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culture et histoire - Page 1144

  • Gueniffey : « Robespierre incarne de façon chimiquement pure l'idée de la table rase »

    Nous l'avons déjà évoqué, dans Lafautearousseau :  Danielle Simonnet, coordinatrice du Parti de gauche, a récemment formulé le vœu qu'une rue de Paris porte le nom de Maximilien de Robespierre. Mais qui était-il ? Dans un intéressant entretien donné à Figarovox [20.06], l'historien Patrice Gueniffey souligne, notamment, la responsabilité que le révolutionnaire porte dans la Terreur.  LFAR

    Quelle place Robespierre occupe-t-il dans la mémoire républicaine ?

    Le consensus républicain sur la Révolution française, au début de la IIIe République, s'est fondé sur l'exclusion de Robespierre du Panthéon des grands hommes de la décennie 1789-1799. Cette interprétation, forgée par les Thermidoriens dès le lendemain de la chute de Robespierre, a été popularisée par les manuels scolaires canoniques (Lavisse, Malet et Isaac) de la Belle Epoque. La IIIe République acceptait tout de 1789 à la chute des Girondins (juin 1793), et triait dans la période qui commence en juin 1793. Elle acceptait Danton et Carnot, qui représentaient la défense nationale, et refusait Robespierre, qui incarnait la guerre civile et la Terreur. Par ailleurs, le culte de l'Etre suprême cher à l'Incorruptible était suspect aux yeux de ces anticléricaux. C'est à l'occasion du centenaire de la Révolution, en 1889, qu'est érigée la statue de Danton place de l'Odéon à Paris. Le représentant de cette sensibilité parmi les historiens de l'époque, c'est Alphonse Aulard.

    Pourtant, Clemenceau et Jaurès revendiquaient « l'Incorruptible » ?

    Oui, mais l'un était radical et l'autre socialiste, donc beaucoup plus à gauche que les « pères fondateurs » de la IIIe République (Jules Ferry, Jules Grévy, Jules Simon, etc.). Après eux, le PCF va batailler pour réintégrer Robespierre dans la mémoire glorieuse de la Révolution. L'historien Albert Mathiez est l'interprète de cette thèse à l'université. Il célèbre l'Incorruptible en raison même de la Terreur, instrument, à ses yeux, de l'égalité sociale projetée par Robespierre. Et il est vrai que celui-ci préconisait un impôt progressif sur le revenu, idée qui révulsait jusqu'aux Montagnards respectueux de la propriété privée.

    Les pétitionnaires qui demandent une rue Robespierre à Paris reprennent donc une revendication classique des communistes ?

    En effet, mais sans l'assumer. Le PCF, du temps de sa puissance, réclamait une rue Robespierre à Paris (il y en a, et même une station de métro, dans les anciens bastions communistes) en se fondant sur son action, laquelle incluait la Terreur. Aujourd'hui, leurs épigones demandent une rue Robespierre en alléguant qu'il n'était pour rien dans la Terreur. C'est le paradoxe: ces pétitionnaires rabaissent le rôle historique de l'Incorruptible afin de le défendre. Ils le rapetissent pour le rendre plus présentable. En somme, c'est une réhabilitation de la Terreur qui n'ose pas se revendiquer comme telle, avec des arguments sommaires. Une sorte de Nuit Debout appliquée à l'interprétation de la Révolution.

    Sur le fond, Robespierre était-il responsable de la Terreur ?

    Robespierre est l'un des responsables, parmi d'autres, de la Terreur qui a débuté en 1793. A l'époque, d'autres (Fouché, Tallien, Barras), envoyés en mission en province, sont beaucoup plus directement responsables de massacres. En revanche, Robespierre est le principal responsable de la Terreur pendant la période qui va de l'exécution de Danton en avril 1794 à sa propre chute en juillet. La loi du 22 Prairial (10 juin 1794), la plus terroriste de la Révolution, est son œuvre et inaugure la Grande Terreur. Elle supprime les rares garanties procédurales encore accordées aux accusés. Et le tribunal révolutionnaire n'a qu'une alternative: l'acquittement ou la mort. Dès lors, la guillotine fonctionne à une cadence exponentielle. Jusqu'alors, les partisans de la Terreur l'avaient justifiée par les circonstances exceptionnelles (la nécessité de punir les ennemis intérieurs et extérieurs). A partir de Prairial, et par la volonté directe de Robespierre, la Terreur devient consubstantielle à la Révolution. La Terreur n'a plus d'objectif précis ni de fin assignée. Son objectif est de paralyser toute opposition, mais elle multiplie aussi les adversaires de Robespierre, qui ont peur pour leur tête. C'est une période où il n'y a plus ni lois ni règles. Le seul enjeu, pour les conventionnels, c'était de rester en vie.

    Diriez-vous que la Grande Terreur a été une expérience proto-totalitaire ?

