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  • Ecouter Roger Holeindre et discuter avec lui

    www.congres-nationaliste.fr

  • Israël agresse la Syrie

    Au mépris du droit international et sans se soucier de la moindre formalité, l’Etat sioniste attaque la Syrie :
    « de fortes explosions ont frappé la banlieue de la capitale syrienne tôt ce dimanche, annonce la télévision d’Etat. Ces roquettes israéliennes ont ciblé un centre de recherche militaire. Les explosions ont été entendues près du mont Qasioun à Damas. La zone abrite le centre militaire de recherche de Jamraya. »
    Une agression qui aurait du soulever l’indignation de la « communauté internationale », mais il n’en sera évidemment rien : Israël est au dessus des lois et sous le prétexte d’assurer sa défense, peut tout faire. En l’occurrence violer le territoire d’un pays souverain, tuer près de 300 soldats syriens sans compter les blessés.

    Le plus notable (mais pas étonnant) dans cette affaire, c’est la coalition entre Israël et les terroristes islamistes qui sévissent en Syrie, soutenus par l’Occident.

    Par ailleurs, le site syrien Dampress rend public les noms de deux pilotes de l’appareil israélien qui a participé au raid contre la banlieue de Damas.
    Les sources sionistes ont reconnu avoir perdu contact avec Shamoel Azar et Esson Gary alors qu’ils survolaient la Syrie.

    http://www.contre-info.com/

  • Les Polonais n’aiment pas les pédophiles : Cohn-Bendit viré d’un débat

    Ils n’aiment ni les pédophiles ni la crasse, ni la pourriture…
    Le 24 avril, le député européen d’extrême-gauche devait participer à un débat sur l’Europe à l’Institut de Politologie de l’université de Wroclaw, en Pologne. Face à la vague de protestations que cela a soulevé, et craignant sans doute d’y être conspué, « Dany le Rouge » a préféré annuler sa participation.
    Les protestataires reprochaient aux organisateurs d’avoir invité un activiste d’extrême-gauche qui a reconnu dans son autobiographie Le Grand Bazar publiée en 1975 avoir eu des attouchements pédophiles avec des enfants de 5 ans d’une école maternelle de Francfort sur le Main où il travaillait. Des aveux réitérés dans l’émission Apostrophes du 23 avril 1982. (Voir notre vidéo en fin d’article)¢
     
    Une partie de la presse polonaise a cité l’extrait de l’autobiographie de Daniel Cohn-Bendit où celui-ci déclare que, à plusieurs reprises, des enfants de l’école maternelle lui ont ouvert la braguette et ont commencé à le caresser et que lui-même les caressait en retour.
    Le site conservateur « wPolityce.pl » a même mis en ligne un extrait de la fameuse émission après l’avoir sous-titré en polonais. Daniel Cohn-Bendit y déclare : « Vous savez, la sexualité d’un gosse, c’est absolument fantastique. [...] J’ai travaillé avec des gosses qui avaient entre 4 et 6 ans. Vous savez, quand une petite fille de cinq ans – cinq ans et demi commence à vous déshabiller, c’est fantastique. C’est fantastique, parce que c’est un jeu absolument érotico-maniaque… »
    Ceci accompagné des ricanements stupides de ses interlocuteurs.
    Le metteur-en-scène polonais Grzegorz Braun, auteur de films documentaires et fervent anticommuniste, a même informé le parquet polonais des déclarations pédophiles de « notre Dany franco-allemand » car même si celui-ci revenait sur ses aveux, le simple fait de vanter publiquement la pédophilie est un délit en Pologne. Théoriquement, une enquête pourrait donc être ouverte en Pologne sur le possible passé pédophile de Daniel Cohn-Bendit.¢

  • Les classiques de la culture européenne – Servitudes et grandeurs militaires, Alfred de Vigny

    Ce qui est mémorable est «digne d’être conservé dans les mémoires des hommes» dit Le Robert. Celle des Français, en ce début de siècle, semble de plus en plus courte. Dans le seul domaine littéraire, des auteurs tenus pour majeurs par des générations de lecteurs sont tout simplement tombés aux oubliettes. Pas seulement des écrivains anciens, de l’Antiquité, du Moyen Age, de la Renaissance ou des Temps modernes mais aussi des auteurs proches de nous, disparus au cours du XXème siècle.

    Cette suite de recensions se propose de remettre en lumière des textes dont tout « honnête homme » ne peut se dispenser. Ces choix sont subjectifs et je les justifie par le seul fait d’avoir lu et souvent relu ces livres et d’en être sorti enthousiaste. Ils seront proposés dans le désordre, aussi bien chronologique que spatial, de manière délibérée. A vous de réagir, d’aller voir et d’être conquis ou critique. En tout cas, bonne lecture !

    *** Les quatre précédents “MEMORABLES” sont Thomas Hardy – Le Maire de Casterbridge,  Charles de Coster – La légende d’Ulenspiegel au pays de Flandre et ailleurs, Liam O’Flaherty – Insurrection et Alphonse de Châteaubriant – La Brière.

    Servitudes et grandeurs militaires, Alfred de Vigny

    Avec Lamartine, Alfred de Vigny (1797-1863) est probablement le moins lu des romantiques français, du moins aujourd’hui. Sa vie est parcourue de succès sans suite, de désillusions, d’échecs. Toutes les misères et les coups bas de la vie littéraire qu’il rechercha parfois puisqu’il brigua cinq fois l’Académie française. A sa réception, en 1846, il se fit étriller par le comte Molé, pur représentant et même cacique du juste milieu louis-philippard. Pour Molé, il incarnait l’aristocrate respectueux de son lignage, imbu de valeurs qui lui étaient étrangères – au tout premier rang, l’honneur que Vigny définissait comme « la pudeur virile ».

    Et Vigny était insupportable car il n’était pas de son temps : « J’appartiens à cette génération née avec le siècle, qui, nourrie de bulletins par l’Empereur, avait toujours devant les yeux une épée nue, et vint la prendre au moment même où la France la remettait dans le fourreau des Bourbons. »

    A 17 ans, alors qu’il prépare Polytechnique au lycée Napoléon, il assiste à l’occupation de Paris par les coalisés autrichiens, prussiens et russes. De famille royaliste, pour plaire à sa mère qui lui a enseigné la fidélité au souverain « légitime », il entre dans l’armée. Il n’en tirera qu’ennui et amertume. La grandeur est passée, il ne reste plus que la servitude d’autant moins supportable que l’armée, la chose militaire sont passées de mode. Vigny reste sous l’uniforme jusqu’en 1821. De son « inutile amour des armes » il tire son chef d’œuvre, ce « Servitude et grandeur militaires » paru en 1835.

    Il se compose de trois récits, Laurette ou Le Cachet rouge, La Veillée de Vincennes, La Vie et la mort du capitaine Renaud ou La Canne de Jonc. Trois contes pour illustrer, pour nourrir une réflexion sur la guerre qui a marqué son enfance : « Vers la fin de l’Empire, je fus un lycéen distrait. La guerre était debout dans le lycée, le tambour étouffait à mes oreilles la voix des maîtres, et la voix mystérieuse des livres ne nous parlait qu’un langage froid et pédantesque (…). Lorsqu’un de nos frères, sorti depuis quelques mois du collège, reparaissait en uniforme de housard et le bras en écharpe, nous rougissions de nos livres et nous les jetions à la tête des maîtres. »

    Dans « Lorette », le narrateur accompagne Louis XVIII en fuite vers la Belgique alors que Napoléon, évadé de l’île d’Elbe, accourt pour reprendre le pouvoir. Il croise un vieil officier accompagné d’une femme qui lui raconte l’« histoire du cachet rouge ». Commandant du brick « Le Marat » en 1797, il a conduit un jeune déporté à Cayenne avec ordre d’ouvrir les instructions secrètes du Directoire une fois en mer. C’est l’ordre de fusiller le prisonnier pour lequel il s’est pris d’affection. Il obéit mais promet de s’occuper de sa femme qui l’a accompagné. Le proscrit passé par les armes, la fureur du commandant éclate : « La pauvre République est un corps mort ! Directeurs, Directoire, c’en est la vermine ! Je quitte la mer ! » Jusqu’à sa mort à Waterloo, le commandant veillera sur Lorette devenue folle.

