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économie et finance - Page 576

  • Loi Macron : un catalogue de mesurettes et de vices cachés !

    L’observation de ce texte nous confirme que volonté de bien faire ne rime pas forcément avec audace.

    En politique, le pragmatisme est d’un usage peu courant, mais souvent avantageux. Il suppose clairvoyance, aplomb et bonne fortune. François Hollande n’est ni réaliste ni audacieux et il ne sait pas que « la chance sourit à ceux qui n’ont pas compté sur elle ». Il est en revanche opportuniste et pusillanime. De promesses répétées non tenues en fautes non assumées, et de reniements en contradictions, il n’a cessé de berner, spolier et appauvrir la France et les Français, sans doute à « l’insu de son plein gré ».

    Alors, face à ses déboires devenus notre accablement, il a pris du recul (lui pense « de la hauteur ») et laissé en première ligne des ambitieux prétendument « véristes » au sens politique. Lui s’est donné l’habit du chef de guerre qui plaît aux Français…

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  • Le rapprochement Russie-Chine, erreur stratégique des USA

    Washington commet une erreur stratégique de taille en durcissant le ton à l'égard de Moscou, car ce comportement favorise le rapprochement entre la Russie et la Chine.

    Le rapprochement entre Pékin et Moscou résulte de la politique pratiquée par l'Occident à l'égard de la Russie, estime le quotidien en ligne The Conversation.

    Selon le Fonds monétaire international (FMI), l'économie chinoise surpasse actuellement celle des Etats-Unis si l'on tient compte de la parité du pouvoir d'achat. La Chine, qui cherche à dominer dans sa région, multiplie les efforts en vue d'augmenter son potentiel militaire. Dans ce domaine, Moscou lui apporte son concours. Si Washington et Bruxelles ne modifient pas leur comportement hostile envers la Russie, la Chine sera prochainement en mesure de tenir tête aux Etats-Unis.

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  • Ukraine : Analyse économique de la crise – Entretien avec Volodymyr Vakhitov

    Pour l’économiste ukrainien V. Vakhitov, les analyses de la crise politique ukrainienne exagèrent le poids de la tutelle russe. Le pays n’est pas aussi divisé qu’on l’affirme, partagé entre l’Ouest pro-européen et l’Est pro-russe. La révolte contre les autorités aujourd’hui est une protestation de grande ampleur contre un régime corrompu, qui confisque les richesses.

    La vie des idées : Les événements actuels en Ukraine, et tout particulièrement à Kiev, donnent l’impression d’un pays profondément divisé, au niveau politique, économique, social, géographique, et même culturel. À quel point cette image correspond-elle à la réalité ?

    V. Vakhitov : Je suis d’accord sur le fait qu’il y a une division économique et politique. Si vous analysez les élections de ces vingt dernières années, vous verrez que le pays se divise en deux, plus ou moins de part et d’autre du fleuve Dniepr : pro-communistes contre « nationalistes », Iouchtchenko contre Ianoukovitch, le Parti des régions contre Patrie, Timochenko contre Ianoukovitch, etc. Tout cela peut donner l’impression d’une division politique.

    Toutefois, si vous prenez une carte de la Rzeczpospolita [1] au XVIIIe siècle et que vous la superposez à une carte de l’Ukraine contemporaine, vous verrez que cette frontière imaginaire suit à peu près le tracé de la frontière Est de la Rzeczpospolita (exception faite de la Région des Trans-Carpates et de la Crimée). Cependant, cette division n’est ni géographique, ni économique, ni sociale. C’est plutôt une division mentale, entre les zones d’influence ’pro-occidentale’ et ‘pro-russe’.

     

    L’Est de l’Ukraine a toujours été plus riche en matières premières, surtout en charbon et en minerais ; c’est pourquoi l’Empire russe, puis ensuite l’URSS ont beaucoup investi dans son développement. L’Est est devenu plus industrialisé, plus urbanisé, plus densément peuplé, et la majorité de sa population a été employée dans de grosses usines liées aux industries lourdes. Il faut se rappeler que la doctrine industrielle soviétique se basait beaucoup sur les économies d’échelle et sur des liens étroits entre différents pays. Dans de nombreuses villes en Ukraine de l’Est, une majorité de la population pouvait être employée par un seul producteur géant dans la région. Après l’effondrement de l’URSS et la désintégration des liens économiques avec les ex-républiques soviétiques et les pays du Bloc soviétique, la production de nombreuses entreprises est devenue obsolète. En même temps, le développement d’institutions clés, comme la protection des droits de propriété, s’est déroulé à un rythme bien plus lent que celui de la privatisation et de la libéralisation des prix. De ce fait, il est devenu possible de mettre en place des plans de privatisation illégaux, et du coup de redistribuer la richesse entre les mains des gens les plus téméraires, audacieux et rusés — qui, par coïncidence, se trouvaient être des cadres du Parti communiste (‘cadres rouges’), du Komsomol (jeunes communistes) et des chefs de gangs criminels.

