
La lèpre ! Le nationalisme, le souverainisme ou ce qu’il appelle le populisme, c’est la lèpre qui part à l’assaut de l’Europe et défigure son visage. Ainsi a parlé Emmanuel Macron jeudi en Bretagne où il était venu évoquer les problèmes locaux. Mais, en proie à une froide colère, il s’est écarté de son discours pour désigner ces lépreux et les vouer à la vindicte de ses auditeurs : « Vous les voyez monter, comme une lèpre, un peu partout en Europe, dans des pays où nous pensions que c’était impossible de [les] voir réapparaître. » Il ajoute : « On s’habitue à tous les extrêmes, dans des pays qui, depuis des années, sont pourtant proeuropéens comme nous. » Mais, pas un instant, il ne s’interroge pour savoir comment et pourquoi l’Italie, de favorable à l’Union, y est devenue hostile ! C’est aussi cette bonne conscience satisfaite qui est effrayante. Il ne reconnaît pas la moindre responsabilité à lui-même comme à ses pairs dans le désaveu des urnes un peu partout dans l’UE.
Au-delà de l’Aquarius et nos voisins transalpins, il s’en prend à ceux qui résistent, en France et en Europe, à sa chimère fédéraliste. C’en est fini de son œcuménisme doucereux, de son désir de « parler avec tous », de sa volonté de « convaincre » plutôt que d’« imposer », c’est son autoritarisme qui l’emporte avec l’injure et la calomnie. Car il accuse ses adversaires de « détester l’Europe » et cela « depuis longtemps », ajoute-t-il. Ce mensonge prouve qu’il n’a rien compris à ce qui fonde l’opposition à Bruxelles et au Conseil européen.
C’est, au contraire, parce que les souverainistes et les nationalistes aiment l’Europe, son histoire, ses traditions, sa religion, sa culture, ses chants et ses légendes, ses héros et ses saints, et qu’ils veulent les conserver avec piété, qu’ils refusent celle de l’Union européenne telle qu’elle est, celle des financiers, des technocrates qui veulent étouffer la liberté et l’âme des peuples au nom de la mondialisation financière, celle qui ouvre nos frontières aux « migrants » et à l’islam, une Europe incapable de protéger la civilisation qui a contribué pendant des siècles à la grandeur et la prospérité du monde. Ce sain réflexe des Européens qui ne veulent pas mourir en laissant la place à d’autres venus d’ailleurs, c’est ce que le chef de l’Etat appelle la « bêtise » des « nationalismes ».
La lèpre ! Imaginons un instant qu’un de ceux que fustige le président de la République ait appliqué le terme aux « migrants » : « Vous les voyez monter, comme une lèpre, un peu partout, en Europe… » A n’en pas douter, les ligues de vertu « antiracistes » auraient saisi les tribunaux pour livrer à la justice ceux qui osent assimiler les « migrants » à une lèpre, une maladie ayant longtemps entraîné l’exclusion sociale des malheureux qui en étaient atteints. Mais les lépreux, pour lui, ce sont les patriotes. Que faire ? Les enfermer dans des léproseries ? Un historien de cette maladie rappelle que « sous les peines corporelles les plus sévères, on interdit l’accès des maisons, des lieux publics, voire même des villes, aux lépreux ». Il fallait éviter la contagion. Le patriotisme est contagieux. Il gagne l’Europe de jour en jour. En traitant les patriotes de cette injurieuse manière, Emmanuel Macron est involontairement un agent propagateur.
Guy Rouvrais
Article paru dans Présent daté du 22 juin 2018
Ayant été associé de près à l’appel d’Angers, puisqu’avec mon ami Guillaume Bernard, c’est moi qui interrogeais les courageuses personnalités politiques (allant des LR au FN, avec ou sans la « bénédiction » de leurs partis respectifs) qui avaient accepté de montrer publiquement que ce qui les unissaient était plus fort que ce qui les séparaient, je suis régulièrement interrogé sur « qui est derrière ».


Mitterrand lui-même, atlantiste convaincu s'il en fut, durant sa longue carrière politique, eut sur le tard un cri de vérité, si du moins est exact ce que rapportent Georges-Marc Benamou dans Le dernier Mitterrand et Paul-Marie Couteaux dans L'Europe vers la guerre : « La France ne le sait pas, mais nous sommes en guerre avec l'Amérique. Oui, une guerre permanente, une guerre vitale, une guerre économique, une guerre sans mort. Apparemment ». Apparemment en effet. Et puis ici, d'ailleurs, avant la mort des individus, il s'agit de mort économique, mort culturelle, mort militaire, mort nationale. C'est cela que recherche inlassablement l'Amérique pour asseoir sa domination mondiale. Il se trouve que la France, les Français, la francophonie forment encore l'un des rares groupements humains s'opposant par son existence même, par sa puissance propre aussi (la France, selon les domaines : agro-alimentaire, aéronautique, services etc., se situe, même si le « politiquement correct » empêche de le dire, de peur de « dérive nationaliste », la France donc se situe entre le deuxième et le quatrième rang, souvent tout de suite derrière le mastodonte étasunien) à l'hégémonie nord-américaine, que les complices ou les aveugles appellent leadership...