    Dans le second récit, un vieil adjudant d’artillerie vit ses dernières années de service au fort de Vincennes. Ses souvenirs conduisent le narrateur à décrire la vie de paria, de réprouvé du soldat de métier. Pour la société civile, il n’est qu’un matricule et elle lui dénie toute humanité. Par pudeur, il la dissimule : « Les choses se passent ainsi dans une société d’où la sensibilité est retranchée. C’est un des côtés mauvais du métier des armes que cet excès de force où l’on prétend toujours guinde son caractère. On s’exerce à durcir son cœur, on se cache de la pitié, de peur qu’elle ne ressemble à la faiblesse ; on se fait effort pour dissimuler le sentiment divin de la compassion, sans songer qu’à force d’enfermer un bon sentiment on étouffe le prisonnier. »

    Le capitaine Renaud est habité par le sentiment de l’honneur, le respect de la parole donnée. Il sert l’Empire jusqu’à la fin. Il vit la guerre comme une passion : « C’est une sorte de combat corps à corps contre la destinée, une lutte qui est la source de mille voluptés inconnues au reste de hommes, et dont les triomphes sont remplis de magnificence ; enfin c’est l’amour du danger. »

    Mais la guerre est biface, Mars et Bellone, l’autre divinité qui incarne davantage ses atrocités. En 1814, durant la campagne de France, le capitaine Renaud a mené l’assaut d’un bivouac endormi de soldats russes. Ils ont été égorgés et parmi eux un tout jeune homme que Renaud a voulu épargner mais qu’il a tué avec son sabre en le recueillant blotti contre lui. Le jeune Russe avait une canne de jonc que Renaud gardera toute sa vie jusqu’à ce 27 juillet 1830 où un autre enfant, un gamin des rues, le blesse mortellement, durant cette journée de barricades :

    « La guerre est maudite de Dieu et des hommes mêmes qui la font et qui ont d’elle une secrète horreur, et la terre ne crie au ciel que pour lui demander l’eau fraîche de ses fleuves et la rosée pure de ses nuées. »
    Ce qui ne fait pas de Vigny un pacifiste, loin de là. Mais il a parfaitement vu le passage d’une guerre encore codifiée qui ne vise pas à anéantir l’adversaire à une guerre totale aux « cruautés froides ». Le passage de l’une à l’autre étant le fait de la Révolution française. D’où, chez cet aristocrate cette interrogation ultime : « Que nous reste-t-il de sacré ? » et sa simple réponse : l’honneur.

    Jean-Joël Bregeon pour Novopress Breizh http://fr.novopress.info

    * Alfred de Vigny, Servitude et Grandeur militaires, Folio, 1992.

  • L’éloquence chez les Gaulois

    La vulgate historique nous dit que de nos ancêtres gaulois, il ne reste rien. La langue, les coutumes, tout aurait été balayé en deux ou trois siècles par Rome, et remplacé par une culture purement gréco-latine.

    Si je prends une carte de France et que je la compare aux frontières de la Gaule antique telle que décrite par César, je vois pourtant, non une ressemblance, mais plutôt une gémellité quasi-parfaite.

    Objection, me diront certains, la Gaule de Vercingétorix comprenait la Belgique et la Suisse. Certes ; mais tout le monde sait bien que Suisses et Belges francophones ne sont rien d’autre que des Français que des événements historiques, qu’il ne nous appartient pas de relater ici, ont un jour séparé de la mère-patrie. La langue française est en même temps le marqueur d’une appartenance culturelle séculaire et une part essentielle de cette culture. Nous pouvons en conclure que les Gaulois actuels sont tout simplement les Européens de langue maternelle française. La Belgique wallonne risque fort, d’ailleurs, de retourner à la France d’ici peu.

    Quant à la Suisse germanophone et à la Belgique néerlandophone, qui faisaient aussi partie de la Gaule antique, il nous suffira de préciser qu’elle n’ont été germanisées que pendant les invasions barbares. On nous dit que les Francs et autres peuplades d’outre-Rhin ont toujours été extrêmement minoritaires en Gaule, ce qui est vrai, mais on devrait préciser que, dans les régions frontalières du monde germanique, ce n’est pas simplement à la prise du pouvoir politique par quelques bandes d’aventuriers que nous avons assisté, mais à l’arrivée brutale de peuples entiers, qui ont soit chassé, soit submergé les autochtones dont l’identité celtique s’est effacée par dissolution ethnique.

    La partie de la Suisse et de la Belgique actuellement francophones sont celles qui, à l’époque du déferlement venu d’outre-Rhin, étaient restées majoritairement gauloises.

    Cette objection étant éclaircie, et sans oublier d’autres exceptions comme la Corse, conquise ultérieurement, cette analogie ethno-géographico-linguistique évidente nous oblige à considérer la Gaule comme source du peuple ayant donné à la France son identité, et à constater qu’il n’y a aucune rupture profonde entre le peuple gaulois et le peuple français, du moins jusqu’à des événements migratoires récents qui tendent à remplacer définitivement la conception ethnique du mot « Français » par une définition juridique et contractuelle.

    Depuis très longtemps, nous vivons sur un mensonge : la croyance qu’une nation peut abandonner tout socle ethnique historique pour n’être plus qu’un club politique, l’adhésion de peuples venant de tous les coins du monde à deux ou trois grands principes abstraits devant suffire à assurer leur insertion dans la société humaine d’origine.

    Le mot « France » symbolise à lui seul ce mensonge.

    En 1792, pendant une de ces périodes incertaines ou il suffit d’un rien pour que l’histoire bascule dans un sens ou dans un autre, plusieurs pétitions furent adressées à la Convention pour que la France reprenne le nom de Gaule. Voilà par exemple celle du citoyen Ducalle :

    « CITOYENS ADMINISTRATEURS,

    Jusques à quand souffrirez-vous que nous portions encore l’infâme nom de Français ? Tout ce que la démence a de faiblesse, tout ce que l’absurdité a de contraire à la raison, tout ce que la turpitude a de bassesse, ne sont pas comparables à notre manie de nous couvrir de ce nom.

    Quoi ! Une troupe de brigands (les Francs conquérants) vient nous ravir tous nos biens, nous soumet à ses lois, nous réduit à la servitude, et pendant quatorze siècles ne s’attache qu’à nous priver de toutes les choses nécessaires à la vie, à nous accabler d’outrage, et lorsque nous brisons nos fers, nous avons encore l’extravagance bassesse de continuer à nous appeler comme eux !

    Sommes-nous donc descendants de leur sang impur ? À Dieu ne plaise, citoyens, nous sommes du sang pur des Gaulois !

    Chose plus qu’étonnante, Paris est une pépinière de savants, Paris a fait la révolution, et pas un de ces savants n’a encore daigné nous instruire de notre origine, quelque intérêt que nous ayons à la connaître. »

    « Il est deux qualités, disait César, plus importantes que tout pour les Gaulois : bien se battre et bien parler. » Cette dernière assertion, au vu de notre histoire, semble se vérifier. L’éloquence fut, jusqu’à nos jours, un élément tout à fait central dans la façon dont de grands hommes surent s’imposer.

    Remontons beaucoup plus loin dans le temps, au IIe siècle de notre ère. Un Grec, Lucien de Samosate, se trouve, en terre gauloise, face à une représentation d’Ogmios, équivalent selon lui d’Hercule. Ogmios a bien les attribut d’Hercule : couvert d’une peau de lion, il porte à la main droite une massue, dans la gauche un arc, à ses épaules un carquois. Mais, alors qu’Hercule est chez les Grecs un personnage jeune et musclé, Ogmios a l’apparence d’un vieillard décrépit.

    Plus étrange encore : le bout de la langue d’Ogmios est percé par de petites chaînettes, qui relient le dieu gaulois à une multitude d’hommes aux oreilles attachées par ces liens. Le dieu marche en entraînant ces hommes derrière lui, tout en se retournant vers eux pour exhiber un large sourire, alors que ceux-ci, loin de paraître contraints, le suivent avec un bonheur visible.

    À ce stade, Lucien de Samosate se trouve dans le brouillard le plus complet quant à la signification de cette scène. Voyant son désarroi, un Gaulois, parlant le grec, lui donne la clef de cette allégorie :

    « Je vais vous donner le mot de l’énigme, car je vois bien que cette figure vous jette dans un grand trouble. Nous autres, Celtes, nous représentons l’éloquence, non comme vous, Hellènes, par Hermès ! Mais par Hercule, car Hercule est beaucoup plus fort. Si on lui a donné l’apparence d’un vieillard, n’en soyez pas surpris, car seule l’éloquence arrive dans sa vieillesse à maturité, si toutefois les poètes disent vrai : “ L’esprit des jeunes gens est flottant mais la vieillesse s’exprime plus sagement que la jeunesse. ” C’est pour cela que le miel coule de la bouche de Nestor et que les orateurs troyens font entendre une voix fleurie de lis, car il y a des fleurs du nom de lis si j’ai bonne mémoire. Ne vous étonnez pas de voir l’éloquence représentée sous forme humaine par un Hercule âgé, conduire de sa langue les hommes enchaînés par les oreilles ; ce n’est pas pour insulter le dieu qu’elle est percée. Je me rappelle d’ailleurs que j’ai appris chez vous certains ïambes comiques : “ Les bavards ont tous le bout de la langue percé. ” Enfin, c’est part son éloquence achevée, pensons-nous, qu’Hercule a accompli tous ses exploits et par la persuasion, qu’il est venu à bout de tous les obstacles. Les discours sont pour lui des traits acérés qui portent droit au but et blessent les âmes. Vous-mêmes dites que les paroles sont ailées. »

    Cette conception gauloise de l’autorité est le contraire exact de la conception romaine ou islamique, où seul la trique et la promesse d’avantages matériels peuvent entraîner des millions d’hommes à la suite d’un seul.

