ail et sans hurler au nazisme. Certes, il est très gratifiant de jouer les antifascistes mondainssans prendre le moindre risque, mais cela ne contribue guère à éclairer le public et voyez-vous, notre péché mignon, à Causeur, c'est que nous préférons comprendre que nous indigner. L'ancrage du FN dans le paysage est en train de changer profondément notre système politique et il suffirait de ne pas en parler ou de n'en parler que sur le mode de l'indignation, et de ne pas donner la parole à ses dirigeants, pour le faire disparaître? Je ne vous savais pas adepte de la pensée magique….Assez de poses et les postures! Si vous voulez combattre le FN, et il y a beaucoup d'excellentes raisons de le faire, il faut arrêter de fantasmer sur la Bête immonde et le combattre normalement: ça s'appelle faire de la politique.
    Justement, parler «normalement» du FN, cela signifie qu'il est un parti normal…
    Vous êtes expert en normalité, vous ? Moi pas. Ce que je sais, c'est que rien, dans les statuts du FN ou dans son programme, ne contrevient à la légalité républicaine - auquel cas il faudrait l'interdire. Et quand ses dirigeants, ses candidats ou ses élus transgressent la loi par des déclarations odieuses, ils sont condamnés et c'est très bien comme ça. Bien sûr, nous n'oublions pas l'histoire de parti créé en 1972 pour fédérer tous les courants - ou groupuscules - de l'extrême droite. Mais en quarante ans, on peut au moins envisager que ce parti ait évolué, non? Peut-être l'avez-vous remarqué, en 2011, Marine Le Pe n a succédé à son père, en imposant un discours républicain qui n'est pas franchement la tasse de thé du Front canal historique. «Double langage !», «tel père telle fille !», répètent inlassablement les perroquets zélés, experts en cœurs et en reins, qui savent voir les mauvaises pensées derrière les paroles. Franchement, Philippot en pétainiste, vous y croyez ? Quoi qu'il en soit, il y a une différence de taille entre le père et la fille, elle veut arriver au pouvoir et elle ne semble pas penser qu'elle y arrivera avec un programme fasciste. Du reste, si 25 % des électeurs votaient pour un parti fasciste, il faudrait prendre les armes ou décamper. Or même Manuel Valls ne nous a pas appelés à de telles extrémités…il ne croit pas lui-même à l'épouvantail qu'il agite.
    C'est tout de même la troisième fois que Marine Le Pen fait la une de Causeur. En prime, une longue interview de six pages! Même Nicolas Sarkozy n'a pas eu cet honneur …
    Mauvaise pioche! Nous avons demandé à de multiples reprises une interview de Nicolas Sarkozy, j'attends encore la réponse, si vous pouviez faire passer le message je suis toujours preneuse. Et je ne vous donnerai pas la liste des dirigeants socialistes qui ne nous parlent qu'en privé par peur de voir leur immaculée réputation entachée par notre mauvaise compagnie. Quant à Marine Le Pen, elle est en «une» de Causeur quand elle fait la «une» de l'actualité, c'est ballot. La première fois, c'était en janvier 2011 après le Congrès de Tours, la deuxième en mai 2012 au moment des présidentielles. Et ce mois-ci, en bons citoyens nous avons écouté le Premier ministre qui nous a dit que l'enjeu de ces élections, c'était le méchant FN. Et nous avons interrogé la chef des méchants…Au fait, vous avez compté les «unes» de l'Obs, de l'Express et des autres, sur Marine Le Pen ?
    Le public connait votre goût pour la polémique. On vous soupçonne d'éprouver une jubilation particulière à interviewer Marine Le Pen ?
    Ecoutez, elle représente l'une des trois grandes forces politiques (ou quatre si vous comptez deux gauches) qui se partagent les suffrages des Français, ce qui serait choquant, c'est qu'on ne lui donne pas la parole - du reste, nous ne sommes pas les seuls à le faire. Si vous me demandez si cela m'amuse de susciter quelques gloussements outrés de benêts qui n'ont évidemment pas lu l'entretien, je ne dis pas…Reste que ce n'est pas pour eux que nous nous donnons du mal, mais pour des lecteurs soucieux de réfléchir plus que de condamner. Alors je souhaite que chacun juge sur pièces et lise non seulement l'entretien mais l'ensemble des contributions. Cela suffira à ridiculiser l'accusation de complaisance….
