Jusqu'où iront-ils ? « Ils », ce sont tous ceux qui se focalisent jusqu'à la névrose, sur les années 1940. Il faut en parler toujours. Trouver la phrase ou découvrir le simple mot qui permettent de recommencer l'éternel procès des acteurs de ces années qui ont dérapé, ne fut-ce qu'une fois, sur la question raciale.
Le 8 mai 1945, l'Allemagne capitule sans condition. Exit le nazisme. Au diable Hitler. Outre-Rhin, le procès de Nuremberg rime avec condamnations et pendaisons. En France, c'est l'épuration avec son cortège de dégradations et d'exécutions. Soixante ans plus tard, chacun pourrait croire que la page est bien tournée. Il n'en est rien. Nous avions déjà eu droit aux procès à retardement des octogénaires sortis du formol pour rejoindre le banc des accusés Barbie, Touvier, Bousquet, Papon, ou la gérontologie au centre des réquisitoires.
Les fonds de tiroir raclés jusqu'à épuisement, il faut trouver ailleurs. Les écrivains ! Beaucoup sont morts, mais leurs écrits sont restés. Il y a dix ans, le cadavre du docteur Alexis Carrel, prix Nobel de médecine et de physiologie en 1912, et auteur d'un ouvrage magistral, L'homme, cet inconnu, publié en 1935, est exhumé. Carrel a défendu des thèses eugénistes. Il a donc ouvert la porte des chambres à gaz. Les rues qui portent son nom sont débaptisées. Lyon. Paris. Rennes. Plus d'une quinzaine de villes épurent la voirie du nom de ce médecin de sinistre mémoire. Philippe Marini, le maire de Compiègne, qui s'obstine à vouloir conserver sa rue Alexis-Carrel, est dénoncé par les ligues de vertu.