    Relisons Camille Jullian : « L’action de Vercingétorix était à la fois plus limitée et plus vaste que celle d’un dictateur militaire. Elle était d’abord tempérée par les rapports permanents avec les chefs supérieurs des cités confédérées ; il n’était pas dans la nature des Gaulois d’obéir sans condition et sans discussion au général qu’ils avaient élu même à l’unanimité [...] Il fallait, avant les questions importantes, que Vercingétorix les réunit en conseil ; il fallait, après l’événement, qu’il rendit compte de ce qu’il avait fait [...] »

    Vercingétorix, en charge non pas d’un « État », mais de tribus totalement indépendantes qui avaient décidé de se coaliser autour de lui contre l’envahisseur, devait sans cesse prouver qu’il était le plus apte à les mener à la victoire. Les Gaulois le suivirent parce qu’ils reconnurent aussi en lui un idéaliste qui ne cherchait aucun intérêt personnel, qui avait décidé de lier irrévocablement son destin à celui de son peuple. C’est d’ailleurs en toute logique qu’il finit, cinq ans après la reddition d’Alésia, étranglé comme une bête dans une prison romaine.

    Vercingétorix employa, pour fédérer autour de son nom la majorité des tribus gauloises, deux armes, le courage et l’éloquence, qui confirment parfaitement le propos de César.

    par André Waroch http://www.europemaxima.com

  • L’Autorité selon Maurras

    Résumer la pensée de Maurras sur l’autorité n’est pas une tâche facile tant son oeuvre est vaste et tant cette idée occupe une place considérable dans l’ensemble de ses théories. Aussi prendrons-nous pour guide et comme référence le seul recueil Mes idées politiques qui présente un choix très intéressant de textes sur l’autorité. Ceux-ci se trouvent principalement au début du célèbre "Avant-propos", La Politique naturelle, dans le chapitre sur « L’Inégalité protectrice », ainsi que dans le corps du recueil, au chapitre sur « L’Autorité » justement, mais aussi à celui sur « La Liberté ».
    On peut induire de ces pages les notes ou caractéristiques de l’autorité pour Maurras. Elle est ou doit être, selon les cas, naturelle, bienfaisante, polie par l’Histoire, éclairée, nécessaire et, en quelque sorte, consubstantielle à la liberté.
    Naturelle et bienfaisante
    Elle se trouve d’abord à l’origine de toute société, c’est-à-dire dans la cellule familiale qui, quelle que soit sa forme particulière, fait toujours bénéficier l’enfant, sans que celui-ci ait rien fait pour la mériter, de l’autorité nourricière, protectrice et éducatrice des adultes : « On ne saurait prendre acte en termes trop formels, ni assez admirer ce spectacle d’autorité pure, ce paysage de hiérarchie absolument net. » Cette autorité protectrice née de l’inégalité des termes figurés par l’enfant et les parents continue longtemps à être la source de ses progrès : « Tout joue et va jouer, agit et agira, décide et décidera, procède et procèdera par des actions d’autorité et d’inégalité, contredisant la falote hypothèse libérale et démocratique. » L’idée maîtresse de Maurras est ici de nous faire méditer sur le premier visage de l’autorité, le plus universel aussi. Ce visage n’est pas celui de la tyrannie ou de la dictature mais de la protection, de l’éducation et de l’amour. La philosophie politique moderne l’a oublié en confondant dans un même rejet l’autorité elle-même et ses formes dégradées ou perverties : « Cette Physique archique et hiérarchique n’a rien de farouche. Bien au rebours ! Bénigne et douce, charitable et généreuse, elle n’atteste aucun esprit d’antagonisme entre ceux qu’elle met en rapport. »
    Polie par l’Histoire et éclairée
    Pour Maurras, l’autorité est aussi un don que possèdent certains individus : « Sa liberté [à l’homme d’autorité] s’impose naturellement à la liberté d’autrui, sa dignité est rayonnante, elle entraîne et transporte. » Dans celui qui la possède l’autorité est « du même ordre que la vertu ou le génie ou la beauté. » Mais cette autorité née des qualités individuelles n’est pas celle à qui Maurras confie la plus haute valeur politique. L’autorité qui vaut pour la cité est celle qui dure et que l’Histoire ratifie. L’exemple le plus éclatant lui en est fourni par l’accession au trône des Capétiens : « Les Français du Xe siècle s’étaient rangés autour de la race qui, depuis cent années et plus, les avait toujours défendus efficacement. » L’exercice de l’autorité chez un ambitieux arrivé au pouvoir par la brigue ou la force est souvent la cause du despotisme mais il en va autrement quand la durée n’est plus celle de l’homme mais celle de la dynastie : « Quand le pouvoir est élevé et qu’il dure, quand il dure un peu, l’effet est tout contraire, l’apprentissage des responsabilités se fait et leur expérience perfectionne au lieu de gâter. »
    Seule l’autorité du prince légitime, héritier d’une lourde responsabilité qu’il n’a pas choisie par passion mais à laquelle tout concourt à le former par devoir, peut être considérée comme éclairée et c’est alors seulement qu’elle se distingue du "pouvoir" : « L’idée d’autorité ne signifie […] point seulement le pouvoir et le grand pouvoir exercés par un homme ou par un groupe d’hommes, mais de plus il enferme la connaissance de l’objet sur lequel s’exerce et s’applique ce pouvoir. » La politique est l’art royal et l’apprentissage du futur roi, qui s’apparente à la formation d’un artisan, est la condition de son succès comme « la garantie la plus précieuse et souvent la seule, contre les abus du pouvoir. » Maurras peut alors ironiser sur un célèbre mot de Voltaire : « Celui qui a dit qu’il fallait une religion pour le peuple a dit une épaisse sottise. Il faut une religion, il faut une éducation, il faut un jeu de freins puissants pour les meneurs du peuple, pour ses conseillers, pour ses chefs. » Aujourd’hui, dans le régime d’opinion cet art et cette science ont disparu et l’autorité n’est plus qu’un "pouvoir", illégitime de surcroît : « Les chefs subsistent et leur pouvoir augmente, mais ce sont des chefs barbares livrés aux impulsions de la passion ou de l’intérêt. »
    Consubstantielle à la liberté
    Le libéralisme politique dans lequel nous baignons depuis au moins deux siècles et demi nous a conditionnés à admettre comme une évidence l’opposition entre les libertés individuelles et l’autorité. Maurras s’attache spécialement à détruire ce préjugé : « Un peuple a besoin d’un chef comme un homme de pain. » En effet, quand la cité est menacée et envahie, que ses remparts s’écroulent faute d’avoir été conservés par les soins d’une autorité vigilante, que restet-il aux malheureux citoyens asservis par une domination étrangère, qu’elle soit militaire, culturelle ou économique ? Comment user de sa liberté quand le défaut de gouvernement nous rend esclaves des accidents de l’Histoire ? « L’autorité ne serait pas une nécessité politique éternelle si, parallèlement à cet instinct directeur qui constitue le fond et l’âme des chefs, il n’existait dans l’âme des sujets et des citoyens un instinct d’obéissance, esprit de suite, disait Richelieu, qui est l’expression vivante du plus grand intérêt des foules : être gouvernées et bien gouvernées, dans un bon sens, avec fermeté. »
    Mais pour Maurras l’autorité n’est pas seulement la condition de la liberté. Prolongeant sa réflexion, il va jusqu’à les identifier l’une à l’autre : « Toutes les libertés réelles, définies et pratiques, sont des autorités. » Cette affirmation nous renseigne sur la conception que se faisait Maurras de la liberté, en accord avec les antiques définitions de philosophes comme Platon et Aristote : « La liberté n’est pas au commencement, mais à la fin. Elle n’est pas à la racine, mais aux fleurs et aux fruits de la nature humaine ou pour mieux dire de la vertu humaine. » Elle ne se confond ni avec la licence, ou liberté de faire n’importe quoi, ni avec la Liberté abstraite et divinisée de l’individu-roi que la République a inscrite sur ses frontons, mais avec la possibilité pour chaque communauté, pour chaque famille, de concourir à sa façon et selon sa nature propre au Bien commun.
    Cette conception de la liberté est à l’origine des idées décentralisatrices de Maurras et de son rejet du jacobinisme, comme de sa défense des droits corporatistes et syndicaux, ou de ceux des congrégations religieuses, contre les empiètements et les violences de l’État républicain. Elle est aussi à la racine de cette magnifique définition de l’autorité politique (à relire pour la confronter, par exemple, au médiocre article de Diderot sur le même sujet dans L’Encyclopédie) : « Quand une humaine liberté se trouve au plus haut point et qu’elle a rencontré d’humains objets auxquels s’appliquer et s’imposer, quel nom prend-elle ? Autorité. Une autorité n’est donc qu’une liberté arrivée à sa perfection. »
    Stéphane BLANCHONNET  L’Action Française 2000 du 20 octobre au 2 novembre 2005

  • Retraites : les Français ne font pas confiance au gouvernement

    Plus de trois Français sur quatre ne font pas confiance au gouvernement pour garantir l'avenir des retraites et leur inquiétude monte sur leurs conditions de vie, après leur retrait de la vie active, selon un sondage Ipsos pour l'Union mutualiste retraite et Liaisons sociales, publié jeudi.