    Oui, cette période a vu l'invention du phénomène idéologique tel qu'on le verra ensuite dans d'autres révolutions. Du reste, Lénine s'en est inspiré pour élaborer sa théorie de la conquête du pouvoir et de la terreur comme instrument au service de la révolution. Pour que l'hécatombe se transforme en un massacre sans exemple dans l'histoire, il ne manquait rien: il y avait une idéologie, une rhétorique du bouc émissaire, la paranoïa révolutionnaire, le culte du chef (l'Incorruptible), des comités, des tribunaux d'exception, un système de surveillance et de délation généralisé. Il ne manquait qu'une chose: le parti. Les jacobins, malgré leurs efforts, n'ont jamais réussi à former un parti homogène et centralisé. Heureusement. Ce qui fait le grand intérêt de Robespierre, c'est précisément la responsabilité, en grande partie, de la Terreur. Il incarne, d'une façon presque «chimiquement» pure, l'idée moderne de la révolution et de la table rase.  

    Grand historien de la Révolution française et de l'Empire, Patrice Gueniffey, ancien élève de François Furet, est directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Parmi ses ouvrages qui ont le plus marqué figure « La Politique de la Terreur. Essai sur la violence révolutionnaire, 1789-1794 » (Fayard, 2000) . Son dernier livre, « Bonaparte » (Gallimard, 862 p., 30€), a reçu le grand prix de la biographie historique 2013.

    Guillaume Perrault

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/

  • Quand le consul Marius a sauvé la civilisation face aux barbares il y a 21 siècles

    Une méditation pour le temps présent, où nous sommes, comme jadis, menacés par les barbares et par une nouvelle barbarie...

    En évoquant ce haut fait romain d'il y a vingt et un siècles, l'exploit du consul Caïus Marius, on parle aussi, en réalité, d'aujourd'hui, de notre présent et de ses immenses dangers....

    De sorte qu'en racontant ce qui s'est passé hier, c'est une allégorie de notre aujourd'hui qui transparaît.

    Notre aujourd'hui réel : inquiétude(s), doute(s), angoisse(s), défaitisme.

    Et notre aujourd'hui rêvé, et possible : l'espérance inébranlable, la foi en nos valeurs, la lutte et... la victoire !

    Cette évocation a été faite aux Baux, en public et en plein air, dans le cadre d'unRassemblement Royaliste, dans les années 1990.

    Caïus MARIUS from Lafautearousseau on Vimeo

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/

  • L'université fabrique de la pensée clonée

    Interrogé dans L'Homme Nouveau à propos de son dernier ouvrage La Guerre civile qui vient, Ivan Rioufol explique d'où vient l'absence de liberté d'expression :

    6a00d83451619c69e201bb09198144970d-200wi.jpg"C’est le fruit d’un lent mais efficace processus de subversion idéologique d’essence marxiste dont on trouve la source dans le principe de la cooptation mis en place dans les universités placées sous tutelle communiste dans l’immédiat après-guerre par Charles De Gaulle. La cooptation, qui permet les promotions des universitaires et des chercheurs sur des critères corporatistes et politiques, a privilégié la pensée « progressiste » au détriment de la pensée autonome. Cet entre-soi a fait des dégâts considérables en marginalisant des pensées dissidentes. L’ahurissant conformisme des sociologues, qui ne veulent rien voir des mutations dérangeantes de la société, est un exemple parmi d’autres des aberrations produites par ce système.

    Bien des esprits libres ont ainsi été écartés de cette fabrique de la pensée clonée qu’est devenue l’université. La porosité de ce monde avec celui des médias a consolidé le poids du politiquement correct. C’est lui qui cadenasse la pensée au point d’empêcher bien des intelligences de se confronter au réel. Vouloir comprendre ce qui se passe en France et en Europe, cette crise civilisationnelle inédite que les « élites » cherchent à mettre sous le tapis, oblige à sortir de ce piège."

    Michel Janva

  • POLYBE : LA RÉVOLTE DES MERCENAIRES (241-238 AV. J.-C.)

    Le traité de paix conclu et ratifié, Amilcar conduisit l’armée du camp d’Eryce à Lilybée, et là se démit du commandement. Gescon, gouverneur de la ville, se chargea du soin de renvoyer ces troupes en Afrique ; mais prévoyant ce qui pouvait arriver, il s’avisa d’un expédient fort sage. Il partagea ces troupes, et ne les laissa s’embarquer que partie à partie, et par intervalles, afin de donner aux Carthaginois le temps de les payer à mesure qu’elles arriveraient et de les renvoyer chez elles avant que les autres débarquassent.