    «Un Français sur quatre», le titre tord un peu la réalité. En effet, un français sur deux n'est pas allé voter ! N'est-ce pas «le système» dans son intégralité, y compris le FN, qui a été rejeté lors de cette élection ?
    Vous n'avez pas connu le glorieux «Deux Français sur trois» de Giscard… Mais oui, si vous voulez, «un Français sur quatre», ce n‘est pas une vérité scientifique, car on ne saurait jurer que la moitié abstentionniste des électeurs se répartit de la même façon sur l'échiquier politique que la moitié votante. Cependant, il est probable que Marine Le Pen recueillera autour de 20 % des voix au premier tour de la présidentielle, ce qui ferait un Français sur cinq. Ce que nous voulions dire avec ce titre très descriptif, c'est que le FN est l'un des principales forces du pays et qu'il est temps d'en tirer les conséquences, surtout si on veut le combattre. Et par ailleurs, quoi qu'on pense du parti et de ses militants (groupe de plus en plus hétérogène d'ailleurs), «un Français sur quatre», ou un électeur sur quatre, cela exclut la thèse du vote fasciste.
    Vous avez critiqué la «diabolisation» du FN. Au vu du résultat des départementales, décevant par rapport aux sondages, on peut considérer que la stratégie de Manuel Valls était efficace…
    Ce n'est pas parce qu'une stratégie marche, à la marge et conjoncturellement, qu'elle est bonne! Il est fort possible que les déclarations paniquardes de Valls aient mobilisé quelques électeurs et fait perdre des voix au FN. Mais si on croit enrayer sa progression en annonçant le retour du nazisme, on se fourre le doigt dans l'œil. D'ailleurs, comme toujours après une débâcle, on entend des grandes ou petites voix de gauche dénoncer l'abandon de l'électorat populaire au FN. La gauche n'a plus de base sociologique (à part les bobos des centres-villes) et il semble que la coalition arc en ciel (l'alliance des femmes, des immigrés, des minorités sexuelles…) rêvée par Terra Nova ne suffise pas à en refaire une. L'enjeu réel, pour Valls et Hollande, c'est la reconquête du «prolo», plus précisément des ouvriers et des employés, et pas le combat contre un fascisme imaginaire. L'ennui, c'est que même quand la gauche lui parle, à ce prolo, elle ne parle qu'à une moitié de ce qu'il est ; elle veut bien entendre l'angoisse du chômeur et du délocalisé, certainement pas celle du «de souche» qui voit son pays changer et à qui ce changement ne plait pas. Traiter ces peurs «identitaires» par le mépris, c'est, pour reprendre une formule d'Alain Finkielkraut, laisser le monopole du réel au Front national. S'il donne de mauvaises réponses à de bonnes questions, trouvons les bonnes réponses !
    Tout de même, Jean-Marie Le Pen vient de récidiver en répétant que les chambres à gaz étaient un «point de détail» de l'histoire. Son père est-il devenu son meilleur ennemi ?
    Elle a viré sa vidéo hebdomadaire du site et s'est clairement désolidarisée de ses propos, faut-il qu'elle le tue physiquement ? Soyons clairs : il y a encore au FN de vieux briscards pétainistes, OAS, racistes et antisémites. Je n'ai pas le sentiment que ce sont eux qui font la ligne, mais cet héritage existe et il constitue une excellente raison de ne pas voter pour ce parti. Et on a justement épinglé les déclarations dégoûtantes d'une quinzaine de candidats, dont aucun n'a été élu et qui ont été exclus du parti. Mais il serait particulièrement injuste de mettre dans le même sac d'extrême droite tous les gens qui se battent aujourd'hui sous l'étiquette FN. Il ne faut pas se faire avoir par le show coproduit par le «Vieux» et quelques médias. Comme par hasard, au lendemain des élections, Jean-Marie Le Pen est convié sur les plateaux, on appuie sur le bouton, il dit des horreurs et on se retrouve soudain dans un débat «pour ou contre le nazisme» (je vous rassure, je suis contre). Et le chœur des vierges médiatiques triomphe: vous voyez bien qu'ils n'ont pas changé ! Certes, Jean-Marie Le Pen n'a pas changé et il ne changera pas : il ne résistera jamais au plaisir de lâcher une énormité - et au passage de savonner la planche de sa fille. Je comprends qu'il ne soit pas simple de désavouer son père, mais si Marine Le Pen veut prouver que son FN n'a plus rien à voir avec celui de papa, elle devra en arriver là : par exemple en refusant qu'il dirige la liste FN en PACA pour les régionales.