    76% des personnes interrogées disent ne pas faire confiance "au gouvernement pour assurer l'avenir des retraites": 50% ne lui font "pas du tout confiance" et 26% "plutôt pas confiance". Seulement 4% lui font "tout à fait confiance" et 20% "plutôt confiance", alors qu'il prévoit cette année une réforme pour rétablir l'équilibre financier des régimes. Selon ce sondage, 63% des Français se prononcent pour une réforme "en profondeur du système en mettant à plat tous les sujets".
    Et seulement 31% souhaitent "qu'on aménage en partie le système afin de contribuer à résoudre les problèmes de financement les plus importants mais sans risquer de blocage social".
    Sur les mesures à prendre, 66% jugent "nécessaire" une augmentation de la durée de cotisation, 63% une hausse des cotisations retraite des salariés et des entreprises et 61% un relèvement de l'âge légal de départ.
    Concernant les conditions de vie à la retraite, 80% des personnes interrogées sont inquiètes quant au montant de leur future pension et 71% le sont pour le niveau de vie. 58% d'entre elles sont inquiètes sur leur capacité à vivre de manière indépendante à la retraite et 57% le sont sur la santé et l'accès aux soins.
    L'inquiétude atteint des niveaux records par rapport aux précédentes éditions de ce sondage: 17% seulement se disent confiants sur le montant de leur retraite (22% en octobre 2012), soit le plus bas niveau depuis avril 2009.
    Les femmes se montrent encore plus inquiètes: 83% le sont sur le montant de leur retraite, 76% sur leur niveau de vie, 66% sur leur capacité à vivre de manière indépendante et 64% sur la santé.
    De même, les actifs occupés sont 86% à s'inquiéter du montant de leur retraite et 77% du niveau de vie.
    En revanche, les retraités sont moins inquiets (65% le sont sur le niveau de vie et 68% sur le montant de la retraite) mais les résultats révèlent une importante baisse de confiance dans cette population, avec des niveaux jamais atteints depuis avril 2009.
    Par ailleurs, 49% des Français disent avoir épargné en vue de leur retraite. Parmi ceux qui n'ont pas épargné, 80% évoquent le manque de moyens, alors qu'ils étaient seulement 68% à avancer cet argument en avril 2009.
    Cette enquête a été réalisée par téléphone auprès d'un échantillon de 1.019 personnes représentatif de la population française âgée de 15 ans et plus entre les 12 et 13 avril 2013.¢
  • Les manifs pour tous en direct (actualisez votre page)

    Dijon : de 12h30 à 17h00.

    Ambiance familiale et détendue : pique-nique et musique.

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    Arrivée du car de l'Yonne

    2000 personnes selon les organisateurs : familles, enfants, de nombreux jeunes font de ce rendez-vous de la famille un événement festif mais très fortement déterminé. On ne lâche rien...

    Niort : à partir de 12h30.

    Niort

    Chartres : à partir de 13h00.

    Lyon : de 14h00 à 18h15.

    Les premières photos avant 13h00 et le ton est donné : mai 68 est mort.

    L1  Lé

    Anecdote lyonnaise : "Des CRS Tres souriants acceptent devant moi des drapeaux de la manif pour tous,donnes par un membre du staff,alors qu'ils déjeunent dans leur camion.Je manifeste ma surprise .un commandant de section me demande de ne pas prendre de photo:"vous comprenez,madame,nous on a des familles.si nos chefs apprennent qu'on pactise avec l'ennemi,on perd notre boulot".

    L3  L5

    L6  L9

    Musulmans pour l'enfance.

    Les Forces de l'ordre sont en place!

    L10  La

    Arrivée des élus.

    L12  L20

    Arrivée des montagnards.

    L13

    La place Bellecour se remplit!

    L1

    Slogans lyonnais :

    "Hollande t'es foutu, les Français lâchent pas la rue"

    "Taubira, serre les fesses, on arrive à toute vitesse"

    L25

    L21

    Lrh

    L01

    Le cortège se dirige vers la rue Édouard Herriot

    Fb

    Frigide Barjot est arrivée à Lyon : elle s'est trompée de manif !?

    L2

    Le message est très clair !

    L65

    L3

    "place Bellecour bouchée : on stagne alors que les premiers sont partis depuis 30mn"

    Monseigneur Le Gal est dans le cortège.

    L001 (2)

    La place Bellecour se vide enfin...

    Lyon1

    L002

    Montpellier : de 14h30 à 16h30.

    Mt1 

    Paris : à partir de 15h00.

    Pour la RATP, pas de manif aujourd'hui ! C'est ce qu'on verra...

    PasDeManifRATP

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    Le calme avant la manif...

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    Ldr

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    Conférence de presse de Ludovine de la Rochère, présidente de la MPT 

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    Ile d'Oléron : à partir de 15h00.

    Saint-Raphaël : à partir de 15h00.

    Rennes : de 15h00 à 18h00.

    Avant d'arriver :

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    La foule arrive :

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    Toulouse : à partir de 15h30. 

    Premiers préparatifs à Toulouse : 

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    Canon à eau contre mères de famille et enfants en poussette?

    Lille : à partir de 15h30.

    Amiens : à partir de 16h30.

    Dreux : à partir de 16h30.

    Soustons : ce matin, plusieurs centaines de personnes.

    Photo(4)

    Photo(5)

    (Dans le Figaro)

    Lahire  http://www.lesalonbeige.blogs.com/

  • Réflexions sur divers mythes de sacrifice divin

     

    Réflexions sur divers mythes de sacrifice divin
    L’une des actions les plus curieuses du dieu nordique Odin est l’épisode d’auto-pendaison décrit dans les strophes 139-142 du Havamal, dans l’Edda poétique [1]. Odin est le « Père de Tout » dans le panthéon des Ases, et certains indicateurs puissants de sa souveraineté (connaissance magique et connaissance des runes) furent gagnés par cet acte d’autosacrifice. Etant donné la position d’Odin comme dieu majeur et la nature particulièrement spectaculaire de son sacrifice, il n’est pas surprenant que des comparaisons soient souvent faites entre cet épisode mythologique et celui de la crucifixion de Jésus Christ au Golgotha [2]. Jésus fonctionne essentiellement comme un « dieu suprême » dans l’iconographie chrétienne, car il est le point focal du Nouveau Testament et l’intermédiaire avec le monde des hommes, alors que le « Dieu Père » techniquement plus puissant est devenu une figure plus vague par rapport à son ancienne prédominance dans l’Ancien Testament. Ainsi, l’une des plus importantes tâches des premiers missionnaires chrétiens dans les territoires germaniques de l’Europe fut de convaincre les peuples païens qu’ils devaient accepter le Christ comme leur Sauveur, le mettre à la place d’Odin, et abandonner ce dernier avec le reste de ses homologues divins. Il est certainement possible que ce processus puisse avoir été quelque peu facilité par les similarités superficielles entre l’acte d’auto-pendaison d’Odin et le motif de la crucifixion du Christ [3]. Comme l’a remarqué Kevin Crossley-Holland :
    « Les parallèles entre la mort d’Odin et la crucifixion du Christ sont frappants : tous deux meurent volontairement ; Odin est percé d’une lance et le Christ aussi ; Odin fait allusion à l’absence d’une boisson revivifiante et le Christ se voir offrir du vinaigre ; Odin hurle ou crie avant de mourir, et le Christ crie ‘d’une voix forte’. » [4]
    Etant donné ces similarités, il n’est pas surprenant que pendant des années les spécialistes se soient souvent demandé si cela pouvait indiquer une influence chrétienne – ou même une source chrétienne partielle – pour l’épisode du Havamal, comme cela pourrait aussi être le cas pour certains autres passages de l’Edda poétique. Ce qui est beaucoup moins fréquemment discuté, c’est la nature de ces actes ou rituels ou actions sacrificiels en eux-mêmes, et les implications résultantes pour ceux qui aligneraient leur attitude spirituelle sur l’une ou l’autre de ces déités. Examinés depuis cette perspective, les détails entourant les « morts » sacrificielles d’Odin et du Christ peuvent être considérés à de nombreux égards comme presque diamétralement opposés. Et si l’on examine attentivement les raisons d’être de ces deux sacrifices religieux, il devient également évident que sur un plan métaphysique ils ont très peu en commun.