    Les Carthaginois, épuisés par les dépenses de la guerre précédente, et se flattant qu’en gardant ces mercenaires dans la ville, ils en obtiendraient quelque grâce sur la solde qui leur était due, reçurent et enfermèrent dans leurs murailles tous ceux qui abordaient. Mais le désordre et la licence régnèrent bientôt partout ; nuit et jour on en ressentit les tristes effets. Dans la crainte où l’on était que cette multitude de gens ramassés ne poussât encore les choses plus loin, on pria leurs officiers de les mener tous à Sicca, de leur faire accepter à chacun une pièce d’or pour les besoins les plus pressants, et d’attendre là qu’on leur eût préparé tout l’argent qu’on était convenu de leur donner, et que le reste de leurs gens les eussent joints. Ces chefs consentirent volontiers à cette retraite ; mais comme ces étrangers voulurent laisser à Carthage tout ce qui leur appartenait, selon qu’il s’était pratiqué auparavant, et par la raison qu’ils devaient y revenir bientôt pour recevoir le paiement de leur solde, cela inquiéta les Carthaginois. Ils craignirent que ces soldats réunis, après une longue absence, à leurs enfants et à leurs femmes, ne refusassent absolument de sortir de la ville, ou n’y revinssent pour satisfaire à leur tendresse, et que par là on ne revît les mêmes désordres. Dans cette pensée ils les contraignirent, malgré leurs représentations, d’emmener avec eux à Sicca tout ce qu’ils avaient à Carthage. Là cette multitude vivant dans une inaction et un repos où elle ne s’était pas vue depuis longtemps, fit impunément tout ce qu’elle voulut, effet ordinaire de l’oisiveté, la chose du monde que l’on doit le moins souffrir dans des troupes étrangères, et qui est comme la première cause des séditions. Quelques-uns d’eux occupèrent leur loisir à supputer l’argent qui leur était encore dû, et, augmentant la somme de beaucoup, dirent qu’il fallait l’exiger des Carthaginois. Tous se rappelant les promesses qu’on leur avait faites dans les occasions périlleuses, fondaient là-dessus de grandes espérances, et en attendaient de grands avantages. Quand ils furent tous rassemblés, Hannon, qui commandait pour les Carthaginois en Afrique, arrive à Sicca ; et loin de remplir l’attente des étrangers, il dit : que la république ne pouvait leur tenir parole ; qu’elle était accablée d’impôts ; qu’elle souffrait d’une disette affreuse de toutes choses, et qu’elle leur demandait qu’ils lui fissent remise d’une partie de ce qu’elle leur devait. A peine avait-il cessé de parler, que cette soldatesque se mutine et se révolte. D’abord chaque nation s’attroupe en particulier, ensuite toutes les nations ensemble ; le trouble, le tumulte, la confusion tels que l’on peut s’imaginer parmi des troupes de pays et de langage différents.

    Si les Carthaginois, en prenant des soldats de toute nation, n’ont en vue que de se faire des armées plus souples et plus soumises, cette coutume n’est pas à mépriser ; des troupes ainsi ramassées ne s’ameutent pas sitôt pour s’exciter mutuellement à la rébellion, et les chefs ont moins de peine à s’en rendre maîtres. Mais d’un autre côté, si l’on considère l’embarras où l’on est quand il s’agit d’instruire, de calmer, de désabuser ces sortes d’esprits, toutes les fois que la colère ou la révolte les agite et les transporte, on conviendra que cette politique est très mal entendue. Ces troupes une fois emportées par quelques-unes de ces passions, dépassent toutes bornes : ce ne sont plus des hommes, ce sont des bêtes féroces ; il n’est pas de violence qu’on n’en doive attendre. Les Carthaginois en firent dans cette occasion une triste expérience. Cette multitude était composée d’Espagnols, de Gaulois, de Liguriens, de Baléares, de Grecs de toute caste, la plupart déserteurs et valets, et surtout d’Africains. Les assembler en un même lieu, et là les haranguer, cela n’était pas possible ; car comment leur faire entendre ce que l’on avait à leur dire ? Il est impossible qu’un général sache tant de langues : il l’est encore plus de faire dire quatre ou cinq fois la même chose par des interprètes. Reste donc de se servir pour cela de leurs officiers, et c’est ce que fit Hannon. Mais qu’arriva-t-il ? souvent ou ils n’entendaient pas ce qu’il leur disait, ou les capitaines, après être convenus de quelque chose avec lui, rapportaient à leurs gens tout le contraire, les uns par ignorance, les autres par malice. Aussi ne voyait-on qu’incertitude, que défiance, que cabale partout. D’ailleurs ces étrangers soupçonnaient que ce n’était pas sans dessein que les Carthaginois, au lieu de leur députer les chefs qui avaient été témoins de leurs services en Sicile et auteurs des promesses qui leur avaient été faites, leur avaient envoyé un homme qui ne s’était trouvé dans aucune des occasions où ils s’étaient signalés. La conclusion fut : qu’ils rejetèrent Hannon ; qu’ils n’ajoutèrent aucune foi à leurs officiers particuliers, et qu’irrités contre les Carthaginois, ils avancèrent vers Carthage au nombre de plus de 20.000 hommes, et prirent leurs quartiers à Tunis, à 26 stades de la ville.