    À la fin des années 1990, les propriétaires d’énormes usines locales les ont vendues pour des bouchées de pain, utilisées comme entrepôts, ou perdues dans des accords de fusion et d’acquisition hostiles au profit de compétiteurs issus d’autres pays (principalement de Russie), ce qui a mené à leur fermeture définitive. Au cours de cette période, le nombre d’emplois à plein temps a été réduit presque de moitié.

    Le résultat est un problème profond de chômage et de salaires impayés qui frappent la totalité de la région, la dissolution du capital humain et la création d’une dépendance envers des entreprises qui sont souvent les seuls employeurs dans une région donnée. Les revenus ont chuté, tandis que la tendance à défendre les droits des ouvriers a été inhibée par des propriétaires d’usine qui contrôlaient les ouvriers en ne leur payant qu’un salaire de subsistance. Ces mêmes propriétaires contrôlant tous les médias locaux, le lavage de cerveau n’a pas cessé.

    Des formules comme ‘la fierté de l’ouvrier’, ‘la stabilité’, ‘les liens avec nos amis russes’, ‘le cœur industriel de l’Ukraine’, n’ont cessé de fleurir, avec pour conséquence la genèse d’un type particulier de population : pauvre, dépendante de l’employeur local, peu éduquée, comprenant de nombreuses personnes avec un passé criminel, mais toutefois très loyale à ses dirigeants locaux, quelles que soient leurs caractéristiques morales, et refusant (parfois agressivement) tout point de vue alternatif.

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  • La NSA et le FBI en guerre, contre les téléphones inviolables

    Lundi, lors d’un colloque d’experts en cybersécurité réunis à Washington, le directeur de la NSA, l’amiral Mike Rogers a réitéré l’alerte lancée par son homologue du FBI en octobre. Il a martelé qu’il fallait à tout prix éviter la commercialisation de téléphones inviolables par les grands groupes comme Apple ou Google. Pour appuyer son argument, il a invoqué les risques criminels et terroristes qui, selon lui, seraient décuplés par le renforcement de la sécurité personnelle des téléphones.

    De quels enjeux parle‑t‑on exactement ?

    Il s’agit ici de la commercialisation de téléphones portables cryptés auxquels seuls les propriétaires pourraient avoir accès. Toutes les données personnelles, courriels, textos, photos, seraient ainsi contrôlées uniquement par leurs propriétaires directs. Ces questions préoccupent les usagers qui aujourd’hui sont toujours à la recherche d’une solution de cryptage plus efficace pour leurs données. Ces préoccupations sont une réponse directe aux scandales qui ont secoué les Etats‑Unis et le monde entier après les révélations d’Edward Snowden, ancien analyste de la NSA, qui a dévoilé l’ampleur du filet de surveillance et des techniques de l’agence gouvernementale étatsunienne. Des révélations qui se poursuivent, puisque vendredi dernier le journaliste Glenn Greenwald a révélé que la NSA avait monté un programme permettant de voler les clefs de cryptage des cartes SIM produites par les grands de cette industrie. Malgré cette dernière révélation, le patron de la NSA a donc appelé à empêcher le cryptage des téléphones et a exhorté les fabricants à prévoir une « porte dérobée » dans leurs programmes pour des questions « De sécurité nationale ».