    Le sacrifice comme rituel
    Dans le cas de la pendaison d’Odin sur l’arbre du monde Yggdrasil, le fait que le récit soit fait à la première personne est de première importance. Le récit commence ainsi :
    Je sais que je pendis
    A l’arbre battu des vents
    Neuf nuits pleines,
    Navré d’une lance
    Et donné à Odin,
    Moi-même à moi-même donné,
    A cet arbre
    Dont nul ne sait
    D’où proviennent les racines.
    Point de pain ne me remirent
    Ni de corne ;
    Je regardai en dessous,
    Je ramassai les runes,
    Hurlant, je les ramassai,
    De là, retombai. [5]
    Il est immédiatement évident que la pendaison d’Odin est volontaire, faite « par lui-même, pour lui-même ». Si cela apparaît incontestablement comme une chose déplaisante pour l’individu moyen, il faut reconnaître que ce n’est pas un simple acte de masochisme. Une telle action a de nombreux précédents dans diverses cultures autour du monde, et peut être vue comme un rite chamanique ou initiatique – mais en tous cas, un rite qui accomplit une fonction importante. D’autres aspects de la persona d’Odin confirment une telle tendance, comme le note Mircea Eliade dans son Histoire des idées religieuses :
    « Nous avons certainement ici un rite initiatique de structure para-chamanique. Odin reste pendu à l’arbre cosmique ; Yggdrasil signifie ‘le cheval (drasil) d’Ygg’, l’un des noms d’Odin. La potence est appelée le ‘cheval’ du pendu, et nous savons que les victimes sacrifiées à Odin étaient pendues à des arbres. En se blessant lui-même avec sa lance, en s’abstenant d’eau et de nourriture, le dieu subit une mort rituelle et acquiert une sagesse secrète de type initiatique. L’aspect chamanique d’Odin est confirmé par son cheval à huit pattes, Sleipnir, et par les deux corbeaux qui lui disent tout ce qui se passe dans le monde. Comme les chamans, Odin peut changer de forme et envoie son esprit au loin sous forme d’un animal ; il cherche la connaissance secrète parmi les morts et l’obtient ; il déclare dans le Havamal (strophe 158) qu’il connaît un charme qui peut faire descendre un pendu de la potence et parler avec lui ; il est instruit dans l’art du seidr, une technique occulte de type chamanique. » [6]
    Un élément clé du chamanisme, qui le différencie d’autres activités occultes comme le « voyage astral » ou le voyage « surnaturel », est que le chaman doit impérativement revenir de ses voyages dans d’autres dimensions de la réalité avec quelque chose de positif – pas seulement pour lui-même, mais aussi pour les membres de sa tribu. Cela prend généralement la forme de pouvoirs de guérison ou de connaissances qui aideront à combattre des démons ou des entités spécifiques qui causent des maladies psychologiques ou physiologiques. Dans le cas d’Odin ce paradigme est évident pour l’acquisition des runes, qui ont de nombreux usages magiques, mais en plus de cela la toute première rune qu’il obtient « est appelée aide, et l’aide elle peut t’apporter / Dans le chagrin et la douleur et la maladie » [7].
    La nature de l’auto-pendaison d’Odin peut être vue comme un voyage ou une « descente » dans un autre royaume (puisqu’il dit qu’il regarde « en-dessous », c’est probablement une allusion à Hel, le domaine des morts, où il peut acquérir une connaissance et une sagesse spéciales de la part de ses résidents). Dans un autre sens, pour emprunter un terme de Nietzsche, c’est un exercice de « maîtrise de soi » par lequel Odin se soumet à des extrêmes de tension (attaché ou pendu à un arbre), de souffrance (blessé par une lance), et de famine ou de jeûne (se privant de nourriture et de boisson). Chacun de ces actes à lui seul pourrait conduire à une altération de l’état de conscience, et dans le cas d’Odin ils sont combinés et donc amplifiés dans un effrayant rituel qui le mène au bord de la mort, lui permettant d’avoir un regard pénétrant dans les mystères du royaume où résident les morts. Si le moyen employé est l’abnégation de soi, le but ultime est l’avancement de soi. En subissant cette épreuve et en la surmontant, Odin revient dans les mondes plus familiers des dieux et des hommes comme un être supérieur ayant acquis une illumination et des pouvoirs nouveaux. Son rite est accompli avec succès, et confirme finalement sa position d’entité suprême parmi les dieux des Ases.
    L’action d’Odin est généralement considérée comme un exercice chamanique, mais il y a un certain nombre d’autres explications possibles, toutes de nature ritualiste. L’une des plus élaborées fut proposée par Jere Fleck dans son essai de 1971, « Odin’s Self-Sacrifice – A New Interpretation », qui utilise du matériel de mythologie comparée indo-européenne pour arriver à une explication plus détaillée de la nature et de la fonction du sacrifice [8]. L’une des conclusions les plus valables pour lesquelles Fleck fournit des preuves convaincantes est l’idée qu’Odin doit avoir été pendu à l’arbre dans une position inversée. Cette position inversée fournit aussi la seule explication raisonnable au fait qu’Odin a pu se pencher vers le bas et ramasser les runes en-dessous (en présumant que ces dernières étaient des objets tangibles, ce que suggère la description), une action qui serait physiquement impossible s’il était suspendu dans une position normale. Fleck discute aussi du parallèle résultant entre l’Odin suspendu à l’envers et l’image du « pendu » dans le Tarot des Arcanes Majeures, qui ouvre un autre champ de comparaisons symboliques.
    Quelle que soit sa forme ou sa motivation exacte, le rituel de l’auto-pendaison a peu de chances d’être une anomalie introduite dans l’histoire d’Odin par un scribe chrétien ultérieur, car la nature sinistre du rite est pleinement en accord avec le caractère du dieu. Les étudiants de la littérature mythologique et historique du Nord préchrétien trouveront des mentions de pratiques cultuelles qui reflètent clairement des aspects clés de l’autosacrifice d’Odin [9]. De plus, je remarquerai simplement qu’une analyse plus allégorique montre que le rituel est un parfait reflet des principales caractéristiques d’Odin. Il est celui qui incite à la bataille et au conflit, dans ce cas à l’intérieur de son propre être ; il est un audacieux promeneur et voyageur, qui voyage dans d’autres royaumes simplement pour se « tester » lui-même ainsi que ses aptitudes ; et surtout il est un collecteur de sagesse, qui dans un autre mythe essentiel sacrifie l’un de ses yeux pour obtenir la connaissance contenue dans le Puits de Mimir. Considérant l’endroit où l’autosacrifice d’Odin a lieu, cela ne semble pas être une allusion à la croix chrétienne. Les peuples germaniques voyaient l’arbre du monde, Yggdrasil, comme une forme d’axe cosmique, un mât vertical et interconnectant au centre des neuf mondes, et il est donc entièrement logique que le dieu suprême choisisse ce même arbre comme le site de son rite le plus personnel. En faisant cela il put obtenir un aperçu dans le fonctionnement mystérieux du plus grand univers lui-même.
    La crucifixion de Jésus est un type d’événement entièrement différent ; les circonstances qui l’entourent sont si fortement en opposition avec celles qui viennent d’être discutées que tout lien significatif entre elles est hautement douteux [10]. Vue dans son contexte historique, la crucifixion du Christ est un acte entièrement « mondain ». La crucifixion était simplement une forme extrême d’exécution. Elle était bien sûr délibérément douloureuse et donc réservée à certains types de criminels, mais son but ultime était de tuer. Par conséquent, en laissant de coté toutes les croyances spirituelles concernant le mécanisme de la mort elle-même, il n’y a rien d’intrinsèquement métaphysique dans la crucifixion. Par opposition à Odin, le plus élevé des dieux germaniques, qui se pend à Yggdrasil, le plus important des arbres, Jésus était considéré par la société en général, en Judée, comme une figure humble, un hérétique blasphématoire, et fut cloué à la croix de la manière la plus dégradante. Crossley-Holland affirme que la mort du Christ est « volontaire » comme celle d’Odin, mais ceci est contestable. Il est vrai qu’elle peut être volontaire au sens où Jésus la provoque par ses activités et ses sermons, qui sont perçus comme une menace pour l’establishment religieux juif existant. Il accepte aussi volontairement sa condamnation et ne résiste pas aux soldats romains qui l’emmènent, devenant le premier martyr – et en même temps le martyr absolu – du christianisme. Néanmoins, cette forme de mort « volontaire » est au fond une soumission ; elle n’est pas choisie par le Christ, elle n’est pas non plus le résultat d’une action spécifique et active de sa part, mais plutôt l’œuvre de forces externes. Par contre, le sacrifice d’Odin est à la fois volontaire et choisi ; de plus, il est entrepris et accompli par lui-même.
    La condamnation à mort du Christ survient à cause de la trahison de Judas, après quoi il est déclaré coupable de blasphème par le tribunal juif local, le Sanhédrin. Mais pour le crucifier un décret des Romains est nécessaire, car ils sont la puissance régnante habilitée à prononcer la peine capitale. Jésus est amené devant les autorités romaines, et est disculpé deux fois. Alors qu’il croit lui-même être le « fils de Dieu », la réalité de la question est que le gouvernement romain impérial, le plus puissant dans le monde, ne fait aucun cas de lui ou de ses enseignements. Ils ne veulent même pas faire l’effort de le tuer, et c’est seulement sur l’insistance du Sanhédrin et de segments de la population locale qu’ils y consentent finalement.
    Lorsqu’elle est examinée en détail, l’exécution ultérieure a très peu en commun avec le sacrifice d’Odin. Jésus est soumis au fouet avant d’être cloué sur la croix, ce qui était une procédure standard. On ne lui offre jamais de nourriture ou d’eau, mais plutôt une boisson analgésique amère avant le début du clouage, et certains récits disent qu’après avoir été mis en croix on lui présente un linge trempé dans du vinaigre, comme humiliation supplémentaire. Jésus crie un certain nombre de fois, en particulier pour s’écrier : « Père, pourquoi m’as-tu abandonné ? ». Ses cris sont des cris de douleur et de frustration, à la différence du cri (de victoire ?) d’Odin qui est émis juste au moment du « triomphe » quand survient l’acquisition des mystères runiques. La mort de Jésus sur la croix est simplement la route désagréable par laquelle il atteint « l’autre monde » ou « le ciel », où il reste « à la droite du Père » [11].