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  • Najat Valaud-Belkacem rallume la guerre scolaire

    Le ministre de l'Éducation dite nationale, Najat Valaud-Belkacem, rallume la guerre scolaire, en s'en prenant, cette fois, aux écoles hors contrat et à l'éducation à domicile : les établissements hors contrat devraient, dès la rentrée 2017, être soumis à un régime d'autorisation préalable d'ouverture, et non plus à un simple signalement aux autorités après ouverture ; quant à l'enseignement à domicile, il serait plus étroitement contrôlé, les parents pouvant être soumis à des contrôles écrits ou oraux de la part des rectorats.

    Pour le ministre, il s' agit officiellement d'empêcher que ces formes d'enseignement soient l'occasion d'un « repli communautaire » et favorisent la radicalisation des jeunes de religion islamique. Mais la vérité est que le gouvernement, ayant vu d'un bien mauvais œil la progression de l'éducation à domicile depuis 2014, date de l'introduction de la théorie du genre à l'école (de 19 000 enfants à 25 000 actuellement !), veut relancer le combat laïciste et reprendre en mains tous les enfants français. II s'agit donc d'une mesure éminemment liberticide que la dame ministre entend imposer par ordonnances afin d'aller vite et d'esquiver tout débat parlementaire.

    Les parents sont donc réellement agressés et dresseront sans doute une levée de boucliers qui ne manquera pas de faire du bruit. Ils ne se laisseront pas déposséder de leurs droits et de leurs devoirs concernant leurs enfants, dont ils sont, par nature, responsables devant Dieu et devant les hommes. L'on risque fort de voir réapparaître le climat irrespirable des années 1981 à 1984. La république a besoin de se retremper périodiquement dans ses sources terroristes...

    Rapt d’enfants

    Les socialistes n'ont rien appris ni rien oublié depuis le fameux plan dit Lange-vin-Wallon de 1947. Ce texte d'inspiration communiste était très clair : « Ce sont, les services dépendant du ministère de l'Éducation nationale qui ont en charge les responsabilités de l'enseignement et de l’éducation à tous les niveaux et sous tous les aspects... C'est à l'Éducation nationale qu'incombe la mission de l'éducation pour tous les enfants. »

    Voilà pourquoi la république socialo-communiste doit être considérée comme une vaste entreprise de rapt d'enfants !

    Tapis dans l'ombre et piaffant de n'être pas encore au pouvoir, les socialistes ont fortement influencé la politique scolaire sous la IVe république et au début de la V. Ils étaient déjà dans la place au ministère de la rue de Grenelle, et les ministres fantoches, prétendus de droite, ne manifestaient aucune volonté d'échapper à leur influence, si bien que la loi Debré du 31 décembre 1959, établissant un semblant de paix scolaire par le régime des contrats, s'en ressentit : Charles De Gaulle avait trop besoin du soutien de la gauche pour perpétrer son mauvais coup contre l'Algérie française...

    Mais les socialistes, sentant que le pouvoir allait un jour tomber dans leurs mains comme un fruit mûr, multipliaient alors les textes annonçant leur volonté de rallumer la guerre scolaire. Dans le Plan socialiste de l'Éducation, Louis Mexandeau, futur ministre des PTT de François Mitterrand, disait vouloir utiliser le système éducatif « pour la stratégie de rupture avec le capitalisme », afin qu'il soit « un lieu privilégié  d'apprentissage de la démocratie autogestionnaire », une « école de front de classe », un « facteur d'émancipation et de contestation » et, comme tel, « se trouvant en convergence avec la classe révolutionnaire antagoniste de la classe dirigeante, [il sera] l'un des terrains et l'un des enjeux de la lutte des classes. » Et il ajoutait : « les socialistes refusent un dualisme scolaire qui consacrerait l'installation permanente de deux systèmes parallèles et concurrents, tous deux financés par l'État. » C'était très clair : on pouvait deviner à quelle sauce allaient être mangés les enfants français, avant même l'âge de six ans, sacrifiés sur l'autel de l'idéologie officielle.

    Les socialistes fauteurs de guerres scolaires

    L'on vit dès l'arrivée à l'Elysée de François Mitterrand en 1981 que les socialistes étaient bien décidés à appliquer leur programme d'assassinat de l'école libre. Ils rallumèrent sciemment, et farouchement, la guerre scolaire, sans même venir offrir à leurs adversaires l'honneur de tirer les premiers.

    Le parti socialiste était, et est toujours, un parti essentiellement et intrinsèquement éducateur. Il agit et agira toujours au nom d'une vision de l'homme et visera toujours à une refonte de l'homme et de la société. Pour réussir, il importe moins à ce parti de résoudre la crise économique, ou le problème du chômage, que d'amener les Français à se débarrasser de l'idée même d'un destin personnel, d'un salut personnel, d'une finalité que chacun accomplit au sein de sa famille, de sa profession, d'une responsabilité propre à chacun. Le socialisme réduit l'homme à sa seule fonction sociale, à sa seule dimension économique, il supprime tout ce qui relie l'homme personnellement à quelque chose de plus haut que l'organisation rationnelle et égalitaire des biens d'ici-bas. Quiconque refuse de se laisser ainsi réduire est un ennemi de classe, un bourgeois...