    NoteElisabeth Lévy est journaliste, essayiste et polémiste. Elle dirige le magazine Causeur et intervient régulièrement sur RTL.

    SourceFigarovox :: lien

    http://www.voxnr.com/cc/tribune_libre/EuklElypAyEhXGOOel.shtml

  • Areva ou les limites du colbertisme

    Ce billet a été publié dans l'Action française 2000 du 19 mars 2015 (n°2905 p.10) sous ce même titre. Il entre en archives RA avec des liens complémentaires en bas de note qui n'apparaissent pas dans la version papier faute de place et une notice plus développée sur Hans Hermann Hoppe*.

    Avec un chiffre d'affaires sensiblement constant, l'action Areva a perdu 88% en 7 ans. Ce n'est pas "la faute à pas de chance" car y fut concentré le meilleur des cerveaux français, et c'est sans doute en celà que les déboires de la filière d'excellence sont inquiétants. Le premier reproche que l'on puisse faire à l'ancienne patronne d'Areva, Anne Lauvergeon, est le fiasco technique d'UraMin. Alors que beaucoup de grands dirigeants français ont suivi un cursus de sciences molles qui les autorise à méjuger les affaires industrielles (la liste est longue), Atomic Anne, agrégée de sciences physiques par Normale Sup, est issue du prestigieux Corps des Mines et s'est donc lourdement trompée dans son cœur de métier. Tout le reste en découle puisque la Justice examine l'alternative entre une erreur par incompétence et une mauvaise décision parfaitement documentée. Le résultat de l'instruction menée par la Brigade financière de Paris et par le juge Van Ruymbecke signalera si l'ingénieur Lauvergeon était sous-calibré pour exercer la dictature nucléaire française consentie par les pouvoirs publics en souvenir du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA), ou si elle a cherché dans ses multiples fonctions sa propre gloire. Cette affaire est la pierre de touche qui révélera la nature profonde des erreurs d'Areva : cafouillages typiques des entreprises d'État dont le propriétaire est un buste en plâtre qui trône dans les mairies. On n'ose parler d'escroquerie délibérée et pourtant, beaucoup de millions ont circulé !

    Yellow Cake

    L'affaire est digne d'un roman de Gérard de Villiers. En quelques lignes, la voici : en quête de mines d'uranium à agréger au patrimoine de la COGEMA devenue Areva, la direction du groupe repère la mine centrafricaine de Bakouma qui avait été découverte par le CEA en 1958 et jugée inexploitable alors, site à moitié noyé, minerai enfermé dans une gangue d'apatite quasiment infractable, logistique ruineuse. La hausse du prix de l'uranium changeait-elle aujourd'hui le compte d'exploitation ? Aucun personnel de terrain ne le crut, mais tout l'état-major voulait acheter sans voir, ni même consulter les copieuses archives de la COGEMA. Les patrons se sont laissé rouler dans la farine par les vendeurs, une holding minière canadienne qui fit fortune dans la transaction, quasiment en faillite dans l'exploitation ! Le monde de l'uranium est un boudoir, chacun savait les permis d'UraMin sans valeur. Sauf Areva ?
    Les déboires d'Areva sont typiques de la gestion étatique des entreprises publiques, la morgue passant trop souvent la raison. Que ce soit l'enthousiasme potache à la rédaction du contrat finlandais d'un EPR™ qui n'en finit plus de s'achever dans les pénalités de retard ; les présomptions arrogantes d'ouverture du marché chinois à des réacteurs de 3è génération, qui pourrait bien se limiter pour nous aux quatre unités de Taïshan, le reste du programme national étant sinisé sous licence Westinghouse à tout motif même déloyal comme la standardisation des filières pour optimiser la maintenance ; que ce soit l'agonie du réacteur EDF de Flamanville ; et bien pire, le désastre d'Abou Dhabi où pour une fois la composante politique du projet avait bien manœuvré mais que la suffisance ou l'inconstance des contractants a ruiné au bénéfice d'une technologie coréenne, tout simplement bien présentée ; nous avons touché du doigt dans chacun de ces dossiers le "détachement" d'élites techniques imbues d'elles-mêmes que rien ni personne ne pourrait critiquer. Jusqu'à ce que les alarmes hurlent ! La Cour des Comptes a signalé les ravages d'une technocratie irresponsable par nature, puisqu'elle travaille sur fonds publics, avec l'argent de tous et de personne, contrairement aux groupements anglo-saxons qui engagent sur ces créneaux des compagnies propriétaires de leurs actifs et de leur avenir, dont l'excitation à conclure tranche avec l'impassibilité narquoise des fonctionnaires français.

