Nationaliser le secteur bancaire, sans indemnisation
Les solutions sont malheureusement théoriques. Sur le plan technique, il serait parfaitement possible de contraindre les banques à faire passer par pertes et profits une série d'éléments de leurs bilans qui correspondent à autant de créances douteuses ou illégitimes. On pourrait aussi imposer une nouvelle discipline bancaire, qui interdirait aux banques d'affaires de se fondre avec des banques de dépôt. À l'époque du New Deal, Roosevelt avait déjà fait adopter le Glass-Steagall, qui imposait au secteur bancaire de se scinder entre banques d'affaires et d'investissement d'un côté, banques d'épargne et de dépôt de l'autre. On pourrait envisager une politique fiscale permettant de mieux contrôler les mouvements de capitaux à court terme, obliger la BCE à financer le rachat par les États d'une partie de leur dette, voire dédoubler le système des taux d'intérêts, de façon à bien distinguer le taux d'intérêt « productif » et le taux d'intérêt « spéculatif ». La loi de 1973 interdisant à la Banque de France d'acheter des Bons du Trésor devrait évidemment être abolie. Une mesure plus radicale serait la nationalisation pure et simple, sans indemnisation, du secteur bancaire et d'autres secteurs-clés de l'économie. Frédéric Lordon, qui a pris position pour la nationalisation du système bancaire et la « communalisation » du crédit, en fait autant de préalables à la mutation ultérieure du crédit en un véritable système socialisé. Mais ce n'est pas demain la veille que l'on verra cela, aucun État n'ayant la moindre intention d'entrer en guerre ouverte contre la finance, même (et surtout) lorsqu'elle l'a saigné à blanc.