    La signification du sacrifice
    Le mot sacrifice vient du nom latin sacrificium, qui vient de l’adjectif sacer, « sacré, saint, consacré », et le verbe sacrare, « rendre sacré ou saint ». Le sacrifice est un rituel religieux qui a été interprété de diverses manières par les anthropologues, les historiens, les psychologues, et d’autres, et il y a diverses explications concernant sa fonction dans différents systèmes religieux. Le sacrifice peut être vu comme une forme de communication entre les mondes du profane et du sacré. Par conséquent, lorsqu’une chose vivante est offerte en sacrifice elle doit être tuée ; la communication a lieu quand l’objet du sacrifice (le « messager ») voyage vers l’autre monde non-matériel [12]. Le sacrifice sert souvent à initier un échange de cadeaux entre hommes et dieux, par quoi une offrande est faite avec l’espoir qu’elle sera acceptée. En retour, un dieu ou des dieux accompliront une requête ou accorderont une récompense positive à celui qui a accompli le rite ou, par extension, à ses compagnons. Dans un sens cynique, certaines formes de sacrifice peuvent aussi être considérées comme une forme de « pot-de-vin » religieux, par lequel un dieu est apaisé : celui qui sacrifie doit présenter une offrande pour continuer à recevoir la bienveillance de la déité, qui détient le pouvoir de rendre la vie misérable pour l’humain [13]. Une forme apparentée de sacrifice est celle de la purification ou de l’expiation – en d’autres mots, pour l’homme (que ce soit un individu ou un groupe collectif plus grand) qui a précédemment transgressé une ordonnance divine, c’est un moyen de s’amender devant le dieu et de rectifier la situation. Dans ces derniers scénarios la distance naturelle entre dieu et homme est soulignée, et l’homme vit dans la crainte de ce qui pourrait arriver s’il ne sacrifie pas en accord avec la coutume.
    La mort du Christ ne peut être comprise comme un sacrifice religieux que si l’on accepte sa signification d’après la doctrine théologique chrétienne. Le Christ est « sacrifié » par d’autres, et cela n’implique jamais qu’il avait besoin que cela se produise pour pouvoir obtenir un gain personnel dans l’autre monde. Si l’acte de le crucifier servait un bénéfice opportun sur le plan matériel, c’était celui de supprimer un élément gênant pour la société. La mort elle-même est assez banale : comparé à la plupart des crucifixions, il mourut assez rapidement et sans beaucoup de façons, avec seulement des phénomènes « surnaturels » mineurs accompagnant l’événement – les récits bibliques font état d’un « obscurcissement du ciel » et ainsi de suite, mais cela ressemble davantage à un embellissement poétique ultérieur. L’importance de la crucifixion ne vient donc pas tant de l’action que de la notion de la personne exacte à qui elle fut faite. Il est le « fils de Dieu », un être « perfectionné », et pourtant ironiquement il subit une mort particulièrement dégradante des mains de ceux qui sont oublieux de sa stature.
    Cependant, un échange sacrificiel fondamental se produit ici, d’après la doctrine chrétienne. Jésus ne meurt pas pour ses propres péchés – car, en termes chrétiens, pourrait-on dire qu’il en ait commis ? –, mais pour ceux de l’humanité. C’est un exemple d’un acte expiatoire particulier, comme le dit E.O. James : « Quelle que soit l’interprétation du récit de ce qui a eu lieu, le fait demeure que la Passion et la mort du Christ introduisirent dans la tradition du Messie juif l’ancienne conception du Roi Sauveur divin souffrant et mourant pour le salut de l’humanité » [14]. Il a été sacrifié afin de « prendre sur lui les péchés du monde ». D’après la croyance chrétienne, cet état de péché existe à l’intérieur de tout être humain et est appelé « péché originel », ses racines remontant à la désobéissance d’Adam dans le Jardin d’Eden. Un paradoxe est ainsi créé, car si en subissant sa crucifixion Jésus a vraiment pris sur ses épaules les péchés de l’humanité, on pourrait logiquement supposer qu’à partir de ce moment l’homme n’en a plus eu. L’histoire du monde ultérieure et ses effusions de sang – dont un bon nombre fut accompli au nom du Christ – démontrent amplement la fausseté de toute affirmation disant que l’homme se serait débarrassé de sa tendance aux dénommés péchés, donc cet « enlèvement du péché » fut un acte symbolique plutôt que littéral. En gardant intact le concept du « péché originel » tout en proférant simultanément l’affirmation métaphysique extravagante sur les implications de la crucifixion du Christ, une formule d’extorsion spirituelle fut instaurée par la doctrine chrétienne. Par conséquent, celle-ci demande un autre sacrifice : pour recevoir le « salut », on doit placer sa foi en Jésus et l’accepter comme « Seigneur » – après tout, il subit magnanimement la torture et même la mort en votre nom. Si vous ne lui donnez pas toute votre foi, vous ne recevrez aucune récompense après votre mort. En plus de cela il y a la menace de l’enfer pour ceux qui n’adoptent pas la foi, qui augmente encore le degré de contrainte. La mort de Jésus peut être vue comme intégrale pour tout cela aussi, car il était nécessaire qu’il remonte au ciel pour finalement rendre son Jugement sur chaque homme après l’Apocalypse.
    Le sacrifice d’Odin ne se prête à aucun parallèle expiatoire, car son acte est entièrement auto-contenu : il est son récipient. Pour faire entrer le rite d’Odin dans une telle équation, la seule solution métaphysique serait de dire que son « moi inférieur » ou « irrésolu » – c’est-à-dire son état d’être initial – a été sacrifié et immolé afin de se reconfigurer dans un « moi supérieur », ou afin de le « recevoir ». De cette manière le moi inférieur est détruit et laissé en arrière, donc il ne peut pas y avoir de demande de « subornation » de la part du moi supérieur. Le sacrifice atteint son but désiré et est donc complet. Le meilleur paradigme explicatif serait certainement celui d’un échange sacrificiel. Odin fait une offrande (son corps, sa raison, et son âme) afin de recevoir un niveau d’illumination supérieur, ou, pourrait-on dire, plus profond. C’est une formule d’auto-transcendance, et Odin poursuit en expliquant ses conséquences quelques strophes plus loin dans son récit :
    Alors je commençai à prospérer,
    Et à obtenir la sagesse,
    Je grandis et j’étais bien ;
    Chaque mot me menait à un autre mot,
    Chaque action à une autre action. [15]
    Ici Odin, conscient de lui-même, comprend comment il fonctionne dans son état nouvellement atteint, recevant la sagesse et employant des mots (c’est-à-dire l’art de la communication – rien de surprenant, étant donné qu’il a maintenant acquis les runes, symboles écrits des phonèmes germaniques originels). Sa connaissance et ses mots conduisent à des actions, qui à leur tour engendrent d’autres actions, probablement plus grandes. Le philosophe ésotériste Julius Evola explique la dynamique de l’acte dans ces termes :
    « La même idée d’une force primordiale qui réagit contre elle-même, qui se libère et accède à un plan supérieur de l’être définissant son aspect divin particulier (la « forme plus haute et plus parfaite de soi-même » des Upanishads) … est exprimée par le sacrifice d’Odin à l’arbre cosmique Yggdrasil, qui permet à Odin de tirer de l’abysse la sagesse transcendante contenue dans les runes et de la mettre en pratique ; en outre, dans une version particulière de ce mythe, Odin, vu comme un roi, est celui qui par son sacrifice montre la voie qui conduit au Walhalla, c’est-à-dire le type d’action qui permet à une personne de participer à l’immortalité héroïque, aristocratique et ouranienne. » [16]
    Un cycle accéléré d’évolution a été initié qui n’est pas seulement terrestre, mais plutôt « magique » dans son essence même. Ce n’est pas seulement un exercice d’esprit nouménal et d’esprit numineux, mais il se manifeste aussi par des actions dans le monde phénoménal. Odin a subi une épreuve et a obtenu en retour la récompense de la vision magique, qu’il met ensuite en pratique tangible sur le plan matériel tout comme sur le plan spirituel.

