J’étais invité samedi 23 janvier à prendre la parole lors de la cérémonie d’hommage au roi Louis XVI organisée par l’Action Française au cœur de Paris, et j’ai ensuite suivi le cortège de fidèles monarchistes ralliant la chapelle expiatoire, bâtie sur l’emplacement du cimetière qui, au soir du 21 janvier 1793, avait recueilli les restes du monarque supplicié.
Voici le texte de ma courte intervention :
Déjà, il y avait eu ce procès unique et inique, cette condamnation à mort, ces adieux de la veille à ses proches, sa famille, son serviteur, ses geôliers…
Et puis, il y a ce parcours qui n’en finit pas, dans les rues d’un Paris brumeux et désert de peuple quand se dressent, tout au long de cette marche au martyre, les baïonnettes et les piques de la froide République…
Il y a ces marches à gravir, ces poignets que l’on offre aux liens, cette chemise que l’on délasse, ce cou que l’on dégage…
Qui est cet homme que l’on supplicie ?
Il est Capet pour les républicains amnésiques et hystériques, mais il est aussi Valois et Bourbon pour les hommes de longue mémoire ; il est Louis, et il est, par toutes les fibres de son corps, par tous les vaisseaux de son cœur, par tous les liens de sentiment, il est la France, il est Louis, roi de France, roi prisonnier, bientôt martyr ; il est ce lien vertical du temps, il est ce lien horizontal de l’espace français…
Il est aussi cet élan vers la foule de bonnets rouges sang, mais qui l’entendra ?
« Je meurs innocent des crimes dont on m’accuse ! Je prie Dieu pour que le sang que vous allez répandre ne retombe pas sur la France ! »
Il est le roi, il est encore le roi malgré la République qui le tue.
La lame, froide ; l’éclair, la tête qui tombe, la tête que l’on ramasse, que l’on brandit quand les hommes hurlent, d’un cri de haine, « Vive la République ! ».
Le roi est mort… Mais il n’y a plus de chancelier au plumet noir pour l’annoncer au balcon de Versailles, juste des corbeaux désolés qui volent au-dessus de la guillotine et du sang versé.
Le roi est mort… et ce sont les canons qui tonnent ; le roi, en ce sinistre jour de janvier, est mort !
Là-bas, dans un cachot sombre et humide, il est une famille qui se serre autour de la mère, il est des larmes qui coulent, des sanglots qui résonnent… Oui, le roi est bien mort… Et cette tête qui roule alors n’en finit pas de rouler tout au long de notre mémoire, de notre histoire…
Et pourtant, rien n’est fini !
Ici, dans ce cachot, la mère prend son enfant dans ses bras, le dépose sur le sol humide et verdâtre, puis, lentement, respectueusement, elle baisse la tête, elle s’incline devant l’enfant de sept ans, ce petit Louis, ce nouveau Louis…
Là-bas, le roi est mort, mais ici, entre les murs de la prison, le roi vit ; le roi est vivant, vive le roi, vive l’enfant-roi ! Vive Louis XVII, roi de France et de Navarre !
Il est une chose que jamais la République ne pourra comprendre, et que jamais, au cœur des hommes fidèles, elle ne pourra dénier : en France, le roi ne meurt jamais !
Mort en père, il renaît en fils… ou en frère…
Oui, quand le roi est mort, il est toujours vivant, à travers ses successeurs. Le roi est mort, vive le roi !
Bien sûr, le jeune Louis, XVIIème du nom, disparaît aux yeux des hommes, enfermé dans une prison dont jamais il ne sortira. Mais il est bien le roi, ce roi dont le nom brille sur les drapeaux de la Vendée catholique et royale, sur les poitrines des chouans de Normandie, du Maine et de Bretagne, sur les billets de la monnaie clandestine…
Ce roi n’a pas dix ans, mais la République en a une grande peur, et elle le tuera. Mais elle ne tuera pas le roi, l’idée, le nom, la réalité, la mémoire du roi…
Car aujourd’hui, en cette soirée humide, nous sommes là, et vous êtes là, fidèles, toujours fidèles, alors même que la République se termine en état d’urgence à défaut d’être un Etat tout court…
Alors, oui, le roi est mort, dix fois, vingt fois, quarante fois, mais « Ô Mort, où est ta victoire ? » Car toujours, nous chantons, nous clamons, cri de joie et d’espérance : « Vive le Roi ! ».
Jean-Philippe Chauvin