    Réacteur EPR™ de Flamanville

    Quels que soient ses diplômes, ses talents personnels et l'expérience acquise en butinant le domaine industriel de l'État, Anne Lauvergeon qui accumule partout les jetons d'administrateurs, reste incapable de mettre aujourd'hui son chéquier sur le tapis vert pour signer un milliard de dollars à la fin du tour de table. On trouve ces entrepreneurs à leur compte outre-atlantique et en Asie. Ils ne vivent pas dans l'entreprise, c'est l'entreprise qui leur sert de cœur et de poumons. Cette véritable "incarnation" de l'entreprise est invincible. Et le concept n'est pas réservé aux Américains. Quand Monsieur Deng débonda l'énergie créatrice de la Chine épuisée par le communisme, il fit confiance à l'impatience des individus à s'établir socialement et à s'enrichir, et pas du tout à la réforme des grands combinats étatiques. La France de Monsieur Hollande n'a pas encore franchi ce seuil d'intelligence, et pour protéger le "triomphe" du secteur public, Areva sera peut-être réprimandée mais pas condamnée. Comme le dit Hans Hermann Hoppe :"l'efficacité est liée à la propriété privée pour que chacun soit incité à faire des efforts" et le même de conclure à la privatisation gagnante de l'État en ramenant un roi propriétaire puisque la monarchie est la forme la plus comptable de l'avenir du pays, pays qui n'est que le sien. En attendant, Areva a récupéré Philippe Varin, le loser de chez Peugeot qu'il a bien fallu poser quelque part puisque les Chinois n'en voulaient pas ! Il préside aujourd'hui le conseil d'administration depuis la mort de Luc Oursel il y a huit jours, éphémère successeur d'Anne Lauvergeon. 

    Pour ceux qui veulent creuser la mine sur ce blogue :
    Résultats du groupe
    Uramin et Areva - mine de rien
    Uramin, la synthèse d'un scandale
    Uramin, omerta chez Areva
    l'ingénieur Balkany dans le schmilblick minier africain
    Areva chez Bellaciao

    (*) Hans-Hermann HOPPE est professeur au Département d'Economie de l'Université du Nevada à Las Vegas, Senior Fellow du Ludwig von Mises Institute et rédacteur en chef adjoint de la Review of Austrian Economics. Il est né le 2 septembre 1949 à Peine, en Allemagne de l'Ouest. Il a fréquenté l'Universität des Saarlandes à Sarrebruck, la Göthe Universität de Francfort s/Main et l'University of Michigan à Ann Arbor pour des études de philosophie, sociologie, histoire et économie. Il a reçu en 1974 son doctorat en philosophie et son diplôme post-doctoral (sociologie et économie) de la Göthe Universität à Francfort. Il a enseigné dans plusieurs universités en Allemagne, de même qu'à Bologne, au Bologna Center for Advanced International Studies de la Johns Hopkins University. 
    Outre de nombreux articles et brochures, il a publié Handeln und Erkennen (Berne, 1976), Kritik der kausalwissenschaftlichen Sozialforschung (Opladen, 1983), Eigentum, Anarchie und Staat (Opladen, 1987), A Theory of Socialism and Capitalism (Dordrecht, 1990) et The Economics and Ethics of Private Property (Auburn, 1993). 
    C'est le dernier venu et le meilleur supporter de la monarchie** parmi les grands esprits parce qu'il fonde sa démonstration sur du concret, un peu à la manière de Maurras. Il présente ses idées sur un site web personnel (clic) et sur les sites des instituts que nous avons cités.