    Ce problème dépasse le cadre de la téléphonie

     

    En effet, la régulation et la surveillance gouvernementale étatsunienne dépassent de loin le secteur de la téléphonie pour toucher plus largement tout le secteur informatique. La semaine dernière, une entreprise russe de sécurité informatique nommée Kaspersky a publié un rapport sur les virus et logiciels espions employés par la NSA. Ce qu’ils ont découvert dépasse l’entendement. Des virus, des outils de piratage, des logiciels espions et autres logiciels malveillants ont été développés par les agences gouvernementales étatsuniennes et servent à surveiller illégalement de nombreuses cibles dans le monde, dont des grandes entreprises dans le domaine des télécoms et de l’aérospatiale ou encore des gouvernements. On peut donc comprendre la réticence de la NSA quant à l’augmentation de la sécurité informatique, et cette opposition farouche devrait servir de piqûre de rappel pour tous ceux qui utilisent régulièrement des outils informatiques connectés.

    http://fr.novopress.info/182902/nsa-fbi-en-guerre-contre-les-telephones-inviolables/#more-182902

  • BFM Story : Agriculture: la France peut-elle faire mieux sans l'Europe ? (23 février 2015)

  • Domenico Losurdo : « Contre-histoire du libéralisme »

    Domenico Losurdo signe un ouvrage accablant sur les liens entre le libéralisme et les théories de la suprématie occidentale (esclavagisme, racisme, massacres de masse) portées par des penseurs ou acteurs politiques et économiques de premier plan, entre le XVIIe et le XIXe siècles.

     

    «La race européenne a reçu du ciel ou a acquis par ses efforts une si incontestable supériorité sur toutes les autres races qui composent la grande famille humaine, que l’homme placé chez nous, par ses vices et son ignorance, au dernier échelon de l’échelle sociale est encore le premier chez les sauvages».

    L’auteur des lignes mises en exergue ci-dessus n’est pas un marginal et sanguinaire partisan de la colonisation occidentale; c’est le doux et libéral A. de Tocqueville, auteur classique, inscrit aux programmes scolaires de certaines filières au lycée ou à l’université –pour des idées toutes autres que celles étudiées par Domenico Losurdo dans le présent ouvrage.

    Le projet de l’auteur italien, qui veut «sommairement reconstituer les premiers siècles de l’histoire du libéralisme et des rapports sociopolitiques concrets établis en son nom», aboutit à un ouvrage proprement accablant pour un ensemble d’acteurs intellectuels, politiques et économiques des XVIIe–XIXe siècles, empêtrés dans une sorte de paradoxe tenace.

    Le premier et principal point commun entre ces acteurs issus de champs divers est leur appartenance revendiquée au courant libéral –de Locke à Tocqueville en passant par Grotius, Montesquieu, divers responsables politiques anglais, américains ou français, hommes d’affaires, propriétaires ou certains militaires.

    Paradoxes inhérents ou maladies infantiles du libéralisme?

    La première question qui se pose est de savoir ce que signifie libéralisme. Losurdo synthétise les réponses courantes: «Le libéralisme est une tradition de pensée qui place la liberté de l’individu au centre de ses préoccupations».

    Tel un inspecteur Columbo des idéologies, Losurdo demande alors: comment se fait-il que des penseurs et acteurs se réclamant de cette tradition intellectuelle, et cherchant donc à défendre les libertés individuelles, s’accommodent si bien du «processus d’expropriation systématique et des pratiques génocidaires» qui accompagnent la colonisation occidentale en Irlande, en Amérique, en Afrique et en Asie?

    Comment se fait-il, même, que, dès le XVIIe siècle, l’esclavagisme, les théories raciales et le colonialisme belliqueux soient entérinés, voire légitimés par divers libéraux (Locke, Grotius, parmi les plus fameux)?

    Losurdo insiste sur le fait qu’il serait erroné de dédouaner les esclavagistes et les colonialistes en considérant que ce point de vue était dans l’air du temps, dominant à l’époque et qu’ils n’ont fait que se conformer à des modes de pensée différents de ceux qui sont les nôtres actuellement –c’est à dire qu’il ne faut pas faire preuve d’«historicisme»: au moins depuis Montaigne, Las Casas ou Jean Bodin, les opposants à l’esclavagisme et au colonialisme ne manquent pas!

    Ceci sans compter les autorités d’Ancien Régime (monarchie, Église, État central) qui s’opposent à ces pratiques déshumanisantes pour des raisons qu’on peut dire stratégiques.

    Car c’est bien sur les intérêts et les stratégies pratiques des acteurs en présence que Losurdo attire l’attention, dans la perspective de mieux saisir le libéralisme et ses incarnations concrètes. Il fait observer qu’au XVIIe siècle, après la révolution anglaise qui met fin à l’absolutisme, la conquête de l’Amérique et la traite esclavagiste prennent un essor inédit.