    Pour changer la société, il faut changer la mentalité du peuple. Il faut donc s'emparer de tout ce qui touche à la culture et mettre l'enseignement, depuis la maternelle jusqu'au supérieur, sous la dépendance du pouvoir de l'État. Si le quinquennat de François Hollande fut minable sur le plan économique et social, il aura quand même bien mérité du parti socialiste, car il aura réussi, semble-t-il, à changer les mentalités sur le mariage homosexuel, sur le divorce, sur l'école et sur mille choses qui tournent le dos à l'ordre naturel.

    Les grands ancêtres contre la famille

    Les grands ancêtres des socialistes d'aujourd'hui sont en fait les "philosophes" du XVIIIe siècle. Pour eux, il n'existait plus que l'individu seul, détaché de tout ce qui le caractérise : sa famille, son passé, sa région, son métier, sa religion. Cet individualisme forcené se dressait contre la tradition, contre le catholicisme, contre l'autorité, et même contre l'Histoire. On imaginait déjà la destruction de tous les organismes naturels - corporations, provinces, paroisses, religion - qui avaient toujours encadré l'homme et soutenu les individus ; de telles théories n'accordaient évidemment que très peu de place à la famille et au rôle de celle-ci dans la transmission des mœurs. Puisque tous les citoyens doivent se ressembler, libres et égaux, puisqu'il s'agit de les "libérer" des traditions qui créent entre eux des différences, mieux vaut que l'éducation soit confiée à l'État...

    C'est ainsi que ce siècle prétendu libérateur fut celui de l'exaltation de l'étatisme. Le rêve des philosophes était le « despotisme éclairé » et un Denis Diderot (1713-1784) écrivait à l'impératrice Catherine de Russie qu'elle devait se réserver le contrôle total de l'instruction publique. L'État devait en quelque sorte devenir directeur de conscience.

    Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) alla plus loin encore : il s'agissait de débarrasser l'individu de ses contrefaçons de civilisé. L'homme est né bon ; s'il y a des coquins, c'est parce que la civilisation, développant la propriété, donc l’égoïsme et les inégalités, a corrompu cet homme bon. Il faut donc régénérer l'individu, l'obliger à briser ses chaînes et remettre à l'État le soin de définir et de promouvoir la liberté. L'éducation aura pour but principal de développer la vertu chez l'enfant - entendez l'état de nature - et l'on trouve sous la plume de Jean-Jacques dans l’Encyclopédie : « On doit d'autant moins abandonner aux préjugés des pères l'éducation de leurs enfants qu'elle importe à l’État plus qu'aux pères. L'Éducation publique, sous les règles prescrites par le gouvernement et sous les magistrats établis par le souverain est donc une des maximes fondamentales du gouvernement légitime et populaire. »

    La croyance en un individu libre, partout égal à lui-même, ne devant rien ni à Dieu ni à la société, s'érigea vite en dogme qu'il fallait répandre comme on propage... une religion ! Et cette religion allait avoir ses dogmes définis et surveillées par une espèce de haute autorité agissant comme un clergé. Ce fut la franc-maçonnerie qui s'y employa dès la seconde partie du siècle, se posant comme le véritable pouvoir culturel, organisant ses universités et ses sociétés de conférences où, évidemment, étaient débattues les questions relatives à l'éducation.

    Puis, après 1789, vint le temps des discours grandiloquents. Sous la Constituante et sous la Législative, l'enseignement fut totalement désorganisé. Arriva alors la Convention qui créa un comité de vingt-quatre membres pour s'atteler à une « tâche éducative » : en firent partie des ennemis de la religion comme le chimiste Antoine-François Fourcroy (1755-1809) qui rêvait de réaliser le vœu de Voltaire « d'écraser l'Infâme », ou Anacharsis Cloots (1755-1794), un Prussien qui se déclarait « l'ennemi personnel de Jésus-Christ », ce qui n'était pas se prendre pour n'importe qui et qui ne l'empêcha pas de passer à la guillotine ! On entendit aussi cette phrase "inspirée" de Rabaut-Saint-Etienne (1743-1793), ce pasteur nîmois qui avait été l'un des principaux rédacteurs de la Déclaration des Droits de l'Homme : « L'enfant qui n'est pas encore né appartient déjà à la Patrie » (sic).

    Robespierre eut aussi des idées sur le sujet : « Les enfants sont la propriété de l'Etat, les parents n'en sont que les dépositaires. » (sic) Et de préconiser de mettre tous les enfants à l'école de l'État de cinq à quinze ans pour les garçons, de cinq à onze ans pour les filles. Mais l'œuvre éducative de la Convention fut lamentable et bien vite instituteur fut synonyme d'ivrogne, car on en trouvait rarement qui sussent lire.