    (**) Royal-Artillerie : De la supériorité économique de la monarchie

    http://royalartillerie.blogspot.fr/

  • La fête à claques

    J'ai eu la perception très nette que l'escroquerie démocratique (clic) était à son comble dans ces élections départementales. Il y a six mois, la strate politique qui doit se gérer maintenant était en voie d'éradication par les mêmes qui en ont fait pendant quinze jours l'apocalypse de la République. Le pouvoir en place, minoritaire comme aucun avant lui ne le fut, a appelé sur ses sectionnaires les voix de tous les républicains afin de sauver les structures partisanes départementalisées qui sont apparus comme autant de briques élémentaires dans la construction d'une "dictature" du modèle courant. Ne voyait-on rien de tout ça il y a six mois ? Cette géométrie départementale est essentielle à la République française et les forces médiatiques déployées sur ces élections le confirment, même si les attributions spécifiques aux départements restent encore dans le vague et si le risque est grand de les voir écrasés entre les régions et les métropoles secondaires. On a fait voter les gens dans un cadre de compétences qui n'existe pas encore. Personne n'avait osé jusqu'alors. 
    Laissant courir les chiens fous d'une réforme institutionnelle qui amuse les désoeuvrés - ce qui est sérieux est ailleurs - l'ancien président du Conseil général de Corrèze a rappelé la meute au pied quand fut remontée de la base la certitude que les départements étaient le substrat politique élémentaire pour se hisser au niveau national, ce que comptait bien faire le Front national. Pas question de laisser revenir les HLPSDNH. Cette incongruité européenne que sont les départements français avait donc son utilité ou son danger ; aussi la mobilisation des états-majors et des fédérations n'en fut que plus complète quand les instituts annoncèrent une Bérézina historique pour les partis en cour.
    Ceux des penseurs honnêtes qui avaient travaillé à la suppression des départements ont pu mesurer le niveau de mépris dans laquelle le Château les a tenus pour donner à la fin de leurs travaux la priorité à ce qu'ils étaient chargés d'anéantir. Mais, répétons-le, le gouvernement du pays lui a échappé et ces jeux démocratiques de proximité ressemblent de plus en plus à un théâtre convenu, un rite gratuit, du cirque à défaut de pain. 
    Qu'a donné ce "Combat de Titans" ? 
    Rien !
    C'est l'échec du Front national et l'allocution extravagante du premier ministre qui m'ont encouragé à écrire ce billet. L'allocution de Manuel Valls hier soir est proprement incroyable, qui, à l'inverse du président droit dans ses bottines, dit avoir entendu le cri des Français et promet pour demain matin l'embellie produite par les mesures gouvernementales courageuses prises depuis trois ans... on rêve ! Le redressement de l'Europe, et de l'Eurozone spécialement, tient à l'effondrement du prix du baril de pétrole, à celui des taux d'intérêts sur les bons d'Etat et à la chute de l'euro en dollar. Ces gens n'y sont pour rien ! Pour rien du tout ! Ce pouvoir est bien celui de Foutriquet.
    M. Valls a été sélectionné par François Normal pour sa gueule et son petit score aux primaires socialistes. Peu dangereux pour l'apparatchik parvenu en douce, c'est un costaud de sous-préfecture qui n'a pas le calibre de la fonction, ce qui multiplie son acrimonie naturelle. On pourrait faire cent lignes qui démontrerait sa "dépersonnalité" en suivant sa quête inlassable de mentors depuis qu'il a choisi ce métier qui n'en est pas un. En plus de nerfs fragiles, il n'a que la colonne vertébrale d'autrui et ça commence terriblement à se voir.
    Personnellement impliqué depuis qu'il a pris en main la campagne électorale au quotidien, en laissant de côté sa fonction de chef du gouvernement, il devrait démissionner après avoir perdu la moitié des départements que tenait son parti. Partout ailleurs en Europe, un pareil désaveu entraînerait la démission du chef de file, sans railleries ni quolibets d'ailleurs. Logique démocratique. Mais ici, non ! Les éditocrates de la presse subventionnée lui trouvent mille excuses.
    Le Front national pour sa part a perdu. Marine Le Pen rate le fameux ancrage. Aucun département n'est conquis et peut-être 50* cantons sur 2000. On peut retourner la question en tout sens, malgré un raz-de-marée en voix, le Front ne perce pas globalement dans une élection concrète. Il reste un parti du mécontentement sans risque, bon pour les européennes.