    Au XVIIIe siècle, après l’indépendance des États-Unis, l’esclavage des Noirs et le génocide des Amérindiens s’intensifient jusqu’à former un ensemble d’États, dans le sud du pays, fondés sur le principe de la discrimination raciale.

    En somme, «l’auto-gouvernement de la société civile triomphe sous le drapeau de la liberté et de la lutte contre le despotisme, alors qu’il entraîne le développement de l’esclavage-marchandise sur une base raciale et creuse un abîme insurmontable et sans précédent entre les Blancs et les peuples de couleur».

    En effet, dans sa lutte contre l’absolutisme étatique, le «parti libéral» exclut la possibilité d’une servitude ou d’un esclavage des Blancs, en métropole, mais ferme les yeux, rationalise -Montesquieu tente d’expliquer la déchéance de certains peuples dans l’esclavage par le «climat» de leurs terres d’origine, qui les rend plus faibles que les Européens industrieux- voire légitime l’esclavage et l’oppression des peuples colonisés, notamment en Amérique.

    Concrètement, les aristocrates et colons Blancs sont les premiers à réclamer une libre jouissance de leurs propriétés (terres, esclaves et serviteurs) contre l’ingérence de l’État central métropolitain.

    De ce point de vue, selon Losurdo, le libéralisme comme courant de pensée ne peut se comprendre sans prêter à attention à son efficacité pratique, étroitement corrélée aux intérêts matériels de ceux qui s’en revendiquent: aristocrates et politiciens européens, responsables politiques et colons propriétaires américains; pour tous, la lutte contre l’absolutisme n’outrepasse pas –voire légitime– la défense de la propriété privée des terres et du «bétail humain». Losurdo parle à ce titre d’un «accouchement gémellaire», c’est-à-dire simultané en ce qu’ils seraient jumeaux, du libéralisme et de «l’esclavage racial», aux XVIIe–XVIIIe siècles.

    La «Herrenvolk democracy»

    L’auteur n’arrête pas son analyse aux oppressions coloniales et montre qu’en métropole également, à la même période, le lumpenprolétariat est durement réprimé par la législation au Royaume-Uni et aux États-Unis (qu’on pense aux workhouses et aux mesures policières prises contre les vagabonds et chômeurs), de même qu’une grande partie des classes populaires est encadrée dans sa vie publique (restrictions du droit de vote, censures de la presse), sa vie privée (mesures eugéniques et contrôle de mœurs), le monde du travail (interdiction des coalitions ouvrières et rejet des entraves à la concurrence sur le «marché» du travail)…

    Tout comme les esclaves et les peuples colonisés, les groupes sociaux métropolitains économiquement défavorisés sont jugés incapables d’être libres, et situés aux confins de la «civilisation», au nom de laquelle ils doivent se «sacrifier», comme le soulignent, avec plus ou moins d’enthousiasme, la plupart des libéraux.

    Losurdo signale qu’aux peuples colonisés, en Irlande, en Asie, en Afrique, en Amérique, aux lumpenprolétaires réprimés, aux prolétaires des métropoles, à une grande partie des femmes et des enfants, on peut aussi ajouter à la liste de ceux qui sont opprimés par le libéralisme au pouvoir les abolitionnistes anglo-saxons, les «radicaux» et les socialistes au XIXe siècle.

    L’auteur italien fait observer que ceux qui souffrent des «clauses d’exclusion» de la liberté revendiquée par les libéraux sont à ce point nombreux qu’on peut décemment qualifier le régime libéral (qui s’applique au Royaume-Uni et aux États-Unis en tête) de «Herrenvolk democracy», c’est-à-dire de «démocratie qui ne vaut que pour le ‘peuple des seigneurs’», comme le proposent des historiens contemporains.

    A partir de la fin du XVIIIe siècle, l’esclavage est de plus en plus contesté, notamment en France, où se constitue le radicalisme, né de la scission d’avec le libéralisme, dans la lutte contre le despotisme, et à l’issue de la révolte de Saint-Domingue (actuel Haïti) et de la déception apportée par la révolution américaine qui n’abolit pas l’esclavage, les discriminations et les exactions coloniales.

    Le radicalisme en France se distingue à la fois du socialisme, et surtout, du libéralisme dominant qui continue, au XIXe siècle, à défendre l’esclavage aux États-Unis –à l’instar de Tocqueville qui considère que l’abolition déstabiliserait gravement les puissances coloniales et serait une atteinte irrémédiable à la propriété privée des colons et des groupes métropolitains privilégiés.

