Par Natacha Polony
Obstruction contre passage en force. On peut jouer longtemps à savoir qui est coupable de poignarder encore un peu plus violemment la démocratie représentative. Du début à la n, le projet de réforme des retraites aura constitué un naufrage politique. D’une idée plébiscitée par une majorité de Français, l’obstination technocratique à faire travailler plus longtemps des citoyens soupçonnés de paresse congénitale aura fait une occasion de plus de construire l’image d’un pouvoir autoritaire et sourd. En face, la guerre de tranchées des députés insoumis à coups d’amendements prétextes aura davantage encore détruit ce qui reste de débat à l’Assemblée nationale. Et ces mots consternants du corapporteur de la loi, le député MoDem Nicolas Turquois, lançant à l’opposition sans même se rendre compte de l’énormité de ses propos : « Certains ont dit “la République, c’est moi”, eh bien, la République, c’est nous, et vous, vous n’êtes rien. » Irresponsabilité, mépris des institutions et réduction de la politique à une guerre de religion. On peut jouer longtemps à tout cela. Jusqu’à ce que les citoyens ne croient définitivement plus en la République comme moyen de tendre vers le bien commun.