    (*)= estimations du 29.3.15 à 23h

    Le grand gagnant est Nicolas Sarkozy qui ramasse 70* départements, mais puis-je ajouter qu'à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire, on me dit qu'il le sait. Le programme concret du gouvernement des réformes n'est toujours pas élaboré. On ratisse large ! La victoire d'aujourd'hui n'anticipe pas celle de demain, les enjeux sont chaque fois différents et les adversaires ne sont pas figés, chacun adaptant sa défense ou son attaque à l'autre au moment. La mise en scène de la pièce est donc à chaque fois différente même si les règles de l'art sont immuables : faire prendre au couillon des vessies pour des lanternes.

  • Doubler rapidement le nombre de mosquées en France

    C'est le message de Dalil Boubakeur prononcé samedi au Bourget à l'occasion du rassemblement annuel des musulmans de France afin de permettre aux "7 millions" de musulmans présents en France d'e disposer d'un lieu de culte :

    "Nous avons 2 200 mosquées. Il en faut le double d'ici deux ans (...) Il y a beaucoup de salles de prières, de mosquées inachevées, et il y a beaucoup de mosquées qui ne sont pas construites, je pense qu'il faut le double de mosquées"

    Le président de l'UOIF, Amar Lasfar, présent à ce rassemblement, a déclaré :

    "Il faut que le nombre de mosquées reflète le nombre de musulmans (...)Nous avons le droit de construire des mosquées, (le droit) que les maires ne s'y opposent pas. Il y a de moins en moins de maires qui s'opposent systématiquement à la construction de mosquées"

    De son côté, le FN a immédiatement réagi et marqué son opposition :

    " (...) Cette annonce, aux allures de provocation, apparaît comme particulièrement irresponsable. Qui est Monsieur Boubakeur pour faire une proposition aussi saugrenue et dangereuse ?

    En effet, comme ne cesse de le dénoncer le Front National, le plus grand flou plane aujourd’hui sur l’origine et le financement des projets de mosquées en France. L’aide financière apportée par certains Etats étrangers, tels que l’Arabie-Saoudite ou le Qatar, qui entretiennent des liens avec les pires mouvements djihadistes du monde, constitue une menace certaine pour la sécurité nationale.

    En outre, le développement particulièrement inquiétant des filières djihadistes en France, utilisant les mosquées comme points de recrutements, et la faiblesse des moyens de l’Etat pour les contrôler, obligent à repenser totalement les projets de nouvelles mosquées dans notre pays.

    Pour toutes ces raisons, et parce que l’explosion du communautarisme multiplie les zones de tension sur le territoire, le Front National rappelle sa proposition de gel de tous les projets de mosquées actuellement en cours, dans l’attente d’une enquête nationale sur leur financement.

    Il en va d’une question de sécurité nationale mais aussi de la survie de notre pacte républicain, que l’islamisme et le communautarisme menacent plus que jamais."

    Philippe Carhon http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

  • François Huguenin : « La droite doit devenir force de proposition »

    François Huguenin a publié A l’école de l’Action française (J-C. Lattès, 1998) et Le Conservatisme Impossible (La Table ronde,2006). Il répond à l’enquête sur la droite de Monde et vie.

    Monde et Vie : François Huguenin, pour vous, les notions de droite et de gauche ont-elles encore un sens ?

    François Huguenin : La différence entre la droite et la gauche s’est estompée pour deux raisons essentielles : d’une part, la gauche s’est massivement ralliée - c’est l’analyse de Michéa - à un libéralisme triomphant dans tous les domaines, économique, philosophique ou moral ; d’autre part, sur la question très importante de l’Europe et de la nation, le clivage passe à travers la droite et à travers la gauche. La différence subsiste pourtant, mais elle s’est déplacée, comme le montre les réformes sociétales, présentées par la gauche comme des avancées sociales, ce qui est typique de sa démarche. En effet, la gauche, en France, c’est le camp du « progrès » et de la révolution. Quand elle n’arrive plus à faire la révolution politique, elle s’emploie à réaliser la révolution sociale, et quand elle ne peut plus faire la révolution sociale, faute de moyens pour l’entreprendre, elle passe à la révolution sociale. Elle se situe ainsi dans une perspective de révolution permanente, que la droite cherche à freiner, sans bien y parvenir car elle adhère elle aussi au libéralisme des mœurs et répugne à se prononcer contre ces mesures sociétales. Néanmoins, le fait qu’un mouvement comme la Manif pour tous ait rassemblé un public globalement situé droite, manifestant contre un gouvernement de gauche, montre que le clivage perdure.