    Un «darwinisme social ante litteram»

    Tocqueville est encore de ceux qui, progressivement, au XIXe siècle, contribuent à faire émerger des paradigmes de la naturalisation voire de la divinisation de l’ordre social, qui rendent les hiérarchies sociales et ethniques intangibles et éternelles, mais, surtout, qui fustigent les atteintes à ces hiérarchies comme blasphématoires et contre-nature.

    Avec Herbert Spencer, pour ne citer que lui, le libéralisme s’attaque férocement à la redistribution des richesses et à l’assistance étatique aux démunis, malgré leur forme embryonnaire à l’époque, et légitime la domination sociale des plus forts, notamment la colonisation, justifiée par analogie avec les mythes bibliques de la quête de la terre promise par les enfants d’Israël.

    Comme J. S. Mill, les libéraux commencent à théoriser une hiérarchie explicitement raciale au sommet de laquelle se trouvent les Blancs, de par leur «mission civilisatrice». Tocqueville propose ainsi d’appliquer le modèle de la colonisation américaine à l’Algérie: il théorise la «guerre juste» faite aux «sauvages» voués à la destruction, qui passe par des exactions à l’encontre des civils, et l’instauration d’un apartheid garantissant la suprématie blanche.

    C’est dans cet environnement intellectuel qu’émergent les thèses raciales, habituellement présentées comme sulfureuses, de Gobineau, qui ne s’avère en réalité, à la lecture du livre de Domenico Losurdo, qu’un libéral parmi d’autres conceptualisant –de façon moins nuancée il est vrai– la suprématie de la «race aryenne». Apparaissent également vers le milieu du XIXe siècle les premières théories selon lesquelles les Juifs et les intellectuels progressistes comploteraient pour agiter les masses populaires contre la propriété privée et contre la colonisation.

    Contre ces menaces faites à la propriété et la liberté individuelle des groupes sociaux aisés, les libéraux n’hésitent pas à préconiser une «dictature temporaire modernisatrice», y compris si elle passe par des coups d’État, que lesdits libéraux appuient chaleureusement, depuis le 18 brumaire de Bonaparte jusqu’à la marche de Rome de Mussolini en 1922. Dans les colonies, face aux ingérences de l’État central, les libéraux menacent encore de sécession et de guerre civile, comme le montre avec éclat la Guerre de Sécession américaine.

    De multiples traits et mises en pratique du «darwinisme social» porté par le libéralisme sont de véritables prémisses aux fascismes du XXe siècle: de nombreux libéraux préconisent une «solution finale», une euthanasie générale des races inférieures éprouvées par le colonialisme et inadaptées à la civilisation; les déportations de populations colonisées, les génocides et l’enfermement concentrationnaire empêchent de considérer «les catastrophes du XXe siècle» comme des éruptions totalement inattendues et imprévisibles.

    Au terme de sa «contre-histoire du libéralisme», Losurdo rappelle à quel point le cheminement vers des formes plus démocratiques a été long, douloureux, et largement dû aux luttes des «exclus» pour leur reconnaissance. Il exhorte à se détacher de toute forme d’«hagiographie» délibérée ou pas, pour, enfin, se pencher sur l’histoire réelle d’un courant qui a encore une grande influence sur notre époque.

    Losurdo fait preuve d’une érudition impressionnante et mobilise une importante littérature anglo-saxonne a priori peu courante pour le lecteur français, ainsi que de nombreux textes d’époque. Il faut également souligner le projet salutaire de remettre à la lumière les cendres et les cadavres sur lesquels la puissance occidentale s’est bâtie, largement au nom d’un système de pensée qui cherchait à promouvoir la liberté individuelle.

    Ainsi, l’ouvrage amène de façon fructueuse le lecteur à questionner une diversité de phénomènes actuels, qu’on aurait tort de croire totalement inédits dans leur forme et leurs implications.

    Slate

    http://fortune.fdesouche.com/374277-domenico-losurdo-contre-histoire-du-liberalisme

  • Financement des mosquées : l’illégalité au service du clientélisme

     Le nombre des édifications de mosquées en France ne fait que croître et embellir. On ne les compte plus. Une liste non exhaustive donnée par le ministère de l’Intérieur relève, en 2014, 2368 lieux de culte musulman ; parmi ces derniers, se trouvent environ 90 mosquées proprement dites, en exercice si l’on peut dire, et 350 projets de construction. La toute récente inauguration de la mosquée de Sablé / Sarthe, sous-préfecture de la Sarthe, dont François Fillon a été le maire et sise à deux pas de la célèbre abbaye bénédictine de Solesmes, cause quelques tourments localement. 