    Les implications d’un dieu sacrifié
    Le christianisme requiert une foi absolue, ou il devient insensé. Si la foi en Jésus en tant que messie n’est pas présente, sa vie et sa mort ont peu d’importance. Si l’on veut trouver des pacifistes éloquents dans l’histoire, il y a certainement de meilleurs exemples que Jésus – ses enseignements ne deviennent uniques ou impératifs que si la doctrine chrétienne est réellement vraie. Si d’autre part on tente de voir le Christ comme un simple modèle historique ou mythique, il serait difficile à imiter, et beaucoup de ses actions apparaissent complètement absurdes. Sa « réalité » est bien éloignée de notre réalité européenne indigène, et à de nombreux égards elle est incompréhensible. Une analyse ingénieuse de cette énigme a été faite par Lawrence Brown dans son histoire spenglerienne de l’Europe, The Might of the West, et mérite d’être citée en entier :
    « Comment peut-on respecter, et à plus forte raison adorer, un personnage qui est tellement simplet qu’il ne sait pas que les gens ne peuvent pas vivre comme les oiseaux et les plantes, qui ne peut pas se protéger contre un traître stupide qu’il connaît déjà, qui ne peut pas trouver de réponse intelligente à une accusation mortelle mais improuvable, qui ne comprend pas quand toute l’affaire est transmise à une juridiction différente ? … Au lieu de comprendre que sa physique n’était pas notre physique, que la réalité pour lui n’était pas ce que la réalité est pour nous, nous voulons qu’il soit motivé par des calculs et des principes qui nous motiveraient. Et ainsi ses motivations, au lieu d’être différentes, deviennent ineptes, et un puissant conquérant prétendu qui eut le courage de plier le ciel et la terre à sa volonté devient une victime pusillanime de petites erreurs, de petites intrigues, de petits hommes. Peut-être que son sens de la réalité était faux et que le nôtre est juste – ou du moins c’est ce qu’il semble aujourd’hui. Mais dans son propre monde, dans le concept levantin qui ne peut jamais entièrement séparer ce monde de l’autre, il est le héros épique par excellence. Lui seul osa arrêter l’horloge du monde. C’est vrai, elle ne s’arrêta pas, et nous Occidentaux ne croyons pas qu’on puisse arrêter cette horloge. Mais nous ne pouvons pas voir Jésus des deux manières à la fois. Si nous persistons à le juger d’après notre sens du réel, il devient familier mais vide. Si nous le jugeons d’après son propre sens du réel, il devient l’un des hommes les plus puissants de l’histoire et l’un des plus tragiques – mais un étranger complet. » [17]
    Si nous voulons regarder les morts sacrificielles d’Odin et de Jésus comme des épisodes mythiques plutôt que comme des « vérités » théologiques, ce sont encore les différences qui sont plus évidentes que les similarités. Et si nous prenons ces sacrifices comme des instructions allégoriques pour notre propre comportement ? La torture et les tourments de Jésus sont censés être une voie vers le salut, et il s’ensuit en effet que ses enseignements encourageaient ceux désireux d’atteindre le « ciel » à être doux, humbles, pacifistes, à « tendre l’autre joue », etc. Le fait que durant toute l’histoire les chrétiens ont souvent mal interprété ces enseignements, ou commis la violence malgré ceux-ci, est à coté de la question. Dans le cas d’Odin, nous avons un archétype complètement différent. Il est caractérisé par un effort vers l’auto-connaissance ; par un certain type audacieux d’égoïsme ; par un désir d’évolution indépendante ; par la fierté de ses propres accomplissements (incluant sa remarque qu’on ne lui a pas donné de pain ou de boisson pendant sa pendaison, ce qui pourrait être vu comme une manière de vanter son endurance) ; par des voyages intrépides vers des endroits et des états de conscience inconnus ; et par un désir de transformer les idées et les mots en actions. La pendaison d’Odin est un paradigme symbolique d’auto-initiation, de développement personnel, et de devenir soi-même ; c’est à de nombreux égards l’antithèse du symbole du Christ torturé, qui est fréquemment décrit dans l’iconographie chrétienne comme docilement cloué sur la croix. Cela implique une négation complète du domaine physique, c’est-à-dire la terre et le monde des actions. Un sacrifice permanent comme celui du Christ ne peut en fin de compte symboliser qu’une utopie mystique (c’est-à-dire le « salut » et le ciel), en d’autres mots, une utopie complètement séparée de la réalité terrestre [18].
    La compréhension de l’incompatibilité de ces allégories n’est bien sûr pas nouvelle. Le gouffre entre les deux orientations spirituelles, l’attitude ethnique-religieuse d’« acceptation du monde » contre l’attitude universaliste de « rejet du monde », devinrent évidents sur le plan pratique lorsque des efforts furent entrepris pour christianiser les tribus germaniques d’Europe du Nord durant le premier millénaire de l’Ere Commune [19]. Le fait que le Christ avait été sacrifié d’une manière vaguement similaire à celle d’Odin a pu favoriser le processus d’acceptation d’une vision-du-monde étrangère, mais une telle similarité était loin d’être suffisante pour convaincre les païens d’adopter la nouvelle foi. On peut trouver une indication curieuse de cela dans le Heliand, une version précoce des Evangiles chrétiens écrite en vieux-saxon vernaculaire. Conçu par un poète missionnaire anonyme du IXe siècle de l’ère chrétienne, le Heliand replace l’histoire de la vie de Jésus dans un arrangement complètement nouveau. Jésus n’est plus un prophète juif renégat dans le monde poussiéreux de la Judée sous contrôle romain, mais un chef de tribu germanique habitant dans la forêt, avec un groupe de guerriers dévoués l’entourant à la place des apôtres. La nature pacifiste de ses enseignements est adroitement reformulée de manière à apparaître à peu près inoffensive pour une audience païenne germanique, et la scène culminante de la crucifixion est modifiée par rapport à sa forme originale. Ici le poète a décrit les dernières heures terrestres de Jésus comme une noble bataille entre Christ le Drohtin (chef de tribu) et sa bande guerrière contre les soldats romains. Après avoir été tué, le Sauveur monte au ciel où il s’assoira pour l’éternité sur son trône, « et de là il voit toutes choses, le Christ régnant voit tout ce qui se passe dans le monde » [20]. Cette image finale est distinctement odinique [21], et n’est qu’une parmi beaucoup d’allusions semblables dans le Heliand. Combinées à cet habile « changement d’image » d’une figure du Christ qui serait acceptable pour un païen germanique, il y a d’innombrables exhortations disant que l’on ne doit avoir « aucun doute » après avoir reçu la nouvelle doctrine. Car si quelqu’un conteste ou continue à douter de son article de foi fondamental, le fondement entier de la doctrine chrétienne s’écroule. C’est un contraste radical avec la figure d’Odin, dont la nature inquisitive et questionnante le conduit même à s’« attaquer » lui-même, si cela favorise son propre développement et son propre bénéfice ultimes. Jésus demanderait que vous misiez tout sur une promesse de récompense dans l’autre-monde, jouant ainsi de la peur innée de la mort chez l’homme, alors que l’exemple d’Odin fournit un paradigme de recherche pour le triomphe sur soi-même et l’évolution dans le monde du présent, par lequel on peut accomplir sa propre gloire et, grâce à ses actions, rester dans la mémoire de sa tribu et de sa descendance. En imitant Jésus vous devriez rester fidèle et même souffrir dans l’espoir de recevoir le « salut » divin d’en-haut ; alors qu’en suivant l’exemple donné par Odin – subir ses propres sacrifices et initiations sur les arbres enchantés de la connaissance, de l’intelligence, et du danger –, le demi-dieu inspirant du respect et de la crainte que vous avez des chances de rencontrer se développera puissamment à l’intérieur de vous-même.
    Michael Moynihan http://www.voxnr.com
    Notes :
    Traduction d'un l’article en anglais paru dans le journal TYR, vol. 2, 2003-2004.
    Mes remerciements à Ronald Murphy, S.J., qui a gentiment fourni l’information additionnelle concernant la scène de crucifixion en bronze reproduite dans cet essai. Cette même image apparaît sur la couverture de la fascinante étude de Fr. Murphy, The Saxon Savior: The Transformation of the Gospel in the Ninth-Century Heliand (New York: Oxford, 1989).