    Les conventionnels affirmaient que l'enseignement était libre en France, mais la guillotine était là pour expliquer comment cela devait s'entendre. Dame Valaud-Belkacem ose, comme eux, déclarer que ses mesures contre l'école hors contrat et contre l'école à domicile respectent la liberté d'enseignement. Le mensonge est, cette fois, beaucoup trop gros pour dissuader les familles de se mobiliser...

    Michel Fromentoux Rivarol du 16 juin 2016

  • Maurice G. Dantec : Suite et pas fin

    “Je ne suis pas un écrivain de café pour fleuriste. Je ne fais pas de storyboard dont je remplis les cases à l’avance. C’est le roman qui dicte ses conditions. Je suis un vecteur, un médiateur, j’suis un translateur. C’est tout ce que je suis. Je suis là pour donner une voix à des gens – je dis bien à des personnes – qui demandent à exister. Qui demandent à avoir la parole, car avoir la parole aujourd’hui, c’est devenu un luxe. Il faut donc des gens qui portent la voix, et ben… c’est mon job.”

    Maurice G. Dantec a pris l’autre chemin.

    Dantec avait franchi le dernier pont le reliant au “Vieux Continent” à 39 ans, afin de rejoindre l’Amérique du Nord. Une rupture tout à la fois contrainte, consentie et vécue comme une renaissance ou une mutation. Il fallait traverser l’Atlantique, comme le baptisé doit s’immerger dans l’eau pour revenir à la vie. Partir à presque quarante ans, avec sa femme et son enfant, n’est pas, pour un survivant du prolétariat post-communiste francilien, un voyage d’agrément. C’est déjà mourir. La fraîcheur qui nimbe la terre natale ne trouve pas de seconde vie sur une terre étrangère qui reste, pour toujours, désenchantée. Il manque les souvenirs qui posent leur empreinte sur l’âme et le cœur.

    Maurice était un auteur “destroy”, bricolant, tentant des spéculations, parfois dans la confusion. Son catholicisme amusait parce que ce converti, venu des ruines de la banlieue rouge, pouvait se laisser aller au hasard du bavardage. Mishima disait qu’à un certain point, les mots rongent et que l’action leur est préférable. Mais dire de sa conversion qu’elle était un artifice identitaire serait erroné.

    Il y a la conversion de ce rescapé de la banlieue rouge qui coïncide avec son départ vers l’Amérique. Il y a l’exil et l’exil intérieur. Désapprendre et apprendre, quitte à errer.

    Partir, pour Dantec, c’était abandonner l’Europe et la France où il avait grandi. En 2004, exilé depuis six ans au Canada français, il écrit, probablement par désespoir, au Bloc Identitaire :

    “Votre combat, sans doute bien difficile, pour empêcher la dissociation de la France, l’Islamisation de l’Europe, la dissolution de l’Occident (le vrai), me touche profondément, car veuillez m’excuser de ce pessimisme spenglerien, j’ai franchement l’impression que ce qui fut mon pays (et l’est encore à bien des égards) est FOUTU.”

    Dantec, c’est essentiel à comprendre, estime dès cette époque et, par évidence bien avant, que “ce qui fut son pays” est “foutu”. Ce regard pessimiste sur un pays qu’il a quitté explique bien des choses.

    Dantec n’est pas un politique ni un doctrinaire. Les attaques dont il a été l’objet, généralement pour son soutien aux USA de George W. Bush ou d’Israël, occultaient une différence essentielle entre lui et ceux qui le dénonçaient, depuis la France : la conscience du rôle déterminant de la culture dans l’histoire en lieu et place d’un structuralisme victimaire partagé par la gauche et la droite hexagonales. Structuralisme qui s’était cristallisé à l’époque dans une haine irrationnelle, pulsionnelle, névrotique de l’Amérique, d’un bloc.

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  • "INSOUMIS", le CD du Dr Merlin est à nouveau en vente

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    Le CD du Dr Merlin cliquez là est à nouveau disponible

    sur notre site de diffusion cliquez ici

    http://synthesenationale.hautetfort.com/

  • Mathieu Slama : « Le grand drame de la modernité »

    Mathieu Slama, essayiste, vient de publier son premier livre : La guerre des mondes : réflexions sur la croisade idéologique de Poutine contre l’Occident. Nous publions d'autant plus volontiers l'entretien qu'il vient de donner à Boulevard Voltaire [23.06] qu'il y exprime des idées tout à fait essentielles qui sont nôtres et qu'en peu de mots il définit la nature de l'affrontement entre la modernité et la tradition. Soit, « deux grandes visions du monde concurrentes : le monde libéral d’un côté, exaltant l’individu et son émancipation ; et le monde de la tradition, exaltant la communauté et l’enracinement. » Qu'on veuille bien lire cet entretien et l'on comprendra davantage encore pourquoi nous avons écrit le 27 mai dernier, à propos de son premier livre : « Nous prévenons les lecteurs de Lafautearousseau; ces réflexions sont importantes. Il faudra être attentifs désormais aux publications de Mathieu Slama ! ». Nous confirmons. LFAR  

    Vous parlez d’une croisade de Moscou contre l’Occident, mais l’offensive n’est-elle pas plutôt menée par les États-Unis, Poutine se bornant à défendre les traditions ?