    En se cantonnant à un rôle de frein, la droite ne se condamne-t-elle pas à perdre? Cette stratégie évoque le tir à la corde : entre ceux qui cherchent à rester sur une position et ceux qui veulent les en faire bouger, ce sont les seconds qui gagnent.

    C’est le problème de la vie politique depuis la révolution, où le camp du « progrès » s’oppose toujours à celui pas toujours aisément définissable, du conservatisme ou de la réaction, qui se trouve en effet en position d’infériorité dialectique. En France, lors des débats télévisés, par exemple, l’intervenant de gauche part avec une cote de sympathie par rapport à l’intervenant de droite, qui a d’ailleurs souvent du mal à se présenter comme tel. Il n’en va pas de même dans les grandes démocraties comme l’Angleterre, l’Allemagne ou les Etats-Unis. Chez nous s’est développé un mythe du progrès, lié à notre histoire : c’est par la violence révolutionnaire que nous sommes entrés dans la modernité et la démocratie. C’est pourquoi la droite, pour parvenir à rétablir l’équilibre dans le jeu de tir à la corde politique que vous évoquiez, ne doit pas camper sur des positions strictement défensives, mais devenir force de proposition, en particulier sur le champs social que la gauche a aujourd’hui déserté. Il lui revient de s’en emparer en conjuguant un pragmatisme économique et un volontarisme social. Elle pourrait être porteuse d’un projet et de valeurs fortes sur l’éducation, l’école, la famille, en les présentant comme des avancées et pas seulement comme des mesures protectrices et défensives.

    Dans votre livre Le conservatisme impossible, vous expliquez l’impossibilité de résister au progressisme par le divorce entre la pensée libérale et la pensée réactionnaire. S’agit-il aussi d’une exception française ?

    Il me semble qu’en effet la France est le seul pays, parmi les grandes démocraties occidentales, dans lequel il n’existe pas à droite de force capable de faire pendant à la gauche et d’être source de propositions, comparable au républicains, aux conservateurs anglais ou à la CDU allemande. La Révolution française a représenté une telle violence qu’il a été ensuite très difficile de trouver un consensus entre les libéraux qui surfent sur la vague de la libération politique apportée par la Révolution - et à laquelle les autres pays sont parvenus moins brutalement - et es conservateurs ou réactionnaires. Les uns ont essayé de prendre ce qu’il y avait de bon dans cet immense mouvement en essayant de ne pas être emporté par la vague- mais ils n’étaient pas assez fort pour y résister ; les autres, ayant compris qu’ils ne résisteraient pas à la vague, ont tout refusé. Ils ne se sont pas fait emporter comme les premiers, mais se sont mis hors-jeu. L’histoire politique française est catastrophique, au sens propre du mot : on se demande s’il était possible de résister à l’onde de choc révolutionnaire. Peut-être arrivera-t-on à repenser une autre configuration des forces politiques en France le jour où cette onde choc aura fini de produire ses effets. A l’inverse de François Furet, que j’admire beaucoup, je ne pense pas que la Révolution française soit encore terminée, et les lois sociétales que la gauche élabore aujourd’hui le prouvent : il s’agit encore d’une illusion révolutionnaires.

    Selon vous, les notions de liberté et de bien commun se concilient-elles ou s’opposent-elles ?

    Le pape François a dit récemment que les libertés, politique, religieuse ou d’expression, sont obligations. On ne peut d’ailleurs parvenir que librement à la Vérité ultime, qui pour un chrétien est le Christ- et qui nous rend libres. La liberté est donc une valeur fondamentale de notre société, mais elle n’est pas le dernier mot de toute chose : comme le demandait Léo Strauss, « la liberté, pour quoi faire ? » Or, certains ont voulu l’absolutiser, en la coupant des autres valeurs fondamentales comme le bien, ou la vérité. Pour moi qui suis profondément chrétien, se pose la question de la conversion personnelle de chacun - au Christ, mais aussi à une éthique personnelle fondamentale, qui conduit à savoir pourquoi l’on fait de la politique, pourquoi l’on s’engage, à quoi l’on fait servir sa liberté. Ce sont les hommes qui font l’histoire et l’on attend qu’ils aient cette conscience du bien commun.