    L’inauguration par Madame le Préfet de la Sarthe, en personne, ainsi que la présence du sous-préfet et celle du maire ont provoqué de nombreuses réactions, y compris de la part de la Libre Pensée qui considère qu’elles constituent une atteinte au sacro-saint principe de la laïcité.

    Dans le même ordre d’idée, Julius Muzart, contributeur de Polémia, vient de nous signaler un article publié par la Gazette des Communes : un article édifiant. La Gazette des communes y explique avec complaisance comment les maires violent la loi pour financer des mosquées, et, entre autres choses, s’acheter ainsi des clientèles électorales. Nous le reproduisons et le faisons suivre des commentaires pertinents de notre contributeur.
    Polémia

    Financement des mosquées : le numéro d’équilibriste des maires

    Au sein du PS comme à l’UMP, des voix s’élèvent pour demander la révision du texte de 1905 encadrant la séparation de l’Eglise et de l’État. L’enjeu : que les collectivités puissent avoir la possibilité de financer, entre autres, les mosquées. Sur le terrain, des maires tentent de répondre au besoin des citoyens musulmans quitte à jongler, parfois, avec la loi.

    A Sarcelles, lors des grandes fêtes du calendrier musulman, comme la fin du Ramadan, l’affluence est telle que certains habitants doivent se recueillir à l’extérieur des deux salles de prières déjà pleines à craquer. Face à cette situation, la mairie met régulièrement à la disposition des fidèles des gymnases afin qu’ils puissent prier dans des conditions acceptables.

    Pour en finir avec ce système D, le député-maire PS de cette commune du Val-d’Oise, François Pupponi a cédé, en 2011, un terrain aux associations musulmanes de Sarcelles. Le but : ériger une grande mosquée permettant d’accueillir dignement les citoyens musulmans. Le bâtiment, encore en cours de financement, pourra recevoir environ 2 500 fidèles.

    Cadre juridique flou

    La loi de 1905 interdisant aux collectivités le financement d’un lieu de culte, l’élu a dû ruser et mettre en place un bail emphytéotique pour faire naitre le projet. Ce bail immobilier de longue durée prévoit un loyer modique, qui se résume souvent à un euro symbolique pour l’association qui gère le lieu de culte. « Juridiquement nous sommes dans le flou, déplore François Pupponi. les maires mettent en place ce genre de bail pour répondre à la demande des musulmans mais nous le faisons dans un cadre qui n’est pas sécurisé.  Peut-être qu’un jour la jurisprudence ne nous y autorisera plus. »

    Un dilemme pour les édiles, qui doivent d’un côté assurer à leurs concitoyens la liberté de culte et de l’autre, respecter l’interdiction de financer les structures qui l’abrite. Pragmatiques, ceux qui souhaitent donner un coup de pouce à la construction de mosquées dans leurs villes subventionnent aussi les activités culturelles des associations religieuses.

    Propositions de loi

    Un numéro d’équilibriste avec lequel certains élus souhaiteraient rompre comme le révèle un récent sondage TNS Sofres commandé par le Sénat, en janvier. Sur 3 000 maires interrogés, 29% sont favorables à l’autorisation d’un cofinancement collectivités-organisations religieuses pour la construction de nouveaux lieux de culte. Par ailleurs, 8 % d’entre eux jugent que le nombre de lieux de cultes musulmans convenables est insuffisant.

    Certains édiles, comme François Grosdidier (UMP) vont même plus loin et prônent une refonte d’un des textes fondateurs de notre République. « Aujourd’hui, la loi de 1905 est obsolète, il faut absolument adapter ses modalités », tempête ce sénateur et maire de Moselle auteur de deux propositions de loi sur le sujet.