    Il y a sans doute une part de provocation dans le choix du mot « croisade », mais aussi deux raisons essentielles : d’abord, Poutine lui-même a décidé, depuis quelques années, de s’attaquer frontalement au modèle libéral des sociétés occidentales. Non seulement il défend les valeurs traditionnelles de la Russie, mais il s’en prend explicitement aux pays euro-atlantiques, et à l’Europe tout particulièrement, qu’il accuse de rejeter ses racines et de tomber dans le « primitivisme », au mépris des « valeurs spirituelles de l’humanité ». Ensuite, le mot « croisade » contient une dimension éminemment religieuse, et il se trouve que c’est aussi sur ce terrain que Poutine s’en prend à l’Occident. Défendant « les valeurs de la famille traditionnelle, de la vie humaine authentique, y compris de la vie religieuse des individus », il s’est attaqué à plusieurs reprises à la conception européenne de la laïcité. On connaît aussi sa proximité affichée avec l’Église orthodoxe, qu’il lie étroitement, dans ses discours, au destin national de la Russie. 

    Voici l’intuition de mon livre : ce qui se joue dans le conflit entre Poutine et les pays occidentaux est bien plus fondamental qu’un simple conflit d’intérêts sur les dossiers syrien ou ukrainien. Il y a, en arrière-plan de tout cela, le retour d’un vieil affrontement entre deux grandes visions du monde concurrentes : le monde libéral d’un côté, exaltant l’individu et son émancipation ; et le monde de la tradition, exaltant la communauté et l’enracinement.

    Vous présentez Poutine comme une personnalité attachée à l’égalité entre les nations. Mais est-il vraiment cet apôtre du droit international et de la non-ingérence ? Nous pensons à la Géorgie, à l’Ukraine. Stratégie rhétorique ?

    Un des mots les plus souvent utilisés par Poutine est « diversité du monde ». Dans son discours, l’Occident se rend coupable de vouloir modeler le monde à son image. Il y a là un argument essentiel qu’il faut entendre (stratégie rhétorique ou non) : l’Occident est persuadé que son modèle libéral est applicable au monde entier. Il suffit de feuilleter les reportages dans les médias français sur l’Iran, par exemple : on célèbre ce pays parce qu’il s’occidentalise ! Mais on crie à l’obscurantisme dès qu’il s’agit d’évoquer ses composantes traditionnelles. C’est tout le paradoxe de nos sociétés libérales : nous exaltons l’Autre mais ce n’est que pour annihiler son altérité. Il y a, dans cet universalisme occidental, un mélange d’incompréhension et de mépris. Cet universalisme est aussi dangereux quand il se transforme en action extérieure (cf. les ingérences occidentales catastrophiques au Moyen-Orient).

    En revanche, il est exact que Poutine ne s’applique pas forcément cette règle de non-ingérence. Poutine n’est pas un saint : il y a, chez lui, une ambition impériale, liée à une volonté de protéger les intérêts stratégiques de la Russie face à une Amérique agressive et intrusive. Comme le disait Soljenitsyne, qui s’inquiétait du renouveau impérialiste russe, plutôt que de chercher à s’étendre, la Russie devrait plutôt s’attacher à conserver l’âme du territoire qu’il lui reste. 

    Faisant l’éloge de l’enracinement, vous prenez l’exemple de Bilbo, un Hobbit frileux à l’idée de quitter sa terre natale pour partir à l’aventure. Attachement que vous qualifiez de « noble ». Or, il me semble plutôt que les Hobbits incarnent cette prudence petite-bourgeoise, aux antipodes de la vraie noblesse qui est lutte pour la vie, mépris du confort matériel et passion pour les équipées lointaines.

    Pour illustrer les limites du modèle libéral occidental, j’évoque, en effet, la belle parabole de Tolkien sur le combat de plusieurs communautés fictives qui luttent pour leur survie face à un ennemi technicien et guerrier. Les Hobbits sont des personnages intéressants car ils vivent en vase clos, selon des rites traditionnels immémoriaux. Ils partent à l’aventure à contrecœur, ayant sans cesse la nostalgie de leur terre durant leur voyage. C’est cette nostalgie que je trouve formidable, parce qu’elle représente tout ce que nous avons perdu en Occident. Le rapport à la terre, au lieu, comme disait Levinas, le sens de la mesure, la perpétuation de vieilles traditions qui donnent un sens à notre existence : tout cela ne veut plus rien dire pour nous autres Occidentaux. Les Européens ne comprennent plus qu’un seul langage, celui des libertés individuelles. C’est cela, le grand drame de la modernité.