    Une première version de cet essai est originellement parue dans Rûna n° 4 (1999).
    [1] Les strophes qui suivent (143-165) doivent aussi être gardées à l’esprit, puisqu’elles exposent les détails de la magie runique d’Odin qu’il a apprise par son rite d’autosacrifice.
    [2] Un exemple succinct se trouve aux pages 42-43 du livre de E.O.G. Turville-Petre, Myth and Religion of the North (New York: Holt, Reinhart and Winston, 1964).
    [3] Le cas d’Odin n’est pas le seul « sacrifice » de dieu païen qui a des similarités avec des aspects du christianisme. Divers auteurs ont soutenu que les scribes bibliques de l’Ancien et du Nouveau Testament ont fondé une grande partie de leur théologie sur des sources païennes, amalgamées pour créer une « nouvelle » religion. Des exemples de travaux de vulgarisation dans ce genre incluent Kersey Graves, The World’s Sixteen Crucified Saviors (New York: Truth Seeker, 1875 ; nombreuses réimpressions) ; J.M. Robertson, Pagan Christs (London: Watts, 1903 ; édition abrégée New York: Dorset, 1996), et Lloyd Graham, Deceptions and Myths of the Bible (New York: Bell, 1979). De tels livres – ainsi que diverses affirmations faites dans cet essai – ne plairont probablement pas beaucoup à certains lecteurs chrétiens. Mon intention ici n’est cependant pas d’attaquer l’adhésion d’une personne à un ensemble particulier de croyances religieuses. Celles-ci concernent l’individu, de même que c’est la prérogative de l’individu de réfléchir – et en fin de compte de les accepter ou de les rejeter – sur les significations profondes des systèmes de croyance auxquels il a été exposé.
    [4] Kevin Crossley-Holland, The Norse Myths (New York: Pantheon, 1980), p. 187. Turville-Petre discute ces similarités encore plus en détail (voir note 9), et remarque (p. 43) : « Si le mythe de la pendaison d’Odin ne dérive pas de la légende du Christ mourant, les deux scènes se ressemblaient si fortement qu’elles finirent par être confondues dans la tradition populaire ».
    [5] J’ai pris cette version dans l’excellente traduction de The Poetic Edda par Henry Adams Bellows (New York: American-Scandinavian Foundation, 1923), où elle apparaît aux pages 60-67.
    [6] Mircea Eliade, A History of Religious Ideas, vol. 2 (Chicago: University of Chicago, 1982), p. 160.
    [7] Havamal, strophe 147. Bellows, The Poetic Edda, p. 63.
    [8] Publié dans Scandinavian Studies, vol. 43, pp. 119-142 et 385-413. Je remercie Stephen Flowers pour avoir attiré mon attention sur cet article.
    [9] Cette question est spécialement traitée, par exemple, aux pages 42-50 de Turville-Petre, Myth and Religion of the North. D’autres détails intéressants peuvent être trouvés dans mon article dans TYR, vol. 1, pp. 89-91.
    [10] J’ai basé mes commentaires des détails de la crucifixion sur deux sources : d’abord, l’analyse détaillée de 340 pages de tout l’événement dans Haim Cohn, The Trial and Death de Jesus (New York: Harper & Row, 1971) ; ensuite, l’analyse « scientifique » d’un article intitulé « On the Physical Death of Jesus Christ » par William D. Edwards, M.D., Wesley J. Gabel, M.Div., et Floyd Hosmer, M.S., AMI, paru originellement dans un numéro de 1986 du Journal of the American Medical Association et qui fut plus tard réimprimé sous une forme abrégée comme appendice à Tortures and Torments of the Christian Martyrs par Rev. Antonio Gallionio (Los Angeles: Feral House, 1989).
    [11] Comme Joscelyn Godwin me l’a signalé, une histoire apocryphe connue sous le nom de « Les tourments de l’Enfer » dit que durant l’intervalle entre sa crucifixion et sa résurrection, le Christ descendit en Enfer ou dans le Hadès pour apporter le salut aux âmes captives en ce lieu. Cette histoire, une addition du IVe siècle à l’Evangile de Nicodème, ressemble à une concession syncrétique ou à un enjolivement opportun pour rendre les enseignements chrétiens plus acceptables pour les non-croyants. Une telle histoire pouvait aider à convaincre un converti réticent que ses propres ancêtres (qui ne pouvaient pas avoir entendu parler des Evangiles) pouvaient aussi atteindre le ciel par quelque mystère de la grâce du Christ. Mais apparemment quelques missionnaires ne comprenaient pas l’utilité de cela. Tel fut le cas de Wulfram, qui fut envoyé convertir les Frisons à la fin du VIIe siècle et au début du VIIIe. D’après la Vita Wulframi, le dernier roi païen, Radbod, était sur le point de recevoir le baptême lorsqu’il demanda à Wulfram si ses ancêtres étaient au ciel et en enfer. Le missionnaire répondit qu’ils étaient en enfer, avec tous les autres incroyants. Radbod interrompit alors la cérémonie, et déclara qu’il préférait être damné et vivre en enfer avec ses honorables ancêtres plutôt que de monter au ciel avec une « bande de mendiants ».
    [12] Pour une investigation sociolinguistique des implications de ces termes et leurs origines culturelles dans les anciennes pratiques religieuses indo-européennes, voir Emile Benveniste, Indo-European Language and Society (Coral Gables: University of Miami, 1973), pp. 452-456. A cet égard, il est également intéressant d’examiner les origines étymologiques du mot « victime ». Le fait qu’Odin semble voyager vers le royaume des morts durant son rite d’auto-pendaison fait fortement écho à cette notion indo-européenne de sacrifice.
    [13] Les diverses définitions du sacrifice, ainsi que sa fonction de « pot-de-vin » religieux, sont discutées aux pages 13-35 de E.O. James, Sacrifice and Sacrament (London: Thames and Hudson, 1962).
    [14] James, Sacrifice and Sacrament, p. 73.
    [15] Havamal, strophe 142. Bellows, The Poetic Edda, p. 61.
    [16] Julius Evola, Revolt Against the Modern World, transl. Guido Stucco (Rochester, Vermont: Inner Traditions, 1995), pp. 30-31.
    [17] Lawrence Brown, The Might of the West (Washington, D.C. and New York: Joseph Binns, 1963), pp. 224-225.
    [18] Une clarification nécessaire : mon intention ici n’est pas de dépeindre Odin comme une sorte de gourou déifié enseignant le « développement personnel » à l’humanité, et son caractère symbolique global comporte de nombreux aspects problématiques dus à sa nature à plusieurs facettes. Dans les temps anciens il est probable que seul un petit nombre de gens le considéraient comme leur dieu-patron, et ceux-ci étaient généralement des membres de la plus haute aristocratie. Les épreuves demandées à ceux qui voulaient se dédier à lui étaient souvent extrêmes, et pouvaient entraîner la mort pour l’adepte. Odin est aussi bien connu pour sa nature trompeuse et moralement ambigüe, qui, si elle était activement imitée par une partie importante de la population, entraînerait probablement un désastre pour n’importe quelle société.
    [19] Pour une discussion détaillée de ces questions dans le contexte des conversions germaniques continentales, voir James C. Russel, The Germanization of Early Medieval Christianity (New York: Oxford, 1994). Les chapitres 3 (« Sociohistorical Aspects of Religious Transformation ») et 4 (« Sociopsychological Aspects of Religious Transformation ») sont particulièrement intéressants à cet égard.
    [20] G. Ronald Murphy, S.J., The Saxon Savior (New York: Oxford, 1989), p. 115.
    [21] Dans le commentaire de sa traduction du Heliand, Murphy note : « Dans les Ecritures le Christ est assis à la droite du Père, mais il n’y a pas de commentaire sur le regard qu’il porte sur le monde. Dans la mythologie germanique, une caractéristique ultime de Woden est qu’après avoir souffert sur l’arbre, il regarde toujours le monde depuis son trône et est au courant de tout ce qui se passe » (The Heliand: The Saxon Gospel, transl. G. Ronald Murphy [New York: Oxford, 1992], p. 198, note 319). Plus spécifiquement, les corbeaux d’Odin, Hugin et Munin, lui servent « d’yeux et d’oreilles » en partant en reconnaissance et en lui racontant tout ce qui se passe dans Midgard.
  • Voilà l’ennemi…

    Quand la République est érigée en idéologie, elle prend les allures d’une religion. Celle du diable. Ça se passe de commentaires…

    http://www.contre-info.com/