     

    propos recueillis par Eric Letty monde&vie février 2015

  • [Tribune] Y a-t-il un pilote dans l’avion ? Par Vincent Revel

    Depuis 2003, la France se félicite de posséder ses premiers établissements scolaires musulmans. Le lycée Averroès, à Lille, celui d’Al-Kindi, à Décines, ont été les pionniers en la matière. Aujourd’hui, grâce à l’appui de nombreux élus, il existe plus de 50 collèges, lycées ou projets en fin de réalisation de confession musulmane en France. Dans les années 2000, le recteur Alain Morvan, qui s’occupait du dossier du lycée Al-Kindi, perdit son poste à l’académie de Lyon pour avoir tenté d’empêcher l’ouverture de cet établissement. Il qualifiait « d’intégristes » les porteurs du projet. A cet instant, avec l’accord tacite de l’administration et de nos gouvernants, ces écoles islamiques réussirent à répondre avec clarté à l’interdiction du voile en milieu scolaire.

    Les radicaux musulmans possèdent la faculté de s’adapter et de contourner les obstacles sans aucune difficulté. Le malaise identitaire, qui touche les jeunes musulmans issus de l’immigration, permet aux islamistes de véhiculer aisément leur propagande. Un sondage Ipsos, commandé par le Figaro en 2003, révélait que 64% des Français musulmans de moins de 25 ans souhaitaient la défaite des troupes occidentales en Irak. Il y a déjà dix ans de ça, nos « jeunes » des cités préféraient, suite à la débâcle rapide des forces de Saddam Hussein, remplacées par des groupes islamistes, motivés par le combat contre l’Occident envahisseur, donner leur soutien à des terroristes en lien avec des mouvements déjà capables de décapiter des prisonniers devant des caméras, comme ce fut le cas pour le journaliste américain Daniel Pearl au Pakistan en 2002, mais aussi prêts à prendre en otages une population toute entière dans le seul but de tuer et détruire pour la gloire de Mahomet, plutôt que d’espérer l’essor d’une démocratie. Ce choix, exprimé librement, sans aucune influence, aurait dû nous alarmer, même si nous sommes nombreux à penser que l’intervention américaine en Irak ne fut pas la meilleure idée de la présidence Bush. Nous savons tous que la démocratie, malheureusement, ne s’exporte pas de cette façon. Cette réalité est d’autant plus valable pour un pays à majorité musulmane.

     

    Comment donc croire en la bonne volonté des dirigeants musulmans du CFCM (Conseil Français du Culte Musulman ), lorsque Lhaj Thami Breze, ancien président de l’UOIF et actuel dirigeant d’Al Waqf al islami, association permettant le financement « pour l’épanouissement de l’islam en France », déclare que « le Coran est notre constitution ». Pour le docteur en sciences Ghaleb Bencheikh, les cadres musulmans devraient faire preuve de plus de sérieux et dénonce que dans les cours de récréation les enfants qui ne suivent pas le jeûne du ramadan subissent l’opprobre des jeunes pratiquants, victimes « des zélateurs de bazar donnant dans la crétinisation des esprits. »

    Pour ne pas voir ces problèmes, nous sommes en droit de nous poser la question suivante, à savoir si nos hommes politiques sont assez compétents pour diriger la France en cette période délicate de notre Histoire ? Suffit-il de faire de la communication avec des pains au chocolat, comme nous l’avons vu avec Jean-François Copé, ou faut-il faire, pour une fois, preuve de courage, en nommant explicitement les risques que nous encourons ? Pouvons-nous compter sur le général Hollande, le soldat Valls et ses apparatchiks seulement préoccupés à chasser le Front National ? L’UMP, du soi-disant nouveau Sarkozy, est-elle mieux armée pour s’attaquer à ce problème ? Nous sommes de plus en plus nombreux à penser que non. Sans mauvais jeu de mot ayant un quelconque rapport avec la triste actualité, nous pouvons légitimement nous demander s’il y a encore un pilote dans l’avion France ? A la suite de Gérald Pichon, auteur de l’ouvrage Sale blanc !, je reconnais que « la tâche est immense, notre marge de manœuvre bien mince et les Européens en quasi-mort clinique. » Il est plus qu’urgent que nous sortions de cet état de « dormition » dans lequel nous sommes plongés. Comme le dit Dominique Venner, dans Le Cœur rebelle« les lieux de bonheur et de paix ne peuvent éclore et durer si ne se dresse en eux la détermination virile de les défendre. »

    Vincent Revel.

    http://fr.novopress.info/185223/tribune-y-t-il-pilote-lavion-vincent-revel/#more-185223