    Entretien réalisé par Romain d’Aspremont 

     Essayiste

    http://lafautearousseau.hautetfort.com/

  • Après la sortie cette semaine de son nouveau livre "LE GRAND REMBARQUEMENT", Emmanuel Albach s'explique :

    Le titre de votre livre, Le Grand rembarquement, semble faire écho au Grand Remplacement de Renaud Camus. Est-ce par hasard ?

    Non bien sûr. J’avoue humblement que Renaud Camus m’a inspiré. Mais mon titre ne fait pas seulement écho : il parle aussi d’une fin heureuse, alors que le principe du grand remplacement, et tout ce que l’on entend un peu partout sur le caractère inéluctable de notre fin proche en tant que nation, nous décrit un avenir noir. Or rien n’est inéluctable. Rien n’est irréversible, c’est ce que nous apprend l’histoire : le destin d’une nation dépend de la volonté de ses membres. Ils peuvent se laisser mourir, ou se dresser. "Aux armes, citoyens !", dit notre hymne, non ?

    Hola ! Votre roman appelle les Français aux armes ? Vous allez tomber dans l’incitation à la sédition !

    On ne peut plus citer notre hymne national ? Et puis c’est un roman. Et l’on n’y trouvera rien qui tombe sous le coup de la loi. Mais voyez dans quelle situation nous nous trouvons : on nous oblige à accepter des trucs dégueulasses qui deviennent des normes, et l’on nous interdit d’en parler. Ce carcan que personne n’aurait pu imaginer il y a encore trente ans, emprisonne notre nation autant que la loi martiale d’un occupant : on en est réduit à chuchoter dans son coin, entre gens proches. Même au travail – je dirai même surtout au travail - on ne peut plus rien dire : il y a toujours des mouchards prêts à vous dénoncer à "la kommandantur". On se tait, on attend le moment où l’on pourra parler à nouveau. Et l’on entend que les collabos… ou les soit-disants « grands cerveaux », les stratèges qui nous expliquent où l’Histoire nous guide. Mais l’Histoire n’existe pas : cette idée d’une direction qui s’imposerait à nous, est un concept de ce phraseur de Marx.

    L’Histoire n’existe pas ? Pourtant la France a une histoire, non ?

    Cela, c’est celle qu’on voit dans le rétroviseur, celle qui est passée. L’histoire pour Marx, c’est un futur tout écrit : celui de la disparition inéluctable de notre monde occidental. Il devait nous détester énormément ! Or la vérité c’est plutôt « Fortuna imperatrix mundi » : la (bonne ou mauvaise) fortune, impératrice du monde. Qu’est-ce que cela veut dire ? Sinon que le hasard, la bonne fortune – ou la volonté de Dieu, diront les chrétiens - est plus puissante que les rois, et que des renversements « de fortune » sont toujours possibles. Des « fortunes », des opportunités se présentent, et c’est alors le moment de les saisir pour renverser une situation qui semblait perdue. Le destin des hommes reste toujours entre leurs mains. Au fond, nous sommes libres. C’est la peur qui nous rend impuissants, la crainte qui habite chacun d’être repéré par le Système qui nous oppresse, et qu’il lui pourrisse la vie… Pourtant qu’est-ce qui pourrait nous arriver de pire que de laisser un occupant voler leur avenir à nos enfants ? A quoi aurait servi notre vie si nous trahissions notre patrie ? Pour elle, pour cette terre où reposent nos ancêtres, pour nos enfants, nous n’avons pas le droit d’avoir peur. Pour eux, il faut savoir répondre à l’appel de notre hymne.

    Rien n’est irréversible ? Quand même, arrivé à un certain stade, souvent on ne peut plus changer grand-chose.

    Si vous aviez demandé en 1950 aux Français s’ils croyaient qu’un jour un million de leurs compatriotes d’Algérie devraient quitter les lieux en quelques mois, en laissant tout derrière eux, et abandonnés par l’Etat, personne n’y aurait cru. Personne. Cela semblait impossible. Les Français d’Algérie, qui y avaient construit un pays moderne, pensaient que leur œuvre les rendait définitivement légitimes sur cette terre. Ils étaient sûrs que les musulmans étaient conscients de ce qui avait été accompli et dont ils profitaient : l’eau courante, l’électricité, les hôpitaux, l’instruction, une alimentation saine… Cet acquis semblait donner un droit irréversible aux Français d’Algérie. Un « droit acquis ». Et pourtant, ils sont tous repartis en quelques mois… Un million de personnes, à une époque où le transport aérien était embryonnaire et le transport maritime minuscule au regarde de ce qu’il est devenu aujourd’hui… Alors, l’irréversibilité, moi je n’y crois pas. Il suffit de circonstances, et l’impossible devient d’un seul coup la seule solution possible…

     

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