    Tour de passe-passe

    Pourtant dans sa commune, à Woippy, la mosquée s’est construite sans trop de difficultés. Exception régionale oblige, le concordat d’Alsace-Moselle de 1801 signé par Napoléon, autorise les collectivités à financer les lieux de cultes catholiques, luthériens, calvinistes et juifs. Le flou juridique qui entoure le sort de l’Islam a permis à ce maire UMP de financer, en 2008, la mosquée avec des fonds publics. Ailleurs son opération aurait été illégale. « La République est schizophrène, elle demande aux musulmans de construire un Islam de France en accord avec ses principes mais ne leur donne pas les moyens de le faire. Je ne voulais pas que la mosquée de Woippy soit sponsorisée par les pays du golfe. »

    Opiniâtre, François Grosdidier compte redéposer un texte qui permettrait aux communes de financer directement les lieux de culte quand cela répond au besoin de la population et à une carence de l’offre privée.

    L’élu souhaite également défendre l’entrée de l’Islam dans le concordat d’Alsace-Moselle, « ce qui permettrait par ailleurs, la création d’une chaire théologique, véritable source intellectuelle structurante pour la religion musulmane. »

    Vente de terrains

    C’est ce rôle « de facilitateur » que Christian Dupessey, maire d’Annemasse en Haute-Savoie, a souhaité tenir quand il a vendu un terrain municipal pour la future mosquée : « Quand on prône le « vivre ensemble » à la française, il faut s’assurer que chacun trouve sa place dans la société. » Quand à l’argument de ses adversaires politiques qui le taxent d’électoralisme, il le balaye : « Je joue mon rôle d’intégrateur, j’essaye simplement de faire une bonne gestion, rétorque l’élu socialiste. » Ici, la mairie n’investira pas d’argent public dans le bâtiment et s’en félicite : « La communauté musulmane d’Annemasse est très attachée à construire elle-même la mosquée grâce aux dons de fidèles. »

    Réinventer la laïcité : pour Stéphane Gatignon, maire EELV de Sevran, l’enjeu est de taille. Dans sa ville, 73 nationalités se côtoient. Une richesse mais aussi un défi pour ce maire qui constate un manque criant de lieux de prières pour les musulmans, hindouistes ou évangélistes sevranais.

    Si l’édile a bien vendu un terrain pour la construction d’une future mosquée, il a refusé l’option du bail emphytéotique et a fait payer à l’association le prix fixé par France Domaine. « Pas d’entourloupes, lâche-t-il, je voulais être transparent. » Sa position est claire : il faut que les mosquées se construisent et que les maires puissent le faire dans de bonnes conditions.

    Contre le repli communautaire

    Il dénonce des décennies de blocage de la part des pouvoirs publics, notamment en banlieue, sur la question des mosquées. « Quand vous devez prier dans une cave ou dehors car il n’y a pas de structures adaptées, vous vous sentez obligatoirement stigmatisé, mis de côté » dénonce-t-il. S’il n’est pas opposé à un toilettage de la loi de 1905, Stéphane Gatignon prône avant tout, l’ouverture d’un débat national « il faut discuter pour retrouver un vrai contrat social. On ne peut plus continuer comme ça. » Depuis quelques années, il observe d’autres communes voisines de Seine-Saint-Denis, confrontées à la radicalisation de certains musulmans après que les élus se soient opposés à tout projet de la communauté. « Si on se retrouve avec ces situations extrêmes, c’est avant tout parce que les gouvernants ont rompu avec le terrain. »

    Alors que le gouvernement a fait de la lutte contre la radicalisation l’un de ses fers de lance après les attentats de janvier, l’aide des collectivités à la construction de mosquée serait-elle l’antidote à la marginalisation de certains croyants ?

    Pour Alain Périès, premier adjoint du maire socialiste de Pantin Bertrand Kern, cela aurait l’avantage de couper l’herbe sous le pied des plus extrêmes. « Lorsque la mairie donne un coup de pouce aux associations musulmanes, l’argument qui consiste à dire il y a deux poids deux mesures ne tient plus. Je ne suis pas naïf, je sais qu’il y a toujours des fanatiques pour savonner la planche ».

    « Notre position, précise Alain Périès, c’est de considérer que la loi de 1905 ne doit pas être modifiée. Elle est en effet l’expression du principe républicain de laïcité. Un tel principe fondateur ne peut, d’une façon ou d’une autre, être amodié, sauf à en amoindrir la force ».

    Dans cette ville de Seine-Saint-Denis, si dix ans ont été nécessaires pour que la construction de la mosquée soit lancée, le premier adjoint l’affirme : « la majorité de la communauté musulmane se sent respectée. »

    Emeline Le Naour, 13/02/2015

    Source : La Gazette des communes

    http://www.polemia.com/financement-des-mosquees-lillegalite-au-service-du-clientelisme/